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Avant de lire son oeuvre, j'avais croisé la route littéraire d'Antoine Chainas par le biais de son travail de traducteur alors qu'il nous proposait la version en français de Donnybrook (Série Noire 2014), récit à la fois brut et hallucinant de Frank Bill nous entrainant dans le monde âpre d'un tournoi de combats clandestins se situant au coeur de l'Indiana. Pour ce qui concerne son travail de romancier, on ne va pas se mentir, on parlera d'un rendez-vous manqué avec un auteur singulier de la littérature noire française jusqu'à ce que je ne découvre que très récemment le fameux Empire Des Chimères (Série Noire 2019) dont il faudra prendre le temps d'évoquer le contenu un jour, même si tout semble avoir été déjà dit au sujet de ce roman emblématique faisant l'objet d'un flot considérable d'éloges enthousiastes pour un récit s'articulant autour d'un empire du divertissement se diluant dans une étourdissante succession d'univers parallèles s'imbriquant au gré d'une construction narrative maîtrisée de bout en bout. Alors qu'il a toujours publié ses romans au sein de la mythique collection Série Noire, Antoine Chainas reste chez Gallimard en intégrant désormais la non moins mythique collection La Noire, reflétant parfaitement la singularité de l'univers de l'auteur se situant à la marge de la littérature noire, en nous proposant ainsi Bois-Aux-Renards, intrigue aux allures de thriller qui bascule subtilement dans le monde chimérique des mythes, contes et légendes d'une forêt perdue où réside une étrange communauté.

Traversant cette région perdue, c'est un soir de l'an 1951 que la voiture sort de la route et que ses occupants trouvent la mort, hormis Chloé, une fillette désormais orpheline et estropiée. En marge de la société, les sauveteurs prennent en charge la gamine et dissimulent toute trace de l'accident. En 1986, comme chaque année durant la période estivale, Yves et Bernadette profitent de leur congé en sillonnant la région avec leur camping-car Transporter T3, en quête d'auto-stoppeuses qu'ils exécutent froidement. Anna, une jeune fille vivant avec sa mère dans une caravane, est la témoin malencontreuse du premier meurtre de leur saison criminelle. Parvenant à s'enfuir, avec Yves à ses trousses, Anna trouve refuge auprès d'une étrange femme boiteuse vivant au coeur d'un bois peuplé de renards. Traquant la fillette sans relâche, le couple de tueurs en série vont croiser le chemin d'une communauté énigmatique qui s'est éloignée du monde moderne pour vivre selon des rites ancestraux que ses femmes et ses hommes au caractère farouche comptent préserver quoi qu'il en coûte.

Les romans noirs se sont-ils substitués aux contes d'autrefois ? Les tueurs en série succèdent-ils aux ogres du passé ? C'est autour de ces interrogations qu'Antoine Chainas nous invite à côtoyer deux dimensions parallèles que sont les légendes cruelles circulant au sein de ce Bois-Aux-Renards envoûtant et qu'entretiennent une communauté recluse, lorsque débarque ce couple de tueur incarnant la cruauté brut d'un monde contemporain qui bascule dans l'ère numérique en se détournant ainsi des rites et traditions surannés. Une déflagration brutale et d'une noirceur absolue qui gravite autour de l'univers meurtrier de Bernadette et de Yves se confrontant aux rituels énigmatiques des habitants d'un hameau perdu, ceci sous la redoutable férule d'Admète et d'Hermione, deux aînés au comportement effrayant. le monde d'Anna, cette jeune fille souffrant d'une légère déficience mentale, se révèle tout aussi inquiétant alors que sa mère la transbahute de camping en camping pour fuir deux individus malintentionnés circulant à bord d'une Mercedes noire. Témoins des exactions de Yves et de Bernadette, elle trouve refuge auprès de Chloé, gardienne des légendes d'autrefois qui vit isolée au sein de cette forêt énigmatique, entourée d'une cohorte de renards au comportement singulier et qu'elle a étudié toute sa vie durant en compulsant grimoires et ouvrages scientifiques. Au gré d'un texte au vocabulaire érudit, parfois un brin sophistiqué, qui s'inscrit parfaitement dans le registre d'une légende perdue, Antoine Chainas oscille, dans un indéfinissable chaos ingénieusement agencé, entre le récit noir et le conte obscur dans lequel se désagrège la personnalité des protagonistes paraissant comme ensorcelés, à leur corps défendant, par l'atmosphère à la fois envoutante et poétique qui se dégage du Bois-Aux-Renards. Incarnant la jonction des antagonismes entre un monde perdu et la société d'aujourd'hui, la rencontre entre ces différents personnages s'inscrit ainsi dans une succession de confrontations au caractère féroce qui font de Bois-Aux-Renards un roman fantasmagorique au charme indéfinissable et à nul autre pareil.


Antoine Chainas : Bois-aux-Renards. Editions Gallimard/Collection La Noire 2023.

A lire en écoutant : Gaspard de la nuit : le Gibet interprété par Ivo Pogorelich. Album : Ravel: Gaspar de la Nuit - Prokofiev: Piano Sonata No. 6. 1984 Deutsche Grammophon GmbH, Berlin.
Lien : http://www.monromannoiretbie..
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Bois-aux-Renards, sous-titré Contes, légendes et mythes, publié dans la collection La Noire, encensé par les critiques (merci Kirzy dont les recommandations sont toujours pertinentes) : ce roman titille la curiosité d'autant plus lorsque l'on apprécie le mélange des genres.
"Bois-aux-Renards comporte selon moi de multiples angles d'approche : histoire d'amour, d'action, d'horreur ; critique sociale ; conte philosophique ; parabole morale et spirituelle ; réflexion méta sur le pouvoir du récit ; roman noir teinté de fantastique… ou rien de tout cela." Cette déclaration d'Antoine Chainas ouvre des horizons multiples et nous libère des carcans du genre.

Cette aventure littéraire débute dès le début du roman avec la découverte d'une écriture singulière et riche. Sans être pontifiante, cette écriture encyclopédique, parfaitement maîtrisée dans tous les champs du savoir, consacre la poésie de ce vocabulaire volontairement énigmatique. Avec ou sans dictionnaire, la lecture est envoûtante et les mots aux sonorités grecques ou latines prennent corps dans les registres les plus variés.
Que ce soit dans la narration la plus noire ou dans l'évocation d'une forêt légendaire, Antoine Chainas reste droit dans sa langue et enroule ses métaphores autour d'un vocabulaire soutenu appartenant à des lexiques scientifiques.

La découverte se poursuit avec l'entrée en scène des personnages. le couple des tueurs en série est ancré dans la réalité d'un monde capitaliste, celle des hypermarchés et du tourisme de masse dans les années 80. le plaisir de tuer est aussi le plaisir de se venger d'un quotidien médiocre et de prendre le pouvoir le temps des vacances estivales.
Prototype de la femme criminelle, Bernadette est une incarnation de Médée qui remet en cause les principes d'une société patriarcale et refuse d'être enfermée dans un rôle de mère. Elle est la négation du rôle accordé à la femme et qui consiste à donner la vie et non à la reprendre.

Dans la forêt médiévale, au sein de la communauté des nomades survivalistes, les femmes possèdent également des pouvoirs qui n'ont rien à voir avec la maternité mais sont davantage liés à la sorcellerie. Hermione et Chloe possèdent le pouvoir de guérir et de tuer en utilisant les plantes dont elles connaissent les pouvoirs. La petite Anna sera très rapidement associée à ces préparatifs, au fur et à mesure qu'elle accomplira sa métamorphose et qu'elle subira le rite initiatique.

S'il a réussi à fusionner l'univers du polar et celui du fantastique, c'est aussi parce qu'il a réussi à créer deux réalités capables de dialoguer à travers des personnages crédibles.
« le monde n'existe que parce qu'on en parle », dit un personnage du roman. Cette apparente réalité parallèle de Bois-aux-Renards propose une vision du monde qui fait écho à des préoccupations contemporaines: la survie en milieu naturel, l'anti-specisme, la place de la croyance, la persistance des mythes.
Rien d'artificiel dans cette création originale qui révèle un auteur de talent.
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Rencontre fortuite (ou pas) entre un couple de tueurs en série (type Fourniret/Olivier), une communauté de « rednecks » à la française ( on pense à « Délivrance » de Boorman ) , une adolescente légèrement handicapée mentale , dans un espace forestier hanté par les renards et les légendes. C'est le deuxième roman de Chainas que je lis ,après « L'empire des Chimères » et le constat est le même : côté positif ,une imagination foisonnante portée vers le gore et le mystère , un sens aigu de la nature, la maîtrise d'une chronologie sophistiquée ,la création d'ambiances glauques .Côté négatif : une tendance redoutable à l'excès , en particulier la surabondance d'interminables récits emboîtés qui viennent rompre le rythme du récit , un vocabulaire d'une préciosité gênante (ainsi que des références culturelles haut de gamme) eu égard aux personnages de l'histoire (employés de supermarché, communauté villageoise quasi préhistorique ,enfant déficiente mentale) , l'accumulation complaisante de détails anatomiques (toujours négatifs) et de violence , un ésotérisme très mode . Mon impression d'ensemble est donc plutôt négative .
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Je rentre d'une étrange balade dans "le bois -aux-renards. Une expérience glauque, horrifique, onirique, poétique.
Un soir de 1951 le père de Chloé a trop bu, roule trop vite, en face une autre voiture et c'est l'accident. Seule la petite fille survit, elle est embarquée par des inconnus qui pensent qu'une certaine Hermione pourra peut-être la soigner, sinon... qu'elle meurt!
1986, un homme et une femme se perdent dans le Bois-aux-renards, ils essayent de tuer une prostituée, une femme de plus à leur tableau de chasse. Depuis la mort de leur fils, Bernadette ne peut jouir que lorsque son mari Yves lui offre un beau meurtre, il l'aime donc il tue! Ils ont décidé de passer leurs vacances à chasser mais ça tourne mal. Une gosse les observe, Yves cherche en vain à la rattraper et à partir de là tout dérape. La petite c'est Anna, elle s'est perdue dans le bois. Elle est partie du camping où elle vit avec une mère très instable.
Dans le bois vivent des chasseurs de renards brutaux qui forment une communauté dont les règles de vie sont érigées sur des contes et légendes de la région et sur la mythologie grecque.
Une certaine Chloé vit au milieu des bois où dans un passé récent elle participait à une expérience insensée : domestiquer des renards !
Tout ce petit monde va se croiser, s'épier et s'affronter.
On passe de l'horreur à la beauté, de la haine à l'amour.
C'est un voyage au bout des Enfers et aux fonds de nos rêves les plus fous.
Le roman est très noir mais l'écriture est flamboyante.
On pense se perdre mais tout s'imbrique dans une logique imparable.
Il y a quelques longueurs : dommage.
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Je l'ai fini et j'ai bien du mal à mettre des mots sur cette lecture. Si ce n'est qu'elle m'a captivé, enchanté et impressionné à la fois, et ce dès les premiers chapitres qui attrapent le lecteur au collet pour ne plus le lâcher avec une longue traque haletante que j'ai lue d'une traite pendant une bonne centaine de pages.
Puis une partie du roman bascule progressivement, par séquences, dans l'étrange, le conte et les légendes, mais sans jamais perdre pied avec la réalité ni relâcher l'attention du lecteur.
L'écriture de Chainas est d'une rare qualité, sa précision chirurgicale use parfois de mots inconnus mais dont on ne doute pas de la pertinence et qui n'entravent en rien la lecture. Que ce soit pour décrire la forêt, les corps, les fluides, les atmosphères, la langue de l'auteur semble produire sur le lecteur le même enchantement et déployer les mêmes sortilèges que cette mystérieuse forêt Bois-aux-Renards vis-à-vis des personnages du roman.
On ressort de ces 500 pages ébouriffé, secoué, enchanté, sans trop savoir comment classer ce que l'on vient de lire tant les "codes" habituels du roman noir ont été explosés par Antoine Chainas, qui nous livre là un morceau de littérature hors du commun à la beauté sauvage et vénéneuse. Un roman noir magistral et ensorcelant.

Je ne peux que me réjouir de l'existence de cette collection La Noire de Gallimard qui permet d'accueillir de tels textes, ça me donne à la fois l'envie de l'explorer plus largement, mais aussi de lire prochainement Empire des chimères, le précédent roman de Chainas que j'avais boudé à sa sortie.
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Depuis l'Empire des Chimères, j'attendais avec une certaine impatience le prochain Chainas ; et le voici. Lire un Chainas c'est s'abandonner complètement au talent de l'auteur. C'est accepter de ne pas tout comprendre avant la pièce finale, mais avec la certitude que l'oeuvre sera magistrale. C'est naviguer entre rêve et réalité, avec une adresse déconcertante. J'avais déjà eu ce sentiment avec "L'empire des Chimères", et il renouvelle ce sentiment mais en changeant de registre cette fois. Ici, il va traiter 4 destins, 4 chemins qui vont les mener aux Bois aux renards. Chloé, seule survivante d'un terrible accident de la route, et qui va être recueilli par des membres du Bois ; Anna, témoin d'un couple de tueur en série qu'elle fuit en se réfugiant dans le Bois aux renards ; et enfin Yves et Bernadette couple de tueur en série qui partent à la recherche d'Anna dans le Bois.
Ce qui est extraordinaire avec Antoine Chainas c'est cette faculté qu'il a de poser une intrigue extrêmement classique (un couple de tueur en série surpris par un témoin, qu'ils doivent donc éliminer), puis de nous emmener dans quelque chose d'autre, presque une réalité alternative, mais sans jamais nous faire perdre de vue son objectif. On se laisse donc volontiers emmener dans ce Bois aux renard, et découvrir cette communauté si particulière, guidée par les mythes ancestraux de ces lieux, qui sont livrés progressivement avec l'évolution des personnages. Chaque pièce prend progressivement sa place jusqu'à nous livrer ce final magistral. Et en refermant la dernière page, on se sent dans cet état intermédiaire entre le rêve et le réveil. Et si toute l'histoire n'était qu'un rêve !!!!
Antoine Chainas a en outre une plume que j'adore, même si elle n'est pas toujours très facile d'accès. Mais son style nous embarque immanquablement, entre mythes, rêves et réalité. Je trouve celui-là légèrement en deçà de "L'empire des chimères", mais je pense que c'est une question de goût car ils sont tous les deux de grande qualité. Alors n'hésitez pas et découvrez l'univers si particulier de Chainas, vous ne serez pas déçus.
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En 1951 et par une nuit sans nuages, au coeur de la montagne, une puissante Citroën Traction Avant déjoue les pièges d'une route en lacets. Après une soirée au cinéma et un dîner arrosé au restaurant, l'homme conduit trop vite, l'épouse lui fait part de son inquiétude, et les triplés dorment paisiblement sur la confortable banquette arrière. Quand l'inexorable se produit, des ombres émergent des bois et vont recueillir la petite Chloé, seule survivante de l'accident.

Trente-cinq ans plus tard, dans les années 80, Yves et Bernadette arpentent la région à bord d'un van désormais devenu mythique, le Volkswagen T3 Westfalia. le couple qui travaille dans la grande distribution s'adonne à son loisir habituel des vacances : ramasser des jeunes femmes, les droguer puis les assassiner. Ce jour-là et alors qu'une prostituée tente de se libérer du lacet qui lui enserre la gorge, la petite Anna aperçoit le van garé en bord de chemin et s'approche pour comprendre pourquoi il remue autant.

Repérée, elle prendra la fuite pour échapper à Yves qui est déterminé à mettre la main sur ce témoin gênant venu gâcher la fête. Elle ira se réfugier dans les bois afin de lui échapper, et finira par être aidée par une étrange boiteuse entourée de renards. En fuite, le couple se perdra dans ce Bois-aux-Renards jusqu'à arriver dans le hameau d'une communauté repliée sur elle-même et prête à tout pour maintenir sa tranquillité...

Êtes-vous prêts à vous aventurer dans le Bois-aux-Renards aux côtés d'Antoine Chainas ? L'auteur nous y entraîne pour 500 pages d'une noirceur enivrante, où les chasseurs deviennent à leur tour des proies, dans un récit où la tension s'accroit avec une lenteur presque sadique. C'est très efficace et j'ai beaucoup aimé ce roman qui m'a rappelé les excellents Des noeuds d'acier de Sandrine Collette et Où reposent nos ombres de Sébastien Vidal. Un auteur à suivre donc !

📖 Bois-aux-Renards d'Antoine Chainais a paru le 5 janvier 2023 dans la Série Noire des éditions Gallimard. 515 pages, 21€.

🔗 Service de presse adressé par l'éditeur.
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Mon petit avis ne va certainement pas vous aider à vous faire une opinion sur ce roman. C''est une bien étrange histoire que celle-là.
J'ai bien du mal à me laisser emporter par le récit. En effet il me faudrait un dictionnaire pour comprendre les mots et le phrasé compliqué que l'auteur emploie. Heureusement il cesse peu à peu d'en employer outre mesure et la fluidité de ma lecture s'en trouve améliorée.
Dès le départ je pense immédiatement à cette série passionnante que j'ai vu sur Arte « les papillons noirs » (ils ont en commun une sombre noirceur), sauf que dans le roman, les meurtriers sont les Beltrand, des quadras qui travaillent dans un supermarché, eh oui !
Pas moyen de me faire un avis sur le roman, il y a tant de choses : le rire, walking dead, une bande de dégénérés mystiques sous LSD (lol), des contes vraiment étranges, des violents survivalistes, l'expérimentation animale, la forêt, les renards, un syndrome postpartum à son paroxysme, un amour passionnel, le meurtre.
Le tout est extrêmement foisonnant, trop peut-être. L'auteur possède sans contexte beaucoup d'imagination, trop pour moi peut être….
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Un thriller qui ne laisse pas place à l'indifférence et qui génère un suspens permanent. Un thriller qui mêlent le road trip d'un couple de tueurs en série, de victimes tragiques d'accidents de la vie, de la vie en autarcie d'êtres humains en marge de la société ; le tout dans une forêt mystérieuse au confins de la civilisation ; où se situent de multiples layons ténébreux et sinueux entourés de foisonnements de la nature aux perfides bruits vibrants dans l'air, en compagnie d'arbres symboles d'une présence occulte, peut-être divine ? Sans oublier les renards roux, fil conducteur énigmatique, du récit, au coeur du " Bois-aux-Renards ".

Un début immédiat dans la perversité, un couple monstrueux, Bernadette et Yves Beltrand, en quête permanent de victimes, afin de satisfaire le besoin irrépressible de l'épouse de connaître le frisson sempiternel de tuer, aidée en cela par son mari dont l'unique but consiste à satisfaire ces envies. Chloé une petite fille, miraculée lors d'un accident en 1951, qui va trouver sa place, grâce à son innocence dans la trame de son ouverture aux dieux de la forêt. Également, Anna une autre petite fille, dotée d'un léger strabisme et de limites intellectuelles, dont la mère irresponsable l'a toujours laissé livrer à elle-même, sans amour maternelle, en outre sans repère d'éducation – elle ne sait pas lire. Enfin des parias à l'intérieur d'une microsociété elle-même marginale, qui cultive la recherche de l'union à la nature et de l'élan vital que " l'homme, en accédant à la conscience et surtout en s'inventant un dieu, avait perdu "et en conséquence " vouloir donner un ordre au chaos " ; mais qui pourtant ne se prive pas d'avoir des moeurs pour le moins cruelles et bien sûr avec une totale absence d'état d'âme dans l'exercice létal. Ce groupe de frustres individus est dirigé de façon autoritaire par Admète (indompté, insoumis en grec ancien) et Hermione pour égérie.

Un roman vraiment noir, protéiforme, qui nécessite des connaissances de la mythologie grecque, d'un précis type Vidal, également de l'anatomie bref, une lecture qui pour être bien assimiler doit être ingérer calmement...

Des ingrédients qui vont tourner dans un paroxysme d'horreur et qui entraîne le lecteur entre contes, légendes et mythes. " Antoine Chainas " oscille avec le manque d'humanité de la plupart des personnages et des faits scientifiques – tel le gène SorCS1 –, qui vont s'imbriquer jusqu'à l'apothéose final de la descente aux Enfers des esprits retors.

Lien : https://bookslaurent.home.bl..
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Antoine Chainas est conteur d'histoires, poète lyrique, maître du fantastique, philosophe du vide, adepte des lais médievaux et érudit écologique limite pro survivaliste.
Son "Bois aux renards" est une fable cauchemardesque époustouflante qui apporte au fond des estomacs (pour ma part, c'est là que je stocke mes émotions) effroi et angoisses.

Il y a d'abord la nature qui se déploie dans ce qu'elle a de plus simple, de plus beau et de plus mystérieux.
Il y a ensuite un huit clos dans une communauté itinérante, qui se déplace de hameau en hameau abandonnés, et se divertie avec des veillées oú histoires et lancés de renardeaux égayent toute la famille.
Il y a enfin un couple très amoureux qui travaille dans un supermarché. La violence de ces "ruches humaines", ils la retournent vers autrui : leur fils puis une série exponentielle de femmes isolées.

Ce très noir récit est composé de 4 chants qui semblent à première vue très éloignés les un des autres : chloé,  petite fille de 5 ans est la seule rescapée d'un accident de voiture / Anna, onze ans autiste fuit les assassins de sa maman / Yves et Bernadette partent au volant de leur volswagen pour des vacances sanglantes / Hermione et son mari organisent une fête annuelle pour leurs cousins et petits neveux consanguins.
A l'intérieur de ces chants, la rhétorique ne manque pas de dérouter le lecteur pour mieux attaquer l'homme. A l'image des chants de Maldoror, on assiste à une (dé)mystification radicale de la réalité. Avec une ironie lyrique, cette histoire démontre l'impossibilité qu'il y a de séparer le bien du mal, l'ordre du désordre, la raison de la déraison.
Les chemins tortueux vont, je vous le dis, à la fois vous terrifiez et vous émerveillez.
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