AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,98

sur 219 notes
5
2 avis
4
3 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis
Dans ce dernier volet de la trilogie allemande, Céline cherche toujours à gagner le Danemark. L'Allemagne nazie est plus que jamais au bord du gouffre : les gares sont ravagées et désertées, les trains mêmes sont en piteux état, et parfois réduits à de simples plateformes qu'on charge comme on peut. Un semblant de bureaucratie persiste, sans d'autre intérêt que celui de maintenir la routine.

Quelques compagnons de route croisent le chemin de l'écrivain : un médecin et son groupe de lépreux qui doivent rejoindre un dispensaire, bien que plus personne ne sache exactement où il se trouve ; un italien, affolé par son retard malgré les circonstances, qui cherche désespérément à rejoindre son patron ; une française qui refile à Céline son cortège d'enfants handicapés à mener à bon port. Pressé par les menaces de bombardement, le groupe part toujours dans l'urgence et tourne souvent en rond.

Le récit est entrecoupé par les sempiternelles plaintes de Céline sur les critiques qu'il reçoit de toute part, et son sentiment de persécution. le thème racial, mis en veilleuse depuis ses pamphlets, refait son apparition : Céline prophétise la fin de la race blanche et critique toutes les religions, les loges, les politiques qui font l'apologie du métissage. Sachant qu'il est mort quelques heures après avoir mis la touche finale à son texte, on est bien tenté d'y voir une sorte de testament, dans lequel l'auteur réaffirme ses convictions, persuadé d'avoir raison, envers et contre tous.
Commenter  J’apprécie          340
Préface : François Gibault

ISBN : 9782070364817

Extraits
Personnages

"Rigodon", publié huit ans après le décès de l'Ecrivain Prodige que fut Céline, l'est ici, la note de Lucette Destouches, sa veuve, en témoigne, dans le court billet situé avant le manuscrit lui-même, comme l'eût souhaité l'écrivain. Est-ce parce que je savais que c'était le dernier "roman" de Céline qu'il me restait à lire ? Ou bien parce que je ne suis pas moi-même au meilleur de ma forme ? Toujours est-il que j'ai hésité et puis, j'ai été emportée, je me suis jetée sur le malheureux "Rigodon" et j'ai lu et relu - car il y a des redites : Céline avait soixante-sept ans quand il mourut, le 1er juillet 1961, à Meudon - et ce texte, pourtant si beau jusque dans ses imperfections et dédié lui aussi "aux animaux" mais cette fois exclusivement à eux, m'a paru le plus amer, le plus désespéré, le moins "drôle" de son auteur.

Pour ceux que choquerait le fait que j'ose affirmer que Céline avait un sens inné de l'humour, je leur répondrais d'aller se faire foutre (s'ils trouvent preneurs) et que nier la chose revient à dire que Talleyrand, malgré toutes ses trahisons et ses turpitudes inouïes, n'était pas un grand homme d'Etat.

Les choses donc éclaircies (tout au moins, je l'espère Bad ) en ce domaine, reconnaissons à "Rigodon" que Céline n'eut pas vraiment le temps de l'achever. Que le Breton de Courbevoie avait mené une vie des plus agitée et connu des expériences - dont la terrible pellagre - qui avaient beaucoup nui à sa santé. Et qu'il n'était certainement pas, lui non plus, au meilleur de sa forme, quand il songea à reprendre la fin de ses notes.

Mais le style, lui, jeune, increvable, est toujours là, incomparable, avec l'ombre du Céline que connaissait jusqu'ici le lecteur, qui se montre de temps à autre : elle est là, bien présente, dans la scène où Robert le Vigan, en partant à Rome et en révélant surtout qu'il avait tramé cette fuite à Siegmaringen (orthographe célinienne) sans en parler à son vieil ami, ricanant et raillant au maximum pour ne pas laisser passer l'émotion de l'homme et de l'écrivain. Tandis que le Vigan est prêt à tomber à genoux pour remercier son créateur, Céline, que l'on sent pour une fois aussi blessé au coeur qu'il put l'être dans son enfance, nous raconte la scène en nous disant, grosso modo, que "La Vigue", comme il l'appelait, se replonge ici instantanément dans le rôle du Christ qu'il avait tenu une fois (et sans grand succès, il faut bien l'avouer, malgré une prestation "leviganesque", c'est-à-dire toujours inspirée mais excessive) dans le "Golgotha" de Julien Duvivier. (Certains devaient dire d'ailleurs pour sa défense, après l'Occupation, que le prestige de ce rôle et l'intensité qu'il avait apportée à l'interpréter étaient tels qu'ils avaient "achevé" en quelque sorte la raison d'un comédien génial mais malheureusement très (trop) instable sur le plan psychique.)

Céline a considéré "La Vigue" comme son "ami", un vrai. Et "La Vigue" a trahi son ami Céline. Au contraire de Bébert, qui était à l'origine le chat de le Vigan, et qui finit ses jours entre Céline et Lucette Destouches, à Meudon, après avoir traversé en long et en large l'Europe du Nord dans des conditions souvent extrêmement difficiles (surtout pour un félin qui ne fait pas de politique).

Céline, malgré tout ce qu'il veut nous en faire accroire, ne s'en est pas remis, de cette trahison. Et nous non plus, surtout si nous sommes cinéphiles. Et Grands Lecteurs. La tristesse de Céline, cette tristesse qui l'habitait et qu'il sut, pendant des années, dissimuler admirablement sous son masque de clown hargneux, vindicatif, rebelle, provocateur, génial, cynique, bouleversant en toutes choses, iconoclaste-né, nous la partageons avec lui et c'est déjà sa disparition à lui qui nous atteint, comme le couperet de la guillotine qui nous trancherait le col. Oh ! bien sûr, dans une prescience incertaine et dont lui seul pourrait nous dire s'il l'a ressentie envers ceux qui, vaille que vaille et en dépit de leurs opinions politiques personnelles, l'avaient suivi et le suivraient fidèlement dans ses livres et son oeuvre, il nous sort de temps à autre quelques intermèdes bien dans sa manière : ses entretiens délirants (ils ont quelque chose de moliéresque ) avec les journalistes, tout ce qu'il raconte sur Sartre, ici aimablement surnommé "Le Ténia" et de petites remarques drôlatiques, par-ci, par-là. Mais, et il l'écrit lui-même maintes fois, l'élan n'est plus là. L'âge est là, rappelle-t-il presque sentencieusement, en ne pouvant s'empêcher d'évoquer ceux qui s'acharnèrent sur les pierres tombales de ses parents pour effacer le nom soit-disant indigne de "Destouches" alors que tant de "collabos" bien pires que Céline et bien plus actifs, conservèrent ou retrouvèrent tranquillement leur poste et leur statut d'avant-guerre sans que quiconque songeât à aller se "venger" sur les tombeaux de leurs géniteurs.

"Rigodon", le rigodon de la Mort, a vaincu Céline. Il est mort dans cette certitude, alors qu'il figurait déjà dans la Pléiade et la Mort plane sur "Rigodon" comme, bien qu'y étant toujours présente, elle ne plane jamais dans aucun autre "roman" de l'écrivain. "Rigodon", malgré les facéties dont j'ai parlé plus haut, malgré tout ce qui concerne les enfants "différents" que Céline et Lucette prennent sous leur aile pour les expédier à bon port en Suède - Céline, le seul auteur qui ne m'aura jamais choquée dans son langage sur les enfants handicapés parce qu'on y sent la vérité, la lucidité et une tendresse (oui, j'ose ! ) cachée, parce qu'il appelle un chat un chat et que, superbement, il affirme, à ceux qui ne veulent pas "voir" ces enfants-là comme ayant des sentiments : "J'appelle un chat un chat mais pour moi, tous les chats, sans exception, éprouvent des sentiments et je le dirai et je vous le redirai jusqu'à la fin des temps et je vous emmerde, bande de connards ! - le Désespoir s'installe en maître dans "Rigodon". Et parce qu'il l'a senti, Céline nous adresse une dernière pirouette comique dans son final en nous replongeant dans le monde des éditeurs, avec "Gaston" (devinez) et "Achille" (devinez aussi). Un dernier rictus, un dernier éclat de rire qui s'envole ...

... vers le haut, bien sûr. Parce que, je vais vous dire, nous, les Bretons, même quand on naît à Courbevoie, on a la saine habitude de "monter en haut" et de "descendre en bas." Et pour nos éclats de rire, c'est pareil : ils montent "en haut." Oh ! Vous aurez beau nous traiter, et Céline avec nous, de tous les noms, vous aurez beau affirmer (ce qui est vrai) que nous sommes loin d'être parfaits, vous aurez beau dire de nous qu'on est des "ploucs", des "collabos", des "nigauds" (cette dernière insulte, vous la trouverez sur Facebook parce que trop de Bretons ont voté récemment pour les anneaux de ténia (sauce hollandoise) qu'est désormais "la gôôôôôôôôôôôche", et encore dans un système électoral en pleine déliquescence parce que trop trafiqué), nous monterons toujours en haut.

Et Louis-Ferdinand Destouches, dit Céline, d'origine bretonne et normande, né à Courbevoie le 27 mai 1894, croyez-moi : c'est tout en haut qu'il se trouve aujourd'hui.

Ah ! ça en fait râler certains d'entre vous ? Alors, ne vous gênez pas. Continuez à le traiter de tous les noms. Il a retrouvé toute sa forme : tôt ou tard, il vous enverra sa réponse en pleine figure. Et ce sera du gratiné ! Je m'en régale à l'avance. Pas vous ? ... ;o)
Commenter  J’apprécie          250
Enfin arrivé au bout d'un des plus difficiles romans de Céline.
Difficile à lire car dans un sens inachevé et Céline est mort après avoir annoncé à son éditeur la fin de la rédaction, mais il n'a pas revu le texte, de fait.
Autre constat, comme toujours, c'est le style de Céline qui impose le rythme de lecture, et là il m'a mené un train d'enfer.
Le train qui est un des personnages principaux du récit, une épopée invraisemblable à travers l'Allemagne nazie qui s'effondre sous les bombes en direction du Danemark où Céline a mis en sûreté son magot.
Il faut en tout cas être drôlement accroché pour ne pas perdre le fil, ce n'est pas Nord.
Commenter  J’apprécie          121
Un livre que j'ai lu une première fois il y a bien longtemps maintenant, c'était le premier ouvrage de Céline que j'abordais. Je déconseille donc formellement sa lecture avant au moins d'avoir lu "Nord" et "D'un château l'autre", ça n'aurait presque aucun intérêt. Mais maintenant que je les ai lus, j'ai bien apprécié Rigodon qui complète, qui éclaircit encore un peu les péripéties de Céline dans l'Allemagne nazi qui perd la guerre 39-45, dans une ruée vers le nord. J'adore toujours ce style si particulier de Céline, du bonheur, un génie incomparable. Néanmoins, j'ai l'impression que l'on ressent - dans ce dernier livre qui précède de très peu sa mort, plus que dans les autres de ses productions (exceptés les pamphlets évidemment) - son racisme, sa peur du métissage qui est aussi récurrente que dérangeante.
Commenter  J’apprécie          120
«Rigodon : Danse servant de conclusion à la plupart des déplacements des danseurs et termine en point d'orgue le phrasé musical. »
Rigodon, c'est le point d'orgue du style émotif de Céline. La conclusion à la trilogie allemande. La fin de cette danse entre les bombes de la RAF dans une Allemagne dévastée par la fin de la seconde guerre mondiale. C'est aussi, le dernier livre de Céline, qu'il a terminé le jour de sa mort. Une conclusion envers et contre tous. C'est un récit grotesque et musical. On suit le phrasé célinien comme une mélodie ensorcelante, dans les ruines d'un pays en proie au vide et à l'anarchie. Au fond, ce qui compte n'est pas forcément l'histoire en elle-même, mais le style de cette oeuvre. Il faut s'accrocher. Entre les retours incessant à son présent où Céline fulmine contre son éditeur, les autres écrivains (Sartre le Tænia) et même ceux qui l'encense (« Son Barjavel, oh, là ! là! aussi pourri que lui ! à la fosse avec !»), on peut avoir du mal à suivre. Il faut au contraire se laisser emporter par cette musique célinienne. Céline n'a pas écrit Rigodon comme un roman – celui-ci est déjà mort depuis bien longtemps ! – Il l'a écrit comme une mélodie, une mélodie vibrante, noire, terrible mais puissante. A lire et relire.
Commenter  J’apprécie          100
Ce livre, troisième du triptyque de la fuite de Céline à travers l'Allemagne pour rejoindre le Danemark, dans un pays ravagé et désorganisé par la guerre, est dans la même veine que les deux premiers. Avec un style décousu qui rend la lecture difficile. Les descriptions de cette Allemagne et de son Reich à l'agonie, avec un humour Celinien, sont le seul interêt de ce livre.
Commenter  J’apprécie          20
3ème partie de son exil, toute une saga en train jusqu'au Danemark... et toujours cet écriture...
Commenter  J’apprécie          20
ce n est pas vraiment un livre, juste une partie d un tout inacheve,
une suite de dialogues, un peu penibles a lire, pas vraiment de fond,
il manque a tout cela un achevement, un peu de completude,
heureusement c est court,
faut bien que Gallimard vive ...
Commenter  J’apprécie          00
J'ai lu pour vous le "premier chapitre" afin que vous vous fassiez votre opinion.
Retrouvez cet extrait sonore de quelques minutes afin de l'acheter ou l'emprunter en connaissance de cause.
Lien : https://www.youtube.com/watc..
Commenter  J’apprécie          00



Lecteurs (637) Voir plus



Quiz Voir plus

Quiz Voyage au bout de la nuit

Comment s'appelle le héros qui raconte son expérience de la 1ère guerre mondiale

Bardamu
Bardamur
Barudamurad
Barudabadumarad
Rudaba Abarmadabudabar

9 questions
1301 lecteurs ont répondu
Thème : Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand CélineCréer un quiz sur ce livre

{* *}