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EAN : 9791097390501
Le Serpent à plumes (06/09/2018)
3.75/5   10 notes
Résumé :
Dans un HLM en briques bordeaux coincé dans l’étau des Maréchaux et du boulevard périphérique du côté de Porte de Bagnolet, le narrateur, un Syrien, passe le plus clair de son temps devant les deux chaînes France 24 et Al-Jazeera en arabe. Il vit à distance la violence dans son pays d’origine et assiste, impuissant, à l’hystérie collective qui décime des populations entières et broie la mosaïque plurimillénaire de toute une civilisation. Il rejette d’emblée tout com... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Fawaz Hussain raconte, sous forme de saynètes bigarrées , son quotidien, immergé dans ce Paris cosmopolite , ce qu'il voit, ce qu'il entend, ce qu'il pressent, sa cohabitation avec ses voisins venus de tous les horizons, dans cette tour HLM , qu'il compare avec humour à la tour de Babel . C'est à la fois drôle, mais aussi émouvant, pathétique. Tantôt sa plume s 'exalte dans une fantaisie poétique généreuse , tantôt elle redevient chagrine, chafouine, mélancolique, nostalgique, tragique quand elle évoque la routine de la vie, la guerre, les exactions , les destructions , la tristesse de la ville sous la pluie, la douleur de la séparation, la misère ambiante . Mais Fawaz sait aussi rêver, imaginer, pour s'échapper de ces effluences mortifères ,dessinant ainsi un coin de ciel bleu dans la grisaille parisienne.
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Paris, 20° arrondissement, entre deux boulevards dont celui des Maréchaux, se dresse un immeuble HLM, facilement qualifiable en tour de Babel tant les origines des habitants sont diverses. Des Français, des Maliens, des Maghrébins, un Serbe ou Bosniaque voire Croate, une Tamoule, un Sénégalais, une Russe, celle du premier à laquelle le Syrien du septième étage n'est pas insensible. Mais chaque fois, elle trouve une parade pour ne pas l'inviter.

C'est la vie dans cet immeuble vétuste que le Syrien raconte, mais aussi ses peurs et angoisses face à la situation dans son pays, d'autant plus que sa famille y réside encore.

On n'est pas dans La vie mode d'emploi de Georges Perec, inévitable lorsqu'on parle des habitants d'un immeuble, mais le Syrien fait le tour de tous ses voisins. Les liens qu'il entretient avec eux, ou pas, leurs particularités ethniques mais aussi physiques, leurs traits de caractère. Il raconte aussi les habitués du square pas loin, les commerçants qu'il visite régulièrement de façon tragi-comique.

Tragique parce que le Syrien ne peut s'empêcher de suivre sur les chaînes infos la guerre dans son pays, de constater que le pouvoir ne fléchira pas malgré les nombreux morts et les encore plus nombreux exilés, il est horrifié de voir que Daech détruit des sites remarquables, tue des gens qui n'ont rien demandé que de vivre paisiblement.

Comique parce que ses gentilles tentatives pour séduire sa voisine russe se heurtent à une femme décidée. Parce que certains voisins sont drôles dans leurs habitudes, que leurs dialogues sont parfois surréalistes par manque de compréhension des langages. Mais aussi tragique parce que l'immeuble abrite des gens pauvres, souvent seuls éloignés de leurs pays, de leurs familles qu'ils ne sont pas sûrs de revoir un jour. Tragique parce que leurs vies auraient pu être tout autres dans leurs pays s'ils n'étaient en guerre ou de régimes dictatoriaux ou encore pauvres qui ne peuvent plus nourrir leurs habitants obligés donc d'émigrer sous des cieux a priori plus cléments. La question du déracinement, de la solitude, de la vie loin des siens et de son pays est posée tout au long du roman, elle est centrale.

Fawaz Hussain parle assez peu de racisme tant les origines sont mélangées et la cohabitation marche bien. La solidarité même entre les résidents de l'immeuble, notamment face au bailleur qui traîne à faire les travaux. Un roman des petits moments de tous les jours, du quotidien d'un grand immeuble parisien pas vraiment de haut standing. Belle écriture qui joue avec les mots, les phrases toutes faites, les expressions. Et belle couverture signée le serpent à plumes.
Lien : http://www.lyvres.fr/
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J'ai reçu ce livre à l'occasion d'une masse critique. C'est un roman très mélancolique, très triste, très désespéré. le narrateur est syrien et vit au 7e étage d'un HLM à la périphérie de Paris. Venu à Paris pour ses études dans les années 70, il était prof dans un lycée, il aimait la vie, avait une compagne japonaise. Mais depuis le début de la guerre en Syrie, le Syrien du 7e étage déprime, il s'est esseulé et éloigné des gens qu'il connaissait et aimait. Sa famille est restée là-bas, sa mère est âgée, il ne peut plus aller lui rendre visite et passe ses journées à regarder la guerre en direct à la télévision. Il s'inquiète, il pense à son pays, il est désoeuvré. Sa vie part en déliquescence comme son HLM et son pays. le narrateur nous fait partager son errance. Il se promène dans les mêmes endroits, croise les mêmes personnes, ressasse les mêmes pensées, les mêmes colères. Il fait la chronique de son immeuble et de son voisinage, il raconte ce qu'il voit, ce qui se passe.

Ce roman donne la parole aux exilés, à la souffrance et la peur que peut apporter la guerre.
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Dans ce roman, c'est le Syrien du septième qui nous raconte sa vie, et la vie des habitants de son HLM en général. Quasiment aucun n'a de nom. Il y a les français du quatrième, la russe du premier et sa fille… Car quand on croise ses voisins, tout juste leur dit-on bonjour. Souvent, c'est juste un regard, un silence échangé. Par l'apparence et les habitudes, on sait d'où les gens viennent, et c'est comme ça qu'on se connait, dans le HLM du Syrien. Parfois, au hasard d'un trop plein de solitude, un des habitants peut se confier à un autre, comme la Tamoule, qui, un jour, s'est épanchée auprès du Syrien sur sa fille…
Tout au long du livre, on découvre les voisins, des confettis de leur vie, celle dans les couloirs ou le hall de l'immeuble. On passe rarement le seuil des appartements. Mis à part celui du Syrien, où l'on partage son quotidien, sa solitude. La nostalgie de son pays natal, qu'il n'a pas revu depuis des années, à cause de la guerre. Il n'a pas revu sa mère non plus, et ça lui pèse de la savoir vieillir loin de lui…
Le mot clé de ce roman est je pense échange. Echange de regards, de tranches de vies, de silences. le Syrien nous livre sa vie sans fard, brute, et nous emmène au coeur de son HLM, microcosme de la société française et de sa tradition d'accueil. Ou du moins d'une partie de cette société. Comme le dit si justement l'auteur, « On ne peut pas parler de la tour de Babel des nations puisque les riches étrangers choisissent les quartiers chics, de l'autre côté ou au centre de la capitale, comme l'île Saint-Louis. »
Fawaz Hussain dresse ici le portrait d'une tour de Babel des pauvres, des oubliés, de la majorité silencieuse. J'ai apprécié cette lecture, toute en tendresse vis à vis des habitants, même si j'ai parfois décroché au quotidien du Syrien, notamment quand il part un peu trop loin dans ses rêveries… le quotidien de l'immeuble, ce patchwork de vies entrecroisées, m'a par contre vraiment passionnée...
Lien : https://leslecturesdesophieb..
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Merci Lyvres sans toi je n'aurais pas repéré ce roman qui est pour moi un vrai coup de coeur. J'espère à mon tour entraîner quelqu'un à lire ce livre triste et merveilleux à la fois. Cet auteur Kurdo-Syrien sait de façon unique – à mon avis- nous faire toucher du doigt ce que représente l'exil quand le pays d'origine est saccagé par la folie des hommes. Même la façon dont le roman est construit rend bien compte de ce que vit Fawas Hussain, il mêle la vie de tous les jours, donc les habitants de son HLM dans le 20° arrondissement de Paris, aux actualités télévisées qui racontent en détail l'effondrement et toutes les horreurs qui ont ravagé son pays . Avec, parfois, des souvenirs heureux du temps de son enfance. Deux rencontres avec des Kurdes, comme lui feront le lien avec ce qu'il vit aujourd'hui et son pays. J'ai souri, car c'est aussi un roman plein d'humour à la façon dont les Kurdes se saluent quand ils ne se sont pas vus depuis longtemps :

« Alors, kurde syrien, tu arrives encore à bander ou tu t'en sers uniquement pour pisser ? »

Fawas Hussain, présente tous ses personnages par leur origine ethnique, la femme qu'il a aimé est toujours nommée comme Japonaise ou Nippone et elle est partie avec « son » Breton. Il faut dire que ces appartenances ont eu tellement d'importance dans les haines réciproques entre les Chiites et les Sunnites qui détestent les Kurdes et tous veulent chasser les Chrétiens… Pour ne pas parler des Yazidis ! Dans son HLM, on sent que les difficultés de la vie, l'argent, l'alcool les infidélités prennent le pas sur ces différences d'origines. Mais il y a une entité qui rassemble tout le monde : « la Société des HLM parisiens ». Les travaux dans sa tour HLM sont des hauts moment d'humour et d'absurdité.

Sur le sol français et dans ce HLM les différents communautés arrivent à cohabiter et parfois à s'entre-aider. Je lisais dans un des commentaires laissé chez Lyvres que c'était peut-être une vision trop idyllique. Je ne le crois pas, car ces HLM sont dans Paris et ne constituent pas des zones de non-droit. C'est parfois violent mais rien à voir avec les phénomènes des quartiers de banlieues péri-urbaines.

Ce roman permet de se plonger dans la réalité des quartiers populaires de Paris et les souffrances crées par la destruction du Moyen-Orient. Et tout cela avec une belle dose d'humour !
Lien : https://luocine.fr/?p=12736
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Depuis le début de la guerre en Syrie, je fais la navette entre France 24 et Al-Jazeera, je me déplace entre l’enfer et la géhenne. Pour quarante-deux euros d’abonnement mensuel, ma box Numericable me permet d’assister au banquet de la folie généralisée, au festin de l’hystérie collective. Les
deux chaînes d’information relatent en boucle l’horreur et me fournissent ma ration quotidienne de nouvelles toutes sanglantes de mon pays. Elles me plongent, dans la langue du Coran et de Mahomet, au coeur de l’apocalypse. Je fais le plein de cadavres déchiquetés, d’immeubles pulvérisés, de survivants qu’on dégage des décombres et qu’on transporte
d’urgence sur des motos dans des hôpitaux de fortune.
Au Moyen-Orient, la Syrie était au sommet, en matière de niveau l’instruction, parmi les plus avancées des nations du monde arabo-musulman. Elle envoyait des milliers de médecins et d’ingénieurs se spécialiser dans les grandes capitales européennes et les meilleures universités des États-Unis. À présent, elle rivalise par son chaos et son instabilité avec les Somalies et exporte le plus grand nombre de
demandeurs d’asile aux quatre coins de la planète. Elle est devenue l’un des pays les plus dangereux au monde pour les civils et les journalistes. Paradoxalement, c’est là-bas et dans l’Irak voisin que l’homme avait cultivé le premier blé de l’histoire de l’humanité.
C’est en Mésopotamie qu’on avait inventé l’écriture, qu’on gravait l’épopée de Gilgamesh sur des tablettes d’argile, les lois d’Hammourabi dans le basalte et qu’on excellait dans l’art de l’irrigation et des jardins suspendus. Avec la découverte de ses gisements pétroliers au siècle dernier, le berceau des plus anciennes civilisations est devenu l’épicentre de graves tensions et l’objet de toutes les convoitises.
Devant une telle charge d’animosité, de contradictions, je fais diversion. Je me fabrique un bouclier, une carapace contre l’aliénation. De guerre lasse, j’éteins la télévision et m’arrache, non sans effort, à ces deux mamelles satellitaires de catastrophes. Je me dis qu’il faut penser à autre chose et
aussitôt dit, aussitôt fait. Ces dernières semaines, une affiche scotchée à la grille de la porte d’entrée de notre HLM nous informe : la Régie immobilière de la ville de Paris tient à notre bien-être comme à la prunelle de ses yeux et améliorera prochainement notre quotidien en nous dotant d’un interphone.
Comme preuve de sa bonne foi, la RIVP, comme on dit familièrement, nous envoie ce matin un jeune Malien, sans doute en stage de formation en vue de l’obtention de son BEP. À neuf heures, il sonne à ma porte afin d’installer
le fameux dispositif. Il me demande tout de go de brancher sa perceuse dans ma cuisine, malgré la prise prévue pour ce genre de tâches sur le palier.
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i les jeunes peuvent s’adapter à leur nouvel environnement et apprendre plusieurs langues étrangères, ma mère ne supportera pas la vie en Europe. Elle vit en Syrie depuis quatre-vingts ans et elle n’a toujours pas appris l’arabe, pourtant la langue de la nation. Alors comment se mettra-t-elle au français et pourra-t-elle maîtriser le comportement de l’épithète ? Elle mourra d’ennui loin de ses filles puisqu’elle continue de les diriger d’une main de fer. Elle impose sa volonté à tout le monde autour d’elle car elle a toujours vécu comme ça et ce n’est pas Daech et un quart de million de morts en Syrie qui lui feront changer de caractère.
Mon ami constate que je n’ai pas oublié le sujet de sa thèse et en sourit. Il passe sa main devant son visage comme pour effacer un souvenir écrit sur un tableau invisible :
« Nos deux pays sont devenus ce qu’on appelle des zones de guerre dans le jargon militaire. Comment laisser la famille à quelques kilomètres des fous d’Allah qui ne pensent qu’à une chose, égorger ? Ces hystériques s’entraînent sur des moutons et des chèvres pour mieux décapiter les hommes, tu te rends compte ?
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L’autocar climatisé faisait un premier arrêt dans l’oasis de Palmyre. Les passagers pouvaient acheter de quoi se restaurer tandis que le chauffeur et son aide mangeaient à l’œil en tant qu » apporteurs de clients. Moi, par peur de tomber malade, je n’avalais rien et je me dirigeais chaque fois vers la grande colonnade, principale voie de circulation de la ville antique qui s’étire sur plus d’un kilomètre. Je passais sous l’arc monumentale où des gamins Bédoins proposaient aux touristes des promenades sur la bosse unique de leurs dromadaires. Je me pressais vers le temple de Bêl, le dieu du soleil, et me recueillais devant le sanctuaire de Baalshamin, le dieu du ciel, sans imaginer alors qu’ils seraient bientôt plastiqués par le groupe État islamique et complètement rayé du patrimoine archéologique de l’humanité.
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Ce soir, je ne vais pas me mettre devant le vieux poste de télévision, non, je ne têterai pas le lait noir des deux mamelles déversant le malheur que sont France 24 et Al Jazeera. Oui, dimanche prochain, j’irai faire le marché, non pas pour les deux Suédoises, mais pour voir le vendeur des quatre saisons et le couvrir d’éloges à propos de la qualité de ses clémentines. Je lui demanderai comment il s’appelle pour de vrai et me présenterai à mon tour, le Syrien du 7e étage. J’espère de tout cœur que d’ici-là l’ascenseur sera réparé, non pas pour moi, mais pour tous les gens de l’immeuble. Je pense en particulier à la Kabyle nourri au miel et au couscous, avec ses pleurs de tragédie grecque et au français du quatrième, celui qui doit vérifier toutes les deux heures s’il a du courrier.
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Mon compatriote me ramène à notre première rencontre devant le restaurant universitaire Albert Châtelet. C’était dans les années 80, et il avait fui Saddam Hussein comme moi Assad, le père, son homologue et ennemi juré. .… Mais avec Saddam Hussein au pouvoir, il n’osait pas, à la fois comme kurde n’ayant pas fait son service militaire, et comme ressortissant d’une petite communauté comme les yézidis qu’on appelait les fayliz.. Musulmans chiites, ils avaient été déportés par le parti Baas est condamné à vivre aux alentours de Bassora.
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Vidéo de Fawaz Hussain
Fawaz Hussain, Yasmine Chouaki, RFI. 1
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