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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je remercie abondamment l'ami, lecteur compulsif comme moi, qui, par ses derniers commentaires fort convaincants concernant ce récit autobiographique...
m'a donné l'envie immédiate de le découvrir !

Je reconnais, avec quelque honte, ne jamais avoir rien lu de cet écrivain...

On m'a offert, il y a quelques années "L'invention de la solitude", qui attend toujours patiemment , sur mes rayonnages, mon bon vouloir !

Cette fois, je me suis décidée à me commander en Babel, "Le Diable par la queue", dans lequel je me suis aussitôt plongée avec grand intérêt. Ce texte très personnel donne une idée très riche et précise de cet éminent écrivain, de son parcours, de ses convictions, de sa volonté très jeune de ne pas adhérer au moule social conformiste proposé par la société américaine, et par ricochet, ses parents...

Il nous raconte l'Amérique des années 50, l'Argent-Roi, la société consumiériste...Des valeurs matérialistes qui très tôt, ne lui convenaient pas ! Il rêvait d'autre chose...tout en ignorant précisément ce qu'il souhaitait obtenir, en dehors de ce besoin irrepressible d'écrire. Une attirance certaine vers l'anarchie, et les "sentiers...non battus " !!

"L'argent fut la ligne de faille, il était devenu l'unique et incoercible source de désaccord entre eux. (...)
Je n'ai jamais réussi à comprendre comment un sujet aussi peu important, toute proportion gardée, a pu causer entre eux tant de difficultés. Mais l'argent, bien entendu, n'est jamais seulement l'argent. C'est toujours autre chose, et c'est toujours quelque chose en plus, et ça a toujours le dernier mot. "(p. 14)


Des portraits, des rencontres [ dont celles avec l'écrivain, Jerzy Kosinski, le poète, Jacques Dupin, directeur des publications à la galerie Maeght ], ses goûts, sa passion pour le cinéma (à tel point qu'il a songé un moment faire l'IDHEC, et devenir réalisateur ],ses aventures à Paris , aux Etats-Unis, comme au Mexique, sans oublier ses embarquements sur des pétroliers, pour travailler et voir le monde !...

De petits boulots en petits boulots, il engrange images, souvenirs, personnages...Il a cependant incessamment affaire avec les mots, entre ses travaux de traduction ou de chroniqueur littéraire, et ses propres tentatives....

"Si je considère aujourd'hui cette époque, je trouve quasi impossible d'assimiler le nombre de livres que j'ai lus. Je les dévorais en quantités stupéfiantes, je consommais des pays, des continents entiers de livres, jamais je n'en avais assez. Auteurs dramatiques élisabéthains, philosophes présocratiques, romanciers russes, poètes surréalistes : je lisais comme si mon cerveau avait pris feu, comme si ma survie même était en jeu." (p. 41)

En lisant le parcours, les anecdotes de la jeunesse, les années de précarité de Paul Auster, j'ai l'impression de naviguer entre Panaït Istrati et Jack London !!!

Le même refus du profit, de la loi de l'argent, la défense des opprimés, des pauvres, des exclus du système...


Une lecture très tonique, très vivifiante, dans nos sociétés de plus en plus marchandes...et âpres, économiquement. Les deux grands axes de cette autobiographie : les mots, l'écriture, les livres...et les rapports complexes que l'auteur entretient avec l'argent...et la normalité sociale. La persistance à rester aux confins du système !!!


"Je n'ai jamais eu faim, je n'ai jamais eu froid, je ne me suis jamais senti en danger de rien perdre de ce que je possédais. La sécurité allait de soi et pourtant, en dépit de l'aisance et du bien-être qui régnaient chez nous, l'argent y était un sujet de conversations et de soucis incessants.
Mes parents avaient tous deux connu la Crise, et aucun des deux ne s'était complètement remis de ces temps difficiles. Ils avaient l'un et l'autre été marqués par l'expérience de la disette, et chacun en portait la blessure à sa manière. (" le Diable par la queue suivi de "Pourquoi écrire ?" , Babel, 1999.p. 13)

**** un petit opus très vivant et coloré... qui me sera sûrement précieux pour que j'aborde ses romans, avec une attention accrue, et un oeil plus averti !
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Toujours cette impression étrange et rare quand j'aborde cet auteur de lire un livre écrit par un ami proche.
C'est une incroyable leçon de persévérance et de ténacité que nous livre Paul Auster dans ce récit autobiographique.
Il a tiré le diable par la queue ; il aurait pu abandonner mille fois son projet d'écriture tant ses déboires ont été nombreux pendant plus d'une dizaine d'années. P. Auster n'hésite pas à pointer du doigt son idéalisme de l'époque qui l'a sans doute précipité dans les difficultés sans nombre. Cet idéalisme prend sa source dans son histoire et l'argent en est le maitre mot ! L'esprit d'économie, pour ne pas dire l'avarice de son père, opposé à la prodigalité sans frein d'une mère généreuse ont conduit ses parents droit au divorce et imprimé en lui le dégout, voire un mépris profond de l'argent.

Son refus des compromissions, son refus de l'argent et des faux semblants, son refus du conformisme ambiant l'ont plongé dans les arcanes d'un réel qu'il ne soupçonnait pas, lui dont l'enfance avait été préservée de la pauvreté, et ont par la même nourri une oeuvre des plus singulières.

La dernière partie du livre "Pourquoi écrire?" est assez surprenante. C'est l'intrusion d'un hasard miraculeux ou parfois sinistre qui dans chacune de ces anecdotes brise le non-sens et la déconvenue ou provoque le départ d'une vie nouvelle.

Une femme qui va accoucher ne peut voir qu'une première moitié d'un film. Trois ans plus tard, par le plus grand des hasards, elle verra l'autre partie qui s'achèvera juste au moment précis de perdre les eaux pour son deuxième enfant. Une histoire mutilée reprend là un sens sans que l'on comprenne vraiment pourquoi : la porte reste ouverte à l'interprétation.
Dans le deuxième récit : Un môme casse un vase et l'auteur en colère s'en va ramasser les morceaux, juste au moment où sa fille déboule dans l'escalier et trébuche, manquant de se tuer si son père, présent à cet instant "t", n'avait pas été là pour la retenir.
Ou encore c'est ce terrible orage dans un camp de vacances qui cause la mort d'un de ses compagnons juste à quelques pas de lui. Première rencontre avec la mort qui restera à jamais gravée dans sa mémoire.
Puis ce sera la Belgique et un drôle de concours de circonstances, la guerre, qui amène une infirmière belge à correspondre avec un prisonnier anonyme. Ils tomberont amoureux de façon épistolaire, se rencontreront puis se marieront. Une génération plus tard, leur fils tombe à son tour amoureux d'une Allemande qui n'est autre que la fille du gardien du camp !
La dernière anecdote est encore plus énigmatique. L'auteur, à l'âge de huit ans rencontre son joueur de base-ball préféré et lui demande un autographe, mais il n'a pas de stylo et personne autour de lui ne sera en mesure de lui en prêter un. C'est l'occasion d'une de ces terribles frustrations, du genre chagrin d'enfant qui vous marque à jamais. Depuis ce jour-là, il a toujours un stylo dans la poche et je cite : « je dis volontiers à mes enfants, c'est comme ça que je suis devenu écrivain. »
L'écriture redonne du sens à ce qui n'en avait pas (puisqu'avec le temps le réel n'est plus aussi absurde et abscons qu'il y parait), elle détourne de la mort et du silence, amène des gens qui seraient restés étrangers, voire hostiles, à se rencontrer, et un simple stylo (je l'ai aussi du reste toujours sur moi) sert à ne jamais se trouver pris au dépourvu si une idée surgit.
Le réel est un livre ouvert à lire sans relâche et à décoder.
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