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Citations de Élisabeth de Fontenay (98)


Chez Hume, les animaux, les Indiens et les femmes auraient donc pour tâche de mener un même combat contre ceux qui monopolisent la raison, accaparent l'humanité, déshumanisent l'autre sexe. Dans la tradition du scepticisme et dans celle de l'empirisme s'expose ainsi, en même temps que la critique du dogmatisme et de l'innéisme, la rhétorique politique de ce qu'on pourrait appeler une menaçante bienveillance.
p 548, Raison et passion partagées.
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On voit que la difficulté de concilier avec la théologie l'histoire naturelle d'une physique et d'une métaphysique nouvelles ne se laisse pas aisément résoudre. Continuité ou rupture entre l'homme et l'animal : telle demeure, déplacée mais insistante, une question que je n'aurai aucun scrupule à déclarer cruciale.
p537, L'indestructible âme des brutes.
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Desmond Morris s'inscrit dans la trace de Plutarque et de Montaigne quand il laisse entendre que l'obligation de respecter les bêtes rendrait intolérables la plupart des conduites que des citoyens de pays démocratiques s'autorisent vis-à-vis d'autres hommes qu'ils exploitent comme des esclaves ou laissent mourir de faim. (Desmond Morris, Des animaux et des hommes, 1992)
p487, Grâce et bénignité
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C'est comme si on assistait là à l'émergence d'une tout autre manière d'envisager la différence humaine. L'arrachement à la naturalité et, si l'on y tient, à l'animalité ne se ferait plus alors sur le mode hégélien d'une conscience maîtresse et appropriatrice, mais dans la précarité d'événements parfois ruineux, dans la psychopathie et la sociopathie de blessures dont on apprend toujours trop tard qu'elles ont permis de naître ou qu'elles ont fait mourir.
p471, Parle et je te baptise
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Pour en revenir à la lettre de Leibniz, on constate qu'une crainte subsiste : (...). La mise est d'importance : il y va de la légitimité de notre toute puissance sur les animaux qui, s'ils sont sensibles, possèdent des droits que bafouerait leur instrumentalisation rationnelle. Pour une fois, à cette époque, la métempsychose n'est pas tant évoquée comme un spectre spiritualiste païen, un épouvantail à chrétiens, que comme la pente douce par laquelle on pourrait glisser de l'aristotélisme au pythagorisme, et se convertir du droit d'user et d'abuser des animaux à un devoir de respect envers leurs vies. En 1678 donc, un grand philosophe, comme en un moment de crise de la raison, évaluait les enjeux, mettait en regard les théories, les pratiques et les conduites, et prenait le temps de s'arrêter à considérer en quelque sorte les bêtes pour elles-mêmes. Ce n'est décidément pas seulement dans les campagnes, mais aussi dans l'esprit européen le plus lumineux et le plus cosmopolite que le christianisme a eu de la peine à triompher de la sorcière Antiquité.
p444, Cauchemars de transmigration
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Rassurez-vous, bons chrétiens, semble-t-il dire, vous pouvez continuer à torturer les bêtes sans commettre de péché puisqu'elles ne ressentent rien. Vous pouvez, sans ajouter du mal au mal, passez sur elles toutes vos fantaisies de pervers polymorphes. La révélation vous a certes constitués pécheurs, mais, par la thèse des animaux-machines, Faites-en donc à votre aise, ad libitum !
p419, La mise en page de la disputatio
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"Il est plus probable de considérer que se meuvent comme des machines les vers de terre, les moucherons, les chenilles et le reste des animaux que de leur donner une âme immortelle". [Œuvres philosophiques, Descartes, t.II, p910]. L'existence de mouvements convulsifs après la mort accroît cette probabilité. On remarquera qu'en cette circonstance où il faut lutter contre la résistance qu'oppose à sa thèse la mauvaise habitude de l'analogie, le philosophe qui avait décidé - dan les règles de sa méthode - de tenir le probable pour du faux recourt au probable et le tient alors pour du vrai".
p392, La fable des machines
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Descartes rêve d'un système de privation sensorielle qui, empêchant que se nouent les liens cordiaux de la perception et des qualités secondes, rende caduque la trop tardive méthode par une rééducation préventive de la mauvaise immédiateté : l’anti-Émile, en somme. C'est cela même, saisi dans la caricature du modèle idéal qui nous est ici donné, que la phénoménologie husserlienne, puis merleau-pontyenne, tentera de réhabiliter : le "monde de la vie", cette connivence préréflexive avec un environnement où l'expérience n'est pas encore sacrifiée au jugement, et où la subjectivité vivante n'est pas déjà expulsée de la connaissance."
p390, La fable des machines
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Descartes a posé ce troisième terme, a introduit dans sa démonstration ce paradigme de l'automate, pour mieux opérer la désintrication des âmes, la chirurgicale séparation de l'homme et de l'animal, la désanimation de la vie.
p386 - La fable des machines
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[Claudel, Bestiaire spirituel] "Maintenant une vache est un laboratoire vivant, (...) le cochon est un produit sélectionné qui fournit une quantité de lard conforme au standard. La poule errante et aventureuse est incarcérée. Sont-ce encore des animaux, des créatures de Dieu, des frères et sœurs de l'homme, des signifiants de la sagesse divine, que l'on doit traiter avec respect ? Qu'a-t-on fait de ces pauvres serviteurs ? L'homme les a cruellement licenciés. Il n'y a plus de liens entre eux et nous. Et ceux qu'il a gardés, il leur a enlevé l'âme. Ce sont des machines, il a abaissé la brute au dessous d'elle-même. Et voilà la Cinquième Plaie : tous les animaux sont morts, il n'y en a plus avec l'homme."
Pour Claudel, comme pour Péguy et Bergson, l'ère du machinisme et du rendement a détruit ce monde harmonieux ; et c'est par une même dérive fatale qu'il n'y a plus ni Dieu ni animaux.
p349, Repentir
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La douceur envers les bêtes accoutume à la bienveillance envers les hommes. Car celui qui est doux, qui se conduit avec tendresse envers les créatures non humaines, ne saurait traité les hommes de façon injuste.
p247 - Une philantrôpia sans limite
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Plutarque, porte-voix des animaux, pousse ainsi les ripailleurs dans leurs derniers retranchements. Si vous répugnez à tuer vous-mêmes la bête, leur dit-il, si vous hésitez à la manger crue et encore chaude, c'est que vous reconnaissez implicitement que vous commettez un meurtre et que vous vous en effrayez, en vertu de votre constitution innée où se fonde le droit naturel.
A ce moment du texte s'opère une transgression rendue possible par la logique des extrêmes, et sur laquelle il faut s'attarder. Le faire-rôtir et/ou bouillir, ces manières de table de l'homme civilisé et du citoyen, ne constitue pas pour Plutarque une circonstance atténuante, bien au contraire. Mieux vaut manger sauvagement et en pleine conscience du crime que de dénier celui-ci par des assaisonnements : chasseurs, sacrificateurs, bouchers, cuisiniers sont tous au même titre des meurtriers, et Diogène mangeant un poulpe cru qu'il dispute aux chiens, ne s'ensauvage pas plus, en réalité, que les convives raffinés de festins somptueux. Lui, au moins, c'est ce qu'il fait et ce qu'il veut faire : devenir comme une bête féroce. Alors que les autres, qui se croient d'autant plus civilisés qu'ils cuisinent, ignorent leur vérité.
p233 - Cuisine cruelle
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Aristote, dans l’Éthique à Eudème, fait de ce fragment une sorte de proverbe : "Ce qui t'amuse me fait mourir". La terrible mise en garde de l'inhumain divertissement de l'homme et du sérieux animal de la mort, cette remarque laconique semble valoir pour tous les jeux cruels que les hommes ont inventés, dans leur histoire, pour faire souffrir et mourir les bêtes les plus inoffensives - chasse à courre, corrida, combats de coqs et de chiens, tir au pigeons -, et elle donne à réfléchir sur ce vivant qui fait mourir d'autres vivants par pur plaisir du meurtre.
p212 - Les soi-disant hommes-chiens
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Il faudrait du reste méditer sur l'impérative nécessité qui fait prononcer le nom de Dieu quand on est à bout d'arguments sur le propre de l'homme.
p200 - Le pourceau magnifique
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C'est donc à toutes sortes d'arguments philosophiques (ou simplement doxiques) accumulés contre l'interdiction de tuer et de manger les animaux que Porphyre s'apprête à répondre. Mais avant de commencer à réfuter les raisonnements antivégétariens qu'il a exposés, il prend soin de rappeler à qui est destiné son traité : non pas "à l'homme endormi qui tout au long de sa vie met ses efforts au service de son sommeil en rassemblant auprès de lui tout de qui peut faire dormir, mais à l'homme soucieux de chasser le sommeil et organisant tout ce qui l'entoure en vue de rester éveillé".
p190 - La souillure carnivore
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C'est le souci ésotérique, élitiste de soi-même qui commande de réviser et même d'abolir la tradition logocentriste pour trouver des raisons de ne pas attenter à la vie animale : on est loin de la compassion et du sentiment de solidarité avec tout ce qui respire. Porphyre cite des recommandations d'inspiration végétarienne qui viennent à point renforcer sa thèse prescriptive, mais rien ne dit qu'il les suive, malgré la radicalité de sa propre position. Ne pas manger de viande, cela reste peut-être pour lui en définitive une affaire entre soi et soi, entre la partie rationnelle de l'âme et la partie irrationnelle (...)
p190 - La souillure carnivore
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Le propos de Lucrèce fut de désenchanter le monde, de désensorceler la réalité pour émanciper les hommes des craintes inspirées par la religion, par la prétendue intervention des dieux dans les affaires humaines, par les diverses croyances en l'immortalité des âmes.
p157 - Lucrèce...
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Décidément, ce n'est pas sur les Épicuriens grecs qu'il faut compter pour voir se dessiner un droit des animaux. Épicuriens et Stoïciens menèrent le même combat contre ces marginaux qui prônaient l'absence de nourriture carnée.
p155 - Un même droit restrictif
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Et si, conclut Jean-Louis Poirier, on veut vraiment trouver une ligne de partage effective et efficace pour Platon comme pour la plupart des grecs, il faut la chercher non point entre l'homme et l'animal, mais entre l'homme libre et l'esclave.
p96, Pesantes âmes à l'oubli livrées
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Lévi-Strauss écrit une page exemplaire par sa densité, par la douleur et la violence rarement égalée qu'elle exprime ; il faut la citer le plus longuement possible, tant elle prend en charge tout ce qui est si difficile de recueillir et de rassembler. Il commence par évoquer la montée en puissance des exterminations, des massacres, des tortures, que nous ne désavouions pas parce qu'ils se perpétraient en notre nom et à notre profit sur des populations lointaines et qui, maintenant, en quelque sorte nous rattrapent, nous menaçant d'une abjecte violence. Puis, avec une solennité rhétorique qui tranche sur son ton habituel, il profère ces mots : "C'est maintenant (...) qu'exposant les tares d'un humanisme décidément incapable de fonder chez l'homme l'exercice de la vertu, la pensée de Rousseau peut nous aider à rejeter l'illusion dont nous sommes, hélas ! en mesure d'observer en nous-mêmes et sur nous-mêmes les funestes effets. Car n'est-ce pas le mythe de la dignité exclusive de la nature humaine qui a fait essuyer à la nature elle-même une première mutilation, dont devaient inévitablement s'ensuivre d'autres mutilations ? On a commencé par couper l'homme de la nature, et par le constituer en règne souverain ; on a cru ainsi effacer son caractère le plus irrécusable, à savoir qu'il est d'abord un être vivant. Et, en restant aveugle à cette propriété commune, on a donné champ libre à tous les abus. Jamais mieux qu'au terme des quatre derniers siècles de son histoire l'homme occidental ne put-il comprendre qu'en s'arrogeant le droit de séparer radicalement l'humanité de l'animalité, en accordant à l'une tout ce qu'il retirait à l'autre, il ouvrait un cycle maudit, et que la même frontière, constamment reculée, servirait à écarter des hommes d'autres hommes, et à revendiquer au profit des minorités toujours plus restreintes le privilège d'un humanisme corrompu aussitôt né pour avoir emprunté à l'amour-propre son principe et sa notion."
p50, le plus autrui des autrui
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