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Un très bon roman d'horreur (je préférerais dire roman fantastique) avec une intrigue originale.
Tout part d'une petite communauté fondée au plus profond des forêts du Nord-Ouest des USA par un épigone d'Elon Musk ou Steve Jobs; ce personnage charismatique veut révolutionner la manière de vivre et d'habiter, et crée son utopie; un hameau de cinq maisons hyperconnectées, chefs d'oeuvre de domotique écologique, permettant -en principe - à leurs occupants de bénéficier de tous les avantages du confort moderne avec une empreinte carbone pratiquement nulle. L'isolement au bout d'un chemin à un endroit à des kilomètres de tout endroit habité n'est pas un problème: Internet est là, et on peut tout se faire livrer par drones. Et tout cela parait parfaitement cohérent et fonctionnel. Un mode de vie new âge, mais avec la technologie; rien ne peut aller de travers. Un paradis pour bobo californien.
Mais...une éruption volcanique catastrophique coupe provisoirement la communauté du monde extérieur; le téléphone portable ne fonctionne plus;, Internet est coupé; impossible de regagner le monde habité, même à pied; très peu de provisions (les drones sont là pour ça, mais justement ils ne viennent plus.)
Que faire? Nos sympathiques bobos craquent à des degrés divers, le fondateur et son épouse les premiers, mais pour eux c'est un effondrement total. Heureusement, l'une des résidentes, artiste en résidence d'origine bosniaque, est capable de réagir grâce aux épreuves qu'elle a connu pendant les guerres de Yougoslavie. Elle tient un moment le groupe à bout de bras, et tout pourrait aller à peu près.
Malheureusement les Big Foot (qui ne ressemblent pas du tout à celui qui illustre une publicité TV pour un papier-toilette)....
La narration est très habile; nous avons trois supports: le journal d'une des résidentes, les déclarations d'une ranger et celles d'un ex-résident de la communauté, qui alternent lors du déroulement de l'intrigue.
Les personnages sont intéressants et psychologiquement vraisemblables; on prend un réel intérêt à la peinture de leurs réactions et de leur évolution.
Leur psychologie est réaliste, car conforme à ce qu'ils sont, et ils ne sont caricaturaux que dans la mesure où leurs modèles le sont aussi.
Visiblement, Max Brooks ne les aime pas beaucoup , à l'exception de Mostar, la réfugiée bosniaque, et de Kate Holland, dont on nous donne à lire le journal et de son mari.
Car il y a une dimension de satire sociale de la société californienne et du type d'individus qu'elle produit; les réactions politiquement correctes de l'épouse du fondateur à l'égard des Big Foot (et d'un certain puma) sont amusantes jusqu'à un certain point. Lorsqu'elle se rend compte que la nature n'est pas bonne, que tout ce qu'elle croit est faux, elle se réfugie dans la quasi-démence.
Et aussi une question plus grave: comment peuvent réagir des individus très (trop?) civilisés lorsque tout s'effondre autour d'eux?
Car tout peut s'effondrer, très vite.
L'histoire est tragique et hélas de moins en moins de gens le savent. Cependant le message de l'auteur est (si l'on peut dire) optimiste : oui, certains peuvent s'adapter
Mais le prix à payer risque d'être élevé. Voir l'évolution finale de Kate.
"Entre la barbarie et la civilisation, il n'y a que cinq repas" (Winston Churchill)
Il y a une autre particularité du livre que je voudrais souligner : on sait que l'auteur est scénariste et metteur en scène, et très proche de l'univers du cinéma d'horreur. D'où un certain nombre de notations plus légères. Ainsi Kate Hollande note dans son journal qu'elle-meme et les autres protagonistes se conduisent aussi stupidement que les personnages de films d'horreur confrontés au danger, attaqués et poursuivis par le monstre. La partie du livre consacrée à l'attaque des résidents par les. Shaskatch est truffée de gimmicks et de citations de films horreur. Il serait intéressant que quelqu'un de plus au faîte que moi de cet univers entreprenne le décodage de ces citations. Il ne faut pas y voir une maladresse de l'auteur, mais un décalque voulu.
Je reviens un peu sur les personnages. Outre Mostar, qui tire sa résilience des terribles expériences qu'elle a vécu, les trois personnages qui supportent le changement ont déjà été blessés par la vie à des souffrances diverses. D'abord et surtout la petite Palomino, rescapée du massacre des Rohingas. Mais aussi Kate Holland et son mari, que le drame tirera de leur état dépressif. On sait que les guerres ont souvent un effet positif sur les personnes dans cette situation, dans la mesure où elles les obligent à sortir de leur stase interne pour affronter le monde et le réel. On sait aussi que c'est en temps de guerre qu'il y a le moins de suicide.
En revanche, les autres personnages, bien adaptés à la société où ils vivaient, sont incapables de renoncer à leurs certitudes.
Ainsi Yvette (l'épouse du fondateur) parfait exemple de gourou New âge, prend à partir Mostar qui vient de sauver Palomino en blessant le puma qui allait attaquait la petite avec un javelot improvisé. Yvette affirme que rien ne prouvait que le fauve allait attaquer l'enfant. Mostar l'envoie paitre et les deux mères de Palomino (il s'agit d'un couple lesbien) commencent à comprendre grâce à leur instinct maternel, plus fort que tous les conditionnements bien pensants.
L'attitude de Kate, qui prêtera aussi au départ de bonnes intentions aux Sasquatchs, rappelle celle des défenseurs du loup qui soutiennent mordicus que cet animal n'attaque pas l'homme, alors que le contraire est attesté et documenté par des siècles de cas référencés par les historiens (par exemple Jean-Marc Moriceau.
On voit donc la richesse et le nombre des thématiques que manie ce livre, qui vaut infiniment mieux que sa qualification réductrice de roman d'horreur.
Espérons que Brooks nous en donnera d'autres de la même trempe


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Une petite communauté isolée contre une horde de monstres, ici des bigfoot/sasquatch/yétis : un cliché narratif on ne peut plus classique, tout dépend donc du traitement. Hélas, Devolution de Max Brooks est un échec complet. le début parvient à faire illusion : cette petite communauté est montée par un grand nom de la tech pour mettre en avant un concept de vie à la fois écologique et hyper-connectée. le beurre et l'argent du beurre : la bonne conscience sans renoncer au moindre confort. Leçons de yoga et courses livrées par drone, safe spaces et smart homes, week-end à l'appartement de Seattle quand on en a marre de la montagne... On est carrément dans de la satire sociale, Max Brooks s'attaque à l'écologisme de façade qui n'est qu'un techo-utopisme réservé à ceux qui ont les moyens de se l'offrir, le tout lié à une morale qui idéalise terriblement la nature, et tout ça est plutôt marrant.

Par contre, une fois le premier tiers passé, le niveau chute drastiquement. On sait à l'avance l'essentiel ce qui va se passer, Brooks n'offre absolument rien d'original, et son écriture simpliste devient rapidement un inconvénient quand narration et propos sont également simplistes. Cette histoire de communauté contre des monstres, tout le monde l'a déjà lue et vue 100 fois. Je me suis rapidement mis à survoler le texte tant il a peu à offrir. le développement des personnages devient comique de médiocrité : le couple alpha, quand les problèmes commencent, sombre instantanément dans le déni et l'effondrement mental, alors que nos deux héros, normalement des gens timides et réservés, se transforment en chefs de guerre pleins de ressource. Alors oui, l'idée c'est que l'adversité révèle l'identité véritable, mais c'est tellement gros, tellement pas subtil... Même chose pour Mostar, la vieille qui fait office de piqure de réalité pour les idéalistes qui n'ont jamais fait face au moindre problème réel. Ce personnage s'est donné pour nom le nom de la ville des Balkans où elle vécu les horreurs de la guerre civile. Encore une fois, donner à son personnage le nom de son trauma, c'est tellement gros...

Lien : http://lespagesdenomic.blogs..
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Quatorze ans plus tôt, Max Brooks publie son premier roman (même s'il avait déjà publié un guide de survie à la fois drôle et ingénieux auparavant) : World War Z.
Véritable chef d'oeuvre du genre, le livre connaîtra par la suites les honneurs d'une adaptation filmique complètement loupée avec Brad Pitt dans le rôle principal pour un long-métrage d'action hollywoodien totalement à côté de la plaque.
Depuis, Max Brooks s'était fait discret si l'on excepte la publication en 2014 d'un (excellent) comic book sur les Harlem Hellfighters.
C'est en 2019 que l'américain annonce la sortie d'un nouveau roman avec Devolution : A Firsthand Account of the Rainier Sasquatch Massacre.
Oubliez les zombies, place aux Sasquatchs ou, Bigfoot, pour les intimes.

Welcome to Greenloop
Certainement le mythe nord-américain le plus fameux, le Big Foot est aussi devenu, au fil des ans, un monstre kitsch à souhait et adapté à toutes les sauces.
Avec Devolution, Max Brooks tente de réitérer l'exploit de World War Z : faire du neuf avec de l'ultra-cliché. Si son histoire d'apocalypse zombie utilisait un récit qui tenait plus du fix-up de nouvelles que du véritable roman, Devolution change (un peu) son fusil d'épaule et joue la carte de la found-letter pour explorer le mythe à la sauce survival/thriller.
C'est donc par l'entrelacement de deux récits que se construit le roman : celui du journal « retrouvé » de Kate Holland, l'une des survivantes du massacre de Greenloop, et celui de l'auteur lui-même qui enquête sur ledit massacre en interviewant Frank McCray (le frère de Kate) et la ranger Josephine Schell (qui enquête elle aussi sur la catastrophe de façon plus officielle) tout en glissant d'autres documents utiles (comme des interviews des habitants de Greenloop d'avant le drame ou des extraits de livres divers autour du Big Foot).
L'action se situe non loin de Seattle dans l'État de Washington où une communauté de quelques riches individus ont décidé d'expérimenter une nouvelle expérience de vie plus proche de la nature mais sans renoncer à la technologie moderne pour autant. Grâce à Tony Durant et à sa femme, une dizaine de personne s'installent donc à Greenloop.
Kate Holland et son mari débarque là-bas à la demande de son frère, Frank, qui n'a plus la possibilité d'y rester et qui entrevoit là un moyen pour aider sa soeur atteinte de TOCs (et d'un gros manque de confiance en elle). C'est aussi un moyen d'aider le couple tant Dan, le mari de Kate, semble de plus en plus apathique du fait de son sentiment d'inutilité devant son statut peu enviable d'entrepreneur-loser.
Surprise, avant d'être le récit d'un survival brutal et terrifiant, Devolution s'attarde d'abord sur cette petite communauté d'écolo-new age qui souhaite se rapprocher de la nature mais sans sacrifier le confort moderne pour autant (à coup de maisons intelligentes, de technologies propres et autres drones).
La plupart — Vincent et sa femme Bobbi, Effie et sa femme Carmen ainsi que leur fille adoptive Palomino, Alex Reinhart l'anthropologue idéaliste fin connaisseur du philosophe Rousseau et bien sûr le couple de bobos superficiels par excellence Yvette et Tony — n'ont en réalité qu'une très vague idée de ce qu'est la Nature, la vraie. du moins, pas une fois sortie des films et des documentaires TV qui pullulent aujourd'hui.
Reste Mostar, vieille artiste et sculptrice de verre… qui semble avoir un lourd passé l'empêchant de tomber dans la béate et naïve admiration dont font preuve les autres devant ce qui gronde au dehors.
Ce qui gronde au dehors d'ailleurs, c'est le Mont Rainier, un volcan qui choisit de s'éveiller brutalement au grand dam des petites villes autour…et de Greenloop, naturellement !
Le décor est planté, la tragédie en deux actes peut commencer.

Retour au réel
Avec l'éruption du volcan et l'isolement de Greenloop, les choses changent rapidement. La communauté si confiante se transforme soudain en une prison où l'on craint demain. Max Brooks utilise encore une fois le prisme de la fiction pour un message social et anthropologique.
Nous ne sommes pas prêts.
Dans un monde où tout s'obtient en un claquement de doigt (ou un clic de souris), rien n'est prévu sur le long terme (et ce qui explique aussi l'incapacité actuelle de lutter contre le réchauffement climatique). Insuffisance des stocks, confiance aveugle en un filet de sécurité qui s'est effiloché depuis longtemps, la société actuelle n'arrive pas à comprendre que sa capacité à vivre dans l'hyper-présent sera la véritable raison de son déclin futur.
Mostar est la seule à se souvenir (du fait d'un tragique passé) que tout peut changer du tout au tout en quelques heures et devient ainsi le seul rappel pour Kate que l'inertie sera fatale aux habitants de Greenloop.
Mostar serait-elle la métaphore de la mémoire collective humaine ? Peut-être.
Mais c'est surtout l'occasion pour Max Brooks de montrer que l'adaptation est encore possible et que l'homme n'évolue jamais autant que lorsqu'il est confronté au pire. du moins quand il accepte ENFIN de voir le pire.
La catastrophe agit comme un catalyseur de ce qui se cache au plus profond de chacun et personne, au final, n'est réellement ce qu'il semble être dans une société moderne qui a inversé les rôles.
Devolution aurait pu se contenter de cette formule catastrophe pour illustrer son propos mais Max Brooks avait une autre idée en tête, une idée plus extrême et plus roublarde pour secouer durablement le lecteur.
Passons donc au second acte.

Darwin en action
Après l'éruption et la redistribution sociale des cartes parmi les personnages pris au piège à Greenloop, Max Brooks réoriente son récit vers l'horreur en faisant entrer en scène un super-prédateur : le Sasquatch.
Sorte de singe-géant ayant évolué parallèlement (ou aux dépends…c'est selon) de l'homme, le Sasquatch s'affirme rapidement comme un danger bien plus redoutable que la famine ou les pumas des environs.
En mixant les interviews de spécialistes et les sources pourtant bien connues sur les rumeurs entourant Bigfoot avec les entrées de journaux de Kate, l'auteur américain passe la seconde et ne s'arrête plus.
Petit à petit la tension monte entre humains et créatures, et ce qui semble appartenir aux légendes devient une réalité aussi impitoyable que sanglante.
Poussant sa réflexion première dans ses retranchements, Max Brooks illustre la naïveté d'une société qui pense la Nature bienveillante et formidable. Alors que la Nature…c'est juste la Nature avec tout le côté impitoyable qui va avec.
Rapidement, Kate et les autres doivent choisir entre s'adapter ou mourir, une illustration parfaite de la sélection naturelle selon Darwin. Sauf qu'ici, ce qui condamne les hommes, c'est justement leur statut supérieur et leur technologie. Il faut donc réapprendre à « dévoluer » pour avoir la moindre chance. le confort moderne nous a ôté le privilège de super-prédateur de nos ancêtres et il est temps pour Kate, Dan, Effie et tous les autres de retrouver leurs rage primale.
Transformé en survival intense et émouvant, Devolution achève sa transformation en page-turner pour un crescendo d'action et de suspense qui se termine comme la légende du Big Foot elle-même : perdu au milieu de la forêt.

Max Brooks a encore frappé.
Après avoir dépoussiéré le zombie, l'américain sort le Sasquatch du placard pour un récit impressionnant et sous-tendu par une réflexion sociale et anthropologique scotchante. Jubilatoire, flippant et parfaitement addictif. Une immense réussite.
Lien : https://justaword.fr/devolut..
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