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4,01

sur 3268 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce qui constitue la trame du récit est bien connu : d'innombrables critiques présentes sur ce site en font mémoire. Je veux donc simplement exprimer ici mon admiration devant l'acuité avec laquelle Carrère pose, à la fin de son livre, la question cruciale : une rédemption est-elle seulement possible, pensable pour cet homme ? Que penser de la conversion en captivité de Jean-Claude Romand ? Ultime stratégie de dissimulation, de fuite du réel, ou bien authentique ouverture vers une transcendance... et un possible salut ? La question n'est pas simplement pour une conversation de salon. En témoigne la violence de la réaction de la journaliste Martine Servandoni, à l'avant-dernier jour du procès, après le témoignage de Marie-France, visiteuse en prison : le témoignage de cette dernière a rendu Martine "folle de rage". Alors quoi ? N'y a-t-il, pour Jean-Claude Romand, de retour au réel qu'au prix d'une profonde dépression ? Et qui jugera qu'elle aura été assez profonde ? Peut-on reprocher à un homme de ne s'être pas suicidé ? Jean-Claude Romand a-t-il désormais le droit d'avoir des amis, une foi, une espérance ? Ce sont ces questions redoutables qu'Emmanuel Carrère pose avec finesse, sans prendre parti, à la fin de son livre. A elles seules, elles lui donnent de mériter d'être lu.
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Livre terminé d'un trait, en une journée. Magnétique et dur. Je n'ai pas aimé tous les livres d'Emmanuel Carrère, mais celui ci me fait le même effet que d'autres vies que la mienne qui m'avait bouleversée il y a quelques années.

L'histoire est lugubre: Jean Claude Romand a menti pendant 18 ans à tout le monde autour de lui, se faisant passer pour un médecin alors que son parcours dans le monde médical s'est arrêté le jour des examens de 2ème année où il ne s'est jamais rendu. Ce jour là le mensonge de sa vie a commencé: il s'est inventé une grande carrière de chercheur, a emprunté de l'argent à tout son entourage. Et personne n'a rien vu tellement sa nature est rassurante. 18 ans plus tard alors, quasi découvert, il tue sa femme, ses enfants et ses parents. Pour les épargner. Pour ne pas avoir à faire face à leurs regards déçus. Lui survit en ratant (lachement?) son suicide. Les voisins et amis découvrent alors la vérité abasourdis et profondemment blessés.

L'histoire a déjà tout d'un roman mais Emmanuel Carrère le raconte prodigieusement bien. Il avait essayé d'écrire le livre au moment des faits mais n'a pas trouvé l'angle qu'il voulait y donner puis y est revenu plus tard et a réussi cette biographie saisissante. le récit des moments d'errance de JC Romand à la fois très entouré mais très seul dans son mensonge a réussit à me toucher. Ce qui n'efface en rien l'horreur des faits.
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Retour de lecture sur "L'adversaire" d'Emmanuel Carrère de 2002. Ce roman, ou plutôt ce récit, est basé sur l'affaire Romand, ce faux médecin de l'OMS qui a tué toute sa famille. Celle-ci a été traitée par de nombreuses émissions télévisées sur les faits divers. Contrairement à ces émissions, les faits sont ici traités de manière minimaliste pour se concentrer surtout sur l'aspect psychologique et le parcours de Romand. Ce livre est donc effectivement, comme j'ai pu le lire, un anti-"Faites entrer l'accusé".  L'angle d'attaque est bien plus intéressant et original. Carrère a essayé de comprendre comment Romand en est arrivé là et tout simplement comment cette histoire ahurissante a pu avoir lieu. C'est court, bien construit, très bien écrit. Même si l'affaire est ultra connue, c'est tellement incroyable que cette lecture reste intéressante. J'ai attaqué ce livre en étant très sceptique quant à l'intérêt d'en lire un sur cette affaire et finalement j'en sors abasourdi par cette personnalité hors du commun, difficilement saisissable, et qui fait froid dans le dos.
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Une fois de plus je retrouve l'écriture d'Emmanuel Carrère, écriture que j'aime, belle sans fioritures inutiles.
A nouveau, c'est du "vrai" qu'il met en mots et c'est là qu'il excelle.
Il s'attaque ici à une histoire que peu d'écrivains auraient osé imaginer, tellement les faits sont monstrueux. Il s'agit du fait divers qui avait défrayé la chronique en 1993, l'affaire Jean-Claude Romand, cet homme qui avait vécu sa vie entière dans un immense mensonge et qui, lorsqu'il sent que l'étau se resserre ne voit d'autre solution que de supprimer tous ses proches (femme,enfants et parents).
Emmanuel Carrère veut comprendre, mais écrire sur ce sujet n'est ni facile, ni banal , il dit même "J'avais peur. Peur et honte. Honte devant mes fils que leur père écrive là-dessus."
J'ai été passionnée par cette lecture et par le regard d'Emmanuel Carrère, ce regard qu'il pose sur cet homme, assassin de la plus monstrueuse manière qui soit, menteur tout au long de sa vie mais qui reste tout de même un homme ....
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Un livre qui dérange ou qui fascine... On ne sait pas vraiment quand on le referme.
Je me souviens du visage de cet homme - Jean-Claude Romand - à la télévision, surtout de son regard. J'étais petite et il m'avait marquée à travers ses lunettes.
Écrire sur un homme pareil n'était pas chose aisée, Emmanuel Carrère l'explique bien. Il existait deux camps : celui de le voir comme un monstre qui a tué de sang froid ses parents, sa femme et ses enfants... et celui d'avoir pitié de lui en tentant de comprendre les raisons d'un acte aussi épouvantable...
Les pages se tournent et l'auteur énumère les faits, l'écoulement de sa vie jusqu'à être au pied du mur et de commettre l'irréparable... J'en ai des frissons en pensant jusqu'où le mensonge peut mener un homme ou une femme.

Cet homme a été libéré en juin 2019, mais qu'est-il devenu ? S'est-il pardonné ? Les survivants autour de lui ont-ils pardonné ?
Tant de questions...

Un livre à découvrir, à le voir comme un documentaire, plus qu'un roman.
L'auteur le souligne : il a eu du mal à trouver son point de vue... car la question du JE a toute son importance.
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Emmanuel Carrère, dans "Le Royaume", évoque à plusieurs reprises ce qu'il avait écrit à propos de Jean-Claude Romand et cela a motivé ma lecture de "L'Adversaire".
Le samedi 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand tue sa femme et ses deux enfants avant d'aller faire subir le même sort à ses parents et à leur chien. Partant de ce terrible constat, l'auteur détaille tout son cheminement pour tenter de comprendre l'homme qui a commis de tels faits sans se dispenser de raconter une vie basée sur un monstrueux tas de mensonges.
À Ferney-Voltaire, « les Romand ? Tout le monde les aimait. » Luc Ladmiral, le médecin généraliste du lieu, était le grand ami de Jean-Claude, parrain de sa fille, considéré comme une sommité dans le monde de la recherche. Tout le monde croyait qu'il travaillait à l'Organisation mondiale de la santé (OMS), à Genève, mais après qu'il eut survécu à l'incendie de sa maison, les vérifications établirent qu'il n'y avait pas de Dr Romand à l'OMS, qu'il n'était pas inscrit à l'Ordre des médecins et qu'il avait arrêté ses études à la fin de la seconde année…
Dans le Pays de Gex, banlieue résidentielle de Genève, en France, on ne veut pas croire ce qui apparaissait au grand jour à propos d'un homme disant fréquenter Bernard Kouchner et dont un prétendu cancer était soigné par le Pr Schwartzenberg… Pas à pas, Emmanuel Carrère décortique cette vaste et dramatique imposture.
Six mois après les événements, il écrit à J-C Romand et ne reçoit une réponse que deux ans après car celui-ci vient de lire "La classe de neige" et a beaucoup apprécié. Une correspondance débute entre les deux hommes. Malgré la peur et la honte qu'il éprouve à vouloir écrire sur ça, Emmanuel Carrère se rend sur les lieux, parcourt les chemins forestiers du Jura où Romand passait ses journées, lui, le fils d'une famille de forestiers jurassiens.
Le livre retrace aussi la jeunesse de Romand, ses études, comment il réussit à s'attacher les faveurs de Florence qui deviendra sa femme. Ainsi, l'auteur décortique patiemment cette vaste supercherie si difficilement explicable, sans omettre de souligner les moments où tout aurait pu être découvert, évitant le drame final.
À force de ponctionner de grosses sommes d'argent à sa famille et à ses amis, l'étau se resserre : « Sans savoir d'où le premier coup allait venir, il savait que la curée approchait. » Il tue méthodiquement puis revoit Corinne, une femme connue à Ferney, qui vit maintenant à Paris et qui lui réclame de plus en plus fermement les 900 000 F (137 204 €) qu'elle lui avait confiés pour qu'il place cet argent dans une banque suisse, système déjà employé avec d'autres personnes crédules.
Condamné à perpétuité avec 22 ans de sûreté, Jean-Claude Romand est devenu très croyant, influencé par Marie-France et Bernard, visiteurs de prison, mais Emmanuel Carrère se demande si le menteur qui est en lui, "L' Adversaire", ne le trompe pas une fois de plus
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Voilà plusieurs jours que j'ai refermé ce livre, et moi qui préfère habituellement poster mon commentaire babelio "à chaud", je n'ai pas pu cette fois m'atteler immédiatement à la tâche.
J'ai laissé décanter. J'ai attendu de reprendre mes esprits, j'ai attaqué un bouquin plus léger pour me remettre de cette plongée en apnée dans le délire d'un homme piégé par ses propres mensonges.

Aujourd'hui encore j'ai du mal à donner mon avis ce "document" (roman ? biographie ? enquête ?) proprement incroyable, au sens premier du terme. Emmanuel Carrère s'y livre à un exercice perilleux : essayer d'expliquer l'inexplicable, de cerner la personnalité d'un affabulateur hors-pair, lui-même complètement perdu entre ses deux vies parallèles, de comprendre un scenario trop fou pour être même imaginé par le plus créatif des scénaristes de fiction...

L'histoire - celle d'un faux-medecin de l'OMS où il n'a jamais mis les pieds, qui a trompé son monde pendant 18 ans (!!!) avant d'assassiner sauvagement parents, femme et enfants quand la supercherie était sur le point d'être découverte - est connue de tous. Cependant Carrère nous la présente sous un jour totalement inédit. Comme souvent, il s'est personnellement investi dans cette enquête, largement rédigée à la première personne, jusqu'à prendre contact avec Romand, à instaurer une relation de confiance avec "le monstre" qui, du fond de sa prison, a contribué à cette réécriture d'une des plus grandes affaires criminelles de ces dernières années.

Et c'est là que le danger guette : comment collaborer avec un assassin sans être happé par sa folie ? Comment ré-ouvrir ce terrifiant dossier, comment revenir sur l'origine du "déraillement" sans prendre en pitié un criminel ? Comment disséquer un cerveau malade sans basculer du côté de l'Adversaire (que la Bible appelle "le Satan") ?
Avec son style si personnel, Carrère revient sur les différentes étapes de son travail d'investigation, et parvient à maintenir toujours la juste distance avec son sujet. J'ai beaucoup apprécié le retour en arrière sur l'enfance de Romand mais je m'interroge encore, comme l'auteur lui-même, sur la sincérité du Romand d'aujourd'hui, apparemment appaisé après une conversion mystique.
Personne sans doute ne comprendra jamais tous les ressorts de ce drame, mais Carrère a le mérite d'essayer... Avec toute la rigueur et le talent qu'on lui connait, il transforme un fait divers sordide en une réflexion profonde (et parfois dérangeante) sur les notions de mensonge et de vérité, de confiance et de trahison, de culpabilité et de repentir, de démence et de duplicité...

Une lecture éprouvante donc, et l'on imagine sans mal que l'écriture le fut tout autant.
L'auteur lui-même, s'adressant à l'assassin, reconnaît : "Mon problème n'est pas, comme je le pensais au début, l'information. Il est de trouver ma place face à votre histoire. En me mettant au travail, je pensais pouvoir repousser ce problème en cousant bout à bout tout ce que je savais et en m'efforçant de rester objectif. Mais l'objectivité, dans une telle affaire, est un leurre."
Un de plus !
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Ce livre a pour sujet l'affaire Jean-Claude Romand. le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand, 39 ans, tue sa femme en lui fracturant le crâne, et ses enfants, âgés de 5 et 7 ans, à l'aide d'une carabine, ainsi que ses parents par le même moyen. Il incendie volontairement sa demeure ainsi que les dépouilles par la suite, et tente en vain de se suicider en avalant une dose mortelle de barbiturique. L'enquête révèle qu'il n'était pas médecin comme il le prétendait. Pendant dix-huit ans, il a menti à sa famille sur sa situation : il n'avait pas de travail. Lorsque sa famille commence à se rendre compte de la supercherie, il décide de la supprimer.
Emmanuel Carrère raconte sa difficulté à trouver sa place dans le récit. Plusieurs fois, il a essayé d'écrire l'histoire sous forme de roman en faisant parler l'assassin à la première personne ou en racontant l'histoire du point de vue des amis de Romand et des protagonistes de l'histoire. Toutes ces tentatives ont été vaines. Finalement, c'est en narrant sa propre expérience qu'il trouve le moyen d'écrire ce livre.
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j'avais adoré cet ouvrage, le meilleur à mon sens de l'auteur ( dont j'ai aussi énormement aimé la classe de neige et d'autres vies que la mienne)...ce mélange d'autofiction et de faits divers, et un fait divers vraiment fascinant par ce qu'il dit sur la nature humaine m'avait vraiment emballé..je n'avais pas trouvé la lecture particulièrement dure contrairement à d'autres de ses oeuvres ( comme Limonov son dernier en date)... un roman magnifique, et également deux très belles adaptations ciné, une de Laurent Cantet, et une autre plus fidèle de Nicole garcia!!!
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J'ai beaucoup aimé ce livre de Carrère basé sur une (horrible) histoire vraie. L'auteur a interrogé un meurtrier, un homme qui a tué sa famille après plusieurs années de mensonge.
J'ai apprécié le fait que l'auteur ne prenne pas position. Il ne joue pas le rôle d'un avocat qui défendrait cet homme ou qui l'accuserait. Sur un ton neutre, Emmanuel Carrere retrace l'histoire de Jean-Claude Romand sans en fournir d'explication, ni d'excuse.

C'est un livre qui m'a profondément marquée.
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