Citations de Yrsa Sigurdardottir (211)
L’’école projetait des ombres glaciales sur le terrain désert. Plus loin, le soleil réchauffait les rares passants dont le trajet passait par là. Lorsqu’ils entraient dans l’ombre ils se pelotonnaient comme ils le pouvaient dans leurs vêtements d’hiver et hâtaient le pas en direction de la lumière. Le temps était calme, seule une froide bourrasque qui dansait dans la cour de l’école poussait les balançoires installées dans un coin. Elles tanguaient doucement comme si des enfants invisibles s’y ennuyaient.
- [...] Ça n'avance pas comme sur des roulettes. Pour ce qui est des mains, on n'a rien de nouveau.
- Personne n'a appelé ? Personne n'a déclaré les avoir perdues ?
Huldar s'abstient d'ajouter que l'intéressé pouvait difficilement composer le numéro. Pour apprendre à tout faire avec les orteils, il lui faudrait du temps.
L’existence de sa mère était tellement misérable qu’il ne pouvait s’empêcher de la plaindre. Mais elle était l’artisan de son propre malheur. C’était elle qui avait décidé de vivre seule et de se tuer au travail. Elle cherchait à se punir contre l’irréparable. Elle n’avait pas assez de cran pour s’immoler par le feu, se faire hara-kiri ou se flageller comme dans les pays lointains. Ce qui lui convenait, c’était d’en baver en se faisant traiter comme une serpillière.
Les morts étaient morts et ils ne l’étaient pas moins quand on défilait devant leur tombe. Mais elle ne lui demandait jamais rien, alors il n’était pas question de dire non. Et puis il n’avait rien d’autre à faire. Enfin, pas plus que d’habitude.
Elle ne réussirait jamais à s’endormir. Plus elle était fatiguée, plus elle se retournait dans son lit, plus elle était inquiète.
Quatre rides profondes barrèrent son front, comme si un tigre invisible l’avait caressée avec sa grosse patte.
S’il était né plus tard, il aurait pu devenir médecin, mais son rêve était peut-être trop ambitieux. En tout cas, avec un peu d’entraînement, il aurait pu acquérir au moins des capacités d’attention suffisantes pour arriver à entretenir une relation suivie avec une femme.
Leurs vêtements usés n’avaient pas d’autre fonction que de cacher leur nudité, certains étaient trop grands, d’autres trop petits.
Pas un mot pour les parents de la fillette. Pas un mot non plus pour la victime dont il avait volé l’innocence et la vie . En revanche il était intarissable sur le pardon que Dieu lui avait accordé, à condition qu’il se mette à son service.Il était convaincu de servir désormais la cause du bon Dieu. S’il disait vrai , pensait Fryja , Dieu devrait absolument réviser ses objectifs dans le secteur du pardon , investir d’urgence dans l’achat d’un détecteur de mensonges, et virer dans la foulée son DRH.
C'est de loin l'autopsie la plus étrange et la plus hors du commun qu'il m'ait été donné de faire dans toute ma carrière, et je peux vous dire que j'en ai vu, pendant mes études, à l'étranger.
Dagny contempla le texte tout en décrochant le téléphone, ne le quittant que brièvement des yeux pour taper un numéro.
"Veigar, où sont classés les dossiers des affaires anciennes ?"
Je me rappelle lui avoir traduit un passage tiré d'une description de l'Islande par l'évêque Oddur Einarsson, autour de 1590. Il parlait du mont Hekla et je me rappelle l'histoire d'un homme devenu fou après avoir gravi la montagne et avoir regardé dans le cratère.
Et puis Harald était fasciné par l'éruption de l'Hekla en 1510, et par l'évêque Jon Arason et son exécution en 1550, et aussi par l'évêque Brynjolfur Sveinsson.
Plus on frappait à la porte, plus il était évident que personne de conscient ne se trouvait à l’intérieur. L’un des parents avait dû quitter la maison avec sa fille et quelque chose était forcément arrivé à l’autre. Impossible de croire que quelqu’un dormait là-dedans, avec tout le boucan qu’on faisait.
Il faudrait faire un test ADN pour déterminer le lien de parenté des enfants mais on ne dispose ni du temps ni de l’argent pour ça. Et puis qui a vraiment envie de savoir ? Il vaut mieux garder l’illusion qu’ils ont un père normal. Tous les trois, pas seulement le plus âgé.
Il n'est pas du genre loquace mais il m'a raconté qu'il avait grandi dans le coin. J'imagine que le cœur et l'esprit aspirent à retrouver les chemins de l'enfance quand on vieillit.
Hormis le clapotis des vagues, un silence absolu régnait. Comment Katrín avait-elle pu imaginer que ce serait une bonne idée ? Eux trois, seuls en plein hiver, dans un village désert du nord de l'Islande, au milieu de nulle part ? Sans électricité, sans chauffage, avec la mer comme seule issue possible ? S'il arrivait quoi que ce soit, ils ne pourraient compter que sur eux-mêmes. Et maintenant que Katrín affrontait la situation en face, il lui fallait bien admettre que leurs ressources étaient limitées.
Une fois dans le couloir, Tryggvi se rendit compte que le geignement s’était transformé en hurlement. Il n’aurait su dire s’il s’agissait d’une vois d’homme ou de femme ; il n’était même pas certain qu’elle fût humaine. (…) Le bruit semblait provenir de l’étage au-dessus et le gardien grimpa les marches deux à deux. Les femmes suivaient toujours et, au grand dam de Tryggvi, elles aussi s’étaient maintenant mises à hurler. (…) Ce n’est pas la bibliothèque renversée, ou le directeur du département, hystérique, rampant à quatre pattes au milieu des livres qui s’étaient répandus dans le couloir, que Tryggvi contemplait, comme hypnotisé. C’était le corps gisant sur le dos dans la pièce, au pied de l’alcôve qui hébergeait l’imprimante de l’étage. Tryvvi sentit son estomac bondir. Pour l’amour du ciel, qu’est-ce qu’il faisait avec des bouts de tissu sur les yeux ?
Elle était persuadée que les voyages obéissaient à une autre loi que la vie quotidienne et qu'elle porterait les vêtements oubliés le reste du temps dans son armoire
Les enfants peuvent être très durs. Mais ça leur passe en grandissant.
Il y a une chose qu’il faut que tu saches. Il vaut mieux perdre son mari parce qu’il est mort que parce qu’il t’a quittée pour une autre femme.