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Paru en 1946, « La main coupée » appartient aux « Mémoires » de Cendrars, qui comprennent également « L'homme foudroyé », « Bourlinguer » ainsi que « Le lotissement du ciel », et reviennent sur les mille vies de l'auteur suisse.

Grand bonimenteur devant l'éternel, Blaise Cendrars n'est jamais à court d'une histoire fantasmée ou vécue, d'une histoire qui sort de l'ordinaire, et nous révèle l'incroyable faconde de l'auteur. Auto-fiction ? Auto-biographie ? Difficile de classer « La main coupée » qui revient sur l'engagement volontaire dans la légion étrangère, d'un poète suisse qui n'aimait pas les boches. « La main coupée » est assurément un hommage sincère et touchant aux compagnons d'armes de Cendrars, qui ont pour la plupart péri au front. Un front, où l'auteur perdit sa main droite, sa main d'écrivain et dût être amputé au-dessus du coude en 1915. Une amputation qui donne son titre à ce roman inclassable, un roman sur la guerre des tranchées, un roman autobiographique, un roman sur l'amitié et le courage.

Une « main coupée » à laquelle Cendrars consacra un poème dans « Feuilles de route » paru en 1924.

« Orion 

C'est mon étoile
Elle a la forme d'une main
C'est ma main montée au ciel
Durant toute la guerre je voyais Orion par un créneau
Quand les Zeppelins venaient bombarder Paris ils venaient toujours d'Orion
Aujourd'hui je l'ai au-dessus de ma tête
Le grand mât perce la paume de cette main qui doit souffrir

Comme ma main coupée me fait souffrir percée qu'elle est par un dard continuel »

---

Blaise Cendrars vient d'être père et de se marier, il a vingt-sept ans, lorsqu'il décide, lui qui est né en Suisse sous le nom de Frédéric Sauser en 1887, qui a déjà eu mille vies, qui a déjà voyagé en Russie et à New York, erré de longues nuits avec les poètes d'avant-garde du début du siècle, et publié lui-même, de s'engager dans la légion étrangère pour aller combattre les boches.

Dès le début de la guerre, le 1ère classe Cendrars se fait remarquer par son audace et insubordination. Il est nommé caporal et prend la tête d'une petite escouade, qui le considère comme un chef charismatique. Pour avoir photographié un christ dont la tête était tombée, le soldat Cendrars est condamné à 30 jours de prison, alors qu'il vient à peine de rejoindre le front.

Protégé par un capitaine qui l'a à la bonne, Cendrars jouit d'une certaine liberté, se moque des honneurs comme d'une guigne, a les gradés en horreur, mais n'a de cesse de harceler les Allemands tout proches, en compagnie de son escouade, dans ce nord de la France qui évoque déjà un paysage lunaire après quelques mois de guerre.

En dédiant la plupart de ses chapitres à ses compagnons d'armes, l'auteur rend hommage à ces hommes qui se sont battus à ses côtés, ces hommes que rien ne forçait à rejoindre cette guerre, ces hommes qui n'étaient pas français, mais qui ont décidé de se battre pour la France. En nous contant les destins peu communs de ceux que le destin a réunis au fond d'une tranchée sous une nuit glaciale de l'hiver 1914-1915, Blaise Cendrars dessine à sa façon ce tableau à la Jérôme Bosch que fut la première guerre.

Truffé d'anecdotes truculentes, de permissions débridées, « La main coupée » nous conte le conflit de 1914-18 avec une honnêteté, une décence et une vérité rares. Honnêteté, car c'est un poète suisse engagé qui nous conte une sale guerre. Décence, car l'auteur ne met jamais en avant son esprit d'aventure, son courage dissimulés derrière le masque de la dérision. Vérité, car la première guerre est nous est narrée à hauteur d'homme, d'un homme qui a décidé d'être là, les pieds dans la boue la plus infecte, parmi ses soldats, en dépit du jugement peu amène qu'il porte sur ses supérieurs.

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J'ai découvert Blaise Cendrars à vingt ans. Ce fut un choc, dans la mesure où je réalisais qu'il existait un auteur français qui pouvait rejoindre le Panthéon de mes auteurs américains. Un auteur à poigne, un aventurier, un Hemingway français, un soldat, un poète, un type épatant ! Un style, une gouaille, un vent de liberté ! Cendrars ignore la peur et prend la vie à la rigolade. Cendrars se fout des médailles, des honneurs, Cendrars se fout de tout. Ouais, c'est ça que je trouvais tellement classe, le mec se fout de tout, il voyage, il mord dans la vie, il est libre.

« J'étais heureux comme un roi, riche comme un milliardaire, libre comme un homme. »

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Incroyable Cendrars! Dans une langue colorée et riche comme la vie, il nous conte les anecdotes terribles des tranchées, où la survie tenait à une seconde ou quelques centimètres, où les personnages les plus obscurs prenaient dans la boue, les excréments, la peur, la faim, les parasites, les rêveries amoureuses ou sexuelles, la stature de héros de l'Antiquité, poursuivis par la malchance ou fauchés par un destin absurde, atomisés par le seul obus du secteur ou ensevelis vivants dans un entonnoir .
Une suite de portraits cocasses à la fois réalistes et expressionnistes, une description, hallucinante ,d'un monde dantesque, ou, implacable, de l'imbécillité de l'état-major. Des hommes à qui l'ont fait faire une marche de soixante quinze kilomètres à pied jusqu'à la première ligne du front, non sans leur avoir fait vider, en octobre, le "matériel non réglementaire", c'est à dire les lainages chaussettes et tricots fabriqués à la main par des milliers de femmes dans un élan de solidarité, et qui les regardent brûler sous les quolibets des sous officiers… le train qui siffle, tractant ses wagons vides, et roulant au pas sur la voie ferrée parallèle à la cohorte le long de ce voyage au bout de la nuit.
Avec tout cela, et par la magie de l'écriture de Cendrars, on croit encore en l'humanité, mais plus du tout, s'il en était besoin, en l'idéal qui fait marcher les hommes au pas. Dans ce livre, Cendrars narre aussi métonymiquement la perte de son bras droit et de sa main d'écrivain. A partir de ce tribut payé à la guerre, un autre pan de sa vie et de sa création va s'ouvrir.
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Blaise Cendrars et son écriture si pleinement descriptive, au plus près des hommes, de la boue, du malheur, de la guerre. Rien pour faire joli. Seulement la force de l'absurdité meurtrière et celle, dérisoire en comparaison mais qui pourtant rend la lecture supportable, de la solidarité, de la camaraderie, des liens entre ceux qui sont jetés dans ce non-sens furieux.

Alors qu'il n'avait pas la nationalité française, Blaise Cendrars s'est engagé à la déclaration de guerre, après avoir signé et diffusé un manifeste appelant les étrangers à rejoindre les rangs de l'armée.
Ils ont été nombreux à suivre cet appel, et au bout de quelques mois, ont été intégrés dans la Légion étrangère. Cendrars, avec le grade de caporal, était donc entouré d'hommes venus d'un peu partout. S'il ne le dit pas expressément, il semble évident qu'il était très soucieux des membres de son « escouade » et que ceux-ci lui vouaient un réel attachement.
Moyennant quoi il a partagé avec eux des heures, d'horreur souvent, mais aussi d'une immense camaraderie, d'une fraternité indéfectible née des circonstances.

Le récit s'arrête en juillet 1915, avec l'annonce d'une permission. Deux mois avant la blessure qui lui coûtera son bras droit et dont nous ne saurons donc à peu près rien dans cet ouvrage.

Le livre alterne le portrait des hommes avec lesquels il a vécu au front et les souvenirs qu'il partage avec eux. Cendrars sait à merveille décrire ses camarades, saisissant aussi bien les traits de caractère que l'allure générale et les expressions des visages. La complicité gouailleuse qu'il ressent pour chacun de ceux de son « escouade » laisse la place à une ironie ravageuse quand il évoque certains gradés, adjudants, colonels, généraux, dont il ne cache pas le mépris qu'ils lui inspirent.

Cendrars qui fréquentait avant-guerre les milieux intellectuels d'avant-garde, vit le front de plain-pied avec les hommes qui l'entourent. Lucide, presque extra-lucide, sur leurs caractères et leurs faiblesses, regardant et acceptant pourtant chacun de ces légionnaires comme un frère en humanité dans ce maelstrom d'enfer qui leur est infligé. Mario Rigoni Stern écrit quelque chose de semblable sur une autre guerre, trente ans plus tard, dans « le sergent dans la neige ».

Cendrars ne se paye pas de grands mots pour exprimer cette fraternité née de la vie en guerre. Descriptions au plus près de la réalité tangible, charnelle, dans un style d'une verve gouailleuse, parfois argotique, parfois violente, toujours précise et colorée, reflétant à la fois l'esprit populaire et carabin de la troupe, et les évènements, pittoresques ou trop souvent tragiques, qu'elle affronte.

Cette richesse d'écriture, ce regard à la fois plein de compréhension et de dérision, me rappellent ceux de Malaquais et de sa « Planète sans visa ». Deux livres écrits à la même époque, sur deux guerres différentes. L'homme y est toujours le même. Mais deux auteurs qui ont un talent fou pour le dire.

De « L'homme foudroyé » je suis arrivée sur le conseil d‘Isidore, à cette « Main coupée ». Isidore, si tu as d'autres catastrophes aussi révélatrices à me suggérer, je prends !
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À l'aise, Blaise, tu l'es, avec la goguenardise poétique de ta gauchère plume.

C'est le souffle coupé que je referme ce livre, qui figure parmi les plus grandes oeuvres que le genre humain ait pu produire. Cette oeuvre est méconnue au regard de son génie.

Gauchère, ta plume, mais tout sauf gauche.

Gauchère, car ta main d'écrivain, tu l'as perdue à la Grande Guerre, toi, l'engagé alors que tu n'y étais pas obligé, le Suisse d'origine. Dès le début de la Guerre, tu as lancé, avec l'écrivain italien Ricciotto Canudo, un Appel aux artistes étrangers vivant en France, et tu t'es engagé pour la durée de la guerre dans l'infanterie. Après un baptême du feu dans la Somme où tu t'es illustré par ta bravoure, tu es rapidement promu légionnaire de première classe, puis caporal.

Ta main droite, tu l'as perdue le 28 septembre 1915, durant la grande offensive de Champagne. Gravement blessé au bras droit par une rafale de mitrailleuse et amputé au-dessus du coude, tu es cité à l'ordre de l'armée, décoré de la médaille militaire et de la croix de guerre avec deux palmes, avant d'être réformé. Tu passes alors une année terrible, dévasté par toutes les pertes auxquelles tu dois survivre. Et il te faut réapprendre à écrire.

Ce qui me frappe le plus chez toi, c'est que ton oeuvre colle à ta vie et à tes actes. Les valeurs que tu défends dans ce texte, le courage, la camaraderie, le mépris des « planqués », l'authenticité brute innervent comme autant de veines ce livre magistral : c'est le sang de ton bras amputé qui coule ici. C'est son absence. C'est le Lys rouge.

Et tu racontes, l'air de rien, ton année au front, tes descentes nocturnes en première ligne, tes promenades en « bachot » qui apparaissent comme des sorties champêtres du dimanche, des « robinsonnades », en somme. Quel héroïsme !

Ta langue charnelle, familière, parfois obscène n'occulte pas l'abjection, l'horreur, la « pagaïe », la « merde » de cette Guerre dans laquelle tu ne vois aucun sens. Mais elle côtoie la plus pure poésie en prose que j'ai peut-être eu l'occasion de lire, l'humour le plus bravache et l'humilité la plus absolue.

Le texte est d'une beauté absolument spectaculaire et nombreuses sont les fois où j'ai frissonné corps et âme en te lisant, touchée par la beauté de l'évocation poétique et/ou la dureté des situations vécues par ces Poilus auxquels tu rends ce magnifique hommage.

Car oui, cette oeuvre est avant tout un tombeau poétique.

Il peut être ardu de suivre les méandres de ces tranchées, et tu parcours ta vie de la même manière : les époques se superposent, comme les visages, les noms, dans un labyrinthe, qui, à l'instar des boyaux dans lesquels vous vous enfoncez désespérément, toi et tes hommes, tout en espérant vous en sortir, perdent le lecteur et le malmènent.

Mais on avance, pas à pas, derrière toi, mon caporal, et on déterre en ta compagnie les survivants, et on compte les morts, auxquels tu tentes sans illusion de redonner vie, comme doit le faire un Phoenix.

Respect. Au grand écrivain et au grand homme.
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C'est un livre autobiographique de Blaise Cendrars écrit entre 1939 et 1941, qui raconte sa vie dans les tranchées durant la première guerre mondiale. C'est plein d'anecdotes qui vont du comique au tragique, teintées d'amertume et de dépit devant l'incompétence et l'incongruité de la hiérarchie. Cendrars avec sa verve de bourlingueur nous dépeint une série de portraits hauts en couleurs. C'est à la fois touchant et révoltant, désabusé et plein d'espoir.
C'est toujours un plaisir d'ouvrir un livre de Blaise Cendrars.
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Blaise Cendrars témoigne dans La main coupée de sa vie de soldat sur le front franco-allemand durant la Première Guerre mondiale, comme engagé volontaire dans la Légion française. Loin de chercher à nous tirer des larmes sur les malheurs et les horreurs vécus par les poilus, Cendrars donne à voir ce qu'il reste d'humain dans un environnement qui ne l'est absolument pas. Il dresse une série de portraits très vifs et caustiques, de ses camarades ou de ses supérieurs hiérarchiques dans une langue à la fois poétique et gouailleuse. Ses histoires paraissent parfois invraisemblables, peut-être certaines sont-elles nées de sa prodigieuse imagination, mais on ne peut qu'y croire tant elles sont sublimement composées.
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Blaise Cendrars, de son vrai nom Frédéric Louis Sauser dit « Freddy », raconte ses souvenirs de la première guerre mondiale dans laquelle il s'engage dès 1914 et qu'il quitte après avoir perdu son bras droit fin septembre 1915. Il rend hommage aux plus proches de ses camarades, ceux avec qui il passe une année au front. Il décrit finement les caractères des différents membres de sa section, à laquelle il sert de Caporal et l'on discerne les affinités, les liens qui se nouent. L'horreur du front cèle entre quelques-uns une amitié et une solidarité sans bornes. L'auteur nous raconte les aléas du quotidien, en plus d'une progression difficile vers l'ennemi, la recherche de nourriture et de tout ce qui peut améliorer le quotidien, les missions secrètes décidées par eux-mêmes dans des lieux tenus par les Allemands, et les parties de franche rigolade déclenchées autant par l'amitié que par la fatigue et la tension. Les reproches de la hiérarchie ne se font pas attendre et malgré les bons résultats, Blaise Cendrars en fera les frais. Il en profite pour dénoncer l'absurdité de certains commandements, donnés par des « planqués » bien en arrière des lignes. Blaise Cendrars livre ici son témoignage, en forme de récit de vie, sur un ton vrai et chaleureux qui rend son récit vivant et nous attache à ce petit groupe d'hommes dont beaucoup sont « tombés pour la France ».
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Il détestait la guerre. Et pourtant il s'est engagé pour la faire. Blaise Cendrars aurait-il été pétri de contradiction ? Non, clame-t-il lorsque la question lui est posée par un contradicteur venu enquêter sur ses agissements. Et d'argumenter que plus que la guerre, ce sont "les Boches" qu'il déteste. Natif d'un pays neutre, il est venu les freiner dans leur entreprise meurtrière. C'est pour cela qu'il s'était engagé et avait même incité d'autres étrangers à venir au secours de la France envahie.

Dans son grand pied de nez à l'intelligence humaine, la "grande saloperie" qu'est la guerre, comme la qualifie Blaise Cendrars, nous a privé de Charles Péguy dès les premiers jours du premier conflit mondial, de Guillaume Apollinaire, quelques heures avant que ne sonne l'armistice. Mais évoquer ceux-là, que la célébrité aura auréolés, plutôt que tant d'autres restés anonymes est une injustice. Blaise Cendrars qui a partagé le quotidien des humbles s'attache à raviver leur souvenir. Il le fait sans apitoiement, avec sa gouaille de baroudeur qui ne laisse personne à sa place dire ce qu'il a sur le coeur. Son interlocuteur fût-il général; au risque de passer pour une tête brûlée.

Blaise Cendrars a servi la France dans les rangs de la Légion étrangère. Son récit n'aura pas le même ton que ceux de Roland Dorgelès dans Les croix de bois, d'Henri Barbusse dans le feu. Il sera moins pathétique, plus bravache, plus anecdotique. Mais point n'est besoin de trame pour relater les hauts faits d'une folie collective. le légionnaire fait les quatre cents coups, nargue le boche comme le gradé. le légionnaire va chercher sa croix de guerre. le légionnaire évoque ceux qui ont partagé avec lui les dangers les plus terribles et n'en sont pas revenus, le corps dispersé dans le cloaque. le légionnaire passe ses permes à Paname dans les bras de ces dames qui glorifieront le poilu en lui prêtant, le temps d'une embrassade, cette richesse qui fait obsession. de celle qui leur manque dans les ténèbres de la déraison. Mais le légionnaire, comme les autres, tombe sous les balles des boches. Et puis après tout …

"Qui sait si l'inconnu qui dort sous l'arche immense
Mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé
N'est pas cet inconnu devenu fils de France
Non par le sang reçu mais par le sang versé" (*)

Dans la "grande saloperie" qu'est cette guerre, l'homme n'est plus homme. Il est devenu une unité de compte que les états-majors additionnent dans les tranchées, soustraient dans les assauts, multiplient dans les cimetières, divisent à grands coups de scie dans les hôpitaux de campagne. Mille de perdus dans une offensive hasardeuse, mille qu'il faudra remplacer pour reprendre la crête aux boches. Ne pleurez mesdames, vos maris, vos fils retirés à votre affection. Heureux les héros de la Nation, ils pèseront leur poids dans la grande comptabilité du souvenir français.

"Mais le cri le plus affreux que l'on puisse entendre et qui n'a pas besoin d'une machine pour vous percer le coeur, c'est l'appel tout nu d'un petit enfant au berceau : "Maman ! Maman !..." que poussent les hommes blessés à mort qui tombent et que l'on abandonne entre les lignes après une attaque qui a échoué et que l'on reflue en désordre : "Maman ! Maman !..."

(*) Quatrain tiré du poème "Le volontaire étranger" Pascal Bonetti - 1920.

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Mon grand père était un ami d'enfance de Blaise Cendrars. Il me racontait que son ami Blaise était un passionné de vitesse et de voitures de course. Quand il allait lui rendre visite en Suisse, l'écrivain l'emmenait à toute vitesse dans les routes de montagne, et lâchait le volant dans les tournants pour changer les vitesses.
Pour cause : il avait perdu une main à la guerre.

La main coupée - puisqu'il s'agit de la sienne est un monument de courage et d'humanité.

Par amour de la France, par nécessité absolue de contrer l'attaque allemande, Blaise, citoyen Suisse s'engage dans la légion étrangère.

Il sera envoyé partout où ça barde.

Avec le réalisme désinvolte d'un trompe la mort, il raconte par petites nouvelles les horreurs de la guerre en nous les montrant sous un jour surréaliste - puisqu'il ne reste plus que cela d'humanité.

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Suisse mais pas neutre, Cendrars s'engage au début de la guerre dans la Légion étrangère. Les deux régiments de marche qui le voient passer dans leurs rangs sont anéantis ou à peu près. Il y laissera la moitié d'un bras et un paquet de copains.
La main coupée, comme tous les récits de la Grande Guerre par ceux qui l'ont vécue, évoque les tranchées, l'horreur, la peur, les bestioles, la boue, la flotte... Et la mort, bien sûr, celle qu'il faut affronter en face au moment de l'assaut, celle aussi, plus insidieuse, qui peut te tomber dessus à l'improviste pendant les moments de calme ou les patrouilles.
Mais pas que. La main coupée, c'est une galerie de portraits, une chronique d'anecdotes de la vie au front. Non sans humour, Cendrars se laisse aller au pittoresque, au cocasse, à l'absurde, à la poésie... ce qui fait d'autant mieux ressortir l'horreur du reste. On oscille entre réalisme et surréalisme devant le système d'De ces poilus qui improvisent tout avec n'importe quoi. Cendrars ne se gêne pas dénoncer le merdier qui règne au sein de l'armée française et retombe comme toujours sur le combattant en première ligne.
Par son ton et sa focalisation sur les portraits, La main coupée se définit comme le roman de l'humain dans un contexte inhumain. L'armée est une grande famille, dit-on souvent. Dysfonctionnelle, faudrait-il ajouter. En tout cas, l'attachement entre frères d'armes est perceptible, l'hommage aux camarades tombés sincère, la compassion réelle. Sans envolées dégoulinant de pathos patriotico-lyrico-pouet-pouet sauce Hollywood. Un hommage simple et juste.
Lien : https://unkapart.fr/critique..
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