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sur 636 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Georges Bernanos - Journal d'un curé de campagne - 1936 : de quoi parlait-on dans ce livre ? du courage d'un jeune homme issu d'une famille pauvre se retrouvant à prêcher une vie qu'il n'a pas connue à une population pervertie depuis longtemps par les caprices de l'existence. Être curé dans les campagnes françaises au début du 20ème siècle c'était revivre chaque jour l'existence de Jésus Christ dans le désert, connaître la pauvreté, le dénuement et la solitude. L'ère des nababs à soutane était finie depuis que la république s'était séparée de l'église et alors que le sacerdoce ne permettait plus d'obtenir des postes richement dotés les séminaires ne formaient plus que des prêtres issus des classes les plus populaires. Lui souffrait dans son âme du mépris affiché envers sa personne par les notables du village, il souffrait aussi dans sa chair épuisée par un cancer qui exacerbait ses doutes et ses questionnements sur sa propre foi. On avait beau être un serviteur de dieu, on en était pas moins un homme avec ses peines et ses faiblesses. Ce journal explorait avec simplicité les tourments de celui qui avait en charge les consciences des autres alors que lui-même portait la sienne enfoncée dans son crâne comme la couronne d'épines sur la tête du christ. Les pages alignaient l'écriture décharnée d'un individu dévoué à son prochain touchant par sa bonté sans artifices et sa confiance juvénile en cet être humain qui pourtant lui montrait chaque jour toute sa bassesse. le propos n'était pas joyeux, il versait même souvent dans la mélancolie et la souffrance. Les petites victoires du quotidien (monter un club de sport pour la jeunesse, ramener la femme du châtelain mortifiée par les infidélités de son mari dans le giron de dieu) ne comblaient en rien les échecs subis pendant son ministère et l'incompréhension grandissante entre lui et une partie de ses paroissiens. Ce livre dévasté montrait que la religion vécue sans partage n'était qu'un vaste champ douloureusement stérile, une plaie ouverte à toutes les tentations. du désespoir à l'exaltation ce texte remuait profondément le lecteur qu'il soit croyant ou non...
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Bernanos pour Pâques. Certaines matines vont clocher.
Un jeune prêtre est nommé curé d'Ambricourt, patelin du nord de la France que Stéphane Bern ne devrait pas sélectionner pour le prochain « Plus beau village français » si on se fie à la lecture de ce roman. Les chasseurs de têtes et d'auréoles de l'époque avaient du mal à recruter depuis que la robe avait perdu de sa noblesse. le métier n'était plus très bien payé, le célibat grattait sérieusement sous la soutane et le télétravail n'existait même pas, même si déjà les réunions avec le patron étaient dématérialisées depuis presque deux mille ans. Priez pour moi.
Le curé s'installe dans sa nouvelle paroisse avec la naïveté et la maladresse des êtres trop purs. Côté comité d'accueil, il n'a pas droit à une parade en papamobile. Au mieux, c'est de l'indifférence. Au pire, un cocktail de sournoiseries dans le calice et l'hostie hostile. Cul sec et langues bien pendues. Son énergie et son enthousiasme se heurtent aux lâchetés de ses ouailles. La désillusion succède à l'exaltation, la foi en rempart, assiégée par la repentance. Il absorbe les fautes d'autrui et ne se pardonne jamais les siennes. Pour cela, il est toujours très pratique d'avoir un ami pratiquant.
Pour supporter son chemin de croix, il va rédiger son journal dans un cahier d'écolier, éclairé par un cierge, faute de budget pour les bougies parfumées. le titre du roman ne pouvait être plus éloquent. Un mécréant comme moi aurait choisi à tort « La grande désillusion » car, si rien n'est épargné au jeune curé, aucune épreuve n'ébranlera sa foi. le salut est un sacré sacerdoce. Faute de miracle et du ratio syndical de persécutions, difficile de faire du curé d'Ambricourt un saint, mais Georges Bernanos, très virulent contre l'évolution de son église qu'il accusait entre autres choses d'abandonner les pauvres, est parvenu à offrir la postérité à son vertueux personnage.
Chez le polémiste, la robe a perdu de sa noblesse et les souffrances du curé d'Ambricourt sont les siennes. Dans ses écrits, Bernanos s'indigne, provoque la polémique, proche en cela d'un Léon Bloy. Dans son roman, son prêtre, issu d'un milieu très pauvre n'a pas les armes pour lutter contre les injustices et son impuissance va dévorer sa santé.
Pas très rigolo tout cela. Mais tellement bien écrit et habité d'un souffle à décalotter un évêque, signature de Bernanos. Même si vous n'avez pas envie de vous plonger dans cette histoire, trichez un peu et lisez au moins la trentaine de pages (je sais que cela ne se fait pas mais je pense que cela ne mérite pas non plus confesse auprès du libraire chez qui vous squattez tous les samedis – une fessée tout au plus et trois chapitres d'un guide de développement personnel pour expier) qui décrit un extraordinaire moment de vérité entre le curé et la comtesse (page 175 à 206 de l'édition de poche). Chaque phrase est un chef d'oeuvre. Cet extrait m'a permis de fuguer de mon prosaïsme maladif pour un peu de spiritualité. Cela ne m'a pas fait de mal.
Je n'ai pas vu le film de Bresson mais les mots de Georges Bernanos se passent très bien d'images.
Ma foi, je n'ai pas arrangé mon cas. Salut le salut !
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Roman paru en 1936.

Au travers du sacerdoce d'un jeune prêtre, l'auteur aborde des thèmes capitaux tels que la spiritualité, le rôle de l'église, la mort, le mal et la corruption de l'être, la vérité, le destin… mais aussi le don de soi, l'espoir, le salut et la grâce.

Ce jeune prêtre catholique qui officie dans la paroisse d'Ambricourt dans le nord de la France, connaît des soucis d'argent et d'autorité, commet des maladresses, se fait duper mais n'en reste pas moins dévoué à sa mission, sauver des âmes.

Parfois naïf, parfois lucide, il met un zèle extrême à vouloir faire don de sa personne et de sa santé pour combattre le mal qui est partout : chez les paysans que la pauvreté rend mauvais, chez la petite aristocratie locale arrogante, … combat perdu d'avance mais combat qui le rapproche de Dieu.
Dans un monde qui apparaît très brutal, le seul moment de plaisir et d'amitié que connaîtra notre prêtre sera une balade en moto avec M. Olivier, neveu de Mme la comtesse, considéré comme difficile lorsqu'il était plus jeune et engagé par sa famille dans la Légion dès ses dix-huit ans, prêt à y laisser sa peau comme il dit, une autre forme du don de soi.

Un livre sincère, bouleversant, qu'il faut replacer dans son contexte religieux et historique pour l'apprécier pleinement.
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Bernanos n'était pas homme de compromis. Toute sa vie, il a clamé son mépris de la médiocrité, de la bêtise, de la "colère des imbéciles qui remplit le monde". Il a rompu avec ses amis quand il les a vu soutenir l'indéfendable ; il a violemment attaqué l'Eglise quand il l'a vu faire de même - car il estimait que c'était ce que lui commandait sa foi de chrétien.

Ses personnages sont comme lui. Sans concession. Les doutes, les crises de foi, les souffrances d'un petit prêtre agonisant d'un cancer de l'estomac, quelque part au fin fond d'une campagne misérable... Voila de quoi parle ce livre. Cette misère, ce dépouillement que l'auteur recherchait pour lui même, il les mets ici en scène. Dans un monde englué dans le péché comme dans la boue, transcendé par sa misère et ses souffrances, ce petit prêtre anonyme devient à son tour une figure christique.
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Un jeune prêtre fait ses premières classes à Ambricourt, petite paroisse rurale. A travers son journal, nous suivons le parcours mystique et désespéré d'un homme de foi confronté aux contradictions de son Eglise, mais aussi aux incompréhensions d'une société qui a du mal à tolérer les individus qui sortent du rang, non pas pour se démarquer par simple volonté, mais parce qu'irrésistiblement poussés par leurs inébranlables convictions.
L'une des plus belles oeuvres de Bernanos, intense, spirituelle et exigeante .
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N'ayant jamais lu Bernanos, ce "journal d'un curé de campagne" a été une véritable claque ! Loin de l'image d'Epinal du curé apprécié de tous, Georges Bernanos nous fait voir un tout jeune prêtre, malade, isolé dans sa campagne venteuse, en butte à la méfiance hostile des villageois.
Rien n'est simple pour lui qui doit lutter contre d'atroces maux d'estomac, contre sa pauvreté, contre les doutes de sa foi.
Les pages sur sa solitude, l'amitié de rares personnes sont d'une grande force. le dialogue avec la comtesse est absolument exceptionnel - ce serait un formidable moment de théâtre. On ne sort pas indemne, selon l'expression consacrée, de la lecture de Bernanos.
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Roman écrit il y a quatre vingts ans, première référence importante car il ne pourrait plus écrit aujourd'hui puisqu'il n'y a plus de curé de campagne. Ce jeune curé confie donc à son journal ses sentiments au fil de ses contacts avec ses paroissiens si différents et se rejoignant toutefois avec facilité dans la complaisance, la vanité, les certitudes, l'hypocrisie et le mépris des uns pour les autres. Même sans curé, cela n'a pas trop changé dans les campagnes au XXIéme siècle. le héros de Bernanos veut apporter du mieux être autour de lui. Il croit, sa foi est indéfectible même si son âme est soumise aux tourments de l'humain. Bernanos a écrit un roman à la fois mystique et très ouvert aux problématiques humaines. Son héros, dans sa fragilité, porte une puissance qui le mène sereinement vers son destin.
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Un curé des campagnes se livre à coeur ouvert dans son journal, parfois les pages sont arrachées, délicatesse ou pudeur, l'homme d'église est ainsi. Ce prête est miné par deux faiblesse dans son corps et dans son esprit. Il est sujet à des mots d'estomac qui l'oblige à la frugalité, mais son alimentation est insuffisante pour restaurer son corps débile. Un quignon de pain, parfois des fruits, et du vin qu'il réchauffe en l'édulcorant tant le breuvage est mauvais. Et puis lui, qui est à peine un homme, est travaillé par sa conscience, non qu'il a perdu la foi, certes non, mais est-il à la hauteur de sa tache? Soulage-t-il les douleurs de ses ouailles, où n'aggrave-t-il pas le mal par son inexpérience, par excès de zèle ou par une compréhension défaillante. Dans sa paroisse, il ne laisse personne insensible, par son allure, sa personnalité. On dit de lui qu'il ressemble à un romantique allemand du siècle dernier. Sa simplicité, sa fraîcheur, son humilité, lui gagne la confiance de quelques uns, qui se confient à lui spontanément. Les nobliaux du village le dévisage sans aménité. L'acmé de l'oeuvre intervient vers la moitié du journal. La femme du noble se confie à lui. le voile se déchire. Puis c'est une vallée de larmes. le récit prend une intensité tragique, pathétique,christique, mais terriblement humain; dans sa plus pure acception la lecture nous met hors de nous, l'affect prend le pas sur la réflexion. Cette puissance hypnotique je l'ai rarement autant ressentit, peut être avec Balzac, certainement chez Dostoïevski.

Le journal d'un curé est de ses livres, tellement précieux, ami lecteur, qu'il justifie pleinement, cette jubilation, ce repos, cette consolation de lire. Avec de tels ouvrages on retrouve la foi dans incommensurable odyssée de la lecture. C'est une borne du chemin, qui nous indique que nous sommes sur la bonne voie. On peut pas mettre six étoiles, s'il vous plait?
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Un curé de santé fragile, dans une campagne obscure écrit ses impressions dans un journal. Quoi de plus banal ? Sauf si on s'appelle Georges Bernanos, lequel manie les mots à la perfection, même si, écrit-il par la voix de son curé : « C'est une des plus incompréhensibles disgrâces de l'homme, qu'il doive confier ce qu'il a de plus précieux à quelque chose d'aussi instable, d'aussi plastique, hélas, que le mot. »

À travers ce journal, le narrateur scrute son sacerdoce avec une acuité extrême, lui cet enfant pauvre devenu homme de Dieu et qui n'oublie pas l'injustice faite aux siens : « Reste qu'un pauvre, un vrai pauvre, un honnête pauvre ira de lui-même se coller aux dernières places dans la maison du Seigneur, la sienne, et qu'on n'a jamais vu, qu'on ne verra jamais un suisse, empanaché comme un corbillard, le venir chercher du fond de l'église pour l'amener dans le choeur, avec les égards dus à un Prince – un Prince du sang chrétien. »

La prêtrise n'est pas chose aisée : « Nous payons cher, très cher, la dignité surhumaine de notre vocation. » Une vocation éprouvée par des situations, des êtres, par leur cruauté parfois. Heureusement, il reste la grâce, et des voix viennent aux secours de ce curé, comme celle de son confrère de Torcy, un sage qui fait ainsi parler le Christ pour, lui aussi, accabler l'injustice propre à l'espèce humaine : « Que mon bras s'écarte un moment, l'esclavage que je hais ressusciterait de lui-même, sous un nom ou sous un autre, car votre loi tient ses comptes en règle, et le faible n'a rien à donner que sa peau. »

Ce journal est donc une introspection tant existentielle que spirituelle, où des généralités côtoient des vérités intimes : « Je n'avais jamais été jeune, parce que je n'avais pas osé. » Puis : « Je n'ai jamais été jeune parce que personne n'a voulu l'être avec moi. » Ou comment dire sa solitude…

Et puis il y a l'entretien à coeur ouvert avec Mme la Comtesse – point culminant du roman et modèle d'espérance –, où les deux se livrent à une lutte pour qu'enfin cette dure femme de race infléchisse son implacable orgueil, vaincue par des phrases telles que celle-ci : « Oh, vous pouvez bien cacher aux misérables les vices de vos maisons, ils les reconnaissent de loin, à l'odeur. […] Il n'est pire désordre en ce monde que l'hypocrisie des puissants. »

Bernanos, qui « montre d'abord une heureuse négligence pour les “lois du roman” » (André Malraux), déploie ici encore ses inquiétudes mystiques, avec ce talent inouï qui le caractérise. Il n'accompagne pas le lecteur : il le lessive littéralement et non moins littérairement. C'est un texte qui s sous le signe de Dieu, mais un Dieu de vérité, pas d'apparence ainsi fustigée : « Je crois, je suis sûr que beaucoup d'hommes n'engagent jamais leur être, leur sincérité profonde. Ils vivent à la surface d'eux-mêmes, et le sol humain est si riche que cette mince couche superficielle suffit pour une maigre moisson, qui donne l'illusion d'une véritable destinée. »

Enfin, ce Journal d'un curé de campagne se lit aussi comme une confession et c'est ce qui la rend si attachante…
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Le livre ultime sur la foi... dans tous ses états. Pour moi, il ne s'agit pas que de foi religieuse dans ce livre, bien au contraire. Il s'agit de la foi tout court, celle qu'on est prête à éprouver lorsqu'on se trouve dans le dénuement le plus total. Rien que pour cela, ce livre est beau et universel car il questionne ce que nous avons de plus beau et de plus mystérieux en nous : notre propension à lâcher-prise (ou pas) pour quelque chose (ou quelqu'un?) qui nous transcende et nous dépasse : Dieu, l'amour, la vie... ce qui vous convient.
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