“La centrale nucléaire [de Tchernobyl] a été annoncée officiellement pour la première fois en 1972 par le camarade président de la cellule locale du Parti, lors d'un discours à l'occasion d'une fête. Les réacteurs feraient de notre région, l'une des plus importantes de l'Union soviétique et apporteraient la prospérité à tous. Un effort colossal dont seule l'Union soviétique était capable. Les spécialistes employés là-bas auraient leur propre ville, moderne et bâtie sur mesure. Dans les semaines qui ont suivi, on a entendu parler d'appartements avec eau courante, chauffage, salle de bains et même téléphone. La ville nouvelle devait s'appeler Pripiat, comme la rivière”.
Le 26.04.86, la centrale
Lénine de Tchernobyl sautait comme un bouchon de champagne, illuminant la planète entière de son feu nucléaire à ce jour inégalé, entraînant la déportation de millions d'habitants d'Ukraine embobinés par le plus gros mensonge d'Etat jamais perpétré, “Tout est sous contrôle”, formule magique largement relayée en France. Parmi les victimes, le nombre des morts passé et à venir reste inconnu.
Valentina fait partie de ces pionniers qui n'ont jamais douté de leur engagement. Veuve par irradiations massives, son fils mort de leucémie, après avoir vécu à Troïchina, ville satellite construite dans les années 80 pour accueillir les Tchernobylzi, ces pestiférés des temps modernes contagieux, elle a décidé de retourner dans la zone d'exclusion au plus près de son histoire, parce que la terre irradiée, c'est tout ce qu'elle possède. Katerina, sa fille, est partie en Allemagne en compagnie d'Olena sa meilleure amie, toutes deux attirées par les chants de sirènes qui leur promettaient de belles études universitaires occidentales mais rapidement, elles n'ont plus donné de nouvelles.
Bien loin de là, à Zyfflich, à quelques encâblures de la frontière hollandaise, Matthias Lessmann, âgé de 68 ans, vit son veuvage sereinement. Il parle à Trine, son mouton préféré, élève ses poules et aime son chien qui le lui rend bien, ils forment un couple fusionnel. Ca lui suffit, sa vie est bien rangée. Il n'a pas décidé de recueillir chez lui une fille qui courait à moitié nue sur le chemin de sa ferme.
Merci à
Mechtild Borrmann pour ce roman dont l'enquête policière n'a servi que de prétexte pour écrire un documentaire, à la fois sur la catastrophe de Tchernobyl, et sur la traite sexuelle de jeunes femmes, enfants et héritières de Tchernobyl, surnommées Tchernobylza, dont personne ne veut, surtout pas comme épouses puisque leurs rejetons seront forcément des monstres post-feu-nucléaire.