AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9791037508416
203 pages
Les Arènes (02/02/2023)
4.27/5   11 notes
Résumé :
Ces jeunes Françaises d'origine maghrébine qui s'affranchissent des tabous
Émancipées, diplômées et féministes, de nombreuses jeunes femmes d'origine maghrébine dissimulent leur vie sentimentale à leur famille pour pouvoir aimer un homme blanc, non musulman. Écartelées entre désir d'affranchissement et injonctions familiales, elles mènent une double vie construite sur le mensonge : vacances inventées, photos cachées, traces effacées.
À 27 ans, Rahma Ad... >Voir plus
Que lire après Nous les transgressivesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
A la croisée des chemins entre témoignage et essai, Les transgressives est un livre écrit par une jeune journaliste française d'origine algérienne.

La quatrième de couverture parle des dissimulations et mensonges auxquels les jeunes femmes d'origine maghrébine ont recours - pour certaines d'entre elles - vis-à-vis de leur famille quant à leur mode de vie.
Pour être franche, si j'ai postulé pour ce livre lors de l'opération Masse critique, c'est parce que je pensais qu'il traitait de féminisme.

En fait ce n'est pas du tout le cas, mais passée cette déception première, je me suis vraiment laissée embarquer par Rahma Adjadj dont l'écriture est agréable. le sujet quant à lui traite de la question identitaire des personnes racisées.

L'autrice, pour approfondir son sujet, nous parle de l'histoire personnelle de son père et de sa mère, des traditions qui ont déterminé leur parcours de vie... Histoire personnelle est finalement mal à propos dans la mesure où dans la culture arabo-musulmane, il n'est pas question de "je" mais de "nous". "Nous" la famille, "Nous" la communauté, etc.

Rahma nous fait part de sa propre quête identitaire entre ses origines dont elle a d'abord eu honte avant de les renier carrément, avant d'entamer un travail vers une réconciliation entre les traditions algériennes qui font sa culture, autant que le mode de vie à la Française.
On la sent morcelée à bien des égards entre ces deux parties d'elle-même. Elle critique et défend l'une et l'autre...
Le côté patriarcal de sa culture d'origine par exemple, et le racisme ordinaire des Français de l'autre (avec par exemple la question qui revient souvent "Tu viens d'où ?").
Elle développe beaucoup de réflexions intéressantes, mais souligne en fin d'ouvrage avec une belle lucidité que certains questionnements restent irrésolus. Entre son besoin de s'émanciper en tant que femme indépendante, qui puisse vivre seule et entretenir une relation avec un homme blanc non musulman - ce qui est totalement prohibé dans la tradition musulmane - et la nécessité pour elle de respecter les valeurs de ses parents.

Elle conclut pour finir sur une note qui m'a semblé très juste : elle n'est pas ou Algérienne ou Française. Elle est les deux.
Et cette réflexion m'a fait penser à James Baldwin à propos des Noirs-Américains. Celui-ci soulevait en effet que ceux-ci ne sont plus Africains, mais ne sont pas non plus Américains (on ne leur en a jamais laissé la place). Il a fallu qu'ils inventent leur propre culture. Celles des Afros-Américains.
C'est ainsi en tout cas que j'ai entendu Rahma.

Une lecture enrichissante pour moi dont je remercie Babelio et les Editions Les Arènes.
Commenter  J’apprécie          261
Voilà un livre écrit par une plume tout à la fois accessible et remarquable, un livre que nous devrions tous lire, tant il est instructif, passionnant et captivant, tant il bouscule allègrement nombre de préjugés et de clichés.
Je dis un livre, car sous ce mot générique se cachent tout à la fois un essai sociologique, un ouvrage anthropologique, une autobiographie, des biographies, un recueil de témoignages, de réflexions philosophiques et de considérations historiques. Ce livre est tout cela à la fois.

Et qui en est l'autrice ? Sous ce terme, générique également, se cachent tout à la fois une femme française, algérienne, arabe, nord-africaine, pauvre, transfuge, honteuse, fière, éduquée, traditionnelle, superstitieuse, de culture musulmane, sage, émancipée. Cette autrice est tout cela à la fois, c'est ainsi qu'elle conclut son ouvrage. (page 199)

Rahma Adjadj, journaliste franco-algérienne de 27 ans, est partagée entre l'amour de sa famille et son désir de s'affranchir d'une culture ancestrale traditionnelle trop pesante. Son arme, sa défense, c'est le mensonge, seul moyen d'épargner à la fois son père qui ne saurait la comprendre et sa vie intime si éloignée des préceptes hérités des anciens.

Dans ce récit, Rahma va dévoiler avec pudeur et tact les personnalités familiales ; son père, sa mère, ses grands-parents, leurs histoires avec leurs drames et leurs fractures. On comprend, au fil du récit, comment s'est construit et perpétué un code de conduite par lequel les femmes n'ont pas leur mot à dire quant à leur avenir. On y découvre un monde de non-dits, de tabous, de secrets. La mère de Rahma en paiera le prix fort avec une vie ponctuée de dépressions, de tentatives de suicide et de séjours en HP.
Les parents de Rahma, pauvres et peu instruits, vont cependant inciter leurs filles à se donner à fond dans leurs études. le père est fier de la réussite de sa fille, même s'il redoute que la fréquentation des « blancs » ne l'éloigne à jamais du giron familial.
On découvre, dans cet ouvrage remarquable, que la société française n'est toujours pas prête à considérer ses citoyen.nes d'origine étrangère (maghrébine, africaine, asiatique) comme des égaux aux fameux « Français de souche ». le témoignage de Rahma, journaliste maghrébine pauvre, mal considérée par ses consoeurs et confrères bourgeois blancs de la rédaction de son journal, est sur ce point tout à fait édifiant et poignant. de même, la famille de son compagnon blanc n'est pas tendre vis-à-vis de ses origines, les clichés et les préjugés empoisonnant les conversations au point que Rahma finisse par couper les ponts, mais en préservant toutefois sa relation amoureuse

La narratrice est attachante, grâce à sa plume sincère et franche qui ne nous cache rien de ses tourments, de ses doutes, de ses interrogations, de ses regrets, de ses états d'âme, mais aussi de ses espoirs et surtout de son amour pour des parents tout aussi victimes qu'elle d'un système qui les dépasse et les empêche.

Un livre qui remue, qui bouleverse, qui bouscule les idées reçues, sans concessions, et que l'on oubliera pas de sitôt, car on prend conscience en lisant Rahma qu'il y a, pour nous tous, quelle que soit notre origine, un immense chemin encore à faire.
Commenter  J’apprécie          50

"Nous les transgressives", des femmes d'origine maghrébine qui s'affranchissent des tabous.
------------------------------------------
C'est une prolongation de son enquête journalistique sur les jeunes femmes d'origine maghrébine qui dissimulent leur vie sentimentale à leur famille, prises entre exigences familiales et émancipation. Pourquoi des femmes maghrébines mentiraient-elles sur leur situation amoureuse avec des hommes non-maghrébins ? C'est la question que s'est posée Rahma Adjadj. À 27 ans, elle fait partie de "cette génération lassée de mentir".

Pourquoi des jeunes femmes émancipées, diplômées et féministes d'origine maghrébine en viennent-elles à dissimuler leur vie sentimentale auprès de leur famille pour pouvoir aimer un homme blanc, non musulman ? Rahma Adjadj en a fait ce livre.

Son travail sur le sujet, Rahma Adjadj l'a débuté en 2020. Alors stagiaire journaliste au Monde, des récits d'expériences similaires et son vécu la poussent à enquêter. L'enquête a été publiée dans M, le magazine du journal le Monde.

Pour la journaliste originaire du Nord de la France, les tabous qui en viennent à produire ce type de situation sont d'abord l'amour et la sexualité, qui poussent à un contrôle en permanence : poids de ne pas faire honte, sentiment d'être une extension de la famille, attention à la manière de s'habiller, de ses discours ou encore de ses relations. Pour elle, "le tabou est un étau à trois faces : la tradition, le patriarcat et la religion".


Serait ce enfin une génération lassée de mentir, à l'encontre de la Tradition du Patriarcat et et de la Religion ? Une génération vraiment République Française ?



Commenter  J’apprécie          411
Ce témoignage de Rahma Adjadj est intéressant à plus d'un titre. D'abord parce qu'il relate avec une belle plume un parcours singulier et intéressant en soi. Ensuite parce qu'il soulève beaucoup de questions autour de l'identité, de l'appartenance etc. Des questions auxquelles nous sommes tous confrontés mais qui, dans le cas présent, sont amplifiées si bien qu'elles deviennent plus claire pour nous-même.

On apprend (on s'en doutait un peu) que la société française possède une double attitude vis-à-vis de l'immigration et des immigrés. Ainsi, dans les salles de presse, on parle de l'immigration au sens large tout en demeurant dans un entre-soi bien compris. Rahma Adjadj nous cite l'exemple du journal le Monde. J'avais été très amusé, à une époque, d'une photo de l'équipe de Libération qui, toute distributrice de bons et de mauvais points qu'elle soit, présente une image étrangement monocolore... on imagine qu'il en est de même pour les idées et les opinions qui y circulent...

Conservatisme et entre-soi... peut-être s'agit-il là de phénomènes sociaux universels ? Sous ses tentatives républicaines ou peut-être ses faux-airs républicains, la société française n'échappe pas à la logique de classe et au déterminisme social. En Inde, on parlerait de logique de caste et dans les pays musulmans, de logique religieuse et patriarcale. J'ai la faiblesse d'espérer que ce modèle français, qui possède bien des limites et des défauts, a permis entre autre chose à Rahma Adjadj de commencer un chemin d'émancipation. On lui souhaite une bonne continuation et de nouvelles belles rencontres sur ce chemin.
Commenter  J’apprécie          11
En 2020 j'étais tombée sur son article publié dans le magazine du Monde, malheureusement je n'avais pu qu'accéder à une lecture partielle n'étant pas abonné.

En sélectionnant ce livre lors de la dernière masse critique de Babélio je pensais lire une enquête dans la continuité de l'article mais ce n'est pas tout à fait le cas. Nous sommes davantage dans un récit personnel évoquant ses réflexions, ses doutes vis-à-vis de sa double culture. Et au final ça ne m'a pas déplu.

Raham Adjadj se raconte à travers les souvenirs (difficiles) familiaux, elle parle de racisme, racisme ordinaire, féminisme, transfuge de classe, ascenseur social en panne, colonialisme, stéréotypes culturels et religieux .....
Cet essai se dévore d'une traite.
Commenter  J’apprécie          40


critiques presse (1)
LaLibreBelgique
27 février 2023
Rahma Adjadj questionne ses identités multiples et dénonce les violences qu'elle subit.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
.



(...)
La conclusion du patriarche, calme et laconique, résonne encore dans la tête de la jeune femme : « Je n’accepterai jamais que tu te maries avec un Français ».
Depuis un an et demi, Nedjma n’a plus eu de contacts avec lui.
(...)





.
Commenter  J’apprécie          30
La vie en France a changé Mohamed. Pas vraiment français, plus tout à fait algérien.
Commenter  J’apprécie          10

autres livres classés : question identitaireVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus

Lecteurs (36) Voir plus




{* *} .._..