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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
A ma droite, Marcel Proust, surnommé le petit Marcel par toute une faune qu'il décrit si bien dans ses chroniques mondaines, 40 ans asthmatique, reclus, effrayé par le monde extérieur et dont le tout Paris littéraire attend la grande oeuvre promise depuis des années.

A ma gauche, Jean Cocteau, jeune farfadet de 20ans, poète précoce hyper doué, rivalisant d'éloquence et de bons mots dans tous les salons littéraires de ce début du XXe siècle.

Leur rencontre sera déterminante pour l'un comme pour l'autre, de suite, ils se reconnaissent comme des jumeaux nés avec 20 années d'écart et, jusqu'à la mort de Proust en 1922, ils n'auront de cesse de mettre en oeuvre une relation d'amour/haine que seule la gémellité peut engendrer.

Jalousie amoureuse, jalousie littéraire, complicité amoureuse, complicité littéraire. Combat à fleurets mouchetés entre un écrivain : Proust, fossoyeur d'un monde aristocratique d'un siècle passé et un poète : Cocteau, écrivain, auteur dramatique, déjà moderne alors que le terme même n'existait pas encore.

Une chose est sûre à la lecture de cet ouvrage : on ne peut que louer l'idée de Claude Arnaud à l'origine de cet essai, car, grâce à l'auteur, nous entrons dans l'intimité de la vie culturelle et intellectuelle de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.

Bienvenue dans les arcanes des maisons d'éditions parisiennes, bienvenue dans la guerre de velours entre Grasset et Gallimard. Valses de promesses entre éditeurs et critiques littéraires, il y a de véritable exécutions capitales dans les antichambres s et les salons mondains. Formidablement écrit , ne vous laissez surtout pas impressionner par le titre un peu théorique « Proust contre Cocteau », cet essai nous livre des clés et c'est justement une très bonne introduction à l'oeuvre de ces deux écrivains .

Une fois terminé ce livre, on n'a qu'une envie, celle de plonger « du coté de chez Swann », de rencontrer « Thomas l'imposteur » ou de savourez la biographie de Cocteau écrite par le même Claude Arnaud parue en 2003 et qui, dix ans après sa publication, reste une référence incontournable en la matière.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Pendant une courte période de notre histoire contemporaine, au moment de la fin des états-nation et l'avènement de l'impérialisme, la croissance économique en France dégage de toutes obligations de revenus des milliers de bourgeois leur permettant de consacrer leur temps à vivre à l'écoute des musiciens, des poètes et des peintres. Ils se lanceront à leur tour dans la création. Paris devint capitale de la sainte trinité laïque : littérature, peinture et musique.
Fin connaisseur des deux oeuvres et de l'époque, Claude Arnaud réussit à entrer en empathie pour Marcel Proust (1871 – 1922) et Jean Cocteau (1889 – 1963), deux personnages gémellaires partageant une curiosité dévorante, un désir de plaire et de dominer aussi abrité sous une commune courtoisie.
Nos esprits, ces miroirs jumeaux dira Proust.
Marcel Proust : valétudinaire à l'oeil de mouche pensant l'écriture comme hors du monde et seul moyen d'échapper au néant de l'existence.
Jean Cocteau : le génie polymorphe. Les miroirs se contentant de le réfléchir sans le penser, il s'en voit sans cesse renvoyé au mystère qu'ils démultiplient.

Le livre détaille au fil des époques les succès et les oublis et plonge dans l'intimité des artistes pour tenter de mieux les connaître sans jamais les juger. L'auteur tente de comprendre comment, dans une sorte de renversement de l'histoire, l'oeuvre d'une vie de l'un, la Recherche, fut installée au panthéon de la littérature française par la postérité et la multiplicité des créations géniales de l'autre presque oubliée de nos contemporains.

Mise en garde de Proust contre l'idolâtrie, l'érudition et le mimétisme : Vos vers sont comme déjà écrits, conformes à ce qui se publie de mieux. Vous ne pensez pas votre art, c'est l'époque qui le conçoit ; comme la lune et les miroirs, vous brillez d'un éclat second.

• Relire la Recherche comme un accouchement interminable, regarder Cocteau de nouveau, le tout grâce à Claude Arnaud.
• Faut-il connaître les oeuvres des deux créateurs pour mieux goûter de cet ouvrage ? Surement.
• Toutefois cette clé de 200 pages pour rouvrir l'accès à deux génies d'hier est à la portée de tous.

Lien : http://quidhodieagisti.over-..
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La quête de l'immortalité chez Proust et Cocteau

"Proust contre Cocteau"

***

Ce titre nettement tranché pourrait laisser croire que Proust et Cocteau se sont opposés en tout. En réalité Claude Arnaud montre ce que la gémellité a comporté en expressions différentielles, marquant ainsi le caractère unique de l'un et l'autre.

Tous deux progénitures de mères qui craignent de ne pas les avoir tout à fait finis, d'une sensibilité extrême - comme Romain Gary qui évoque après eux la promesse d'un absolu d'amour jamais tenue en comparaison de l'amour inaugural maternel -, homosexuels, ayant usé les bancs du lycée Condorcet, bourgeois adorant les mondanités, habités par la création, tiraillés par le besoin de reconnaissance, Proust et Cocteau à première vue se reconnaissent, semblables à s'y méprendre.
Mais leurs esthétiques diamétralement opposées, l'une minimaliste, sans cesse désépaissie, moderne, l'autre accueillie d'abord comme une prose documentaire verbeuse tout juste publiée à compte d'auteur, ne font déjà pas mystère. C'est la fin d'une époque que retranscrit l'un qui ne connaîtra que la IIIe République et cultivera une fascination pour l'atmosphère second Empire, son aristocratie qui lui semble un apogée social, et l'appel du futur pour l'autre qui traversera à pas de course deux Républiques et la naissance du 7ème Art.

De 1909 ou 1910 jusqu'à la mort de Cocteau qui survit à son aîné presqu'un demi siècle, Arnaud retrace les contours d'une relation faite tantôt de communion et d'admiration, tantôt engluée dans la matière d'un amour collant à l'odeur suffocante de vapeurs de reproches, ou qui ne tient qu'à l'invocation du spectre de l'autre, disparu.

Avec la manière gracile de celui qui s'est beaucoup frotté au beau et à ses techniques, Claude Arnaud démontre que le point final de la relation n'a jamais pu être posé, et qu'entre Cocteau et Proust la théorie de la brouille littéraire est infiniment mince devant les sacrifices qu'imposent la création littéraire anthropophage, et la conception toute personnelle de l'Art. Pour avoir été les meilleurs amis, s'aidant, se lisant, se cooptant, se cajolant, Proust et Cocteau se devaient d'être les meilleurs ennemis extravagants, passionnés, vindicatifs, jaloux, mesurés à dessein quand l'autre attendait de l'exaltation … comme un vieux couple en crise, en proie à des différends irréconciliables.

En effet, si Cocteau est l'enfant radieux du couple, un éthéré protéiforme, à la vingtaine créative, qui incarne la modernité dans les salons mondains de l'époque, sa précocité artistique renvoie Proust au temps précieux de sa jeunesse (il a alors quarante ans) qu'il n'a pas su saisir. Voilà donc les Origines du projet de reconquête obsessionnelle des strates temporelles que nous connaissons aujourd'hui sous le nom de « La Recherche du temps perdu ». La ligne de faille de l'amitié est donc la temporalité, le rythme.
Quand l'un est dans l'immédiateté, la sociabilité et semble percer le mystère de l'Art total en saisissant sans distinction et avec un talent égal la poésie, le dessin, la musique et la danse, l'autre, envieux, décide de s'ensevelir dans une chambre capitonnée pour se recentrer sur lui-même et faire jaillir des souvenirs révolus et susciter la Littérature.

Alors c'est la théorie de l'immortalité littéraire qui finit par s'imposer. Proust, largement promu par son ami Cocteau abondant dans l'éloge, commence à connaître le succès avec "Du côté de chez Swann". le renvoi d'ascenseur est glaçant : Proust s'assure son immortalité en tuant éditorialement celui qui le premier crie à son génie, laissant Jean inconsolé de l'antique Petit Marcel si peu sûr de lui.

Un essai tout à fait passionnant murmurant, à côté de ces portraits croisés, la petite histoire du « Contre Sainte-Beuve » qui a planté les jalons du structuralisme en Littérature.
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Aujourd'hui, tout le monde ou presque connaît Proust - de nom, grâce, le plus souvent, à une certaine madeleine. Presque personne ne le lit, pourtant. Je me demande si la situation n'est pas pire pour Cocteau - reste son adaptation de la Belle et la Bête, qui continue de plaire aux plus jeunes, et à être vaillamment étudier en 6e.
Je vous l'avouerai volontiers, il ne m'est pas venu à l'esprit que ses deux auteurs s'étaient côtoyé. J'ai ainsi découvert l'amitié, puis la rivalité des deux hommes, leur jeunesse respective, le réseau social dans lequel ils étaient insérés - ou plutôt, dans le cas de Proust, dans lequel il essayait de s'insérer, fasciné. C'est à un véritable panorama de la littérature du début du XXe siècle que nous convie l'auteur, une petite société dans laquelle l'homosexualité n'était pas un problème (elle ne devait le devenir qu'avec Vichy).
Cet essai fait la part belle à leur vie privée plus qu'à leur oeuvre, comme si, prenant le contrepied du structuralisme, uniformément utilisé pour enseigner les lettres, l'oeuvre pouvait s'expliquer en partie par l'homme. J'ai cependant eu l'impression que Proust était privilégié par rapport à Cocteau - parce que l'auteur a déjà consacré un essai entier à cet auteur, je devrais dire artiste prolifique ?
Proust contre Cocteau est un essai intéressant, qui m'a tout de même laissé un peu sur ma faim.
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Tout d'abord, merci à Babelio, l'opération Masse critique et les éditions Arléa pour m'avoir permis de me plonger dans ce livre.
Un essai que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire. On y découvre Proust et Cocteau en véritables personnages. La partie sur leur enfance qui débute le livre m'a particulièrement plu car on entre vraiment dans leur psychologie.
C'est intéressant, ensuite, de découvrir leurs relations, leur rapports – dont je n'avais aucune idée – et surtout leurs deux personnalités à la fois proches et éloignées.
Le style est, la majorité du temps, agréable à lire. Une élément que j'ai beaucoup apprécié est qu'il a parcouru son textes de citations des auteurs, ce qui nous offre de véritables moments de poésie.
Il y a énormément de références et cela donne envie de prendre des notes et d'aller en lire davantage.
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