Citations sur Rhapsodie italienne (118)
-Je pense que tu as eu peur, dit Julia. Je sens que tu ne me racontes pas tout. Tu ne peux pas.
- La peur, dit Lorenzo, c'est avant et c'est après. Sur le moment, on n'y pense pas.
La guerre ne confère d'autre diplôme que celui des médailles et des citations.
Dans l'île, le temps ne compte pas, la durée, les délais, c'est pour les gens de Rome. En Sicile, on ne vieillit pas. On va doucement vers la mort, ce qui n'est pas la même chose, d'ailleurs, les gens ne meurent pas vraiment, ils passent de l'autre côté, chargés des messages des vivants, et on continue de communiquer avec eux, bien après qu'ils ont rejoint le cimetière.
Il vient beaucoup de monde aux obsèques de don Tomasini, des cousins, des arrière-cousins, des faux cousins, des correspondants d'affaires, des hommes politiques et quelques personnages délégués d'organismes fictifs, qui en réalité représentent cette institution typiquement sicilienne dont on ne prononce jamais le nom. Il ne vient pas d'amis parce qu'il n'en a jamais eu.
Ils rient. Ils ont les désirs de leurs vingt ans et, au village, il n'est pas question de papillonner auprès des filles, sauf à afficher une volonté de mariage. Pères et frères veillent au grain et ont le couteau facile. Une fille qui cède à un garçon qui ne l'épousera pas est une fille perdue dont personne ne voudra, et son amant d'un mois, d'un soir, un homme mort. Les villages sont pleins de ces histoires de filles, enceintes ou déflorées, qui ont dû quitter leur famille pour aller se louer comme domestiques, dans des endroits où personne ne les connaît. Quant à l'amant, si on l'identifie, une fois mis en demeure de régulariser la situation et s'y étant refusé, il doit, lui-aussi, s'exiler dans une contrée lointaine, à l'autre bout de l'île (la Sicile) ou même sur le continent. A défaut, on le retrouvera comme le père de Nino, un beau matin, sur le bord d'un chemin, le lacet encore noué autour du cou.
Ce que tous deux ignoraient, c’est que leurs raisons d’entrer dans les troupes d’assaut se ressemblaient, un manque, un vide cruel dans la vie
En Sicile, on ne vieillit pas, on va doucement vers la mort, ce qui n'est pas la même chose, d'ailleurs, les gens ne meurent pas vraiment, ils passent de l'autre côté, chargés des messages des vivants, et on continue de communiquer avec eux, bien après qu'ils ont rejoint le cimetière. Tout cela, Carmela le sait.
L'élégante, la belle Carmela fait partie de ces femmes qui donnent le ton. Elle fait la mode, lance les débats et entretient les conversations.
Grandi rappelle cette maxime des anciens Romains : "Le plus grand malheur pour un peuple est d'être gouverné dans les moments dramatiques par un vieux prince."
_ Je l'ai déjà entendu, celle-là, remarque Lorenzo, en remplaçant un vieux prince par un enfant.
_ Quand j'ai rouvert les yeux, j'ai aussitôt senti la douleur tout le long de ma jambe, mais surtout, je me suis aperçu que je n'étais pas seul dans ce trou. Un autre soldat, blessé lui-aussi, me regardait sans bouger...
A un moment donné, un obus est tombé juste à côté. Il a explosé et cela a produit un souffle violent, tandis que de la terre soulevée est retombée sur nous, et il y a eu un éboulement... Dans un mouvement instinctif, cet homme et moi nous nous sommes rapprochés l'un de l'autre et pris dans les bras. Pour que chacun protège l'autre... Pendant plusieurs minutes, j'ai posé mes mains sur sa tête et lui sur la mienne. Puis là-haut, enfin à l'extérieur, ça s'est calmé. Le combat se déplaçait plus loin. Alors, nous nous sommes écartés et j'ai découvert qu'il était autrichien.
_ Que s'est-il passé ? demande Julia.
_ Rien, nous étions là, face à face. Lui à genoux, moi sur le flanc à cause de ma jambe. Lui était blessé au bras et à l'épaule... Il m'a offert une cigarette et moi un morceau de biscuit...