Cobalt 60 c'est une Bande dessinée des années 70s. Quelques pages en noirs et blancs passées en vitesse dans un magazine - Métal Hurlant - qui était en phase avec son époque. Plus vraiment à sa place aujourd'hui, toutes ces séries qui se sont multipliées depuis ont trop banalisé le thème du fantastique et de la science-fiction. Ce qui était sous-culture ou même anti-culture il y a 40 ans, aujourd'hui c'est un genre bien huilé, trop même avec des mécanismes de narration - que tout le monde ne maîtrise pas, heureusement, ce qui donne lieu à de savoureux nanars avec lesquels on peut plaisanter un peu. Ce n'est pas le cas de
Cobalt 60 qui est sombre, triste et hyper violent. Bodè n'hésitant pas à s'attarder sur un meurtre - exécution d'une sorte de géant qui joue le rôle d'un garde du corps - en découpant l'action en plusieurs vignettes avec une réelle jouissance dans la mise en scène du spectacle. Tel est le style de cet auteur, plein et entier - avec un plaisir presque charnel - dans chacun de ses traits. On sent une vraie intention dans chacun des cadrages, dans le choix même des limites de la vignette s'enfonçant dans le décor, créant une unité entre le contenu de l'image et le reste de la planche au travers du blanc de la feuille. Une gestion de l'espace et du trait qui signe un style tout-à-fait personnel que l'on peut décomposer en un ensemble de "tics" graphiques et de cadrages, des effets bien définissables qui sont réemployés par son fils dans la suite - en couleurs celle-là - des aventures scénarisées par Larry Tod. Mais il manque quelque chose - ce quelque chose qui crée l'unité des images du père et qui fait "construit" et synthétique dans le travail du fils.
Ps - on trouve sur le net, des crayonnés
Vaughn Bodé du second épisode de l'histoire originale qui ne figure pas dans ce recueil. Je regrette vraiment qu'ils n'aient pas été édités eux-aussi.