L'
Algérie est une énigme. Comment un pays qui a retiré des milliards de dollars de ses champs de gaz et de pétrole, qui se proclame socialiste, qui s'est affranchi de son passé colonial, peut-il encore rester aussi hostile à la modernité, à la démocratie, à l'ouverture aux autres cultures?
Seule la démographie a connu une progression fulgurante, atteignant 40 millions de jeunes habitants, malheureusement dépourvus de perspectives en terme d'emploi, de logement, de vie culturelle, de possibilités de voyager et de s'émanciper du carcan des traditions, qu'elles soient familiales, religieuses ou politiques. La corruption gangrène les administrations, l'économie, les institutions, et le pouvoir en place calme la fièvre populaire par un mélange de répression et de subventions. L'économie ne peut compter ni sur les exportations ni sur le tourisme, et fluctue selon les cours du pétrole dont elle dépend entièrement.
L'
Algérie est toujours fâchée avec ses voisins: le Maroc, la Mauritanie, la Libye, et pas vraiment réconciliée avec son ancien colonisateur, la France, qui lui a imposé deux guerres (colonisation puis indépendance) et de longues décennies d'occupation, qui lui a enrôlé ses hommes pour faire sa guerre puis pour les faire travailler sur les chantiers de reconstruction.
Et pourtant, les bateaux et les avions ne cessent de traverser la Méditerranée, chargés d'hommes et de femmes qui ont une moitié de vie sur chaque continent, qui mélangent les mots d'ici et de là-bas, qui passent de leur terre d'accueil à leur terre de coeur, agitant le drapeau vert et blanc aux matchs de foot mais attachés aux libertés de la république.
L'
Algérie attend un Bourguiba ou un Nasser pour faire de ce vaste territoire un grand pays.