Apprécier quelqu'un mettait cette personne en danger.
Dès lors, ne pas l'aimer devenait une preuve d'amour.
Il mit assez vite en pratique les préceptes d'une telle logique : il commença par se détacher de Tiphaine et Sylvain, terrorisé à l'idée qu'ils disparaissent à leur tour. S'il les perdait, il serait seul au monde.
Milo était grand pour son âge. C'était un adolescent dont la croissance s'était emballée de manière tyrannique, sans ordre ni logique.
Besoin d'air. De changement. Un nouveau départ. Soif de rencontres. D'aventure. Une autre vie. Une seconde chance.
Elle avait su trouver les mots qui soignent et les silences qui aident. p. 50
Elle s'accroche à lui avec tant désespoir dans les yeux qu'il se sent happé par sa souffrance. Il ne comprend rien, mais il sait déjà que le malheur a de nouveau frappé. Sans concession. On lui avait pourtant bien dit de ne pas aimer... Milo tressaille, refuse de lâcher le regard de son amie. Il voudrait se précipiter vers elle, la prendre dans ses bras, la serrer fort contre lui... Mais entre eux se dresse déjà le tumulte de l'épreuve, comme si le sol s'ouvrait entre les deux maisons, découvrant le précipice sans fond d'un marasme infranchissable.
Tu as déjà brisé ma vie. Tu ne le feras pas une deuxième fois. - Ta vie ? Quelle vie ? gloussa Sylvain sans cacher son dépit. On n'a plus de vie, Tiphaine. Tout ce qu'il nous reste, c'est du temps devant nous. Du temps pour souffrir.
Cette fois, Alexis pila net sur place, l'angoisse chevillée au cœur. Nora n'avait aucune chance face à Tiphaine, et à cette faiblesse s'ajoutait encore son ignorance de la situation. Si Tiphaine projetait de régler ses comptes ce soir-là, Nora lui ouvrirait grand sa porte et la ferait rentrer chez elle, sans se douter un instant qu'elle accueillait la femme trahie et non la gentille voisine.
Très vite, le naturel joyeux de la jeune fille déteignit sur l'ambiance et, peu à peu, Milo se laissa gagner par cette salvatrice insouciance.
Alexis Renard se targuait d'être rusé. A plusieurs reprises, il avait gagné des procès en empruntant des chemins sinueux qui avaient désarçonné ses adversaires. De plus, il avait une vivacité d'esprit capable de lui faire voir une situation sous différents angles.
Au cours de ses fouilles, il tomba sur un fait divers qui le mit en alerte. L'article, paru huit années auparavant dans le journal local, relatait le plus effroyable des accidents domestiques : Maxime Geniot, alors âgé de six ans, avait trouvé la mort en tombant par la fenêtre de sa chambre située au premier étage de la maison familiale.