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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Ils sont rares ceux qui reconnaissent craindre la folie de l’autre, avouent fuir devant les dérèglements.
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Après "Bienvenue au club", le CNL en partenariat avec Public Sénat, met en avant les conseils des lecteurs en leur donnant la parole dans l'émission #LivresetVous. Une nouvelle chronique à ne pas manquer tous les vendredi à 17h30. Deux livres et deux histoires d'engagements. Des pages d'Histoire aussi Dans « Livres & Vous » sur Public Sénat, Guillaume Erner et ses invités, Dan Franck (« Boro, Est-Ouest » Ed. Fayard Grasset) et Vanessa Schneider (« La fille de Deauville ». Ed. Grasset), nous ouvre la porte de destins singuliers, où fiction et réel s'entremêlent. Une émission présentée par Guillaume Erner, en partenariat avec France Culture. Suivez le CNL sur son site et les réseaux sociaux : Site officiel : www.centrenationaldulivre.fr Facebook : Centre national du livre Twitter : @LeCNL Instagram : le_cnl Linkedin : Centre national du livre
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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Ils sont rares ceux qui reconnaissent craindre la folie de l’autre, avouent fuir devant les dérèglements.
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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Il n’est jamais trop tard pour dire aux gens qu’on les aime.
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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Tu sembles ne pas savoir qui tu es. Tu n’as pas de papa. Ta maman t’aime mal, tu as la mine inquiète des enfants qui pressentent que le chemin de la vie sera pavé de pierres coupantes.
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La fille de Deauville de Vanessa Schneider
Quand tu es sortie, personne n’a vraiment cherché à savoir ce qui s’était passé là-bas. Tu n’as rien dit non plus. Raconter la taule, les hurlements, le désespoir, la saleté, les rats et la folie, tu aurais eu honte. Quand on prétend faire la révolution, quand tant d’autres meurent en martyrs au Liban ou dans des camps de réfugiés, on ne pleurniche pas. Pourtant, tu as bien dérouillé. Il t’en a fallu du temps pour que ça devienne supportable, le bruit et l’ennui, la bêtise et la brutalité, sans même quelque chose pour te soulager, un joint ou une ligne. Tu as pensé plusieurs fois crever de solitude et d’angoisse, tu appelais ta mère dans la nuit comme une gosse qui ne parvient pas à se réveiller d’un cauchemar, tu as chialé des jours entiers sous ta couverture rêche, tu as mendié des cachetons à l’infirmerie pour arriver à dormir quelques heures et ne pas te pendre aux barreaux de ta cellule.
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La fille de Deauville de Vanessa Schneider
Joëlle était jeune et bien-portante. Elle n’abîmait pas son corps à l’usine comme les ouvriers exploités, ne se levait pas au milieu de la nuit pour rejoindre chaque matin un travail pénible, n’avait pas à affronter les remontrances d’un petit chef acariâtre. Pourtant, elle se sentait lasse. À ce moment précis, les yeux clos dans le creux de son bras, elle aurait tout donné pour s’arrêter, ne plus rien faire, ni penser ni réfléchir, ni combattre et ni lutter.
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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
"Dans ma famille, on ne fait pas les choses à moitié . Quand on boit , on meurt à huit grammes. " |
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Le Pacte des Vierges de Vanessa Schneider
[Ma mère] passe dix heures par jour devant la télé à boire des sodas et à manger des beignets. Avec tous les médocs qu'elle s'enfile depuis des années, elle a perdu son regard, elle n'écoute plus quand on lui parle. Elle ne dit rien non plus d'ailleurs. Elle est devenue silencieuse. De temps en temps, elle m'attire à elle sur le lit et elle me serre très fort dans ses bras en me demandant pardon. Ça me bouleverse quand elle fait ça. J'ai envie de chialer moi aussi, mais je me retiens car c'est déjà suffisamment angoissant et puis je n'ai pas envie qu'elle sache que ça me rend horriblement triste de la voir comme ça [...]. (p. 88-89)
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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Personne n’a écrit que tu étais partie en buvant du champagne, ta boisson favorite, la mienne aussi, celle qui fait oublier les meurtrissures de l’enfance et qui nimbe de joie les fêlures intimes des âmes trop sensibles. Tu t’en es allée au milieu des bulles et des éclats de rire, de visages aimants et de sourires pétillants. Debout, la tête haute, légèrement enivrée. Avec panache.
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Le Pacte des Vierges de Vanessa Schneider
J'étais assise sur la canapé du salon en train de lire un magazine, lorsque [mon père] est arrivé et a éteint la télé. Quand il fait ça, c'est qu'il y a quelque chose de super important dans l'air parce que chez nous, on n'éteint quasiment jamais la télé sauf pour dormir, et encore, ça arrive qu'on oublie et qu'on la laisse allumée. (p. 73)
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Tu t'appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Le lendemain de ta mort, « Libération » affiche en une grande photo de toi te montrant poitrine nue et offerte, bestiale, objet sexuel. Une photo tirée du « Tango ». Tu aurais détesté que l'on te rende hommage ainsi. Tu en aurais pleuré, tu te serais mise dans une rage folle, toi qui as passé toute ta vie à essayer d'effacer les marques que tu pensais infâmes. Nous n'avons pas aimé non plus cette représentation de toi. Parce qu'on ne voulait pas te voir réduite à ta chair. Parce que tu étais autre chose que ce corps exhibé. Parce qu'on ne représente pas les morts ainsi. Parce que jamais un journal n'aurait choisi pour accompagner une nécrologie l'image d'un homme dévêtu. Parce que le journal qui avait décidé de le faire n'était pas n'importe quel journal. C'était le nôtre, c'était le mien. C'était celui que mes parents achetaient quotidiennement depuis son premier numéro en 1973. Celui qui nous avait initiés, nous les enfants, à la politique et à tant d'autres choses comme le combat pour les femmes. Celui qui m'avait donné envie de devenir journaliste. Celui où j'avais travaillé pendant treize ans et où l'un de mes cousins écrivait encore. Ce n'était pas de ce côté là que l'on attendait le coup.
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Jack London a écrit :