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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"Ces contes ont été écrits pour les enfants âgés de quatre à soixante-quinze ans. Il va sans dire que par cet avis, je ne songe pas à décourager les lecteurs qui se flatteraient d'avoir un peu de plomb dans la tête. Au contraire, tout le monde est invité. Je ne veux que prévenir et émousser, dans la mesure du possible, les reproches que pourraient m'adresser, touchant les règles de la vraisemblance, certaines personnes raisonnables et bilieuses." Voici un extrait de la préface de ce livre, sorte d'avertissement au lecteur. Car ce livre peut se lire à divers degrés. Ainsi, je l'ai découvert lorsque j'étais à l'école primaire, en CE1 ou CE2. Je me souviens que lorsque l'institutrice prenait le bouquin, c'était alors une bonne heure de lecture. Oui, j'ai eu la chance d'avoir une enseignante qui nous lisait, plusieurs fois par semaine, en fin de journée, lorsque les cerveaux étaient fatigués, des livres passionnants. Et j'attendais ce moment avec impatience. Les histoires de Delphine et Marinette me transportaient dans un autre monde...

Avec du recul, et avec quelques années de plus (oh, juste quelques-unes, hein !), je me rends compte que finalement, les histoires des deux fillettes ne sont pas si idylliques que ça. Leurs parents sont des monstres qui maltraitent les animaux et considèrent que leur progéniture n'est pas des plus intelligentes. On comprend dès lors que l'innocence de Delphine et Marinette leur permet de pouvoir converser avec leurs animaux, êtres également purs et innocents au demeurant. D'ailleurs, c'est toujours auprès d'eux qu'elles trouveront du réconfort.

Lorsqu'on réfléchit sur les contes et les récits imaginaires s'adressant aux enfants, il en ressort souvent le même constat : les contes ne sont pas vraiment faits pour les enfants. Ils sont plus là pour éduquer les parents et leur faire passer un message. Comment ? Les auteurs avaient tout compris : n'est-ce pas, le plus souvent, les parents qui lisent les contes aux enfants ?

Bien évidemment, il ne faudra pas se méprendre sur le titre. le chat Alphonse n'est pas, à proprement parler, le personnage principal. Ceci dit, il ouvre les contes puisqu'on découvre d'entrée de jeu qu'il est un allié de poids pour les fillettes : ces dernières, pour avoir cassé un plat, se retrouvent punies et doivent aller chez leur affreuse tante. Alphonse, qui a le pouvoir de faire pleuvoir en se passant la patte derrière l'oreille déclenche un véritable déluge afin que les petites puissent rester chez elles. Mais toute cette eau abîme les récoltes et les parents veulent le noyer. Il sera sauvé par tous les animaux de la ferme. Ainsi débutent les contes. Je vous laisse à présent les découvrir et passer un bon moment en leur compagnie.
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Je relis régulièrement "les contes du chat perché". J'y prends toujours un grand plaisir.
C'est un livre, je crois, auprès duquel, l'âge venant, on aime à venir se rassurer.
Périodiquement, je me replonge dans l'oeuvre de Marcel Aymé.
J'ai naturellement une prédilection pour son théâtre dont certaines pièces, mais pas toutes, sont de véritables chefs-d'oeuvre.
Ma préférée est sans conteste : "Lucienne et le boucher".
Parfois je vais piocher, "du côté de chez Marianne", quelques unes de ses si fines et si plaisantes chroniques.
Le fleuron de ma bibliothèque est un recueil de nouvelles intitulé "en arrière".
Il a été dédicacé, en 1950, à Émile Juvin, avec un cordial souvenir de Marcel Aymé.
Lorsque l'envie me prend de me replonger dans un de ses romans, je me fais violence pour ne pas choisir, une fois de plus, "la table aux crevés", "Gustalin" ou "Uranus".
Il m'a fallu un jour, pour accéder à ce fameux texte maudit , "les jumeaux du diable", casser ma tirelire et acheter un de ces précieux volumes de la "Pleïade".
Mais que l'on se plonge le plus profondément dans l'oeuvre de Marcel Aymé, qu'on la parcourt dans tous les sens, de toutes les manières, on part forcément des contes pour inéluctablement y revenir.
J'ai longtemps trouvé ça injuste et réducteur.
Comme j'avais tort.
"Les contes du chat perché" est un de ces livre rares qui accompagne une vie entière.
Il a été mille et mille fois disséqué, découpé, exposé, expliqué et défini.
Là-haut, la clope au bec et le sourire aux lèvres, Marcel Aymé ne dit rien.
"On n'a pas le droit de décourager les bonnes volontés !"
Peut-être que, fait de ressenti, il s'interprète d'autant de façons différentes qu'il peut se lire.
Ce bestiaire fantaisiste, présenté par Marinette, la plus blonde et par Delphine, qui a les plus grands yeux, m'appartient.
J'en jurerai.
Il a surgi de la ferme de Tante Nini, à Flottemanville au pont-Cochon.
Même l'éléphant, puisqu'il n'est que la petite poule blanche qui s'est transformée, même la panthère puisqu'elle est une amie, ramenée de voyage, par le canard.
Instinctivement on aime "les contes du chat perché"....
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Aujourd'hui c'est mercredi et mercredi, c'est... ?
« Les histoires à Berni ! » de nouveau, les enfants ont crié à l'unisson ces quelques mots comme un cri de ralliement.
J'ai prévu aujourd'hui de parler d'une histoire qui convoque les animaux. La petite Sylvie nous avait indiqué la dernière fois qu'elle voulait absolument apporter ce mercredi-ci son animal de compagnie. C'était sa manière à elle de bien s'intégrer dans la classe et c'était donc l'occasion rêvée d'accepter son initiative. La maîtresse d'école Sandrine, a tout de même vérifié auprès de l'inspection d'Académie si cela ne posait pas de problème.
La petite Sylvie s'est avancée au milieu du cercle en présentant un petit sac en jute qu'elle a commencé à dénouer. « Salut les poteaux, aujourd'hui vous allez faire connaissance avec mon meilleur ami Kama, c'est un élaphe.»
Le petit Pat a alors fait un geste ample avec son bras qui ondulait depuis le milieu de son visage, semblant étirer une sorte de trompe invisible. La petite Chrystèle a haussé les épaules d'un air moqueur à son encontre : « Mais non, ce n'est pas un éléphant dans un si petit sac. Oh, celui-là, je vous dis ! »
Le sac s'est ouvert et nous avons vu la tête d'un reptile surgir avec sa langue pointue. Les élèves ont été impressionnés. Certains ont même reculé d'effroi en faisant des petits cris d'affolement. La petite Fanny s'est mise à pleurer, tandis que Sandrine la maîtresse s'empressait d'aller la réconforter.
« Faut pas avoir peur, les poteaux, il est pas méchant, mon Kama ». La petite Sylvie a tendu sa main et le reptile est venu s'enrouler sur son bras, comme autour d'une branche. « Il est même très affectueux ».
Le caméléon du petit Paul n'en revenait pas. Observant la scène, ses yeux sortaient de ses orbites et il a pris aussitôt la couleur de l'amitié.
« Est-ce qu'il mange du chocolat ? a demandé la petite Doriane, curieuse.
- Et pourquoi pas du nougat de Montélimar ou du caviar, tant qu'à faire ?! s'écria la petite Sylvie d'un petit rire espiègle. Mais non, il mange des souris et des oiseaux, comme tous les élaphes. »
Il y a eu des exclamations offusquées dans l'assistance, de dégoût presque. « Eh bien ! fit la petite Sylvie comme pour banaliser la chose, c'est comme les chats, non ? »
Tandis que Kama allait se blottir sur les épaules de la petite Sylvie, j'en ai profité pour avancer vers mon auditoire.
« Les enfants, tout ceci tombe à pic, aujourd'hui, je vais vous faire découvrir un livre de contes où beaucoup de personnages sont des animaux et que j'ai découvert quand j'étais en classe de CE2, j'avais donc votre âge. En ce temps-là le jour de repos n'était d'ailleurs pas le mercredi mais le jeudi. »
- Oh ! C'était il y a très longtemps alors, soupira la petite Anne-Sophie.
Je ne sais pas pourquoi, j'ai senti que tous les enfants brusquement me regardaient de la tête aux pieds comme si j'étais devenu un vieux Monsieur, alors que non, vous le savez bien, ce n'est pas vrai, hein ... ?
J'ai montré le livre aux enfants. Un vieux livre de poche tout froissé.
« Oh ! Il n'y a pas d'images dans ton livre, fit le petit Jean-Michel d'une moue un peu dépitée.
- Les images, nous allons les inventer tous ensemble en découvrant une première histoire.
Le livre s'appelle Les contes du chat perché. Celui qui a écrit ce recueil de contes s'appelle Marcel Aymé.
« Pourquoi le titre du livre s'appelle comme ça ? a demandé la petite Isa d'un air étonné.
Tout d'abord, le premier personnage principal de ce livre est un chat. Mais vous savez, chat perché c'est aussi un jeu qu'on joue dans la cour de récréation. »
Tous les enfants m'ont regardé comme si j'étais devenu un extra-terrestre.
La maîtresse d'école, avec bienveillance, a cru bon alors de préciser : « Tu sais, Bernard, les enfants ne jouent plus à ce jeu de nos jours. » Décidément, si Sandrine s'en mêlait elle aussi...
J'ai vite changé de sujet : « Un jour, l'auteur de ces contes a dit qu'il avait écrit ces histoires pour les enfants âgés de quatre à soixante-quinze ans.
- Des enfants de soixante-quinze ans ! pouffa la petite Francine morte de rire. C'est mon papi qui va être content d'apprendre ça. »
J'ai poursuivi.
« Tous ces contes mettent en scène deux soeurs, Delphine et Marinette. Leurs parents tiennent une ferme où il y a plein d'animaux. Et ces animaux parlent dans les contes. Delphine est la plus grande et Marinette la plus blonde. Ces deux soeurs sont inséparables l'une de l'autre, elles sont complices pour faire parfois les quatre cents coups... »
Alors, on a vu la petite Doriane et la petite Nico sortir du rang, se dandiner, se taper dans les mains sous les acclamations de leurs petits camarades. C'était comme un numéro de duettistes mille fois rodés sous les projecteurs.
J'ai rajouté : « Marinette est quand même moins sage que Delphine ». Là, tous les enfants ont ri et j'ai bien senti qu'il serait très dur de départager les deux petites complices qui se trémoussaient devant moi.
Je vais vous raconter la première histoire, elle met en scène le chat de la ferme, Alphonse.
Après avoir fait tomber un vase auquel leurs parents tenaient beaucoup, Delphine et Marinette doivent, en guise de punition, rendre visite à l'affreuse tante Mélina, une horrible femme ne pensant qu'à rendre la vie dure aux deux petites. En plus, tante Mélina pique la peau douce des petites filles, car il faut bien vous l'avouer, la tante Mélina a un peu de barbe sous le menton.
Delphine a alors une idée pour se sortir de ce mauvais pas : le chat de la ferme, Alphonse, doit passer sa patte derrière son oreille pour faire pleuvoir le lendemain. »
J'ai alors fait une petite pause pour interpeler les élèves. « N'avez-vous jamais remarqué que lorsqu'il va pleuvoir, les chats passent un de leur patte de devant derrière l'oreille lorsqu'ils font leur toilette. C'est un signe qui ne trompe pas. Mais ici, ce qui est drôle dans cette histoire, c'est justement le contraire : c'est le chat qui volontairement, à la demande des deux petites soeurs espiègles, passe sa patte derrière son oreille afin qu'il pleuve.
Hélas, les parents, loin d'oublier la punition, ne voient la pluie que comme un léger retard et Alphonse n'a d'autre choix que de continuer sans cesse et sans cesse pendant plusieurs jours. Les parents finissent par comprendre que leur chat n'est pas pour rien dans ce déluge continu qui les empêche de se rendre aux champs, et ils décident de se débarrasser du gênant félin... »
J'ai alors vu devant moi des visages emplis brusquement de tristesse et d'effroi. Même le caméléon du petit Paul, même l'élaphe de la petite Sylvie, semblaient figés dans un silence glacial.
Heureusement l'histoire finit bien, grâce aussi d'ailleurs à la complicité des autres animaux de la ferme.
Je sentis un grand soupir de soulagement dans l'assistance et je conclus par la dernière phrase du conte :
« La semaine suivante, il y eut encore un heureux événement. Ayant eu l'idée de raser sa barbe, la tante Mélina avait trouvé sans peine à se marier et s'en allait habiter avec son nouvel époux à mille kilomètres de chez les petites. »
Les enfants ont applaudi à l'idée de cette nouvelle réjouissante.
Tous ces contes mettent en scène la vie pleine de rebondissements, d'ironie et parfois de cruauté, au sein d'une ferme. Les parents de Delphine et Marinette sont rudes avec les animaux, n'ont aucune pitié, parfois les battent. Et puis ils les mangent ou ils les vendent. La plus grande différence entre ces parents et leurs deux filles est bel et bien leur relation avec les bêtes : les fillettes voient chacun d'entre eux comme des amis et les défendent régulièrement contre leurs parents. C'est source d'histoires parfois cocasses, parfois tristes...
Je suis sûr que certains lecteurs d'entre nous se souviennent de ces contes qui prennent avec malice et ironie le contrepied des contes classiques. Y a-t-il une morale dans ces textes ? Ce n'était pas forcément le but avoué de Marcel Aymé. Cependant l'innocence des deux fillettes jouant de complicité avec les animaux, y trouvant du réconfort et une source d'inspiration face à un monde d'adultes indifférents et cruels, est une idée qui me séduit.
Pour conclure la matinée, j'ai ajouté : « il y a même dans ce livre une histoire avec un loup qui sort des sentiers battus. C'est d'ailleurs ce conte qui m'a été raconté sur les bancs de l'école, à votre âge.
- J'espère qu'il est gentil ton loup dans cette histoire, camarade », dit la petite Gaëlle en scrutant mon visage, le visage grave.
- Disons qu'il y met beaucoup de volonté pour l'être ou le devenir.
- Moi je connais une histoire avec le loup en slip », a dit la petite Domm. Évidemment, sa remarque a emporté la classe dans un grand éclat de rire.
Alors, la petite Anna a demandé si la fois prochaine elle pouvait apporter en classe son gecko. Je me suis alors éclipsé sur la pointe des pieds tandis que plein de mains étaient tendues vers Sandrine la maîtresse d'école, tous ces enfants suppliant celle-ci de répondre favorablement aux sollicitations de chacun d'entre eux, car chacun avait un animal de compagnie, que dis-je ! un ami qui méritait, autant que Kama l'élaphe de la petite Sylvie, d'être mis au-devant de la scène...
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Bon pour résumer la situation et pour gagner du temps je vais la faire simple :
Les contes du chat perché, on pourrait intégralement les recopier dans la rubrique « citations ».
C'est TELLEMENT drôle, adorable, fin, délicieux, que chaque ligne est un petit bonbon ( celui que vous aimiez tant quand vous étiez petits).
Ce sont les statues de Delphine et de Marinette qui devraient être dans nos rue à la place du Général Machin ou de l'Amiral … c'est quoi son nom déjà ?

J'ai beaucoup aimé Les Contes de chat perché, BEAUCOUP ! Mes enfants aussi.
À qui le tour ?
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Deux fillettes, Delphine et Mariette,  habitent une ferme avec leurs très rudes parents. Grâce à la . compagnie d'animaux qui parlent, qui rient, qui pleurent et font des projets, les filles ne sont plus seules ; les animaux deviennent  leurs amis.
Certains sont des personnages inoubliables : on se rappelle le chat se passant la patte derrière l'oreille pour qu'il pleuve, on se rappelle un personnage drôlissime, le cochon qui se déguise en détective chaque fois qu'il y a un mystère à résoudre et qui lance "Avec une fausse barbe, je passe inaperçu n'importe où."
On se rappelle le canard qui part en voyage et revient accompagné ...
Bref, on n'oublie rien de ces contes intemporels.

Mais si les animaux souhaitent devenir humains,  il arrive aussi aux filles de vouloir devenir animal.

La métamorphose est un thème fondamental dans l'oeuvre de Marcel Aymé, thème qu'il a magnifiquement traité dans le Passe-Muraille.

C'est le désir que nous avons tous de devenir autres.
Chez Marcel Aymé,  la métamorphose est un miracle éphémère qui fait rêver ses lecteurs, mais qu'il fait toujours retomber,  avec grâce. ..sur leurs quatre pattes !

Voici donc un ouvrage qui nous plonge au coeur de la basse - cour et de la paysannerie de la première  moitié du XXEME siècle pour des transformations étonnantes, très détonnantes.
Lien : http://justelire.fr/les-cont..
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Je me rappelle avoir dévoré plusieurs fois "Les Contes du Chat Perché" alors que j'étais petite fille. J'empruntais alors l'exemplaire de mes cousins, plus âgés que moi, une édition folio poche fatiguée par des dizaines de lectures et je me réfugiai auprès de Delphine et Marinette, à la ferme qui ressemblait beaucoup à celle de mon oncle et de ma tante, ma deuxième maison, mon foyer de petite fille dont les parents faisaient des horaires de fous.
Etrangement et malgré mon gout pour ces contes, je n'ai plus relu l'ouvrage de Marcel Aymé durant de longues années... Pourtant, j'en gardai et j'en garde encore un souvenir ému et, concernant certains contes, précis.

Récemment m'a saisie l'envie irrépressible de redécouvrir "Les Contes du Chat Perché" et j'ai poussé le vice jusqu'à me procurer d'occasion la même édition que celle qui se trouve encore à P. Plusieurs choses, je crois, dans ce désir de relecture... L'envie de renouer un peu avec l'enfance d'une part et d'autre part, celle de découvrir des textes à travers un regard et une conscience d'adulte. On sait bien que contes et nouvelles ont souvent plusieurs niveaux de lecture et Marcel Aymé l'écrit lui-même en préface, que ces contes sont autant pour les petits que pour les grands... Par ailleurs, je suis toujours friande de double lecture... Outre que c'est un exercice intellectuelle qui me passionne, cela me donne aussi toujours l'impression de découvrir des secrets bien gardés.

La couverture, représentant un fourneau sur lequel se perche un chat dans un style faussement naïf, a fait naître en moi quelques réminiscences douces-amères. C'est ainsi que je suis retournée chez Marcel Aymé. Et là, surprise des surprises! Je me suis rendue compte que malgré plusieurs lectures enfantines de l'ouvrage, il ne m'en restait pas tant que de souvenirs que ça... Certes, certains contes étaient et sont restés très ancrés en moi ("Les Boeufs", "Les Pots de Peinture", "Le Canard et la Panthère") mais pour certains, je ne m'en souvenais absolument pas ("Le Problème", "Le Petit Coq Noir", "Le Mouton" notamment...). Quant aux autres, ils me revenaient au fur et à mesure de la lecture et j'y entrais comme sur un chemin de brume ("Le chien", "L'Eléphant", "Le Cygne", "L'Ane et le Cheval"...).

"Les Contes du Chat Perché", ce sont les aventures de deux petites filles, deux petites blondinettes (quoique l'une soit plus blonde que l'autre) qui grandissent dans la ferme de leurs parents auprès d'une foule d'animaux anthropomorphes, aventures mâtinées d'un fantastique tantôt très doux, tantôt parées d'une inquiétante étrangeté, d'une bizarrerie loufoque et un effrayante.

Ce qui me frappe au terme de ma lecture, c'est toute l'ambiguïté de ces contes qui oscillent entre fantaisie enfantine et amertume adulte. Cela en fait une lecture passionnante qui m'a autant émerveillée que questionnée, qui a touché la petite fille en moi en touchant aussi l'adulte que je suis. Etrange...

Du côté de la fantaisie, il y a d'abord l'aspect vaguement désuet de ces contes qui nous parlent d'un temps révolu où l'on jouait à des jeux qui semblent bien exotiques de nos jours: les barres, la patate chaude, le cadre d'une ferme colorée qui ressemble à celles des plus beaux albums pour enfants. Il y a ensuite la création d'un monde réservé aux enfants et raconté à leur hauteur. Delphine et Marinette vont à l'école, jouent, obtiennent (ou pas!) de bons points à l'école. Quant aux parents qui paraissent bien cruels la plupart du temps, ils sont présentés comme une entité indifférencié et à peine esquissés la plupart du temps. Enfin et surtout, il y a tous ces animaux anthropomorphes, caractériels, bavards et très, très attachants. Complices de Delphine et Marinette, compagnons de jeux inlassables, ils sont toujours de leurs côtés et il y a une vraie tendresse, une vraie humanité dans la construction de ces personnages... Dans "Les Contes du Chat Perché", les canards sont fichtrement intelligents, les ânes profondément émouvants et les cochons à mourir de rire... Tous sont en tout cas bien plus émouvants et sympathiques que les parents qui tout à leur réalité un peu triste ne pense qu'à faire travailler leurs ouailles avant de les dévorer. C'est un peu la victoire de l'enfance contre les adultes d'ailleurs, cet aspect du roman... Les animaux y sont associés aux jeux, aux rêves et aux victoires enfantines... Il y a du J.M. Barrie chez Aymé qui joue de son pouvoir de romancier pour nous offrir un monde pareil où la tendresse et la drôlerie se mettent au service d'aventures aussi rocambolesques que celle d'une petite poule blanche se rêvant éléphant, d'un cochon jouant à l'inspecteur Columbo...
Je crois bien que j'ai retrouvé en relisant "Les Contes du Chat Perché" le plaisir de ces lectures qui donnent à voir un monde joyeux, riant et fantaisiste; un monde rassurant dans lequel les animaux se font les amis des enfants, à la manière de "La Famille Delajungle" en mille fois mieux et en premier lieu parce que Delphine et Marinette s'aiment bien plus qu'Elisa et Debbie, un peu à la manière de Paul et Sophie.

Pour autant, j'ai trente-cinq ans et mes yeux d'adulte ont apporté une toute nouvelle à ma lecture, une dimension venue se superposer à la première.
Que d'ironie, déjà, dans la plume de l'auteur notamment à la fin du "Petit Coq Noir", ou dans les propos du canard dans "La patte du chat"! C'est noir, c'est sombre, c'est caustique... Et c'est très bon!
Au-delà de l'ironie, les contes sont si ambigus parfois: la panthère et le cochon avec cette révélation finale... Difficile aussi de ne pas voir dans le conte du Loup une symbolique un peu dérangeante... Et que dire des boeufs que l'instruction mène à leur perte? Des "Vaches" qui pourraient dénoncer certaines idées nauséabondes propres aux années 40 (et peut-être bien en 2023, par les temps et les lois qui courent hein...)? du petit coq noir qui pâtit des idéaux révolutionnaires? de là à écrire qu'Aymé dénonce les mirages des institutions républicaines, il n'y a qu'un pas et je ne suis pas loin d'avoir envie de le franchir... mais je ne suis pas assez connaisseuse du bonhomme pour me faire une opinion véritablement construite. Il n'empêche que ces contes sont bien étranges et presque subversifs, qu'ils donnent à réfléchir (et j'ai adoré ça!)... Il y a aussi la cruauté de "L''âne et le cheval" dans lequel les fillettes finissent par devenir ce dont elles ont la forme et qui ne sont pas mieux traités que les autres bêtes par leurs parents... Il est kafkaïen ce récit et semble affirmer que celui qui semble inférieur est toujours traité comme telle... Pessimiste, effrayant et fataliste: la nature enferme et l'on n'y peut rien changer. Comme le loup qui ne peut pas ne pas désirer manger les fillettes malgré la tendresse qu'il a pour elles, comme les parents qui ne peuvent pas ne pas traiter leurs filles comme les animaux dont elles ont pris l'aspect...

Voilà tout ce qu'ont été pour moi "Les Contes du Chat Perché": un incessant va et vient entre l'enfance et mon triste adultisme, un émerveillement presque aussi constant que mes questionnements.
J'y ai retrouvé le plaisir fou des lectures innocentes et pleines de joie et celui de celles qui interrogent et rendent plus riches...
Pas de doute à avoir donc: "Les Contes du Chat Perché", de sept à soixante-dix sept ans.





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Marcel Aymé a écrit ces contes en 1939 marquant une première incursion dans la littérature pour enfants qui sera suivie par une seconde avec "le Passe-Muraille" en 1943. Pendant 17 histoires, l'auteur nous narre les histoires de Delphine et Marinette, deux petites filles habitant dans une ferme au milieu de tous les animaux. Ces animaux ont une particularité c'est qu'ils parlent et qu'ils sont les amis des deux petites filles. Elles vont avoir besoin de leurs aides car elles vont devoir faire face a des situations difficiles et a leurs parents dont le caractère est intransigeant. Autant dire que le portrait des parents n'est pas très flatteur : ils passent leur temps, en dehors de leurs travaux aux champs, a punir Delphine et Marinette et a battre leurs animaux. Des personnages pas sympathiques qui ont beaucoup moins d'humanité que beaucoup des animaux de la ferme. Tout au long de ces contes on suit les tribulations des deux fillettes et leurs aventures avec différents animaux puisque a chaque conte correspond un nouvel animal. Des situations qui souvent semblent inextricables mais qui grâce a l'intelligence des animaux trouvent une conclusion positive. A la lecture de ces histoires, on rit souvent et c'est avec un grand plaisir que l'on se plonge dans la découverte des nouveaux amis de Delphine et Marinette.

Un livre et un auteur a redécouvrir .
Lien : http://desgoutsetdeslivres.o..
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Delphine et Marinnette sont deux soeurs qui habitent dans une ferme. Leurs parents sont assez sévères. Elles n'arrêtent pas de faire des bêtises avec les animaux de la ferme.

Un livre très drôle, avec plusieurs petites histoires qui se suivent, toutes plus drôles l'une que l'autre.
Les deux fillettes nous font bien rire avec leurs animaux !!
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- Et si les animaux parlaient, hein, qu'est-ce qu'ils diraient ?
- Et si… et si… Et si ma tante en avait on l'appellerait mon oncle ! Et si mon oncle en était on l'appellerait ma tante ! Allons donc, les animaux ne parlent pas : les chats miaulent, les chiens aboient (comme les ciseaux), les moutons bêlent (comme Isa) et les lions rugissent (sous l'émotion), mais non, les animaux ne parlent pas ! Mon cher vous êtes dans la vraie vie, pas dans les contes de fée !
Pas tout à fait un conte de fée, mais de féerie, sans nul doute, puisque nous sommes chez Marcel Aymé. Il y a mille et une sortes de fantastique, celui de Marcel Aymé est un des plus attachants : c'est la vie de tous les jours, à peine décalée : c'est un type qui un matin s'aperçoit qu'il peut traverser les murs, c'en est un autre qui a une auréole derrière la tête, c'en est un autre, nain de naissance, qui se met à grandir… et ce sont les animaux de la ferme qui se mettent à jacasser comme vous et moi.
Vous connaissez l'histoire, on a dû vous la raconter à l'école, ou vous l'avez lue quand vous étiez plus jeunes, et comme vous aimiez ça, vous l'avez lue à vos enfants : Delphine et Marinette sont deux fillettes, pas nées de la dernière pluie, qui adorent bavarder avec les animaux, qui le leur rendent bien. le chat (c'est lui le chat perché), qui répond au nom d'Alphonse (quand il daigne répondre) est le fil conducteur des histoires, narrateur, témoin ou acteur. Au total dix-sept contes qui mettent en scène toute une ménagerie (chat, chien, loup, vaches, moutons, coqs et poules, canard, oies, cochon et même éléphant), pleine de vie et de fantaisie, solidaire des fillettes devant la rudesse (relative) de leurs parents, et la bêtise des adultes en général.
Dans sa préface, Marcel Aymé déclare : « Ces contes ont été écrits pour les enfants âgés de quatre à soixante-quinze ans ». C'est positivement scandaleux. J'admets qu'à moins de quatre ans on ne peut pas saisir toutes les subtilités du texte, à la rigueur, je veux bien. Mais interdire les « Contes du chat perché » aux plus de soixante-quinze ans est tout à fait abusif, et avoisine la gérontophobie. Déjà que Hergé avait fixé pour Tintin une limite de soixante-dix-sept ans ! Alors maintenant les vieux n'ont plus le droit d'être jeunes ! Mais je ne suis pas inquiet, je suis certain que, le soir, sous leurs draps, ils liront en cachette ces contes ignominieusement interdits.
Et ils feront bien, car c'est un véritable retour à l'enfance, à l'innocence, à l'époque bénie si bien décrite dans sa préface par François Morel : « cette époque si merveilleuse, si surprenante, elle se réinvente chaque fois que des enfants s'enthousiasment en commençant leurs phrases par « on dirait que je serais capitaine, cosmonaute, cheval de cirque… On dirait que je serais la mer, les étoiles, un nuage au loin… »
Et le plus fin de nos humoristes (de très loin), l'un des plus drôles et des plus attachants, de conclure : « Il suffit d'ouvrir un livre de Marcel Aymé pour se retrouver illico plongé dans ce royaume où la fantaisie et l'imagination sont souveraines. Ce continent infini dans lequel tous les rêves sont possibles, toutes les libertés à portée de la main et qui, si je ne me trompe pas, s'appelle la littérature ».
Tout est dit, non ?
Pour vos minots, vos drôles, vos maynats, vos enfants, quoi, usez et abusez des « Contes du chat perché » et enchaînez avec les « Contes de la rue Broca » de Pierre Gripari, l'esprit n'en est pas très différent.


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Lire, relire "Les contes du chat perché"… et s'offrir un retour vers l'enfance. A l'époque de ma première visite, j'avais quelques comptes à régler avec la lecture... La lecture forcée ne pouvait donc facilement me convaincre. Pourtant, j'ai eu envie de me replonger dedans... plus de cinquante ans après un premier passage en force. le second fut tout en douceur. J'ai aimé ces animaux (plus humains que les humains) fantaisistes et improbables (c'est bien ce que je disais...) On plonge dans l'impossible réel, dans l'absurde qui se justifie, dans la médiocrité d'une vie sublimée par l'imagination !

Les contes du chat perché, une aventure pour petits et grands... plus belle encore pour les grands qui acceptent l'idée de rêver !
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