LE DIT DE L’ABANDON
À quelle profondeur coule la source de l’abandon ?
Il y a des jours où elle rode avec un manteau sur son pyjama.
L’infélicité est scandaleuse.
Elle est si coupable qu’elle ne peut avoir de commerce avec le corps.
Elle le regarde avec détachement. Elle s’emmitoufle dans le manteau
et dort comme un fœtus. Le froid est bienvenu.
Le corps n’est rien d’autre qu’un toit.
Il n’y a pas de désir, pas de noms, pas de sexe.
" Comme les escargots ", murmure-t-elle.
Le col de fourrure couvre ses yeux et ses oreilles.
En s’endormant sa tête fend l’air
elle navigue en rêve au bord des corniches de pierre.
« Antonella Anedda a dit que la poésie était la réalité même de sa vie : "une racine, et parfois une lame". Une racine qui la relie à la totalité de la terre et du cosmos, aux vivants et aux morts, à la parole même de ce qui semble ne pas avoir de voix. Et une lame qui ouvre au monde, désigne une blessure, mais devient aussi l'emblème du tranchant de la poésie. »
PARLA L’ABBANDONO
Quanto profonda scorre la vena dell’abbandono ?
Ci sono giorni in cui vaga con il cappotto sul pigiama.
L’infelicità è scandalosa.
È così colpevole che non può avere commerci con il corpo.
Lo guarda con distacco. Si avvolge nel cappotto
e dorme come un feto. Il freddo è benvenuto.
Il corpo è solo un tetto.
Non esistono nomi, né desiderio, né sesso.
" Come lumacche " bisbiglia.
Il bavero di pelo copre occhi e orecchie.
Addormentandosi la sua testa fende l’aria
naviga in sogno lungo i cornicioni di pietra.
Avec Antonella Anedda, Michel Deguy, Jacques Demarcq, Benoît Casas, Andrea Inglese, Sophie Loizeau, Valerio Magrelli, Claude Mouchard, Guido Mazzoni & Martin Rueff
Andrea Zanzotto est né il y a cent ans et mort il y a dix. Ce double anniversaire, marqué par d'importantes publications posthumes, Erratici, disperse e altre poésie (1937-2011 – Francesco Carbognin éd., Mondadori, 2021), Traduzioni, trapianti, imitazioni (Giuseppe Sandri éd., Mondadori, 2021) est l'occasion de nombreuses célébrations en Italie comme en France. Dans le cadre d'un colloque de trois jours, « Zanzotto europeo, la sua poesia di movimento » (25-27 novembre 2021), organisé par Giorgia Bongiorno, Laura Toppan, Andrea Cortellessa et Martin Rueff, la Maison de la Poésie accueille cette soirée exceptionnelle. Des poètes de France et d'Italie évoqueront la figure d'Andrea Zanzotto, l'importance de son oeuvre, la fécondité de son héritage.
Le programme du colloque est consultable sur le site de l'Institut Culturel Italien
À lire – Andrea Zanzotto, Venise, peut-être, trad. de l'italien par Jacques Demarcq et Martin Rueff, éd. NOUS, 2021.
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