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4,16

sur 1823 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
D'une exceptionnelle puissance, La Servante écarlate est un des romans les plus géniaux que j'ai lus. Amen. Une fois ce constat fait, je n'avais bizarrement aucune attente surdimensionnée avant d'aborder sa suite, 35 ans après ... tout simplement parce que cela me semblait impossible de réitérer un telle déflagration , quel que soit l'immense talent de la grande Margaret Atwood, d'autant plus après les images indélébiles créées par l'excellentissime série télé. Soyons clair, Les Testaments n'ont pas l'envergure de la Servante écarlate mais ce fut un grand bonheur de lecture.

Nous sommes 15 ans après le premier volet. C'est avec beaucoup d'habileté et de savoir-faire narratif que Margaret Atwood a évacué les dangers inhérents à une suite. Elle a intelligemment décidé de se passer de June / Offred ( qui fera juste une apparition sur la fin ) pour exploser son récit en trois témoignages narrant les derniers moments de la terrible théocratie totalitaire de Gilead désormais traduit par Galaad ( pas fan de ce changement onomastique, je n'y vois aucune réelle pertinence ), juste avant sa chute.

Finie l'étude psychologique , fini le regard claustrophobe d'une femme séquestrée, violentée qui rêve de liberté. Place à une brillante étude sociologique du monde dystopique créé par Atwood à travers les regards panoramiques de ces trois femmes : Tante Lydia, une jeune fille des hautes sphères de Gilead / Galaad sur le point d'être mariée et une jeune fille vivant au Canada, dont , forcément, les parcours vont finir par se croiser jusqu'à ce que tout soit éclairé sur les liens qui les unissent.

Les chapitres les plus passionnants sont clairement ceux dédiés à la fascinante Tante Lydia, personnage emblématique de la Servante écarlate, dont on découvre le parcours et comment cette juge aux affaires familiales de 53 ans a accepté de collaborer avec les instances dirigeantes de Gilead / Galaad, jusqu'à instiguer la chute du régime. le personnage du premier volet était monochromement méchant, il dresse avec mille nuances de gris le portrait d'une femme puissante. Tante Lydia interpelle un hypothétique lecteur et le pousse à réfléchir sur ses propres choix, si lui aussi avait été confronté à cette collaboration infâme. Passionnant.

Les pages se tournent toutes seules, avec avidité, même si les derniers chapitres, purement dans l'action pour parvenir à un dénouement clair, m'ont nettement moins intéressé, je les ai presque survolés car le principal n'était pas là mais dans la description de la décadence de Gilead / Galaad qui derrière ses apparences vertueuses et puritaines cachent les pires turpitudes. On retrouve des pages terrifiantes, à vous glacer le sang, sur la pédocriminalité instituée, notamment au travers du personnage de Jemina Agnès, même pas 13 ans, qui doit épouser le commandant Judd, la cinquantaine.

« Le Commandant s'est avancé, a organisé son visage autour d'un sourire flasque et collé sans bouche sur mon front en un chaste baiser. Ses lèvres étaient désagréablement chaudes et elles ont produit un bruit de succion en se retirant. J'ai visualisé sa bouche en train d'aspirer un petit bout de mon cerveau à travers la peau de mon front. Mille baisers plus tard, il ne me resterait plus rien dans le crâne.
Je sentais son haleine, où s'emmêlaient des relents d'alcool, de bain de bouche à la menthe pareil à celui de chez le dentiste et de caries. M'est venue alors sans que je l'aie voulu l'image de la nuit de noces : une énorme masse informe blanc opaque avançant sur moi à travers la pénombre d'une chambre inconnue. Elle avait une tête mais pas de visage : juste un orifice rappelant la bouche d'une sangsue. de quelque part à côté de son nombril un troisième tentacule s'agitait en tous sens. Elle est arrivée devant le lit où j'étais allongée, paralysée d'horreur, et nue. Et ensuite ? J'ai fermé les yeux pour repousser cette scène intime, puis je les ai rouverts. »

Si on retrouve donc ces passages effrayants à forte puissance d'évocation, Les Testaments sont comme un antidote à La Servante écarlate : le premier était profondément pessimiste, terriblement sombre, là où le second voit des lueurs d'espoirs s'allumer jusqu'à la couverture qui perd l'écarlate pour se nimber de vert. La force du premier résidait dans des ambiguïtés ambitieuses, dans son refus farouche d'élucider au point de laisser June / Offred à la toute fin sans connaître son sort à venir. Dans Les Testaments, les contours ne sont plus flous, tout est expliqué, ce qui fait peut-être au récit son élasticité et son mystère, tout en suscitant moins d'émotions pour le lecteur qui sait dès le départ que ce cauchemar a pris fin. 
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Quinze années se sont écoulées. La Servante Écarlate allongée sur le lit d'un commandant, je la laisse ainsi, cuisses écartées, telle est la loi de cette vie, son unique but étant de se faire violer pour enfanter, la loi pour survivre dans la communauté. Je délaisse donc cette cape rouge, pour m'intéresser aux tailleurs bleu-vert des Épouses ou au brun des Tantes. Dress code de rigueur dans ce milieu-là. Plusieurs voix me parlent d'ailleurs pour comprendre, savoir, appréhender, une Tante repentie à travers les mémoires d'un hologramme, une jeune fille qui s'apprête à devenir épouse, mais est-elle vraiment prête, une jeune fille de l'autre côté du "rideau de fer" version canadienne, des Perles venues prêcher les bonnes paroles de notre Seigneur et du Commandant Jude.

Et se demander ainsi ce qu'est devenue Galaad depuis tout ce temps...

Une suite donc sans être tout à fait une suite, disons un nouveau chapitre de l'Histoire écrit trente-quatre ans après. Et je me demande ainsi non pas ce que je suis devenu depuis tout ce temps, sans intérêt, mais si une telle société, décrite dans un roman dit dystopique, serait même envisageable dans la réalité. Et je crois que malheureusement cette vision futuriste de ce monde ne serait, au final, pas si éloignée par certains aspects du notre, comme pouvait l'être d'ailleurs la servante écarlate en son temps. Ce qui me fait dire que ces deux romans n'ont pas d'âge. Comme quoi, même à quatre-vingt ans, l'auteure a encore moyen - et envie - de dénoncer, décrypter, disséquer la société dans laquelle nous vivons tous, habillés de rouge de vert ou de brun... Question de dress code, avec le petit espoir qu'il pourrait exister des passerelles entre le vert et le brun, entre le rouge et la corde, avec le maigre espoir de se dire que crise oblige la frontière entre Galaad et le reste du monde (donc le Canada) est perméable.
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Si on juge un livre à la vitesse à laquelle il est lu, alors c'est un très bon livre.
Si on juge un livre à la qualité de son écriture, à son rythme, à son humour, la beauté de certaines tournures, l'intelligence des dialogues, la finesse de sa construction, alors c'est un très très bon livre.
Si on juge un livre à sa capacité à nous tenir en haleine, à nous faire nous poser des questions, à nous pousser à spéculer sur la suite des évènements, à supputer la fin, à nous tromper, à nous donner raison, à nous surprendre et à nous contenter, alors Les Testaments est un livre génial.
J'attendais Les Testaments avec impatience, j'avais un peu peur d'en attendre trop et d'être déçu. Maintenant que je l'ai terminé je peux le dire : je n'ai pas du tout été déçu, j'ai beaucoup beaucoup aimé cette lecture. Margaret Atwood a réussi le pari difficile de me surprendre et de me satisfaire en même temps. Bravo !

Les Testaments est le dernier roman de Margaret Atwood. C'est la suite tant attendue – et très réussie – de son livre le plus connu : La servante écarlate, sorti en 1985. Trente-quatre ans après, l'autrice canadienne parvient encore à nous surprendre et à satisfaire nos attentes et nos exigences. Si vous avez aimé La servante écarlate, alors j'espère que comme moi vous aimerez Les Testaments ! Et que vous aurez autant de plaisir que moi à lire enfin ce qu'il advient de Gilead et des personnages qu'on a suivi dans le premier tome.

(Alors évidemment, je pense qu'il y aura aussi des personnes que Les Testaments ne satisferont pas. Et je pense que c'est normal, c'est le principe même des suites. le premier livre est génial, tout le monde le lit, tout le monde veut savoir ce qu'il se passe ensuite. le problème c'est qu'ensuite, on est parfois déçu par les réponses, ou simplement déçu d'avoir eu des réponses…)

Mon avis complet sur mon blog :
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Il s'agit de la suite de "la servante écarlate", suite principalement axée sur le devenir de ses filles, nées de deux pères différents, Luke et Nick.
Élevées différemment, elles sont en conséquence dissemblables : l'aînée, élevée à Galaad, est promise à un mariage dès son plus jeune âge et finit par trouver une solution pour y échapper. La seconde, plus rebelle, a grandi chez des parents adoptifs qui décèdent dans un attentat. Elle devra passer la frontière pour détruire Galaad.
Une troisième protagoniste, une Tante fort rude, dirige les femmes et intrigue en secret. Nous la connaissons par le journal qu'elle tient.
L'autrice donne tour à tour la parole à ces trois femmes, jusqu'au dénouement final.
Ayant lu ce dernier roman en même temps que le premier, je les autant apprécié l'un que l'autre et ce fut une expérience agréable de les découvrir parallèlement. J'ai pu faire des suppositions (pas toujours avérées) et maintenir le suspense malgré tout, un suspense que j'ai cependant trouvé plus important dans ce deuxième livre.
En revanche, je n'ai pas encore découvert la série télévisée, je compte bien sûr le faire prochainement, sachant que la plupart du temps j'apprécie mieux les livres que les films.
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Fin 2019, il était difficile de passer à côté de ce livre en librairie. La couleur vert fluo de sa couverture et les piles d'Atwwod rendaient cette auteure incontournable. Mais, je n'avais pu lu « La servante écarlate », pas vu non plus le moindre épisode Télé de ce feuilleton. Alors, lire un tome 2 sans même avoir tenu en mains le tome 1 me paraissait une aberration.
Pourtant, je suis rentré dedans, avec aisance et grand plaisir. Il est vrai que je souhaitais, en ouvrant ce ‘500 pages', d'abord et avant tout me désembrumer l'esprit après la lecture d'un titre Booker Prize qui ne m'avait pas du tout convaincu. Voulant me réconcilier avec ce Prix littéraire, je me suis ouvert à une confrontation avec une dystopie…
Dystopie ? Vous avez dit dystopie ? Mais, bon sang c'est bien sûr, il s'agit effectivement d'une mise en mots de l'histoire, ici décadente, d'une société imaginaire régie par un pouvoir totalitaire et une idéologie que l'auteur ne veut défendre. Et c'est ce qui m'a beaucoup plu. Moi qui ne suis pas friand de Fantaisie, j'ai aimé découvrir un tout fantaisiste mais solide où chaque parcelle constituante a son pendant réel dans l'histoire de nos sociétés. Avec brio, Margaret Atwood agence des fragments de vérités glanés au cours des siècles et au coeur de nos cités pour construire un imaginaire à peine moins vrai que nature. L'ensemble est faux, le lecteur en conviendra. Il sait qu'il est dans un roman, une fiction… mais chaque coup de projecteur est si vrai !
Une merveilleuse construction de l'esprit qui s'appuie sur une plume efficace et une traduction au service du roman. Une plume capable de nous surprendre, de titiller nos certitudes, nous émouvoir et nous pousser à réfléchir au modèle de société à bâtir. Un très bon moment de lecture.
Merci à Madame lit et à son défi littéraire ( https://madamelit.ca/2019/12/20/madame-lit-son-defi-2020/ ).


Lien : https://frconstant.com/2020/..
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Le monde décrit dans La Servante Écarlate n'était pas de la petite bière, nous étions loin du pays des Bisounours…

Pourtant, malgré le fait que nous étions dans une dystopie, il y avait des relents de déjà-vécu quelque part dans le Monde ou quelque part dans le passé.

Il fait froid dans le dos, ce roman, car nos sociétés pourraient basculer dans ce cauchemar très vite, sans que l'on s'en rende compte et sans que l'on sache y faire quelque chose.

Sans oublier que certaines sociétés sont dans ce puritanisme religieux…

Puritains quand ça les arrange, bien entendu ! On oblige les autres au puritanisme, mais si on gratte sous la croûte de pudibonderies, on trouvera de la saloperie.

Quant à la religion, elle a bon dos et ne sert qu'à justifier certaines règles, certains comportements, qu'ils soient machistes, phallocratiques, misogynes ou qu'ils transforment la femme en vache reproductrice. Une tyrannie doit reposer sur quelque chose et la religion est souvent la bonne excuse.

Bien souvent, les suites sont moins bonnes que le premier tome, mais ici, ce n'est pas le cas, j'ai même trouvé la suite meilleure que le premier opus !

En tout cas, niveau froid dans le dos, j'ai eu ma dose pour quelque temps. J'ai comme une envie de me jeter sur des Petzi ou des Martine, c'est vous dire combien j'ai flippé ma race.

Dans le monde décrit brillamment par l'auteure, les femmes n'ont aucun droit, si ce n'est celui de fermer sa gueule et de jouer aux juments reproductrices, ou aux vaches gestantes. Au choix… Mais elles n'ont pas toujours le choix de l'étalon (ou du taureau).

Le taux de fécondité ayant fortement baissé, il faut bien perpétuer la race Humaine avec celles qui savent encore tomber enceinte et donc… Les Servantes Écarlates sont comme des vaches qu'on engrosse pour prendre le veau. L'enfant, pardon.

Trois personnages marquants vont nous raconter leur vie dans cette suite : une Tante, une jeune fille habitant le Canada (donc libre) et une fille d'un Commandeur, habitant Galaad (Gilead dans la traduction précédente, mais ça ne m'a pas dérangé).

Nous sommes 15 ans après le premier tome, donc, le récit n'est pas linéaire et ne vous attendez pas à retrouver Defred aux commandes de la narration.

J'ai trouvé que donner la parole à une Tante qui avait connu la démocratie, qui avait assisté à la chute de la société, qui avait été dans un camp et qui en était sortie en abandonnant une partie de son âme, était une riche idée. Nous avons vu la naissance de Galaad d'une autre manière et compris que si ça arrivait chez nous, cela se passerait de la même manière : sans quasi de résistance.

Le récit est fort, puissant, intense, horrible… Il m'a donné froid dans le dos. Entrer ainsi dans le fonctionnement de Galaad et voir le lavage de cerveau m'a donné envie de vomir. Voir le système de l'intérieur, voir sa corruption, sa corrosion, son hypocrisie, son manichéisme, m'a collé la nausée tant tout était réaliste et possible.

Mon seul bémol sera pour la fin qui est un peu trop précipitée à mon goût. Bianca l'a trouvée elle aussi un peu trop rapide, mais malgré ce léger point critique, tout le reste est dans le haut du panier littéraire.

Une dystopie à l'écriture fine, caustique, réaliste. Une tyrannie basée sur des mensonges, sur religion dont les écrits sont détournés pour servir les intérêts de quelques-uns et pas du bien commun.

Des personnages forts, énigmatiques, profonds et qui évolueront au fil des pages. Un monde décrit qui fait froid dans le dos et où la lecture et l'écriture sont devenus dangereux, interdits et réservés à quelques personnes triées sur le volet.

Anybref, une fois de plus, une LC réussie avec Bianca et nous sommes sur la même longueur d'ondes. Et si vous suivez le lien, vous en aurez la preuve !

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Que penser de ce roman? J'avoue que je suis partagé, entre le plaisir donné par l'écriture de Margaret Atwood, et entre une certaine déception dans les jours qui ont suivi.
Fallait-il écrire une suite à La Servante écarlate ?
Certes Margaret Atwood a été sollicitée par des lecteurs et des lectrices pour écrire une suite à ce roman écrit en 1985, édité en France en 1987 et réédité en 2017...un roman qui trouvait alors une résonance particulière du fait des actualités que le monde horrifié découvrait...La dystopie devenait une réalité...et un succès littéraire, 30 ans après son écriture.
Ce roman m'avait enchanté, parce que j'avais pris en considération la créativité de l'auteure, une créativité et une inventivité rattrapée en partie par l'actualité des années 2000. La fin du roman me convenait, j'étais libre d'envisager la vie de Defred une fois les portes du fourgon refermées. Je ne voyais pas la nécessité d'en écrire une suite.
Certes l'écriture de Margaret Atwood dans Les Testaments, est plaisante, malgré quelques longueurs et des impressions parfois de redites, mais je n'ai pas été bousculé par le déroulement de l'histoire, par les situations, par les personnages,...autant je l'ai été avec "La Servante écarlate"
J'ai même eu l'impression de souvent retrouver, sous une autre forme, des propos déjà lus dans ce titre...On y retrouve des thèmes déjà évoqués tels que le danger de la lecture d'ou son interdiction, la censure, mais aussi le rappel que toute idéologie peut échapper aux contrôles de ceux qui la prônent, les vols de bébés, la peine de mort... des points retrouvés parfois également dans l'actualité ou le passé de certains pays de notre monde...
D'autres points sont cependant développés et méritent d'être soulignés. Sans aucun doute ils constituent les thèmes forts de ce roman, ceux qui apportent des émotions nouvelles aux lecteurs...
Oui, des femmes peuvent se mettre au service d'hommes, de dictateurs, pour asservir d'autres femmes...Oui, des femmes peuvent aussi apporter la liberté à leur pays...Oui, des livres religieux ont écrit une partie de ce que décrit l'auteure, que ce soit la Bible ou d'autres...Bible mentionnée dans "Les Testaments" à plusieurs reprises. Oui, des régimes politiques, des théocraties ont été crées en prenant pour référence des livres religieux... Pensons à la "Plus grande démocratie du monde" dans laquelle les nouveaux Présidents jurent sur la Bible..mais aussi à ces théocraties violentes exécutant chaque jour des "mécréants" Oui, souvent des régimes ont considéré que "Le savoir est pouvoir"!
Oui, il est important de douter !
Finalement ces deux livres se complètent, ce qui fut sans doute difficile à écrire, n'en doutons pas...L'actualité des 30 dernières années de notre monde a peut-être aidé Margaret Atwood
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Trente-quatre ans après la parution de la Servante écarlate, Margaret Atwood publie cette suite. Entre-temps, le premier tome, adapté avec succès en série télévisuelle, a connu une seconde vie dans le contexte du mouvement ≠metoo.
Cette suite adopte un procédé narratif original. Il s'agit de documents rédigés ou retranscrits par des personnages clés de Gilead. Les événements relatés forment une sorte de puzzle que le lecteur doit placer pour trouver le fil de la narration. Cet exercice ludique et finalement peu laborieux provoque une immersion narrative que j'ai beaucoup appréciée. La dernière partie est à la hauteur de la créativité du roman.
Si le style n'est pas excessivement littéraire, l'univers est très bien construit et cohérent.
Le propos est très différent de celui de la série, même si on retrouve certains personnages. de ce fait, il n'y a aucune redite à craindre. J'ai essayé de contextualiser le roman dans la série et j'ai échoué. À vrai dire, j'en tire une certaine satisfaction puisque cela m'a amenée à envisager plusieurs possibilités.
Après tout, il s'agit d'une dystopie, le propos n'est donc pas très éloigné de notre environnement. Se voir offrir plusieurs hypothèses est un élément de réflexion très intéressant.
J'ai trouvé du sens à cette suite même si ce sont les événements qui ont conditionné sa rédaction et non pas une intention première de l'autrice.
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C'est avec la série « the Handmaid's tale / La servante écarlate » que j'ai découvert Margaret Atwood. Addict à la série je n'ai pas lu le livre dont elle est l'adaptation, mais j'étais curieuse de lire cette suite écrite 34 ans après le premier opus.

Nous sommes 15 ans après les faits relatés dans The Handmaid's tale. La théocratie totalitaire de Galaad (Gilead) est sur le déclin. « Les testaments » est le récit choral de trois femmes dont les destins sont liés. Trois témoignages : l'un est un journal écrit par une Tante, gardienne de la rigueur qui régit la société de Galaad, et par n'importe quelle Tante puisqu'il s'agit de l'implacable et terrible Tante Lydia. Les deux autres récits sont les transcriptions des interrogatoires de deux jeunes femmes, l'une ayant grandi à Galaad, l'autre au Canada, en pays libre. le tout est présenté comme des témoignages historiques.

Je ne vous en dirai pas plus sur l'intrigue pour ne pas en dévoiler le suspens (même si on comprend très vite qui sont réellement ces trois femmes). Ce qui m'apparaît clairement est que Margaret Atwood a écrit une suite, la suite qu'attendaient les fans de la série.

Toutes les horreurs de cette théocratie imaginaire ont été montrées dans le premier livre et au-delà dans la série TV. Avec un leitmotiv : tout ce qui est imposé aux femmes dans cette dystopie a été mis en oeuvre au moins une fois dans le monde par le passé. Ca fait peur !

Il y a donc peut-être moins de violence dans cette suite qui reprend les accents de lutte féministe que l'on avait déjà connus en les accentuant peut-être pour répondre aux soubresauts des années 2018/2019. Faut-il rappeler que la série est sortie aux USA alors que Donald Trump accédait au pouvoir suprême ? Alors qu'au Royaume-Uni les leaders pro-Brexit ne cachaient pas leur sexisme et leurs idées racistes ? Alors qu'en Argentine les femmes se battaient pour le droit à l'avortement, ce même droit remis en cause dans certains pays comme la France ? (Pardon, je m'emporte, revenons-en au livre).

Après un peu plus d'une quinzaine d'années d'existence les limites du régime de Galaad se font sentir. On rentre plus dans les méandres du pouvoir, enfin de ceux ou celles qui ont un vrai pouvoir : celui de contrôler la vie des autres, d'influer sur leur décision grâce aux secrets chèrement gardés, grâce à la peur omniprésente. Mais une théocratie sur le déclin, où la résistance s'est organisée, d'où les fuites vers la liberté n'ont jamais cessé, où la corruption et la déliquescence sont à tous les étages. Un état totalitaire qui, s'il est toléré par la majorité du reste du monde, reste tenu à l'écart et sous surveillance.

Cette suite est très différente de « The Handmaid's tale », mais reste extrêmement addictive. L'enchaînement des récits et la répartition des voix créé un suspens qui reste haletant jusqu'à la dernière page. On suit les questionnements, les doutes, les espoirs, de trois femmes bien différentes. Si l'une a participé activement à la création de Galaad et a connu le monde d'avant, les deux autres ont grandi dans des univers opposés et post-naissance de Galaad. Trois destins de résistantes (et même un peu plus que trois).

Je regrette que cette suite n'ait pas la force, la puissance du premier récit ou tout du moins que ce que la télévision en a fait. Si le livre se lit comme un thriller j'ai eu quelques moments de doute sur la crédibilité de certaines situations, de certains revirements. Pour ce qui est du style, on a quand même l'impression d'avoir dans les mains le script de la saison 5 de la série (on attend la saison 4 pour le printemps). Il n'en demeure pas moins que j'ai été happée par le récit et qu'il m'était difficile de lâcher le livre tant j'étais impatiente de connaître la suite.
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Après avoir lu La servante écarlate, quoi de plus logique d'enchainer en lecture commune avec la suite de ce roman culte. Suite? oui et non , on se retrouve une quinzaine d'années après l'histoire de Defred au coeur de Galaad mais Defred n'est qu'évoquée en fin de roman.
L'histoire tourne autour de trois "héroïnes", Agnès, une jeune fille de bonne famille élevée dans la pure tradition galaadéenne, Daisy, une autre élevée au Canada où Galaad apparait comme une secte, et une tante mais pas n'importe laquelle, une tante fondatrice si ce n'est la plus importante et imposante de ce monde d'asservissement des femmes. Trois protagonistes bien différentes au passé bien mystérieux et à l'avenir dans Galaad bien incertain.
Sans être aussi glaçant que le premier, cette suite nous replonge dans l'univers anxiogène de la Servante écarlate. Agnès n'a connu que les règles strictes de ce monde impitoyable sans éducation autre que la broderie, comment entretenir une maison, se dévouer mais toute trace de rébellion peut-elle être annihilée par une telle éducation? Daisy ne connait de Galaad que les images de répression, de violences lors de manifestations contre ce régime, pour la protection d'une icone pour les deux parties, bébé Nicole, une enfant disparue lors de la fuite de sa mère.
Véritable page turner, peut être plus que la servante écarlate qui nous sidérait et pour lequel il fallait un temps pour digérer certains passages avant de s'y replonger. L'histoire nous incite ici à rechercher les liens entre les personnages, la chronologie qui est un peu perturbante pour situer la temporalité de chacune des protagonistes et surtout comment cela va se terminer, le premier s'étant fini sans réelle réponse pour Defred.
Une superbe découverte en lecture commune pour partager nos ressentis. Merci pour ces échanges!
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