A force d'entendre vanter autour de moi les "cosy mystery", leur ambiance -mais si, tu sais, tellement british. Pas à la
Ken Loach, non. Plutôt à la
Agatha Christie, tendance Downton Abbey; si british, si surannée et tellement douillette. Mais si, enfin cette ambiance feu de cheminée, scones à la crème et earl grey parfaitement infusé -, j'ai fini par vouloir déguster moi aussi ma part de Sponge Cake, nonchalamment installée dans un fauteuil tendu d'un confortable plaid écossais...
C'est ainsi que me voilà montant à l'assaut du rayon dédié de ma librairie, un peu perdue face à l'offre pantagruélique. Heureusement, je suis une bonne tacticienne: j'avais préparé la bataille et noté scrupuleusement les titres et les séries dont les noms revenaient le plus souvent.
Après une très minutieuse exploration du terrain, j'ai fini par m'emparer victorieusement du premier volume des aventures de "Son espionne royale mène l'enquête" afin de le ramener chez moi.
A moi la légèreté, l'humour à la Richard Curtis, l'enquête moelleuse et confortable comme un édredon d'autrefois. A moi l'ambiance liberty et sauce à la menthe.
A moi la bulle désuète façon fleur séchée, pâtisserie, arsenic et vieilles dentelles.
Tu parles! Tu parles d'une bulle! D'une bataille, d'un rapt, d'une captivité!
Entre
Rhys Bowen et moi, c'est surtout un rendez-vous manqué. L'affrontement n'a pas eu lieu là où je l'aurai cru et les ennemis ne furent ni le criminel mystérieux, ni ma raison me contraignant à ralentir ma lecture -ô combien passionnante- afin de préserver mon sommeil.
Non.
L'ennemi, ce fut l'ennui. le terrible ennui. Celui qui vous fait bailler, celui qui vous pousse à préférer faire le ménage plutôt que de reprendre votre livre. L'ennui qui vous tue lentement, mais sûrement, comme un poison pernicieux. L'ennui qui subrepticement se substitue à Morphée pour vous endormir du sommeil du juste...
"Son espionne royale" ne fut bonne que pour mes insomnies. Pour moi qui adore qu'un livre me prive de sommeil, c'est presque une tragédie que ce calme plat...
Elle n'est pas désagréable Lady Victoria Georgiana Charlotte Eugénie, au début du moins, parce que passé les premiers chapitres, elle devient on ne peut plus agaçante et d'une crédibilité douteuse, tout comme l'Angleterre dans laquelle elle évolue où les affaires qu'elle tente d'élucider. J'entends bien que c'est là la vocation de ce type de roman, d'offrir au lecteur une friandise, un bonbon, un peu d'évasion, de drôlerie et de douceur dans ce monde cynique, brutal et plus cruel que ne l'aurait été le rejeton de Gilles de Rais et d'Elizabeth Bathory s'il avait existé mais tout de même!
Au-delà du filtre gentillet qui se déploie sur tout l'ouvrage et qui pourrait ne pas faire de mal, il faut bien reconnaître qu'une intrigue aussi cousue de fils blancs, aussi paresseuse, aussi simplette relève autant de l'apathie intellectuelle que de la condescendance vis-à-vis des lecteurs. On peut vouloir dorloter ces derniers sans pour autant les prendre pour des imbéciles, non?
Entre son espionne royale et moi, c'est décidé: nous en resterons là, à ce premier rendez-vous décevant qu'on aurait voulu écourter dès la première gorgée, celui qu'on avait envie de quitter sous un prétexte fallacieux et patiemment élaboré (et bien supérieur à l'intrigue imaginée par
Rhys Bowen soit dit en passant) avec une bonne copine mais qu'on a n'a pas osé abandonner parce qu'on est trop polie.
Je l'ai fini ce satané roman, mais quel ennui!