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Critiques de Zora Neale Hurston (68)
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Une femme noire

Quel bonheur de découvrir l'enfance, l'adolescence, les trois mariages de l'héroïne de Their Eyes Were Watching God... sa persévérance à rechercher une vie conforme à l'idée qu'elle s'en fait.



Un roman sans conteste féministe, présentant l''alignement du comportement de l'homme noir, post abolition de l'esclavage, sur l'homme blanc. Ses manières, vêtements, principes, ambition, matérialisme dévorant, volonté de dominer, de posséder d'abord tout ce qui compose son foyer puis sa communauté, et toutes les justifications improbables qui vont avec.

Pourtant, c'est un féminisme sans violence sans rejet, ni jugement de vies qui ne s'accordent pas à la vision de l'héroïne/l'auteur. La prise de conscience d'une femme noire, la construction et la préservation d'un monde intérieur dans lequel elle se tient droite, digne et souriant au monde, prête à voir sa vie éclore. Dès le départ, la métaphore du poirier en fleur et des abeilles est superbement peinte, cette vision centrale au monde intérieur de Janie, représentant sa conception de la vie, une sexualité certaine, mais, me semble-t-il, une idée d'harmonie et de naturel...



Le refus de Janie de se conformer à une vision de la vie imposée et de se laisser enfermer dans une vie qui ne correspond pas à ce qu'elle souhaite pour elle-même, sa lente émancipation d'une vision du monde qui n'est pas la sienne, sont simplement magiques.



Une femme qui trouve sa voix, entre l'anglais conventionnel de la voix de narration et l'anglais idiomatique africain américain du sud des États Unis. L'utilisation de cet anglais idiomatique source de conflits et controverse avec les autres grands auteurs africains américains des années 1930-40, Ellison et Wright entre autres, jugeant l'effet rétrograde et caricatural.

L'effet est loin d'être aussi réducteur. Une fois que l'on s'est adapté à la graphie particulière de l'anglais idiomatique, une petite voix lente et musicale vient se caler au creux de votre oreille de lecteur et vous accompagne de son rythme enchanteur et de son langage particulièrement imagé :



"Dat's all right, Pheoby, tell 'em. Dey gointuh make 'miration cause mah love didn't work lak they love, if dey ever had any. Then you must tell 'em dat love ain't somethin' lak uh grindstone dat's de same thing everywhere and do de same thing to everthing it touch. Love is lak de sea. It's a movin' thing, but still and all, it takes its shape from de shore it meets, and it's different with every shore."



Le résultat en est un instant de bonheur, de plaisir et gaieté infectieuse face à la persistance de Janie, l'héroïne de Zora Neale Hurston. Une magie qui me met, curieuse et enchantée, sur la piste des ses autres œuvres, qu'elles soient fiction, autobiographiques ou écrits anthropologiques.
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Pour moi, lire c'est aussi faire de mes lectures des contrastes, en changeant de pays voire de continent ou d'époque à chaque livre afin de ménager l'émerveillement, la surprise, de garder un regard neuf. Je ne lis donc jamais deux fois de suite le même auteur ni même deux auteurs de même nationalité et/ou de même époque. Ainsi, après un roman contemporain d'un auteur finlandais que j'adore, j'ai lu Mais leurs yeux dardaient sur Dieu. Mon tout premier livre édité par les Éditions Zulma. Et ce ne sera pas le dernier ! Je suis sensible à la magie des titres et celui ci est magnifique. Écrit en 1937 par Zole Neale Hurson, l'une des premières auteures afro-américaines, figure du mouvement Herlem Renaissance et redécouvert par Alice Walker (un IMMENSE merci à elle !), ce livre nous livre le - magnifique - portrait d'une femme entière, Janie, enfant et adolescente d'abord innocente et naïve, descendante d'esclaves et qui dans un milieu et une époque dans lesquels les femmes sont très peu de choses n'aura de cesse de trouver sa place, de réaliser son idée de l'émancipation, de l'accomplissement, d'un amour choisi, d'un destin qui lui ressemble. Il lui faudra trois mariages, on pourrait dire trois vies pour parvenir à prendre sa vie à bras le corps : durant les deux premiers, elle préserve contre ses maris (et la société tout entière) sa vie intérieure "des choses empaquetées et rangées dans des recoins de son coeur où il ne pourrait jamais les dénicher" et durant le troisième, avec un homme sans le sou et beaucoup plus jeune qu'elle - quel scandale !!!, elle se réalise enfin. Le livre est le récit de sa vie qu'elle raconte à une amie et offre à la lectrice émerveillée que je suis. Les mots - en black english, sorte de patois ou d'argot - résonnent au sens propre tout au long du livre, avec tant d'authenticité que j'ai eu l'impression d'entendre sa voix, cette langue orale si frappante, restituée avec brio par la prodigieuse Sika Fakambi, traductrice au talent inouï, qui rend cette rencontre, cette magie possible. Et c'est avec cette lecture que l'expression galvaudée "un classique incontournable à lire absolument" devint juste.
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Barracoon

Ce livre qui raconte l’histoire poignante du dernier esclave américain a été interdit de publication pendant plus de 70 ans, car le mythe des Africains pauvres et exploités, qui capturaient et vendaient leurs compatriotes aux esclavagistes, était pour beaucoup un sujet tabou.



L’auteure Zora Neale Hurston retrace avec beaucoup de soin l’histoire d’Olualé Kossola appelé peu de temps après son arrivée en Alabama, Cudjo Lewis. Il a vécu comme beaucoup de gens de son peuple, la traite négrière, les atrocités commises par ceux de son propre peuple et par les Américains. Trop d’entre eux ont été enlevés, traumatisés, enchaînés, affamés et entraînés dans d’autres terres que les leurs. Il raconte son existence précaire dans le navire qui l’a conduit jusqu’à ses nouveaux maîtres, puis les baraquements (maisons) dans lesquels lui et d’autres esclaves ont vécu par la suite. Il finira par parler de sa vie après cette période sombre, le jour où il fut émancipé, sa joie d’être enfin libre malgré la peine qu’il ressent de ne pouvoir retrouver son pays.



La chronique complète sur Songe !
Lien : https://songedunenuitdete.co..
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Je suis sure que la traduction ne rend pas justice à ce livre.

Je n’ai pas réussi à passer sur un langage difficile à décoder, alors qu’on peut constater la très grande qualité d’écriture de l’auteure.

Dommage !

Malheureusement je ne maitrise pas suffisamment l’anglais pour le lire dans son écriture originale.
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Barracoon

Une ethnologue recueille les mémoires d'un esclave africain vivant en Alabama depuis ses 18 ans... récit de sa rafle par des négriers noirs, traversée douloureuse...Sa mémoire est confuse,son vocabulaire limité,ses souvenirs pauvres faute d'avoir connu des situations variées

Seule persiste la mort sans jérémiade et une forme de noblesse . Bref et digne,ce livre ,sans racolage.
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Ce roman m’a happée, bouleversée et pourtant, ce n’était pas gagné ! Sa particularité, qui lui a valu de nombreuses critiques à l’époque de sa sortie, tient dans l’utilisation de l’anglais vernaculaire noir américain dans tous les dialogues. Et autant vous dire que, lorsque vous n’y êtes pas habituée, il faut parfois s’accrocher car la syntaxe et le vocabulaire sont très différents de l’anglais “classique”. C’est d’ailleurs très imagé avec de nombreuses métaphores. Dans cette nouvelle traduction parue chez Zulma en 2018 [le livre date de 1937] Sika Fakambi s’est efforcée de rendre le mieux possible les particularités de cette langue vernaculaire en français et cela n’a pas dû être un exercice facile ! Il m’a donc fallu un certain temps d’adaptation pour entrer dans ce roman et apprécier ma lecture.

Ce qui m’a donné envie de m’accrocher [outre, l’avis enthousiaste de Zadie Smith sur la 4e de couv], c’est évidemment Janie. Elle commence son récit par la période où elle était enfant, vivant dans l’arrière cour de la famille de blancs qui employaient sa grand-mère. L’esclavage a été aboli depuis peu et la grand-mère de Janie veut offrir le meilleur à cette enfant qui n’a plus d’autres parents car elle sait qu’une autre vie est possible, plus heureuse que celle de ses ancêtres. C’est elle qui, sans le vouloir, plante “cette” petite graine dans l’esprit de Janie. La jeune fille rêve d’amour et de liberté mais elle va mettre toute une vie avant de les rencontrer. Cela lui prendra trois mariages et autant d’existences très différentes les unes des autres. Je ne veux pas trop vous dire et je trouve que le résumé du roman, sur l’objet-livre en dit déjà de trop.



Par ce roman, l’autrice nous propose des personnages qui s’affranchissent de ce que la communauté blanche peut bien penser d’eux et qui construisent une société totalement indépendante. Néanmoins, cela n’empêche pas toute une série d’oppressions d’avoir lieu : mépris de classe, misogynie et j’en passe. Même le racisme refait son apparition puisque visiblement, pour certain·es, il y aurait des noir·es meilleur·es que d’autres. A travers Janie et ses voisin·es, l’autrice nous propose tout un panel de personnages qui sortent des clichés habituels. Elle s’interroge aussi, longuement, sur le rôle des femmes dans la société et la manière dont il est possible de faire couple [dans des mariages hétérosexuels]. J’ai trouvé cela très novateur pour l’époque.



La nature joue également un rôle important dans ce roman puisqu’elle est souvent à l’origine des changements de cap de Janie. Il y est notamment question de travail agricole, et de tout ce que cela implique, mais aussi d’ouragans. On y voit tout ce qu’elle peut avoir de merveilleux mais aussi de dévastateur.



J’ai beaucoup aimé les thèmes abordés dans ce roman. J’ai vibré pour Janie dans les derniers chapitres et je ne regrette aucunement d’avoir persévéré quand je butais sur les premiers chapitres. C’est une lecture dense, qui demande une certaine attention et implication de la part de ses lecteurs et lectrices mais je vous la conseille vivement si vous aimez cette littérature américaine à l’ambiance un peu lourde, à la Toni Morrison ou à la Jesmyn Ward.
Lien : https://www.maghily.be/2021/..
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Lecture difficile mais fascinante.

Les dialogues sont écrits en Vernaculaire Afro Américain ( Black English ou "Spoken soul"...), style utilisé aussi par Mark Twain.

De ce fait, on se confronte parfois à des phrases à la limite de la compréhension.

L'imaginaire véhiculé par ces dialogues est aussi par moment très troublant.

Certains dialogues peuvent paraître aussi très insignifiants...

Mais en fait tout cela contribue à nous plonger dans cet univers physique et mental de ces AfroAméricains qui vivent entre eux dans le monde des blancs , peu présent dans le livre mais toujours menaçant de manière diffuse.

Il m'a fallu la moitié du livre pour pénétrer cet univers incroyable porté par cette femme extraordinaire.

Courage et bonne lecture. :-)
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Barracoon

" Le livre est précieux aussi parce qu'il nous fait entrer dans cet abîme de désespoir que les Africains nomment Maafa, « terme swahili signifiant à la fois le désastre et la manière dont les hommes réagissent face à lui. » A l'instar du Samudaripen, de la Shoah, de la Naqba, mais avec une portée infiniment plus vaste, puisqu'elle désigne à la fois le déracinement, l'ethnocide, le génocide, l'esclavage, la traite, et ce pendant des siècles, cette expression porte l'horreur inédite du destin africain, mais aussi de cette résistance profonde, obscure, entêtée à ce qu'on pourrait appeler la nuit sans fin de la dépossession, de la déshumanisation. On ne peut qu'être épouvanté par la vie terrible que raconte Kossoula. La fin de l'esclavage ne verra évidemment pas la fin de ses tribulations. Comme le disait Wilde non sans perspicacité, « Les esclaves se retrouvèrent libres, absolument libres de mourir de faim ». Chassés des plantations sans le moindre dédommagement pour les années de travail gratuit, en butte à un racisme qui n'avait pas fléchi pour l'issue d'une guerre ou un texte de loi, ils devaient travailler dur pour peu. Dans sa naïveté, Kossoula demande à son ex-propriétaire un bout de terre pour s'y installer avec ses compagnes et compagnons, une fois qu'il a compris dans la douleur que jamais le fruit de son travail ne lui permettra de payer le voyage retour vers l'Afrique. le planteur, qui estime avoir toujours été bon avec ses esclaves (et en effet ce n'est pas une brute comme il en existe beaucoup) se met alors en colère, outré, et lui explique qu'il ne lui doit plus rien puisqu'il ne lui appartient plus. Au prix d'années de labeur, les Africains déportés du Clotilda acquièrent alors collectivement un lopin de terre où ils installent leur ville, Africatown (Plateau, en Alabama). Ce sera, pendant toute leur vie, un succédané d'Afrique où pourtant la vie n'est jamais facile. Entre Africains au début, ils sont rejoints par des afro-américains qui n'ont jamais connu l'Afrique, parlent anglais et les considèrent comme des sauvages. Douleur du massacre de sa famille et de l'arrachement, douleur de la déportation, douleur de la nostalgie et du mal du pays, douleur de l'esclavage et de l'humiliation, douleur lancinante et inguérissable du déracinement dans la violence, Kossoula décline toutes les facettes du Maafa. La trentaine d'Africains à rester ensemble, Principalement des Yoruba et des Fon, leur permet de continuer à parler leur langue, ne pas perdre leurs histoires, leurs contes, leurs proverbes, leur mémoire. Mais ils ont une vie d'assiégés, dure et violente, limitée en tout, sans espoir de retour. Malgré la férocité de son sort, Kossoula est un vieillard enjoué, changeant, parfois abattu et grincheux, mais la plupart du temps étonnament disert et avide de bonheur. le lien qui se tisse entre lui et Zora, alors âgée de 38 ans, est plein de fraîcheur et de spontanéité. Déporté à 19 ans, il a une mémoire très précise de tout ce qui s'est passé, et en lui l'Afrique est restée la part la plus intense et la plus lumineuse de sa vie, bien qu'il n'y ait passé que la fugacité de son extrême jeunesse. À l'époque où Zora le rencontre, il a perdu successivement quatre de ses enfants, sa femme, Abila, déportée en même temps que lui, et pour finir son dernier fils. Ne restent auprès de lui que sa belle-fille et ses petits-enfants. Sa famille a constitué pour lui un sanctuaire d'amour et de bonheur, le seul, dans une détresse constante. Mais d'elle aussi il a été dépouillé. Il cultive son jardin. À aucun moment de son récit il ne se présente comme le personnage central de sa propre vie. Il a tout subi, il a fait ce qu'il a pu, il a aimé pourtant, il s'est efforcé de résister à la cruauté du sort. Il est si pauvre que Zora et son éditrice lui porteront secours à plusieurs reprise, lui évitant de sombrer dans l'indigence. Il est devenu un bon chrétien, mais garde, à travers ses paraboles et ses contes, sa vision originelle de l'existence. ( ...) À partir du moment où on est né, on peut être dépossédé de l'avenir et de son destin, mais pas de ses origines. On est tout étonné de voir sortir des griffes d'une insatiable méchanceté ce vieillard qui parle d'amour, et qui sans cesse parle dans un présent aussi long que sa longue, très longue route. "

Lonnie, extrait de l'article paru dans DM
Lien : https://doublemarge.com/barr..
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Quelle écriture et quelle histoire !



L'écriture, très certainement excellemment servie par la traduction de Sika Fakambi, est à la fois très littéraire et poétique quand l'histoire est racontée, et tout à fait déformée, simple, presqu'argotique dans les dialogues. La langue utilisée par les personnages rappelle le français qu'on peut entendre aux Antilles et au Québec, c'est une langue drôle, savoureuse, très étonnante : " Le jour où tu vas mettre ta main dans la mienne, plus jamais je vais laisser le soleil descendre sur nous en célibataires. Moi chuis un homme avec des principes. Toi t'as jamais connu c'est quoi être traitée comme une dame et moi je veux être celui-là qui va te montrer. Appelle-moi Jody comme tu fais des fois." (p55)



L'histoire est celle de Janie, une jeune femme noire du Sud des Etats-Unis dans les années trente ; elle raconte à son amie Pheoby, une fois revenue dans son village d'origine d'Eatonville en Floride, ses trois existences différentes à travers ses trois mariages.

Sa grand-mère qui l'a élevée et qui avait connu l'esclavage, voulait que Janie trouve sécurité et richesse dans son mariage et quand elle s'aperçut que sa petite fille s'ouvrait à la vie - il y a de très belles pages sur "l'éclosion" de Janie - elle la marie très vite à un homme qui a du bien...

Ainsi commence l'existence de cette femme remarquable, qui va chercher à la fois à connaître des sentiments vrais, à s'émanciper, à établir sa propre identité ; dans le tumulte de sa vie, elle poursuivra la recherche d'un bonheur profond et honnête, et de sa liberté.



Elle est belle, courageuse, intelligente, féministe et elle aime la vie cette Janie ; c'est une jeune héroïne noire, dans une société d'après l'esclavage qui se cherche un avenir.



Quasiment inconnu en France, ce récit puissant, immense aux États-Unis, est à lire, à découvrir, à apprécier !



Premières phrases : "Les navires au lointain transportent à leur bord tous les désirs d'un homme. Certains reviennent avec la marée. D'autres voguent à jamais sur l'horizon, sans jamais s'éloigner du regard, sans jamais toucher terre jusqu'à ce que le Guetteur détourne les yeux de résignation, ses rêves raillés mortifiés par le Temps. Telle est la vie des hommes."
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Une femme noire

Je suis ravie d’avoir découvert ce classique tellement important qui a été écrit en 1936 à Haïti alors que l’auteur y séjournait pour se renseigner sur les pratiques vaudou. Grâce à son héroïne, l’auteur se fait la porte-parole des femmes noires américaines qui à l’époque peinent à trouver leur place et à se faire entendre dans un contexte post abolition de l’esclavage.



C’est un texte tellement important dans la littérature afro-américaine, c’est comme le point de départ, la base d’une pensée féministe tout en douceur.

C’est à travers tout un parcours initiatique que nous suivons Janie qui est le personnage central, et qui refuse dès le départ la vie que sa grand-mère a choisi pour elle. C’est une lutte intérieure qui se joue en elle, tout un cheminement de pensée qui va évoluer au fil du roman.



Janie est une femme digne, en quête de sa conscience et en quête de l’amour.

L’auteur pointe du doigt certes le racisme des blancs envers les noirs mais aussi les comportements abusifs des hommes noirs qui finalement s’alignent sur celui des blancs dans plusieurs domaines et notamment en rabaissant les femmes. Après l’abolition de l’esclavage aux Etats-Unis, c’est toute la communauté noire qui cherche sa place et qui doit affirmer son identité. L’auteur, anthropologue de formation, s’inspire de tout un folklore et de toute une croyance populaire et nous livre là un roman dont la force est de dépeindre la réalité de la volonté d’émancipation d’une femme noire à travers un voyage initiatique.



Ce roman est beau, ce roman est une voix, la voix de la femme noire. Dans ce magnifique roman, l’auteur a tenu à retranscrire la langue « black English ». Si la traduction française fait penser au début à un patois campagnard et rend la lecture assez bizarre, ensuite on se laisse facilement porter et envouter par la musicalité de cette voix. Cette utilisation du black English dans l’œuvre est essentielle et contribue avec force à la richesse de ce roman.



Ce que j’ai adoré par-dessus tout, c’est la voix de Janie. Elle ne s’exprime pas beaucoup au début, du moins pas avec son deuxième mari, nous la découvrons surtout à travers ses pensées. Mais à chaque fois qu’elle s’exprime c’est comme si on buvait ses paroles. Nous n’avons pas tellement de détail sur son premier mari, on sait juste que c’est sa grand-mère qui lui a imposé et qu’elle ne l’aime pas. Elle le quitte lorsqu’elle décide de s’enfuir avec Jodie qui deviendra son deuxième mari. C’est un homme noir, ambitieux, travailleur, et très autoritaire avec Janie. Il s’impose rapidement comme le maire de la petite bourgade d’Eatonville et possède un magasin dans lequel il fait travailler Janie. Il la rabaisse, l’insulte, la traite d’incapable mais tout ça c’est normal pour lui, après tout la femme doit servir l’homme alors il faut bien l’éduquer. Vous l’aurez compris elle ne trouve pas non plus sa place dans ce second mariage. Après son premier mari elle s'était rendu compte que mariage et amour ne vont pas forcément de pair, trouvera-t-elle l’amour avec son troisième mari ?

 Même si Janie encaisse beaucoup sans rien dire, cela ne veut pas dire qu’elle n’a rien dans le crâne, au contraire. Elle nous sort à plusieurs des « punchlines » bien senties en réponse à son mari qui la rabaisse et c’est à mourir de rire. Janie est pour moi une héroïne littéraire qui m’a marquée et dont je me souviendrai.



C’est compliqué de faire un article complet sur un texte classique comme celui-là. Je n’ai fait qu’aborder les quelques points qui m’ont marqué, mais bien d’autre thèmes mériteraient d’être développés. J’ai eu du mal à rassembler mes idées et j’ai laissé passer un peu de temps après l’avoir lu avant d’écrire l’article. Peut-être que je complèterai ma chronique au fil du temps et que j’affinerai mes idées. Rien n’est figé.
Lien : http://marie-loves-books.blo..
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

C'est au cours de ce genre de lectures que je me rends compte de l'extraordinaire chance que j'ai de pouvoir lire en anglais.



L'indicible beauté de cet indiscutable chef-d'oeuvre m'a enveloppée: poésie des langues, puissance du message, débordement d'amour, incarnation de la force.



Je ne veux pas en dire trop sur l'intrigue. Il suffira de dire que je suis sortie de cette lecture bouleversée et en paix.



Zora Neale Hurston est une immense autrice.
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Un livre attachant, dont j'ai beaucoup admiré la traduction qui arrive -je suppose- à rendre un parler étrange(r) sans le ridiculiser mais au contraire en s'en servant de levier pour rendre le caractère des personnages et leur monde.

Oui, c'est surtout la langue qui m'a retenue, la façon remarquable dont elle charpente l'histoire. Elle est le véritable fil rouge du récit que fait Janie à sa meilleure amie, de retour dans sa ville après une longue histoire d'amour qui n'a duré que quelques mois intenses.
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Voilà un livre que j'ai bien failli abandonner à la trentième page, malgré ce qu'en disait Toni Morisson "l'un des plus grands écrivains de notre époque".

Puis le style m'a pris de cette très belle traduction d'un langage parlé. Ce n'est pas seulement l'histoire d'une petite fille d'esclaves noirs en Floride dans les années 30, c'est une belle réflexion sur ce qu'est l'amour, le vrai amour que porte Janie à Tea Cake après avoir eu deux compagnons qui ne lui convenaient pas. Qu'est-ce que rencontrer celui qui vous convient, qui voit en vous le meilleur de ce que vous êtes et le fait grandir. Noir ou blanc, c'est la même quête, le reste n'est que contexte. C'est la grandeur de Zora Neale Hurston de ne pas s'arrêter aux misères des noirs dans un monde de blancs, mais de donner à ce couple des tourments et une grandeur qui dépassent la couleur de leur peau, une totale et indiscutable humanité dans laquelle tout le monde peut se reconnaître.
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Un récit très touchant. L'auteure offre une perspective très moderne de la féminité. le personnage principal Janie est une femme noire-américaine indépendante qui cherche à échapper à sa condition. Elle doit faire face au regard de sa communauté, elle-même minée par l'oisiveté et l'absence d'opportunités, comme embourbée dans les marais des Everglades en Floride, sorte de métaphore pour évoquer l'incapacité à se défaire des inégalités de l'ère Jim Crow.
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Barracoon

Ce livre m'a été conseillé par un ami qui l'avait trouvé très intéressant. Moi même je l'ai lu d'une traite. Sa lecture en est simple mais les faits évoqués dans ce "report" de la parole de Cudjo Lewis sont poignants sur la simplicité de sa vie.

On y retrace le témoignage d'un des derniers esclaves qui a vécu aussi en Afrique. Il ne s'agit pas seulement de raconter sa vie d'esclave puis d'homme libre aux USA, même si c'est un témoignage supplémentaire de la réalité de l'esclavage, mais il nous indique surtout comment ces hommes libres ont été capturés par d'autres africains dans le but de les vendre comme esclaves aux Blancs. Leur rêve était de revenir en Afrique et non de terminer leur vie en Amérique. Il montre comment ces hommes et femmes, car le bateau contenait autant d'hommes que de femmes, se sont retrouvés "rejetés" par les esclaves déjà présents qui n'avaient plus ce lien avec l'Afrique et avec un sentiment d'abandon et de trahison de la part d'autres africains.

Zora Neale Hurston recoupe le récit de Cudjo par différentes recherches et sources avérées mais donne toute sa place à sa parole et Deborah G. Plant replace bien son travail dans une étude plus vaste sur l'esclavage.
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Barracoon

Je ne m’attendais pas à cela en ouvrant ce livre. C’est plus ce qu’il y a autour du livre qui prend une place importante. Si je n'ai pas trouvé d'intérêt dans les passages un peu pointus sur les conflits universitaires ou autres concernant les difficultes à publier ce livre pour l'auteure anthropologue afro-americaine, j’ai apprécié cette rencontre entre l’auteur, Zora Neale Hurston et Cudjo Lewis qui a été capturé et amené d’Afrique sur le dernier navire important des esclaves aux Etats-Unis.

Le viel homme lui raconte comment il est devenu libre à la fin de la guerre de sécession. Mais la liberté ne vaut pas grand chose sans terre, sans droit. J'ai été touchée par le récit de cet homme désormais seul. J'ai aimé les légendes et autres histoires qu'il lui confie et la complicité qui se fonde entre l'auteure et Cudjo Lewis.

L’histoire du livre et un glossaire permettent de revenir sur l’histoire de l’esclavage.

Un livre que j’ai trouvé original dans sa construction mais aussi dans la manière dont il traite le sujet bien que je n’en ai pas lu énormément, j’ai trouvé intéressantes l’approche et la présentation de l’entretien. Je m'attendais à une histoire sur les conditions de vie de cet ancien esclave mais ce livre offre une autre vue de l'Histoire.

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Remarquable témoignage historique de la vie de Cudjo Lewis, esclave africain en Amérique, arraché à sa terre et ayant vécu la terrible expérience du voyage et de l'esclavage. Texte célèbre et bien écrit, véritable récit, dans lequel on est plongé sans y prendre garde. Rarissime narration de première main des circonstances de l'enlèvement, de la transaction, du voyage et des conditions de travail. Un ouvrage de référence à découvrir sans hésiter.
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Mais leurs yeux dardaient sur Dieu

Le début est un peu surprenant puisqu'il faut s'adapter à l'écriture qui retranscrit les paroles des héros dans leur dialecte. C'est surprenant, et peut-être un peu rebutant, mais je m'y suis fait. En quelques pages, j'ai pris le plis et j'ai suivi Janie et ses maris  sans problème, grand bravo au traducteur ! Outre ce fait, plutôt d'un point de vue pratique, Janie est attachante, l'écriture permet de magnifier sa personnalité et ses sentiments.

Ce roman met en perspective la vie aux U.S.A. au début du 20ème siècle, le racisme tant des blancs que des noirs, de la précarité et de la condition des femmes dans tous ces préjugés raciaux et sociaux. Tout cela est écrit avec un style très particulier. C'est savoureux, drôle, romantique et  caustique, tout à la fois.
Lien : http://cath-jenta3.hautetfor..
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Barracoon

Un ouvrage précieux pour comprendre dans sa complexité la traite esclavagiste transatlantique. Son intérêt tient évidemment au témoignage unique de Kossola qui nous met face à ce que l'homme fait à l'homme quelque soit sa couleur de peau lorsqu'il se convainc de croyances qui légitiment sa barbarie. Complété par des documents annexes qui expliquent pourquoi ce livre n'a jamais été édité du vivant de Zora Neale Hurston, et éclairent le contexte de sa rédaction en 1927, ce livre est une plongée dans la vie d'êtres humains qui depuis leur capture en Afrique jusqu'à leur mort en sol américain "n'ont cessé de se battre pour récupérer la souveraineté sur leur propre corps".

Sa présentation fort pédagogique devrait retenir l'attention des enseignants.
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Barracoon

Le témoignage fort du dernier rescapé d'une des plus grandes tragédies humaines.



Recueilli initialement en 1931 par l'auteure et anthropologue culturelle Zora Neale Hurston, le témoignage de Olualé Kossola est un document historique de grande importance.

En effet, Kossola étant le dernier esclave américain, en tout cas l'un des derniers, son expérience de l'esclavage offre aux lecteurs une vision singulière de la traite négrière.



Le livre est scindé en différentes parties permettant une mise en contexte du texte original. Cela s'avère capital quand on apprend que ce dernier a nécessité de nombreux entretiens entre l'auteure et Kossola (d'ailleurs décrits tels quels dans le livre) et qu'il a été largement inspiré d'écrits d'autres auteurs.



La retranscription de l'histoire de Kossola est très fidèle malgré quelques ajouts et cette authenticité crée une grande proximité avec le lecteur, qui a l'impression d'être face à cet homme.

Les informations historiques et culturelles apportées par le récit ne manquent pas d'intérêt mais c'est surtout la singularité et l'humanité du livre qui m'ont touché.



Zora Neale Hurston, afro-américaine et figure importante du mouvement de la Renaissance de Harlem, n'aura malheureusement pas la chance de voir son texte édité de son vivant. Elle laissera derrière elle, outre ce livre atypique, des romans et essais traitant notamment du folklore afro-américain, une autobiographie et de nombreux travaux universitaires. Une auteure à découvrir ou redécouvrir.
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