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4,08

sur 2979 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'ai longtemps repoussé la lecture de ce roman, et c'est finalement ma première lecture de l'année 2024.
Le Désert des Tartares est bien écrit, bien construit, bien pensé — et d'un abord beaucoup plus simple que ce que je craignais. Si je dis que le roman est "bien construit", c'est que je n'ai pas ressenti de longueurs, ni de lassitude, alors même qu'il ne se passe pas grand-chose au fort Bastiani, et que comme Drogo le lecteur n'assiste pas à l'évènement si longtemps attendu.
J'ai été sensible aux réflexions et aux images de Dino Buzzati sur le temps qui file et qu'on gaspille comme s'il ne devait jamais nous manquer, sur le décalage qu'il creuse entre des personnes auparavant si proches, sur la passivité et la force des habitudes aussi. Et ce Drogo qui poursuit une chimère, je l'ai trouvé plutôt poignant, car c'est un risque pour nous tous, de se rendre compte qu'on a gaspillé le présent pour un hypothétique avenir radieux.
Si ce roman n'est pas le coup de coeur que j'aurais aimé qu'il soit, c'est en tout cas une très bonne lecture.

#challengesolidaire2024
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Dino Buzzati considérait le désert des Tartares comme le "roman de sa vie". Roman de l'attente, de l'imminence de la guerre et de l'absurdité de la vie, le désert des Tartares décrit la vie d'un homme sacrifiée au devoir, mise au service de la défense de l'illusion politique qu'est la frontière.
Drogo est affecté au fort Bastiani alors qu'il sort à peine de l'Académie militaire. Ce fort garde la frontière avec le royaume du Nord, peuplé de Tartares. Drogo quitte sa famille, s'attendant à partir au plus tôt car il s'aperçoit rapidement que de guerre et d'exaltantes veillées, il n'y aura pas. Peu à peu, la force de l'inertie lie solidement Drogo au fort : les rondes, l'entretien, les habitudes forgent sa vie. Bientôt, les Tartares se manifestent ou semblent le faire tandis que Drogo laisse s'écouler les années sur ce poste-frontière, négligeant de demander une nouvelle affectation à laquelle il avait droit. Quand la guerre éclate réellement, Drogo se trouve blessé : la désillusion et la cruauté d'une vie qui a passé, inutile. Une vie vide, comme le désert des Tartares.
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Le desert des tartares fut pour moi une belle découverte :

Quelque part sur terre, en occident, dans d'autres temps, un jeune homme fraichement gradé d'une quelconque armée, se voit attribué un poste dans une caserne, sorte de relais de surveillance frontalier perché au col d'une montage, à l'orée d'un desert. le fait est que pour un militaire désirant faire carrière dans l'armée, cet endroit est maudit puisque plus rien ne s'y passe. Pas d'ennemis de mémoire d'hommes. Il y a bien la légende d'un peuple Tartare contre qui un jour il faudra se battre pour défendre la patrie, mais la réalié est un desert plat, uniforme, une lande sans vie qui s'etends au pied d'une chaine de montagnes, avec ses parois de roche et ses cimes enneigées. Au lieu de demander de suite une mutation, le jeune officier reste un peu, qu'il aura bien le temps dans quelque mois, de partir. Les quelques moi passent, puis les années s'envolent, et le temps s'enfuit....

L'auteur parvient avec une force incroyable à nous fair ressentir cette fuite du temps contre laquelle on ne peut rien, enchainer que nous somme la plupart dans un train train quotidien. Une fuite en avant qui dévore a petit feu, le temps qui nous est impartit. Un jour on se rendra compte qu'il est trop tard, mais qu'avons nous fait tous ce temps là ? le regard porté vers un avenir incertain, dans l'attente que le meilleurs reste à venir, nous ressemblons un peu à l'officer qui au bord du précipice, scrute l'horizon perdue du désert, perduader de voir tout la bas au fond, les légendaires Tartares qui offrent par ce mirage l'unique sens à sa vie.
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S'obstiner dans l'illusion que ce qui est important n'a pas encore commencé.
Voilà une phrase tirée du roman (chapitre XXV) et qui en résume plutôt bien l'histoire : celle de Giovanni Drogo, jeune officier affecté au fort Bastiani, situé à la frontière nord du pays, à la limite d'un désert. Dès son arrivée, Drogo pense repartir au plus tôt. Mais finalement, comme les autres soldats du fort, il va se trouver happé par celui-ci, et par la possibilité d'une gloire à venir.
On a envie de dire à Drogo "ne te laisse pas berner, pars maintenant, tu vois bien qu'il ne se passe rien" et en même temps, comme lui, on a envie de se dire, "mais si tu pars maintenant, ne vas-tu pas gâcher ces moments passés à attendre et rater quelque chose ?".
A une échelle moindre, c'est comme attendre dans la queue d'une attraction en panne, en se disant qu'elle va bien redémarrer un moment ou un autre et qu'on sera aux premières loges. Sauf que parfois, l'attraction ne redémarre pas et on a perdu sa journée.
A une échelle plus large, c'est se contenter de la vie qu'on a malgré certaines insatisfactions, se contenter d'espérer et d'attendre certaines choses en se disant qu'elles finiront bien par arriver, que ce serait dommage de tout changer après avoir fait comme ça aussi longtemps, se laisser aussi dicter par la peur du changement qu'on peut tous ressentir. A un moment, le temps passé à attendre finit par prendre le pas sur l'objet de l'attente. Et on continue, parce que ce serait un gâchis d'arrêter maintenant cette attente, et puis peut-être que ... ?
Ce texte est sombre, on y ressent du désespoir, de la tristesse, de la colère, mais malgré tout, ce texte est beau et nous amène réflexion. J'ai beaucoup aimé.
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Le désert des Tartares paru en 1940 est certainement le roman le plus célèbre de l'écrivain italien Dino Buzzati (1906-1972) qui à cette époque était journaliste chroniqueur au Corriere della Sera.
Le jeune lieutenant Drogo pour sa première affectation est envoyé à la frontière, au fort Bastiani. le roman se déroule en un lieu qui n'est jamais cité, tout au plus sait-on que nous sommes dans « le royaume » et qu'au-delà du fort il y a « l'état du Nord ». La garnison a pour mission de surveiller le désert qui s'étend à perte de vue, dans la crainte d'une éventuelle attaque des Tartares. La vie au fort est faite de rituels et de routines, de relèves de la garde et d'échanges de mots de passe. le temps passe inexorablement, chaque jour n'est pas un autre jour et le lieutenant Drogo qui pensait ne pas séjourner au fort longtemps avant d'être muté constate qu'il n'en est rien. Tous les officiers ne rêvent que d'une chose, une attaque des Tartares qui leur permettrait de montrer leur courage et donc d'obtenir honneurs et promotions. le temps qui s'écoule devient un marécage dans lequel s'enlisent les esprits, paralysant les envies, et même Drogo finira par préférer rester au fort plutôt que de s'en éloigner alors qu'une ouverture s'offre à lui. Les années se succèdent, les promotions ne s'obtiennent que par l'ancienneté, bientôt Drogo devenu commandant s'aperçoit à l'aube de sa vie, qu'il est arrivé à la fin de sa carrière et que son existence s'est écoulée sans qu'il en fasse rien, si ce n'est attendre indéfiniment ces Tartares. le destin s'avèrera cruel car c'est lorsque devenu trop vieux, trop faible et qu'on le poussera à quitter ce fort pour se reposer, que ces maudits Tartares apparaîtront à l'horizon.
Je connaissais ce livre de réputation depuis bien longtemps mais j'en différais la lecture car je m'imaginais qu'il serait – passez-moi l'expression – chiant ! Des types coincés dans un fort et qui attendent, attendent, interminablement… résumé ainsi ça peut laisser perplexe. Heureusement il en faut plus que ça pour m'empêcher de me lancer dans une lecture, si en plus le hasard d'une brocante me met en présence de l'ouvrage pour une somme dérisoire, là je n'hésite plus. Alors, ne faites pas comme moi, n'attendez pas – le temps passe trop vite, c'est un des thèmes du bouquin – et lisez ce roman.
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L'on reste longtemps incrédule devant le nombre de thématiques et de questionnements qu'ébauche et travaille ce pourtant très court récit.
Au delà de son contexte proprement militaire qui m'a instantanément évoqué la Chanson Zangra de Brel et de manière plus anecdotique et personnelle , les tours de garde des nuits froides d'un appelé du contingent perdu dans une caserne de l'ennui, ce livre incroyablement beau, parvient justement à partir d'une situation en apparence on ne peut plus particulière : le quotidien monotone de soldats dans un fort isolé , à mettre en travail, sous la forme d'une parabole antimilitariste, tout à la fois la question de l'ennui corrélé à celle de l'inutile , de la servitude volontaire, de l'absurde, du rapport au temps que produit la répétition du meme mais aussi de notre fascination pour le néant et le désir impérieux d'y matérialiser néanmoins quelque chose. le désert des tartares est un livre ressac, un jalon incontestable dans une vie de lecture.
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Très belle écriture, qui coule avec élégance puis exprime en quelques mots un événements brutal. L'attente étirée à l'infini, sur des dizaines de description des mêmes lieux arides et mornes (un désert, une plaine stérile, des montagnes dénudées).
Le propos est celui du temps qui passe, de la condition humaine, et de l'attente de ce moment fatidique qui donnera un sens à tout cela et ne viendra peut-être jamais. Malgré le ton et le message, quelques surprises dans le récit nous font vivre les sursauts d'espoir de Drogo puis de nouveau l'ennui, l'attente, et le retour de ces mêmes paysages désolés.

Ennuyeux comme il le faut, je le relirais pour ses descriptions impressionnistes, où quelques grands traits, notamment de lumière, figurent les formes et les couleurs de manière frappante.
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Le désert des Tartares est une immense plaine rocailleuse, sans horizon et où il semblerait qu'il n'y ait âme qui vive. Pourtant cet espace infini et aride semble envouter tous ceux qui la contemplent, au point de ne plus quitter le Fort Bastiani, ouvrage militaire sensé empêcher toute invasion tartare.
Alors qu'il voulait immédiatement repartir après son arrivée au fort, le jeune lieutenant Drogo, va y passer sa vie, oubliant ses ambitions et ses rêves de gloire militaire.

A travers ce récit lent et le style simple de Dino Buzzati, on sent le temps qui passe, le poids des années qui écrase petit à petit Drogo, qui s'obstine toujours plus à attendre cet ennemi qui ne vient pas.
La chute, dramatique au possible, viendra nous rappeler que la vie est absurde et que nous n'avons finalement pas notre mot à dire sur son écoulement.

Il y a deux façons de ressortir de cette lecture : accablé par le temps qui passe et que l'on subit jour après jour, ou au contraire avec une envie de révolte et la certitude que contrairement à Drogo nous devons et pouvons être acteur de nos vies.
Le désert des Tartares est un beau roman qui se laisse interpréter de multiples façons et qui raisonnera différemment chez chacun et je pense à chaque (re)lecture.
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Le Désert des Tartares oppose un monde d'en-haut, joliment et minutieusement décrit (le fort et ses postes avancés, le "désert" avec les différents plans focaux, les montagnes, les officiers et soldats) et un monde d'en-bas, assez sommairement esquissé par quelques coups de pinceaux (la ville, les proches, l'état-major); entre les deux, la vallée, un entre-deux par lequel on monte et on descend et où éventuellement on se croise.
Si cette vallée devait être une sorte de purgatoire, lequel du haut ou du bas serait le Paradis et l'Enfer?
La question semble posée dans l'esprit de Drogo même si elle reste largement rhétorique, étant ce que l'auteur a fait de lui.
Du haut de la Montagne magique, Thomas Mann et Hans Castorp jettent un regard curieux et perplexe...Comme cela a déjà été mentionné dans d'autres critiques, Franz Kafka et K clignent de l'oeil, un brin complices.

ll y a longtemps que la géographie a identifié ces configurations de montagne et, semblant choisir son camp, désigné ces lieux topologiques: bassin de réception, chenal d'écoulement et cône de déjection. Comme s'il était évident d'établir entre eux une hiérarchie, en gratifiant l'un et déclassant l'autre par leur seules désignations.
Buzatti quant à lui, et c'est son mérite, ne tranche pas de façon si univoque, car il n'y aurait plus de roman: si le bas n'est qu'ébauché, a priori guère attractif et semblant correspondre à sa dénomination géographique, ce n'est que la conséquence du choix (ou est-ce un non-choix?) de Giovanni Drogo et non le donné de l'auteur; et le haut, si magnifié soit-il dans l'oeuvre, est-il si digne de sa belle appellation topologique, si on en juge par le destin du lieutenant? Aux innocents, les mains pleines mais aux rêveurs pusillanimes, les mains vides et point de réception.
L'entre-deux ne devrait être qu'un passage, un lieu de séjour temporaire où finalement rien n'arrive, sinon des eaux de fonte qui chutent et des âmes abandonnées aux bons soins de Charon qui ne font pas évènements. Buzatti surprend en décidant in fine d'y arrêter le temps.
Etrangement, mais n'est-ce pas une manifestation de la magie de l'oeuvre, le sablier (sablier de la vie, qui en principe ne se retourne pas), autre modèle de topologie semblable, concrétise parfaitement cette articulation espace-temps si essentielle au roman: les minuscules grains de sable figurant, peut-être mieux que les molécules d'eau parce que quanta visibles, cet écoulement des instants qu'on aimerait pouvoir suspendre, sinon arrêter.

Avec le personnage de Giovanni Drogo campant un anti-héros de rêve, Dino Buzzati fait un choix en apparence statistiquement raisonnable pour prétendre illustrer une problématique humaine qu'il veut, on l'imagine, universelle.
Pourtant le trait est forcé à un degré qui affaiblit la démonstration: l'appropriation benête et fantasmée d'un avenir servi par d'autres, l'assujettissement passif aux habitudes et routines, la mollesse de caractère et le défaut d'esprit de décision, l'absence totale d'opportunisme, l'extrême lenteur à comprendre les enjeux et voir l'envers des décors,….La statistique est substantiellement mise à l'épreuve.
Heureusement, avec Angustina, vrai héros celui-là, Buzatti affermit paradoxalement son propos en le relativisant et ouvre grand la fenêtre vers l'atteinte possible d'un destin personnalisé, de pleine humanité. Vers un Haut accessible à Angustina, à force de courage et de volonté, bien éloigné du Haut hors de portée dérisoirement visé par Drogo.

La lecture de cette oeuvre surprenante bien qu'inégale procure d'excellents moments, son format réduit favorisant sa force de percussion.
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➡️ de quoi ça parle ? Giovanni Drogo est un jeune officier tout juste enrôlé au fort Bastiani. Plein d'espoirs et de rêves d'aventure et de gloire, il sera vite refroidi dans son ardeur en découvrant la vie austère et morne du fort. Pourtant, une force étrange le fait rester sur place et peu à peu s'enfoncer dans sa routine, son règlement, ses codes et rituels, rompant avec sa famille, ses anciens amis et même toute vie sentimentale. Ne cessant jamais vraiment d'espérer une guerre qui donnerait un sens à sa vie…

➡️ Je vous recommande cette lecture si la chaleur actuelle vous épuise, ce livre est un véritable roman d'atmosphère qui se situe quelque part entre le rêve et la réalité, où la fraicheur crépusculaire pimente les pensées du personnage principal et où le silence est roi. le récit est simple, précis et contamine le lecteur dans une sorte de dédale psychanalytique onirique, où se confronte les angoisses et les attentes de Giovanni face à la fuite du temps et l'absurdité de la guerre.
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