CELLE QUI A TOUTES LES GRÂCES
à C.A.
Il me souvient d’avoir aimé passionnément
Une enfant aux boucles blondes avec qui je me battais
En jeux cruels violents deux garçons mais avoir vu en toi
Mon enfant douce dans la tendresse infinie de mes bras
En berceau quinze ans j’avais à ta naissance mon lever du soleil
Ton drame intime l’abandon le deuil et bientôt tu auras un petit frère
Aux boucles blondes comme toi. Tu es l’enfant que j’ai choisie
Choyée tu étais si petite encore quand je suis partie, douze ans
Et moi de me débattre avec la maladie et t’avoir laissée
sans un mot
La culpabilité d’avoir rompu un lien si fort
poignardée de lumière
D’avoir eu la chance de te voir grandir.
L’éclosion d’une intelligence
Si précoce tes voyages plus tard la vie en Chine,
aux États-Unis
Ta curiosité, tes livres, à pas même trente ans énarque
la femme
Que tu es devenue loin de moi.
Il n’y a pas deux êtres plus différents
Mais tu me bouleverses, je te comprends si belle
ton front baudelairien
Le mien mon sang toutes deux d’avoir foncé
nos cheveux bouclés
Ne jamais parler de toi et toujours l’ouverture du coeur
pour l’Autre
Être si jolie et le savoir si peu tes grands yeux verts
soulignés de bleu
Ta présence inouïe quand tu les plantes dans mes rétines
Passant par les lésions tu m’habites et je ne vois que toi.
La petite enfant qui me servait d’alibi pour fumer secrètement
Et toi m’avoir promis le secret puis m’avoir dessinée
la clope au bec
Les secrets font du mal aux petites filles (p. 25-26)
Catherine Andrieu lit un extrait de Très au-delà de l'Irréel ( Editions Rafael de Surtis) .
https://www.catherineandrieu.fr
http://rafaeldesurtis.fr