AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9789684116801
112 pages
Ediciones Era (01/01/2007)
4/5   1 notes
Résumé :
Aira travaille avec les rêves que le cinéma semblait avoir volés à la littérature, les récupère et les multiplie, mais à l'abri et souvent caché par ce récit où l'on ne peut s'attendre qu'à l'inattendu, il y a un essayiste très pointu qui injecte le poisons de son intelligence profitant de l'éclat produit par son imagination. Qu'est-ce que la vitesse ? Qu'est-ce que la folie ? Comment écrire ?, se demande Aira et se répond, sans rien perdre, tout gagner pour son rom... >Voir plus
Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten
Que lire après La costurera y el vienteVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« La Costurera y el Viente » est un roman écrit en 1994, de César Aira (2007, Ediciones Era, 112 p.), non traduit actuellement (la couturière et le vent)
Un voyage de Coronel Pringles vers la Patagonie, avec cette dernière considérée comme un personnage. Et en plus, une faille dans l'espace-temps puisqu'il va s'agir d'un ami d'enfance de César Aira. Comme souvent chez César Aira, le titre et le texte sont dissociés. Puisque pour aller en Patagonie, il part d'un café parisien, ce qui est le plus court chemin. Là, il se sent l'envie d'écrire un roman intitulé justement « La Costurera y el Viente ». « Ces dernières semaines, avant même de venir à Paris, je cherchais une intrigue pour le roman que je voulais écrire : un roman d'aventures, successif, plein de merveilles et d'inventions. Jusqu'ici rien ne m'est venu à l'esprit, à part le titre que j'ai depuis des années et auquel je m'accroche avec l'obstination du vide : « La couturière et le vent ».
Ensuite, il règle le problème de la couturière. Délia Siffoni est couturière à Coronel Pringles, avec son mari Ramon. Un fils unique Omar, qui est l'ami de César Aira. Cela tombe bien. La protagoniste « doit être couturière, du temps où il y avait des couturières ». Et en même temps, il lui faut s'occuper du vent « le vent sera son antagoniste ». Voilà une bonne chose de réglée, « elle sédentaire, lui voyageur, ou inversement : art voyageur, turbulence figée. Elle l'aventure, lui le fil des aventures ». Reste à monter l'histoire. Pas de problème là non plus car ce qu'il advient entre eux pourrait « être n'importe quoi ». le lecteur est ainsi rassuré, ce sera bien un roman de César Aira. Parti de rien pour arriver nulle part, aurait dit Pierre Dac. Et effectivement, le roman qu'il se propose d'écrire partira du voyage en Patagonie, mais traitera plutôt du processus de création de l'écriture. L'anecdote du café devient l'acte même de la création littéraire. Dès lors, chaque roman qu'il va écrire partira d'une anecdote et se poursuivra par autre chose, voire même par plusieurs autres choses sans rapport entre elles. Ce qui fait que la lecture d'un roman de César Aira désoriente beaucoup de lecteurs non préparés. Par contre, elle ravit ceux ou celles qui ont compris et intégré le système. « L'imagination, cette faculté merveilleuse, ne fait rien, si elle n'est pas contrôlée, mais s'appuie sur la mémoire ». Et « L'oubli devient une pure sensation. Déposez l'objet, comme dans une disparition. C'est toute notre vie, cet objet du passé, qui tombe alors, dans le tourbillon antigravité de l'aventure ».

En reprenant l'histoire, Omar, le garçon dont la disparition déclenche les recherches et les aventures qui se déroulent en Patagonie, se présente comme un ami d'Aira, qui remonte à son propre passé biographique romancé, lorsqu'il avait huit ou neuf ans, la disparition du fils de la couturière, sa voisine. Perchés sur d'une remorque de camion, Omar et le jeune César partagent « un jeu de fantaisie purement psychologique » consistant à se faire peur. Face à la terreur que ce jeu éveille, Aira ferme les yeux et lorsqu'il les rouvre, sans savoir comment, le fils de Delia n'est plus là. Au départ de Coronel Pringles, on croyait qu'il s'agissait de César qui avait disparu, jusqu'à ce qu'on remarque que le garçon disparu était Omar. Pour cela Coronel Pringles « était un quartier, et l'information circulait vite comme un corps en chute libre ». Son fils ayant disparu, Delia Siffoni devient folle, ou plutôt selon les mots du narrateur, « plus folle ». La femme suppose que son fils était parti de force dans la remorque du camion « un enlèvement parfaitement involontaire ».
Les voisins, « font alors fait quelque chose d'absolument inhabituel » pour la ville. « Appeler un taxi, pour ne pas perdre une minute de plus et traquer le camion ». Mais Coronel Pringles ne compte que deux taxis. L'un d'eux est celui de Zaralegui, une voiture « une vieille Chrysler des années 1930 » qui n'est utilisée « que pour se rendre à la gare ferroviaire de Roca ». Mais l'équipée du taxi s'arrête vite, car il rentre en collision, avec un énorme camion, celui de Chiquito.
La Chrysler est « réduite à une coque de tôle tordue » après s'être écrasée à l'arrière du camion et s'y coller « comme un météore heurtant une planète ». le camion et le taxi « était vraiment comme des planètes ». L'hypothèse de Aria de rouler à des vitesses élevées sur la route défoncée parait totalement irréaliste. Sauf que, si le camion a un peu ralenti, il a pu provoquer selon Aira une « accélération fantastique contre celui qui venait derrière ». Mais, Aira reconnaît que, pour éclaircir cet épisode, il faudrait de « manière irréaliste des vitesses élevées ».
L'accident cause un tel choc que la mère d'Omar « perd connaissance, et continue sa route endormie, sans voir le paysage ». Ce qui retarde son lien avec l'espace de la Patagonie et la construction même de cet espace, puisque l'évanouissement annule le regard qui constitue et organise le paysage. « le soleil se couchait sur la province de Santa Cruz ». La Patagonie en tant que lieu, en tant que nature, ne s'installe dans l'histoire que plus tard. L'arrivée de Delia dans le sud est surréaliste. A son admission endormie, en état « coma hystérique », la région ne représente pas. Il n'y a plus que « le ciel rose comme le pétale d'une fleur titanesque, la terre bleue, un disque immobile sans autre limite que la ligne ». Elle « «se sentit comme une fille sur un manège, chevauchant le dos d'un scarabée de verre noir. Elle semblait même entendre la musique, et elle l'a vraiment entendu, alors que ce n'était que le sifflement du vent ».
Effrayée, « déjà folle, Delia Siffoni a été rendue folle par la disparition de son fils unique. Elle est entrée dans un état frénétique. Spectacle prodigieux, carte postale pérenne, cinéma transcendantal, scène de scènes : voir une folle devenir folle. C'est comme voir Dieu ». La couturière crie et agite les bras qui tenaient le cadavre de Zaralegui, qui s'envole immédiatement. À la bosse qui « a dû contribuer, car elle n'avait pas beaucoup de force » pour jeter le corps, s'ajoute « le tourbillon du vent » qui a propulsé le cadavre du chauffeur de taxi dans les airs.
Le voyage vers le sud représente une transformation pour le petit univers du roman. Elle implique des modifications et des coupures si intenses qu'on peut dire qu'il s'agit de l'entrée dans un autre monde. de plus, on passe du petit monde de Coronel Pringles à l'immense et imprévisible Patagonie. Dans sa course d'accélération et de décélération contre la petite voiture bleue qui le suivait, Ramón Siffoni est enveloppé par « la poussière transparente qui montait du chemin de terre » et semblait « comme un argent fluide ».
Pour résumer, on a dans l'ordre (il faut bien faire le point par moments). « Si je peux faire une liste ordonnée :
1) le gros camion avec une remorque, et la double planète de Chiquito, en tête.
2) la carcasse de la Chrysler de Zaralegui, à ce stade plus resssemblant à une baignoire chinoise laquée noire.
3) le cadavre de Zaralegui
4) Delia Siffoni, perdue, marchant au hasard.
5) La robe de mariée de Silvia Balero, portée par le vent.
6) Ramón Siffoni dans son petit camion rouge (un jour avant).
7) et fermant l'entourage, la mystérieuse voiture céleste. »
Pour une fois que César Aira essaye d'aider le lecteur. « Bien sûr, ce n'est pas si facile. Il y a d'autres personnages, qui apparaîtront... Ou plutôt, non. Ce n'est pas qu'il y ait d'autres personnages (ils sont tous là) mais les révélations ont fini par en faire d'autres, donnant lieu à des rencontres [] Une danse des transpositions ». Suit une métaphore intéressante. « Certains ivrognes, à partir d'un certain moment de leurs soirées, font toutes sortes de mélanges ; ils boivent de tout, un verre de chaque alcool qu'ils ont sous la main, au hasard ». Mais pour son mari Ramón Siffoni, éminent joueur « Les enjeux montent toujours. La lune s'est levée... Mais elle ne s'est pas levée, car elle ne se lève pas, ni le soleil ; cette montée est une illusion créée par la rotation de la terre… Au zénith du pari, Ramón Siffoni, l'homme-lune, qui par la simple gravitation de sa masse faisait monter les flots d'argent, mettrait sur la table, ou l'avait déjà mis, le Pari suprême : son mariage ». Et dans son camion, il lève le pied, brutalement. La vitesse chute. « le paysage lunaire du plateau avait fui vers l'arrière, et maintenant il fuyait vers l'avant. La poussière transparente s'élevant du chemin de terre qui l'engloutissait, comme l'argent qui coule ».
Resurgi alors la Patagonie. « Patagonie maudite, beauté du diable. Son angoisse et sa perplexité grandissaient avec le temps […]. D'étranges phénomènes atmosphériques semblaient se produire : un rideau de nuages s'était levé de l'horizon. […]. L'impression d'être passé ou de passer dans le registre de la croyance, et de sortir de celui de la pure et simple réalité, sa vie d'horaires. […]. La croyance avait un nom : la Patagonie ». « le ciel de la Patagonie est toujours clair. Les vents s'y rencontrent, dans une grande fête aux transformations invisibles. C'est comme dire que tout s'y passe, et que le reste du monde se dissout au loin, inopérant, la Chine, la Pologne, l'Egypte... Paris, la miniature lumineuse. Tout. Il ne reste que cet espace radieux, l'Argentine, belle comme un paradis ».
« Un nuage ? Non. Une robe blanche, bien sûr sans forme vestimentaire, ou plutôt : sans forme humaine, une robe de mariée ». « Il avait devant lui la merveilleuse Patagonie nocturne, entière et illimitée. C'était un plateau blanc comme la lune, et un ciel noir plein d'étoiles. Trop grand, trop beau, pour englober d'un seul coup d'oeil ; et pourtant il a dû le faire de cette façon, parce que personne n'a deux regards. Ce panorama semblait se reposer dans le noir pur de la nuit, mais en même temps c'était une pure lumière. Il était parsemé de petites taches noires, comme des trous de vide, découpés en formes très claires et capricieuses, dans lesquels le hasard semblait avoir tenu à représenter toutes les choses qu'une conscience ».
Et soudain une voix « « Delia… Delia… ». « La voix était celle d'un homme : profonde, cultivée, modulée avec un calme supérieur » « Il n'y a pas d'homme. Je suis le vent. / le vent parle ? / -Est-ce que tu m'entends / "Oui, oui, je l'entends." Mais je ne comprends pas… Je ne savais pas que le vent pouvait parler. / -Je peux. / Quel vent es-tu ? / Je m'appelle Gale ». Et Delia se met à converser avec le Vent.
Le vent tombe amoureux de la couturière. « le vent était amoureux. J'ai été amoureux de toute éternité, moins que son éternité de vent ». Mais les autres protagonistes veillent. « C'était contradictoire : comment pouvaient-ils être en sécurité, avec un camionneur fou, et en plus un monstre qui la cherchait pour la détruire ? ».
C'est une des caractéristiques de César ira, de prendre aussi comme personnages de ses romans, ceux qui en forment le cadre. Ici la Patagonie elle-même, et le Vent. En fait ce sont eux choses qui vont ensemble. Mais d'où on ne revient pas, captivé par sa beauté et son immensité. « Je ne retournerai jamais à Pringles » dit Delia.


Commenter  J’apprécie          00

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Si je peux faire une liste ordonnée :
1) le gros camion avec une remorque, et la double planète de Chiquito, en tête.
2) la carcasse de la Chrysler de Zaralegui, à ce stade plus resssemblant à une baignoire chinoise laquée noire.
3) Le cadavre de Zaralegui
4) Delia Siffoni, perdue, marchant au hasard.
5) La robe de mariée de Silvia Balero, portée par le vent.
6) Ramón Siffoni dans son petit camion rouge (un jour avant).
7) et fermant l'entourage, la mystérieuse voiture céleste. »
Commenter  J’apprécie          00
Bien sûr, ce n'est pas si facile. Il y a d'autres personnages, qui apparaîtront... Ou plutôt, non. Ce n'est pas qu'il y ait d'autres personnages (ils sont tous là) mais les révélations ont fini par en faire d'autres, donnant lieu à des rencontres [] Une danse des transpositions

Certains ivrognes, à partir d'un certain moment de leurs soirées, font toutes sortes de mélanges ; ils boivent de tout, un verre de chaque alcool qu'ils ont sous la main, au hasard
Commenter  J’apprécie          00
Ces dernières semaines, avant même de venir à Paris, je cherchais une intrigue pour le roman que je voulais écrire : un roman d'aventures, successif, plein de merveilles et d'inventions. Jusqu'ici rien ne m'est venu à l'esprit, à part le titre que j'ai depuis des années et auquel je m'accroche avec l'obstination du vide : « La couturière et le vent ».
Commenter  J’apprécie          00
L'imagination, cette faculté merveilleuse, ne fait rien, si elle n'est pas contrôlée, mais s'appuie sur la mémoire ». Et « L'oubli devient une pure sensation. Déposez l'objet, comme dans une disparition. C'est toute notre vie, cet objet du passé, qui tombe alors, dans le tourbillon antigravité de l'aventure
Commenter  J’apprécie          00
déjà folle, Delia Siffoni a été rendue folle par la disparition de son fils unique. Elle est entrée dans un état frénétique. Spectacle prodigieux, carte postale pérenne, cinéma transcendantal, scène de scènes : voir une folle devenir folle. C'est comme voir Dieu
Commenter  J’apprécie          00

Videos de César Aira (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de César Aira
Payot - Marque Page - César Aira - Prins
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus
Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten


Lecteurs (1) Voir plus



Quiz Voir plus

Voyage en Italie

Stendhal a écrit "La Chartreuse de ..." ?

Pavie
Padoue
Parme
Piacenza

14 questions
600 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , voyages , voyage en italieCréer un quiz sur ce livre

{* *}