L'oubli que vous serez est une belle chronique d'une famille très bourgeoise de Nantes (les enfants vouvoient leurs parents, quel exotisme !), où l'on suit notamment Alice, des années 30 jusqu'à sa vieillesse. Dans cette famille, la mère, Yvonne, est le pilier : aimante, avec une forte personnalité, elle organise la vie des siens – le père se consacre à son métier de médecin et plane un peu. La relation d'Alice à sa mère est presque fusionnelle, d'autant plus que la soeur aînée est quelque peu psychotique, et le frère aîné un enfant souvent violent, imprévisible. Mais Yvonne gère son petit monde. La seconde guerre mondiale touche même les familles aisées, et
Chantal Vidil nous offre de magnifiques pages, documentées et émouvantes, sur Nantes au cours de cette époque tourmentée.
Curieusement, Alice s'épanouit durant cette guerre, découvre le sentiment amoureux, prend son envol, s'implique dans l'aide à autrui. Mais la famille est là, plus puissante que jamais, qui refermera insidieusement sa vie. Famille idéale ? Mère trop aimante, dominante ?
Le prologue qui ouvre le livre nous met l'eau à la bouche : nous devinons des dysfonctionnements, et nous nous jetons à l'assaut des chapitres pour comprendre ce que la vie a fait d'Alice. Impossible de lâcher ce roman, dont les enchaînements sont rapides, très bien menés, et qui nous permettra de comprendre enfin cet étrange prologue : qu'est-ce qu'une vie ? Quel oubli sera Alice, que deviendront nos vies, qu'est devenue Alice ?
Chantal Vidil nous offre là une belle tranche de vie, tout en nuances, avec cette dimension métaphysique sous-jacente qui nous concerne tous,
l'oubli que vous serez…