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Critiques de Wendy Delorme (166)
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Viendra le temps du feu

Je m’étais procuré Viendra le temps du feu car il faisait partie de mes recommandations de l’année dernière. Je ne l’ai pas lu dans les temps mais j’étais quand même curieuse de découvrir ce roman réputé de Wendy Delorme, une dystopie éco-féministe. Qu’en ai-je pensé ?



Viendra le temps du feu est une dystopie qui donne la parole à de multiples personnages. Dans un futur proche, très proche du nôtre, une société est devenue obsédée de la sécurité et des naissances. Six narrateurs dévoilent l’histoire d’une communauté autonome de sœurs vivant en symbiose avec la nature dans le passé, tandis qu’au présent, elles font face à un régime totalitaire oppressant, imposant des contraintes à la reproduction et réprimant l’homosexualité. Le contexte est marqué par une inaction complète face aux défis climatiques. Les frontières sont closes, et les aspirations à la communauté et à la réflexion sont étouffées. En somme, toute similitude avec nos sociétés occidentales contemporaines est délibérément soulignée.



Le point fort du roman est dans sa similarité avec le monde actuel. On nous parle de réarmement démographique, on se replie sur soi… Cette dernière apparaît d’autant plus effrayante en raison du contraste saisissant qu’elle forme avec la sororité florissante de l’autre côté de la rive, dont plusieurs femmes témoignent et sont originaires. Deux systèmes de valeurs, deux univers, et deux modes de fonctionnement se côtoient, accentuant la divergence entre les deux réalités. Un système oppressif qui ne peut que donner naissance à des résistances, composées de personnes hors système.



Le fond a tendance à prendre le pas sur la forme. Si j’apprécie habituellement l’aspect choral d’un récit, ici le style entre chaque voix est trop similaire pour être réellement distinct. On ne croit pas vraiment au fait que plusieurs personnes prennent la parole, ce qui nuit à l’immersion. Le style est par ailleurs beau, précis et poétique. Seules les parties narrées par L’enfant prennent un peu de relief. D’autres éléments manquent un peu de nuance. L’État est décrit comme une masse informe qui prive les gens d’individualité, mais je n’ai pas saisi qui était l’ennemi tant le récit reste imprécis. Cela m’a donné l’impression d’une vision très manichéenne des choses.



Mais cette imprécision donne un côté fable qui ne manque pas d’intérêt quand on construit une dystopie qui se veut avant tout critique. Ceci dit, le roman a le courage d’aborder des sujets d’actualité, comme la question de l’homosexualité ou de la transidentité. Ces parties sont plutôt bien amenées. En parallèle, les motivations de certains personnages sont restées obscures, notamment Louise, à laquelle je ne me suis nullement attachée tant j’avais du mal à comprendre certaines de ses décisions.



Si le roman m’a globalement intéressé, je suis cependant beaucoup plus partagée que d’autres lecteurs. L’aspect dystopique cible avec lucidité certains travers de notre société, comme l’obsession pour la démographie et le contrôle du corps des femmes. L’écriture de Wendy Delorme est poétique mais manque de variété pour un roman choral, ce qui nuit à l’immersion globale et donne l’impression que l’aspect militant manque de nuance et prend le pas sur le roman. Pourtant, c’est une lecture qui est loin d’être privées d’attraits, car j’ai apprécié le discours avant-gardiste.


Lien : https://lageekosophe.com/202..
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Devenir lionne

La narratrice vient ici, en relation avec la lionne, reparcourir deux étapes de sa vie amoureuse. La première à Berlin alors qu'elle avait vingt ans, et la seconde à quarante ans, en France.

C'est lors d'une visite au zoo de Berlin qu'elle tombe sur une lionne enfermée dans une cage étroite. Profondément émue par cet animal qui ne bouge pas sinon pour se mutiler, la jeune femme la visite fréquemment, fascinée par cette image d'elle-même puisqu'elle entretient au même moment une relation de dépendance malsaine avec un jeune homme qui l'encage psycho-sexuellement.

Si l'héroïne a tant de mal à quitter cet homme, c'est en vertu de ce déchirement entre son désir d'une vie riche, autonome, libre, et son besoin d'appartenir totalement à un homme, d'être même entravée par lui, ce qui la rend potentiellement encageable .

Quand vingt ans plus tard la narratrice aime à nouveau, elle craint de retomber dans la même cage qu'à Berlin. Mais avec ce second amour, elle comprend qu'il y a une troisième voie : un devenir lionne de la femme qui lui permet de sortir des cages mentales et sexuelles que la société, et elle-même, ont édifiés. Un devenir lionne piétinant les barreaux de la binarité et de la hiérarchie, inventant d'autres rugissements pour sortir de ce système qui n'engendre que la violence, la domination et la haine.

Ainsi, entre la liberté sans engagement et l'esclavage, il existe la confiance.

Intelligent, enlevé, ce livre d'une femme forte et fragile, vulnérable et puissante, douloureuse et radieuse, est un appel à ce qui, dans la femme et par elle seulement, peut aboutir à un devenir autre, et donc à un avenir impensable dans les systèmes patriarcaux.



Merci à NetGalley ainsi qu'aux édition J.L.Lattès pour cette lecture.
Lien : https://trancheslivres.wordp..
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Viendra le temps du feu

Très beau roman de Wendy Delorme. L'écriture est vraiment belle, avec un rythme de poème, (c'est même parfois en vers) ce qui donne une atmosphère vraiment particulière au livre. À travers le témoignage de plusieurs personnages, un futur proche se dessine, où la différence est bannie de la société, où chacun et chacune doit avoir une utilité. Mais comme toujours des rebelles se préparent dans l'ombre à faire mal au pouvoir en place pour montrer leur désaccord.
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Viendra le temps du feu

Rien de ce que je pourrai écrire ne rendra justice à la beauté et à la puissance de « Viendra le temps du feu », alors je serai brève.



Dystopie éco-féministe et queer écrite d'une plume poétique et sensuelle, il s'agit à la fois d'un cri d'alarme et d'une ode à la liberté et à la sororité. Ce roman sonne déjà douloureusement familier à cause de l'actualité récente. Chaque choix artistique de Wendy Delorme est une prise de position militante et les nombreuses références littéraires sont une respiration dans le texte qu'on lit en marchant sur des charbons ardents.



Tour à tour glaçant et flamboyant « Viendra le temps du feu » est le livre que j'aurais souhaité écrire.
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Viendra le temps du feu

C’est un coup de cœur pour Viendra le temps du feu, une dystopie qui résonne puissamment dans l’actualité, un roman plein de sororité et de tolérance, un cri d’amour pour la liberté de vivre tel que nous le désirons. C’est un ouvrage poignant, qui nous rappelle la fragilité des utopies mais aussi la force d’un peuple qui s’unit et se soulève.



Avis complet sur yuyine.be!
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La mère, la sainte et la putain

La mère, la sainte et la putain est le troisième ouvrage de Wendy Delorme, publié aux éditions Au diable vauvert. C'est un récit infiniment intime que nous décrit ici à merveille l'auteure : elle est parvenue avec brio à coaliser une tendresse et douceur incroyables au moyen d'un verbe cru, brutal à la limite du licencieux. le propos est incisif et saisissant à travers une économie de mot qui reste sans bavure, résolu, âpre et sibérien. Ce livre, autobiographique, rédigé à la suite d'une rupture, est un éclat de voix, un aboi dans lequel est canalisé un mélange prodigieux de sentiments qui retournent et kidnappent l'esprit. Toujours au bord de l'éruption, l'auteure délivre ainsi un discours complexe où se confrontent trois figures féminines façonnées par la société, trois ordonnances qui colorent la progression du récit et auxquelles le·a lecteur·rice s'accroche douloureusement. In fine, Wendy Delorme offre une lettre ouverte, une plaie à vif que les mots viennent suturer sans anesthésie, tel un remède, une vérité lancinante mais nécessaire.
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L'évaporée

Eve a quitté Jenny du jour au lendemain sans aucune explication. L’évaporée, comme la surnomme Jenny, a laissé toutes ses affaires dans la maison de sa compagne. Cette dernière ne cesse de se questionner sur leur relation et ne perd pas espoir de revoir venir celle qu’elle a aimé éperdument. Pendant ce temps, Eve doit essayer de guérir de blessures qui ont ressurgi de son passé. 



« Depuis que j’ai lu l’incipit de ce livre, je sais qu’il est possible de vivre une même histoire en deux narrations totalement différentes. Et que l’expérience de chaque être en ce monde est une solitude vraiment irrémédiable. » « L’évaporée » est écrit à quatre mains et nous propose d’explorer alternativement les deux faces de cette rupture. Fanny Chiarello a écrit les chapitres concernant Jenny, tandis que Wendy Delorme, dont j’ai adoré le roman précédent, a rédigé ceux qui concernent Eve. Deux points de vue, deux écritures qui donnent vie, corps et chair à deux femmes qui se sont aimées puis séparées. Cette construction en parallèle nous permet de comparer et de comprendre les points de vue, les ressentis des deux femmes.



Et ces deux femmes sont fort différentes. Jenny est écrivaine, elle s’est retirée à la campagne, est revenue à la terre. « Elle me console de mes illusions perdues, me réconcilie avec mon espèce et, un jour, elle me fera un linceul moelleux et chaud, généreux. » Jenny est en quête d’absolu, l’amour chez elle ne souffre aucune compromission. Eve est journaliste, parisienne, elle a été mariée et est mère de deux enfants. Elle est plus distante et semble ne plus rien attendre de l’amour. Les deux autrices nous offrent une analyse fine de celle qui reste et de celle qui part, l’une et l’autre déjouent nos attentes quant aux rôles qui leur sont assignés au départ.



Dans les propos des deux femmes se dessine également un questionnement sur la création et notamment sur la manière dont les écrivains se nourrissent de ce qui les entoure pour créer. L’écrivain doit-il se fixer des limites pour éviter de faire souffrir ses proches ? Les mots peuvent en effet devenir des armes tranchantes…



« L’évaporée » est un texte formidablement écrit. Les deux voix, toutes en poésie et en sensibilité, se marient merveilleusement bien. Un dispositif littéraire original qui fonctionne grâce à deux autrices inspirées.
Lien : https://plaisirsacultiver.com/
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Viendra le temps du feu

Énorme coup de coeur pour cette dystopie écoféministe. Mais est-ce qu'on peut parler de dystopie si, une fois atteinte la conclusion du roman, on est rempli.e.s d'espoir, un espoir mélancolique certes, mais espoir quand même ? Ce livre aux multiples voix, en majorité féminines, résonne douloureusement avec notre actualité, on y reconnaît des clins d'oeil de Wendy à des personnalités de nos jours et on y entend un cri d'alarme très pressé et urgent. Mais on y entrevoit aussi beaucoup d'amour, amour pour la lecture, l'écriture, la nature, et un hymne à l'amitié, la sororité et à l'entraide entre êtres humains.

Une lecture fortement recommandée pour tou.te.s, une œuvre magnifiquement écrite. J'ai hâte de découvrir d'autres livres de Delorme.
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Viendra le temps du feu

Lecture angoissante !



Louise, Eve, Rosa, Raphaël, Grâce…ce livre à plusieurs voix. A travers des lettres, des journaux intimes, nous rentrons dans leurs intimités. Basculant d’un témoignage à un autre, nous comprenons, petit à petit, ce qui est arrivé à leur monde, à notre monde. Wendy Delorme imagine une dystopie inquiétante, si peu éloignée de nos angoisses climatiques et sociales actuelles.



Dans cet univers, il n’y a plus de monnaie mais des avoirs, il n’y a plus de livres mais des divertissements sous contrôle, il n’y a plus de déplacements car les frontières sont fermées, il n’y a plus de citoyens mais des contributeurs. Chaque contributeur est affilié par paire, homme et femme, pour remplir sa mission : enfanter.



Les crises ont décimé la jeune population, les rébellions ont été étouffées. La nouvelle société totalitaire a signé “Le Pacte” pour renouveler la nation et chacun doit s’y conformer. Pourtant une révolte se prépare dans les villes mais aussi en dehors. “Viendra le temps du feu” nous présente également le destin d’une communauté sorore. Au milieu de la nature, des femmes ont repris le contrôle de leurs corps et luttent pour leur liberté.



Il faudra attendre la moitié du récit pour comprendre le lien qui unit le destin de nos personnages. Chaque récit est bouleversant. J’ai particulièrement été touché par celui retraçant le début de la répression car elles résonnent énormément avec notre actualité : les crises climatiques et sanitaires, l’accueil des migrants…Impossible de ne pas penser à la servante écarlate et à 1984 en lisant ce roman mais Wendy Delorme apporte un nouveau regard dans cette dystopie. Elle nous alerte également sur l’appropriation de nos corps, de notre sexualité. J’ai beaucoup aimé que l’homosexualité et la transidentité soient abordés de manière évidente dans ce roman et ses questionnements font sens dans ce combat.



C’est évidemment une lecture marquante, parfois douloureuse mais pas toujours sombre. Une lecture remplie de sororité et qui nous pousse à l’embrasement

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Hot Dog : Chroniques dystopiques du grand d..

8 auteur.e.s s’amusent ici à détruire les peurs irrationnelles des fachos. Les nouvelles sont à la fois piquantes et trash et vont au bout de l’absurde. J’avoue qu’elles m’ont toutes semblé beaucoup trop courtes, j’aurais aimé que certaines soient plus approfondies.
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Viendra le temps du feu

Entre « La servante écarlate » et « 1984 », Wendy Delorme nous présente ici une dystopie éco-feministe qui ne laisse pas de marbre.



On peut dire que je suis complètement sortie de ma zone de confort avec ce roman, et j’en suis ravie.

En plus d’avoir découvert une superbe maison d’édition : Cambourakis.

Cette histoire m’a envoutée autant qu’elle m’a révoltée.



Sans s’installer dans une année précise, Wendy Delorme nous laisse nous interroger sur l’espace temporel où s’installe cette histoire de femmes, de survivantes, d’un monde terrifiant qui, à la lecture, ne semble pas si loin du nôtre. Et si c’était ça notre destin ?



📖 Suite aux suicides de toute une génération face à une dictature naissante et une indifférence es autorités face à la situation climatique, le gouvernement décide d’installer « Le Pacte National ». Une liste de règle dont tout le monde doit se soumettre. L’argent est supprimé, des bons de rationnements sont installés, les livres sont brûlés ou détruits, toute l’histoire doit être ré-écrite, certains mots sont interdits, les « déviances » sexuelles sont punies, la créativité n’est plus permise, les voyages sont interdits car, de toute façon, bons nombres de territoires ont disparus. Les forêts brûlent, les poissons meurt, la vie s’éteins. Les protagonistes vivent dans un monde de règles où le terme de liberté est absent. La priorité est de repeupler la population. Vivre par paire, ne pas faire de vague, et c’est en contribuant que le quotidien sera plus agréable.

Le récit suit le quotidien et l’histoire de plusieurs personnes (femmes pour la plupart mais aussi homme et enfant) qui « survivent », et qui, par leur sororité et leurs valeurs souhaitent contrer la tyrannie installée.



Bien que très noir, ce roman est surtout rempli d’espoir. Même sans liberté, privés de tout, les protagonistes restent humains. Ils cherchent des solutions, il se battent, ils aiment.



Wendy Delorme nous adresse un roman choral où chaque minorité a son mot à dire. La société décrite semble tout d’abord ubuesque et puis, plus on avance dans le récit, on comprend qu’elle est possible. On s’interroge : et si … ?



Un récit qui fait froid dans le dos certes, mais tellement intéressant. Je vous le conseille par anticipation à un monde fou.

Et moi ? Quelle serait ma place dans cette société ? Est-ce que je me battrais ou est-ce que je me résignerais ?
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Viendra le temps du feu

Gros coup de cœur pour ce roman, qui, par certains aspects m'a rappelé Après le Monde, d'Antoinette Rychner. Un post apo féministe, où l'on suit différentes femmes, dont le récit va s'entrecroiser. Beaucoup de poésie dans ce roman, qui parle de tolérance, d'amour, de sororité... Et leurs opposés : l'intolérance, la haine, les déchirements.

A travers différentes voix, on appréhende ce monde glaçant où les femmes doivent "contribuer" si elles veulent un confort matériel (comprendre : faire des enfants), se plier aux règles d'une société traumatisée par une vague de suicides massifs qui a eu lieu quelques années auparavant. Le futur n'est pas rose, mais surtout, il est plausible, et c'est ce qui est glaçant : des catastrophes climatiques sont nées d'autres problèmes qu'il a fallu régler, et ainsi l’inacceptable a été accepté par la population survivante. Aussi simplement que cela.

Les femmes sont les premières à payer, toutefois les hommes, comme on l'apprendra plus tard, n'ont pas beaucoup plus de liberté. Ils doivent eux aussi "contribuer", et s'ils ne le peuvent pas, un autre partenaire sera attribué à leur compagne. D'ailleurs on ne se met plus vraiment en ménage par amour, mais par nécessité. Bien sûr, l'homosexualité est interdite ! Et surtout, chaque homme doit aller un certain temps sur une sorte de front, dont soit il ne reviendra pas, soit il reviendra complètement traumatisé. C'est à se demander ce qui est le pire...

En opposition à cette société glaçante, il y a une sororité de femmes, à un jet de pierre (littéralement) de la ville, et qui dérangent par leur liberté. Nous apprenons à les connaitre via quelques voix : celles des survivantes, une qui agonise après un raid destiné à les exterminer, une qui s'est échappé, une qui a changé de vie par désir d'enfants mais qui reste hanté par la sérénité de son ancienne vie et son amour dévorant pour une femme prénommée Louve.

Chaque chapitre va porter la voix d'une femme ou d'un homme, jusqu'à ce que les histoires se mêlent, et qu'au puzzle qui s'est enfin formé devant nos yeux, s'ajoute une magnifique conclusion, porteuse d'espoir. A travers leurs voix, dans ce futur plausible, on est touché par finalement toutes ces histoires d'amours - "amour", mais pas forcément amoureuses ! - qui font toute notre humanité, et qui sont si bien rendu par l'autrice, dont l'écriture ciselée et pleine de poésie est un vrai régal. Cette dystopie pose des questions très actuelles sur le désir (ou non) d'avoir des enfants, la liberté des femmes, le bonheur, l'avenir face au climat, ce qu'on est prêt à accepter et surtout ce qui nous dépasse et est plus fort que nous.

Un ouvrage époustouflant.
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Viendra le temps du feu

Un roman dystopique très moderne, qui pose de nombreuses questions d'actualité : la crise écologique, la pénurie de ressources, la dictature, les frontières qui se ferment, l'injonction à la reproduction et à la conjugalité hétéro... et la mystérieuse disparition d'une génération sans illusion. Le tout dans des termes de novlangue qui sont très parlants. Dans ce monde, chacun-e doit CONTRIBUER. Et rendre des comptes.



Une communauté de femmes se forme dans une zone naturelle. Elles creusent  des galeries dans la montagne, elles travaillent dans leur propre mine et vendent ce qu'elles possèdent (la pierre, d'autres denrées ou leur corps) pour survivre. Elles s'entraident, s'aiment, se défendent, survivent en autonomie.



Les chapitres font alterner les points de vue, et les personnages, qui cachent tous un secret, se côtoient, se rencontrent. Chacun cherche une issue dans un monde totalitaire. Les personnes marginalisées (dissident-e-s, homosexuel-le-s, trans...) se retrouvent la nuit pour organiser leur fuite, la chute du pouvoir, ou tout simplement pour se sentir elles-mêmes pendant quelques heures.



C'est un roman fort, puissant, inspiré des Guerrillères de Monique Wittig auquel il rend hommage. Un plaidoyer pour la sororité contre la tyrannie.

Merci à la communauté booksta et à la poudre de m'avoir fait découvrir cette autrice !

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Viendra le temps du feu

[La littérature sera politique ou ne sera pas !]



Des réminiscences de Fahrenheit 451 en guise de comparatif littéraire, "Viendra le temps du feu" est un roman nécessaire et ô combien politique en ces temps marqués par les restrictions de nos libertés individuelles.



Nous évoluons ici dans une dystopie féministe, mais ne vous y trompez pas, nous sommes surtout projetés face à nos comportements collectifs et ce qu'ils entraînent comme décrochages, burnouts, retours à soi et désirs d'ailleurs.

Comme une simple envie de respirer sans les masques idéologiques avec lesquels on nous étouffe depuis des décennies.



Le désir d'émancipation, découlant de la violence de l'oppression sociétale, crée l'énergie du désespoir qui pousse à accomplir des prouesses.



Sortir des carcans pour essayer de bâtir un autre monde, celui qu'on a réellement choisi, pas celui qu'on nous a imposé, voilà le tour de force de ce roman choral qui multiplie les points de vue, nous questionne et nous enrichit intérieurement par ses références, par la puissance de son inventivité et l'universalité de son message. À découvrir absolument parole de libraire!
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Viendra le temps du feu

Je suis une Uranienne. Mon cœur bat à l’unisson de ceux de mes sœurs et de mes frères. Mon cœur bat avec force et silence, prêt à bondir, à frémir, prêt à résister et à réduire en flammes le Pacte National.

Mon cœur bat pour le monde d’avant, nostalgique survie dans un monde ultra armé, répressif, homophobe, hyper protectionniste.



Je suis une uranienne et je suis riche de l’âme de mes sœurs disparues, riche d’une vie passée nourrie de liberté, nourrie de sensations et d’émotions intenses au contact de la peau de mon amour.



Je suis une uranienne et mes sœurs ont péri, je suis seule mais unie à tout jamais à elles, unie à notre territoire, havre de paix pulvérisé dans l’indifférence d’un système belliqueux.



Je suis une uranienne et l’impossible porosité entre les territoires ne pourra jamais m’empêcher de m’éloigner, laisser mes souvenirs vagabonder, retrouver mes sœurs, ressentir la paix et l’amour, disposer à nouveau de mon corps en toute liberté…sensations enfouies, en veille mais jamais évanouies.



Je suis une uranienne et ma colère n’a jamais trouvé repos. L’heureux passé me hante et ma rage se nourrit chaque jour des libertés réduites, des répressions humiliantes, de l’écrasante autorité. Rien n’y fait, je ne serai jamais des Autres, peuple uniforme, sans vie, sans âme et prisonnier.



Car je suis une uranienne. Je viens d’un peuple pluriel, solidaire, guerrier pacifiste, libre et aimant. Un peuple ne faisant qu’un, un espace ouvert dans un esprit de fraternité et de sororité, étouffé par la répression mais jamais totalement exterminé.

Car, discrètement, les cœurs des survivants battent et résonnent déjà du son de la résistance et de la libération…



Superbe roman choral à la force narrative communicative qui vous saisit par la vibration des émotions de ces âmes solitaires en quête d’émancipation et de ré-union.

Un monde hostile reste à combattre par les mots et l’embrasement de ces cœurs résistants prêts à s’unir et s’élancer pour offrir au monde un nouveau souffle vital. Une langue saisissante au rythme poétique qui rappelle la nécessité des mots pour dire le monde d’aujourd’hui et d’hier et d’en préserver l’impérieuse mémoire.

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Viendra le temps du feu

C’est un pays totalitaire où depuis que le Pacte National a été signé plus aucun civil ne peut passer la frontière, si tu pars tu ne reviens plus. L’argent n’a plus cours ; la population dispose d’avoirs pour le logement, la nourriture, l’accès à l’eau potable, les vêtements, les divertissements, en fonction de la contribution que l’on apporte (production/reproduction).

C’est un pays où les livres n’existent plus, les médias sont sous contrôle, la mémoire numérique a été effacée, la police veille.

Le monde ancien n’est plus, le sud est dévasté par la sécheresse, le nord par la montée des eaux, les mers sont acides et la pollution est à son paroxysme. Alors pour continuer à vivre dans son petit Eden ce pays garde ses frontières, férocement.





Ce sont des voix qui nous racontent, des voix de femmes, mais aussi un homme. Des voix qui se rebellent, des voix qui luttent, des voix qui veulent retrouver la liberté.

Eve, Louise, Rosa, Grâce, Raphaël…et tous ceux que l’on n’entend pas.

Ils veulent vivre, libres, libres d’être qui ils sont, libres d’aimer qui ils veulent, libres d’écrire, de lire, de rêver, libres de vivre.



Un livre fortement engagé, qui reprend toutes les thématiques brûlantes actuelles notamment autour du changement climatique, de la montée des extrêmes, des migrants mais aussi de la différence, du rejet de l’autre, des corps, des sexes, de l’amour.





Une dystopie pleine de poésie, d’amour et de rage, une histoire de sororité et de partage, un livre éblouissant, à lire, à réfléchir, à partager !!



Un livre qui m'avait tout simplement attiré grâce à sa magnifique couverture ! (peinture de @karinerougier)




Lien : https://enviedepartagerlesli..
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La mère, la sainte et la putain

Bonsoir à toi qui passe par là. Aujourd'hui, j'ai découvert l'auteur féministe Wendy Delorme et c'est très beau. Dans ce journal intime sous formes de lettres, l'auteur nous invite avec une sensibilité à fleur de peau et une plume délicate à une réflexion lucide sur la place des femmes dans la société, sur les rôles qu'on veut bien lui donner, les archétypes de La Mère, la Sainte et la Putain, trois statuts imposés au corps de la femme. Wendy nous dit avec beaucoup de bienveillance mais avec des mots pulsions la difficulté de jongler avec ses différentes casquettes qu'on nous assigne et l'horreur par laquelle les princes arrosés aux contes Disney se permettent de nous étiquetter et de décréter que la putain ne sera pas la mère de leurs enfants. Notre amazone fragile et forte à la fois dénonce les travers d'une soit-disant société moderne remplie de jugements. Elle nous parle de l'enfance et de son importance dans notre construction, des lignées de femmes et de notre force sauvage sacrée, de l'amour-passion, du deuil, des gorgées de temps dont nous avons besoin pour penser nos plaies et des relations pansements qu'on utilise en remède à un coeur blessé qu'elle nomme "corps palimpsestes". Un livre libérateur, du brut d'âme à offrir d'urgence.
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Le corps est une chimère

Le corps est un papier cadeau, seule l'âme, le cœur comptent dans une relation saine et épanouie. L'auteur nous parle, sans pathos, avec délicatesse et pudeur, de l'homosexualité, de la maladie, de la recherche d'un bonheur, de la souffrance, de la mort. Des destins pourtant si différents vont se rencontrer et changer le cours des choses et de leurs vies. Comment une rencontre peut-elle influencer une vie, un destin, une pensée ?
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Viendra le temps du feu

La dystopie, ça me flanque le cafard, une roulette russe où l'abattement se loge dans le barillet. Tu y greffes du féminisme et là, d'un bloc, ça te pond Viendra le temps du feu.

Si j'étais assez douée pour écrire autre chose que des critiques, c'est au grand jamais que je me lancerais dans la dystopie. N'est-ce pas que la dystopie est exigeante ? Une forme de vérité des choses dramatisée au futur. Elle engage le lecteur sur un terrain politique, d'un éveil à la vigilance. Et puis on n'imagine pas un récit conçu à la va-vite, entrecoupé astucieusement de séances vidéo YouTube au mordant complotiste.



Puis fatalement vient le temps des comparaisons. Car s'il existe un genre aux gros cuissots, sorte de bordel encombrant qui fait flipper quand on veut se lancer au feeling, c'est bien celui-là. Tiens, par exemple, 1984, Le meilleur des mondes, Fahrenheit 491 ou The Handmade's Tale, ça pleut dur, jusqu'ici certains ont bricolé plus que sérieusement.



Alors quid de notre bouquin ? Je ne suis pas une toquée de récit futuriste, d'un rétro post-apocalyptique piqué de technologies qui nous branlent tour à tour les neurones ou nous les lobotomisent.



À mon soulagement, le livre en est exempt. Ceinturé d'amulettes pour mieux asservir son peuple, l'impénétrable État balance ici un peu de tout en termes de mesures coercitives. L'épouvantail ultime, c'est le dehors, sorte de sombre far west où l'eau se fait rare, le sol infertile, en gros, tout est clamsé dans les terres inhospitalières.



Et c'est forcé, la liberté trinque, scalpée par un régime despotique sans visage. Alors on instruit aux têtes blondes une parfaite docilité d'esprit et de corps, l'épuration du langage en étant une facette, et on encourage la surveillance de ses pairs. Les classiques du genre sont bien là dans un pays qui ségrège la population, amas mou traversé d'une forme de renoncement neurasthénique.



Les femmes, sans surprise, sont les premières à dérouiller se dandinant tout contre la Père-patrie. Sur fond d'obligeances patriarcales, les nénettes suent, bassinées par un catéchisme nataliste où l'empowerment féminin prend un billet aller simple pour les chiottes, complété par un nationalisme bien trempé. Ainsi on ferme les portes, rien ne doit passer, l'étranger, ça dégage.



Aussi les LGBTQIA+ prennent leur mandale, c'est comme dans les fratries, pas de favoritisme, la distribution des dérouillées, c'est pour tout le monde. Il faut que ça file droit et en ligne droite, le contrat hétéronormatif ou rien. N'escomptez pas vous fendre la poire, la plume est de circonstance, aride et froide, l'ensemble roulé dans de courts chapitres extrêmement cadencés.



Dans le même temps, car on ne saurait imaginer une dystopie sans des lueurs d'espoir, des formes embryonnaires de résistance s'organisent. J'ai bien apprécié cette communauté de femmes, braves tailleuses de pierre se méfiant des hommes. Loin de lancer des confettis, Wendy Delorme dresse un portrait attachant d'amitiés et d'amours au féminin, de deuils douloureux, d'abandons à peine digérés, de vies de labeur où les corps se déploient dans leur pleine force physique, qualité trop souvent découplée du corps féminin.



J'ai aimé cette sororité aguerrie faite de rocs et de pieux, loin de la figure maintes fois singée de la féministe, celle de l'hystérique aux aisselles poilues, de sa voix de crécelle venant agacer les tympans fragiles de ces messieurs. Un bon bouquin à offrir à votre pote progressiste.



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Devenir lionne

Devenir lionne est particulier, difficilement définissable. Pourtant, je ne peux nier que ce livre a quelque chose de fort, de profond.

Wendy Delorme nous partage ici un texte très personnel, intime. Tout commence quand son amie Isabelle lui dit qu’elle est une lionne et qu’elle n’a qu’à écrire sur la lionne. On se retrouve alors au début de sa vingtaine, quand l’autrice est étudiante à Berlin. Tout au long du roman, nous allons naviguer entre le passé et le présent, entre l’autobiographie, le documentaire animalier et l’essai féministe. Ca vous paraît bizarre ? Je vous l’accorde, écrit ainsi, ça l’est. Pourtant, ce que c’était bien !

Outre le fait que Devenir lionne se lise avec fluidité, ce que l’on retiendra surtout de ce livre, ce sont les sujets abordés et la façon dont l’écrivaine a su rendre tout cela passionnant. Ses souvenirs amoureux l’amènent à nous parler d’amour, bien sûr, mais aussi de sexualité, de captivité, de domination et d’emprise (pour qui ? La femme ou la lionne ?). Et puis il y a cette chose dont je ne m’étais jamais rendue compte et qui, pourtant, est évidente : c’est la façon dont les êtres humains ont tendance à tout humaniser – et je ne parle pas du Robin des bois de Disney. Nous avons une vision tellement anthropocentrée et binaire du monde que nous avons tendance à appliquer nos façons de vivre au monde animal mais aussi au monde végétal (il s’avère qu’un certain nombre de fleurs est hermaphrodite, cassant au passage l’idée de binarité femelle/mâle, ce que font également diverses espèces d’animaux). Cela fait le lien avec les relations non-hétérosexuelles dans nos sociétés, ainsi qu’avec les identités de genres. Et l’on en revient à la fluidité du récit. Si elle n’est pas évidente dans mon retour, elle l’est bel et bien dans le roman.

J’ai appris des choses avec Devenir lionne, j’ai poussé ma réflexion sur certains sujets mais, surtout, ce roman, qui frôle le viscéral, est une invitation à l’introspection. Où est-ce que nous, nous en sommes ? Sommes-nous emprisonné·es dans une relation qui ne nous convient pas, ou sommes-nous libres, avec ou sans relation ? Plus largement, quel est notre rapport au monde ? Etc.



Devenir lionne ne fait peut-être que 216 pages mais il n’en est pas moins un livre généreux, mélangeant habilement des genres dont la cohabitation me semblait inattendue et qui fonctionne ici merveilleusement bien. Devenir lionne, c’est une petite perle de ce début de 2023 alors, si vous vous sentez prêt·es à plonger dans la vie de Wendy Delorme, d’une lionne en captivité, mais si vous êtes également prêt·es à plonger dans votre propre existence, il ne fait aucun doute que ce roman est pour vous.
Lien : https://malecturotheque.word..
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