Pratique, sympathique, l'une des dernières personnes en Amérique à n'être pas entrées dans les rang de la Police du Tabac. (p.156).
La peur est ce qui nous incite à prendre des risques et à nous pousser au-delà de nos limites normales, et un écrivain qui se croit en terrain sûr a peu de chances de produire quoi que ce soit de valeur. (p.88)
Il m'avait fait voir en moi quelque chose qui me remplissait de dégoût, pour la première fois de ma vie, je compris ce que c'était de haïr quelqu'un. Jamais je ne pourrais lui pardonner - et jamais je ne pourrais me pardonner à moi. (p.73)
Berkeley, Californie. Trois ans d’études de droit. L’idée était de faire le bien, de travailler pour les pauvres, les opprimés, de m’engager en faveur des humiliés et des invisibles et de voir si je ne pourrais pas les défendre contre les cruautés et l’indifférence de la société américaine. Encore des fadaises exaltées ? On pourrait le penser, mais je n’ai jamais eu cette impression. De la poésie à la justice, alors. Justice poétique si tu veux. Car la triste réalité demeure : il y a beaucoup plus de poésie en ce monde que de justice.
Nous ne sommes pas tombés amoureux l'un de l'autre, on pourrait dire plutôt que nous sommes tombés l'un dans l'autre et, dans l'espace profondément intime que nous habitâmes pendant ce peu, très peu de temps, notre seule préoccupation fut le plaisir. Plaisir de manger et de boire, plaisir sexuel, plaisir de prendre part à un dialogue animal, non verbal, dont le langage consistait à regarder et à toucher, à mordre, savourer et caresser.
J'ai probablement vécu trop seul depuis six ans. Je confonds parfois ce que je pense du monde avec le monde lui-même.
Born avait à peine trente-six ans, mais déjà c'était une âme dévastée, un individu en ruine et, tout au fond de lui, j'imaginais qu'il avait dû souffrir terriblement, vivre dans une douleur constante, lacéré par les coups de couteau du désespoir, du dégoût et du mépris de soi.
J'avais beau être sur mes gardes, je me sentais fasciné, aussi, par ce type étrange et indéchiffrable, et le fait qu’il parut authentiquement content d’être tombé sur moi alimentait les feux de ma vanité- cet invisible chaudron d’estime de soi et d’ambition qui frémit et bouillonne au fond de chacun d’entre nous.
La vie est trop courte pour lambiner
Mais c'est ça, notre boulot, au CNRS: rendre le monde aussi ennuyeux que possible (p. 259)