La mer éclatée, tome 1 : La moitié d'un roi

- Le vrai souci, c’est le trou dans la coque, fit observer Ankran. Il y a du jour dans la cale. Il faudra le colmater avant d’envisager de remettre le navire à flot.
- Mais où va-t-on bien pouvoir trouver des planches ? demanda Shadikshirram d’un ton ironique, en indiquant la forêt qui bordait la plage.

- Dans la vie, la mort est la seule certitude.
- Tu sais remonter le moral des troupes, persifla Sumaelle.

De temps à autre, Laithline soufflait une injonction à Yarvi.
- Tenez-vous droit. Vous êtes roi. Ne vous excusez pas. Vous êtes roi. Redressez votre boucle de cape. Vous êtes un roi. Vous êtes le roi.
Comme si elle tentait de le convaincre, de se convaincre elle-même et de convaincre le monde entier de l’évidence.
La Mer Eclatée avait beau n’avoir jamais connu meilleure négociatrice qu’elle, Yarvi doutait que ce mensonge-ci trouve preneur.

-Un bon ennemi est le meilleur cadeau que puisse te faire les dieux. Comme le silex aiguise la lame, un bon ennemi vous garde toujours prêt au combat.
-Je préfère m'émousser, grommela Jaud.
-Choississez vos ennemis avec d'avantage de soin que vos amis, murmurait Personne. Ils vous accompagnent plus longtemps.
-Ne t'inquiète pas, le rassura Rulf, si la vie m'a appris une chose, c'est que le prochain ennemi, n'est jamais bien loin.
-On peut toujours changer ses amis en ennemis, rappela Sumaelle. Devenir ami avec ses ennemis s'avère plus compliqué.

L'imbécile est esclave de sa colère. Le sage en tire parti.

L'imbécile frappe, avait-elle dit.
Le sage sourit, observe et apprend.
Ensuite, il frappe.

Un roi doit gagner. Le reste n'est que poussière.

De toute évidence, il s’était fait des alliés, mais aussi des ennemis. Toutefois, les ennemis, disait sa mère, sont la rançon du succès.

- Vous voyez, une femme peut prêter le même serment qu’un homme.
- Si elle est assez stupide…

- Quelle sorte de conte, frère Yarvi ?
- Un conte de sang et de trahison, de trésor et de meurtre, de traîtrise et de pouvoir.
Mère Gundrig rit et but une autre gorgée de thé.
- La seule sorte de conte qui m’agrée. Y a-t-il des elfes dedans ? Des dragons ? Des trolls ?
Yarvi secoura la tête.
- Les humains peuvent causer seuls tout le mal dont nous avons besoin.