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EAN : 978B0018IXKM8
(30/11/-1)
3.6/5   5 notes
Résumé :
Son front de jour en jour plus proche de l'argile,
Il est des temps où l'homme, endurci, ne sent rien
Que le choc des désirs brutaux contre les siens.
Il marche et devant lui les spectacles du monde
Passent sans l'enrichir d'une image féconde.
Tout à coup l'amour vient, lumineux, triomphal,
Et l'homme qu'attirait un paradis banal,
Le dédaigne et se vêt de nouvelle espérance.
Des faits accoutumés changent de rés... >Voir plus
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Émotions raisonnées

L’or


Je suis l’or, simulacre étrange de la vie,
Mode ultime de l’énergie
Que l’homme, prolongeant l’élan primordial,
Conçut pour insuffler une âme subalterne
À la matière qu’il gouverne,
À ses créations de fibre et de métal.

Je circule parmi les rêves
Et ceux que je touche se lèvent
Matérialisés en fantasques moissons
D’œuvres d’art, de maisons,
De vin clair qui chatoie,
D’instruments et de pain, de bijoux et de soie.

Je suis un rayon de soleil
Qui paraît et métamorphose,
Autour de l’homme, toutes choses :
Un amas de charbon en un boudoir vermeil,
Une source chantante en écheveaux de laine,
Une plaque de bronze en essaim de phalènes.

Je suis une vibration
Qui répercute au loin l’effort de la matière.
Une machine impose au fer des torsions,
La masse tombe et fend la pierre,
Et par moi, quelque part, s’allongeront des bras,
Des outils couperont, la vapeur luttera.

Je suis une idée en voyage
Qui se transforme en acte et de lui se dégage.
Après m’être incarné dans le cuir ou le plomb
J’en sors pour quelque randonnée.
Je suis un mouvement né d’un autre, fécond
Dans le rythme éternel des forces alternées.

J’accours où voltige l’espoir,
Où les dieux ont juré de capter l’eau dansante
Et d’enchaîner la flamme au fond des antres noirs.
Je brille et des cités s’étalent, débordantes ;
Il rôde dans les champs de grands trains annelés,
Les grains percent le sol, des rocs sont descellés.

Subitement les murs fléchissent, les fenêtres
Semblent des orbites de morts.
On se demande avec angoisse : Où donc est l’or ?
Je suis caché dans l’ombre, inutile à mes maîtres.
Leur foi seule était mon soutien,
Ils ont tremblé, je ne suis rien.

pp.41-43
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Réflexe


Toi, Mal, dont l’homme a fait son fardeau périlleux
Pour ne pas condamner l’ouvrage de ses Dieux,
Si tu n’allumais pas les convoitises rouges
Dans les mille regards qui sur les choses bougent ;
Si tu n’assaillais pas la lande et la cité,
Hérissé d’égoïsme et de fatalité,
Comment l’homme irait-il, aveugle, sans indice,
Par delà la nature adorer la justice ?

Toi, Souffrance, qui prends l’être insensible et lourd
De son sommeil dans le néant depuis toujours,
Le mords, ouvres ses yeux, exploses dans son âme
Et libères l’idée au contact de la flamme,
Sans toi comment sentir le frisson souverain
D’être une conscience en l’éternel dessein ?

Toi, Mal, qui t’assouvis en créant la souffrance,
Toi, Souffrance, où le mal médite et se condense,
Par vous l’humanité, loin du repos charmeur,
Dépasse son désir d’un ciel inférieur
Et s’élève, parmi les éclairs et la cendre,
Jusqu’à la dignité suprême de comprendre.

p.36-37
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Lettres


Simples ou parées, quelques qu’elles soient.
Les lettres que nous envoyons aux femmes,
Les lettres de désir et d’amour et d’espoir,
C’est notre moi qui s’évade,
Ce sont des êtres
Qui, de toutes leurs cellules, les mots,
Vont frapper les nerfs, le cœur, le cerveau,
Créer de la vie étrange, inattendue.
Telle qui fut écrite mollement
Nous apporte un enchantement,
Une réponse qui nous arrive
Ainsi qu’un jeune dieu né d’une source vive,
Et nous restons émerveillés,
Nous demandant : Quoi de nous,
Quoi donc s’est transfiguré ?
Telle autre où notre pitié cherchait,
D’une main délicate, à panser une plaie,
Déchaîne l’orgueil qui nous cravache.
Nous avions dit : Amour.
Pourquoi donc, en retour,
Cette lettre nous tourne en caricature,
En monstre fait de tous nos défauts,
De nos seuls défauts, de nos seules tares ?

Ces lettres que nous avons inspirées,
Quelles qu’elles soient, simples ou parées,
Ce sont nos enfants
Où nous cherchons fiévreusement
Des marques d’hérédité.
Nous cherchons dans leurs traits les nôtres,
Comment cette semence, cette idée
S’est ainsi réincarnée,
Nous revient étrangère, pourtant reconnaissable.
Nous cherchons pourquoi, pourquoi
Telle lettre que nous ouvrons
Promet d’abord de riches floraisons
Puis se dilue et traîne, lymphatique ;
Pourquoi telle autre où nous souhaitâmes
Contempler, rajeunie, notre force,
Nous renvoie une image affaiblie et douteuse,
Comme fait un étang brouillé.

Quelles qu’elles soient, quelles qu’elles soient
Les lettres que nous recevons des femmes,
Lettres dont la froideur nous incise,
Ou qui sont à l’esprit d’adorables hantises ;
Quelles qu’elles soient, quelles qu’elles soient
Les lettres que nous envoyons aux femmes,
Les lettres de désir et d’amour et d’espoir,
Qui vont frapper les nerfs, le cœur et le cerveau,
Ce sont des êtres tendus éperdument
De tous leurs mots, de tout leur sang,
À créer de la vie étrange insoupçonnée,
D’autres lettres, d’autres êtres.

Quelles qu’elles soient, simples ou parées,
Nos lettres sont notre moi qui s’évade,
Celles des femmes sont nos enfants.

p.63-64-65-66
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Vigile

Ô les mots qu’on adresse à la femme attirante,
Les mots qu’on veut badins, spirituels, charmeurs ;
Mots voilés et pensifs, échappés ou qu’on tente !
— Prélude où le désir se cache dans les fleurs.

Ô les regards soudainement pleins de lumière,
Où se révèle un cœur ouvert et confiant,
Regards que l’on dirait de limpides prières !
Respectueux regards — manège inconscient.

Ô les saintes pudeurs devant la bien-aimée,
Et, dans les songes fous, promptitude à bannir
Toute image lascive auprès d’elle formée !
— Épargne ingénument faite pour l’avenir.

Visions d’un bonheur imprécis et sans fièvres,
Chaste frémissement quand se joignent les mains
Et que l’on croit baiser une âme sur des lèvres !
— Mirage nécessaire à l’idéal humain.

Les yeux mi-clos, la chair se prépare au festin.
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Déclaration

Femme, sitôt que ton regard
Eut transpercé mon existence,
J'ai renié vingt espérances,
J'ai brisé, d'un geste hagard,
Mes dieux, mes amitiés anciennes,
Toutes les lois, toutes les chaînes,
Et du passé fait un brouillard.

J'ai purifié de scories
Mes habitudes et mes goûts ;
J'ai précipité dans l'égout
D'étourdissantes jongleries ;
J'ai vaincu l'effroi de la mort,
Je me suis voulu libre et fort,
Beau comme un prince de féerie.

J'ai franchi les rires narquois,
Subi des faces abhorrées,
Livré mes biens à la curée
Afin de m'approcher de toi.
Devant moi hurlaient les menaces,
J'ai méprisé leurs cris voraces
Et j'ai marché, marché tout droit.

J'ai découvert, pour mon offrande,
Un monde fertile en plaisirs ;
J'ai pesé tes moindres désirs,
Je sais où vont les jeunes bandes,
Je connais théâtres et bals ;
J'ai dans les mains un carnaval,
Dans le cœur, ce que tu demandes.

Pour la rencontre, j'ai prévu
Quand je pourrais quitter l'ouvrage,
La route à suivre, un temps d'orage,
Et jusqu'au perfide impromptu.
J'ai tremblé que point ne te plaisent
Les tapis, les miroirs, les chaises.
J'ai tout préparé, j'ai tout vu.

J'ai mesuré mon art de plaire,
Mes faiblesses et ma fierté,
Les mots, l'accent à leur prêter ;
J'ai calculé d'être sincère,
Triste ou gai, confiant, rêveur.
Je me suis paré de pudeur,
De force et de grâce légère.

Et me voici, prends-moi, je viens
Frémissant, comme au sacrifice,
T'offrir, à toi l'inspiratrice,
Mon être affamé de liens,
Mon être entier qui te réclame.
Donne tes mains, donne ton âme,
Tes yeux, tes lèvres... Je suis tien.
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