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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Bernanos... encore un de ces auteurs dont on se dit qu'il faudra bien qu'on les lise, un jour...
Ma première tentative en ce sens s'est lamentablement interrompue avant le premier quart du "Journal d'un curé de campagne", dont les circonvolutions philo-théologiques ont coupé net mon bel enthousiasme.

J'aurais pu en rester là, d'autant plus qu'Aaliz, qui est courageusement allée jusqu'au bout du "Soleil de Satan", semblait confirmer la rebutante complexité de son oeuvre.

Puis, je suis tombée par hasard à la librairie du coin sur "Monsieur Ouine", agrémenté d'une élogieuse petite note du libraire. "Soit, ne soyons pas obtuse. Retentons l'expérience...", m'exhortais-je in petto.

Je ne remercierais jamais assez l'auteur de la dite petite note : j'ai adoré ce bouquin ! D'emblée. Les premières pages du roman m'ont fait penser à Faulkner (si ça, ce n'était pas de bon augure) : le lecteur est immergé sans préambule au coeur d'une scène en cours, se trouvant face des personnages qui, ne lui ayant pas été présentés, lui donnent un peu de fil à retordre pour ce qui est de comprendre qui ils sont, et quels sont les liens qui les unissent les uns aux autres. Et à peine a-t-il vaguement commencé à se familiariser avec ce contexte que le voilà projeté sans transition vers une autre scène et d'autres protagonistes qu'il faut à nouveau apprendre à connaître avec le peu d'éléments que nous fournit l'auteur.

Rassurez-vous, les interactions entre les héros deviennent rapidement suffisamment claires et l'intrigue suffisamment intelligible pour nous permettre d'en saisir le cadre général.
Quant à en comprendre toutes les subtilités... disons que "Monsieur Ouine" est sans doute de ces romans que l'on ne peut appréhender en profondeur qu'à condition de le lire plusieurs fois. Georges Bernanos s'y montre maître dans l'art de l'ellipse : les événements sont souvent davantage suggérés que réellement dépeints, les pensées des personnages livrées par bribes, mais ces bribes sont choisies avec une telle justesse qu'elles permettent au lecteur de percevoir sans peine l'ampleur de leurs désespoirs, la force de leurs haines... Car ce texte est d'une intense noirceur.

L'auteur utilise le prétexte de l'assassinat d'un jeune valet de ferme, dans un village du nord de la France, dans les années 30, pour mettre en exergue la malveillance et la perdition des âmes.
Autour de l'entité incarnée par des villageois anonymes qui, entraînés par le phénomène de groupe, finissent par exprimer toute l'étendue de mauvais instincts qu'excitent la hargne et la bêtise, orbitent des héros plombés par le mal-être.
Le jeune Steeny, orphelin de père, étouffe au sein d'un foyer uniquement féminin où il ne trouve pas sa place, et dont il rêve de fuir la torpeur. On comprend sa fascination pour la sulfureuse comtesse de Néréis, femme extravagante, violente et sensuelle qui se livre avec le garçon à un étrange jeu de séduction. Celle qu'il éprouve pour Monsieur Ouine est plus énigmatique. Ce pensionnaire du château des Néréis, au physique flasque, rebutant, exsude une souffrance psychologique et spirituelle terrible, dont les fondements demeurent troubles.
D'autres que lui sont également rongés par d'insondables culpabilités, face auxquelles les médecins du corps comme de l'âme, dont la foi s'épuise face à tant de malheur et de barbarie, demeurent impuissants.

On referme ainsi l'avant-dernier roman de Georges Bernanos avec la conviction de l'absence de toute possibilité de salut pour cette humanité déchue...

Relirai-je un jour "Monsieur Ouine" ? Peut-être..
Toujours est-il qu'il aura suffi de cette première lecture pour que ce roman désespéré, à l'écriture foisonnante, complexe, et d'une implacable précision, me passionne...
Lien : http://bookin-inganmic.blogs..
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Monsieur Ouine est le roman de Georges Bernanos que j'ai le plus relu. Peut-être même est-il un des romans, avec par exemple La plage de Scheveningen ou Absalon, Absalon ! que j'ai le plus relu au cours de toutes ces années de méthodique dévoration de livres. le relisant depuis que je l'ai découvert, assez tardivement par rapport aux autres romans de Bernanos, que, consciencieux gamin, je m'appliquai à lire dans l'ordre de leur parution, je suis passablement étonné d'y dénicher tel ou tel aspect qui n'avait pas retenu jusqu'alors mon attention.
Lien : http://www.juanasensio.com/a..
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MONSIEUR OUINE de GEORGES BERNANOS
Philippe, surnommé Steeny, 16 ans a pour mère, Michelle et pour gouvernante Miss Daisy, à la fois stricte et ( peut être ?) amoureuse de lui. Ils reçoivent la visite de la châtelaine de Wambescourt, Madame de Nereis, surnommée Ginette Jambe de laine, épouse d'Anthelme, châtelain diabétique, épris d'art, qui a recueilli un lettré, Monsieur OUINE qui veut servir de guide à Steeny ( en attendant mieux?). Ce dernier a comme copain Guillaume, infirme qui lui parle de ses rêves. Un soir, Steeny reste chez Monsieur OUINE qui envoie un valet prévenir sa mère qu'il reste au château. le lendemain, le dit valet est retrouvé mort avec des traces de strangulation. A partir de cet instant, entrent en scène le maire Arsène, qui semble avoir bien des choses à se reprocher, le médecin, Malepine, incapable et veule, ainsi que le curé de la paroisse, tout nouveau dans sa fonction. La mort du valet à laquelle s'ajoute la même nuit celle du châtelain diabétique va déclencher une cascade d'événements, de dénonciations et faire surgir du passé bien des éléments qu'on aurait préféré rester cachés. Mais c'est le sermon du curé lors de l'enterrement qui va mettre le village en émoi.
Un livre étrange, construit comme un bon vieux polar, multipliant les pistes, fausses ou abandonnées en rase campagne. Monsieur OUINE est omniprésent dans les esprits de tout le village, on se réfère souvent à ce qu'il pense ou aurait pensé et en même temps il n'a que quelques lignes de présence dans le roman. C'est une sorte d'esprit qui plane au dessus du village exacerbant les mauvais penchants de ses administrés. Mais on est chez Bernanos alors Dieu plane sur les lieux bien que le curé se plaigne amèrement que « sa place soit de plus en plus petite »et donc la notion de péché s'infiltre partout. C'est aussi une vision bien sombre des hommes qui dans le village devraient montrer la »bonne direction » mais ils sont curé, médecin ou maire, accablés de tares pesantes. C'est le dernier livre écrit par Bernanos. Il m'a donné envie de relire ceux qu'avait adapté Pialat au cinéma. Bonne lecture.
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A mon sens, le plus désespéré des ouvrages de Bernanos, il n'y a presque personne à sauver, où du moins il n'y a plus la figure de sainteté à laquelle se raccrocher, tout est pourriture dans le village, à l'instar de M. Ouine, qui pourrit littéralement vivant par sa maladie. le style est parfois obscur, mais c'est volontaire, je crois, pour montrer les méandres dans lesquels sont plongés les personnages.
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Monsieur Ouine est considéré par le petit cercle des meilleurs exégètes de Georges Bernanos comme son grand oeuvre. La rédaction de ce roman a duré près de 20 ans, ce qui n'est pas sans provoquer certaines instabilités stylistiques et narratives. C'est l'histoire troublée d'un village du pays d'Artois qui accueille un très étrange personnage, monsieur Ouine, professeur de langues en lent état de décomposition morale et physique. Logé par un couple de châtelain il exerce une sombre fascination sur les habitants du village. Un jour un petit vacher du village se fait assassiner, ce qui accélère la décrépitude de la communauté et sa confrontation larvée avec les offices de police. Ce meurtre n'est que le dévoilement de l'avancement de l'état de pourriture halluciné de ce groupe humain. Monsieur Ouine ne joue qu'un rôle passif dans cette histoire, dont il est le totem mou, aspirant et visqueux comme un mollusque. Bernanos met sa foi chrétienne à l'épreuve de l'immobilité du mal et de la froide noirceur humaine, il en ressort une histoire parfois bancale voire datée et des pages visionnaires qui donnent à voir la boue mêlée de pluie glacée qui s'entasse au fond des âmes comme des fossés d'Artois. Un grand livre d'ambiance sur la banalité du mal et la déchéance communautaire. L'étude préalable de François Angelier est à consulter pour bien saisir les enjeux de ce roman.
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Très déroutant au départ, avec une introduction in media res pleine d’ellipses. On s'efforce de comprendre, de reconstituer mentalement une situation initiale classique : qui est qui, que font-ils à cet endroit, que s'est-il passé avant ? Mais le maître du jeu reste Bernanos, et c'est avec brio qu'il distille au fil du roman les éléments qu'il juge nécessaires à la compréhension, mais surtout au ressenti des événements et de la décadence poisseuse d'un petit village, parallèlement à celle - et sous l'influence morbide - du fameux Monsieur Ouine.
Une description et une incarnation du "mal" peu communes, mais bien inquiétantes.
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