Je connaissais le groupe "Zelda" mais pas
Magyd Cherfi "tout seul". Dans ce roman, il nous propose de se raconter, de replonger dans son année de term, dans son quotidien des quartiers nord de Toulouse, dans ces heures passées sur le banc à se faire traiter de pédé, dans les failles, que dis-je, les précipices qui séparent la société des "Blancs" bien français de ces rebeus de banlieue, promis à aucun avenir, dont l'idée même d'avoir le bac paraît ô combien farfelue. Il nous raconte l'assoc de soutien scolaire, les cours de théâtre et les ateliers d'écriture, sa place à part parce qu'il aime les mots, Brel Brassens Ferré, Flaubert
Maupassant et tous ceux là qui ne sont pas de sa culture mais qui le deviennent ; il parle de ce déracinement, de cet arrachement identitaire, de cette impression de naviguer en eaux troubles, toujours, de la difficulté à trouver sa place.
Oui, c'est super bien écrit. ca manque un peu de liant parfois, d'autres c'est un peu catalogue, mais que de verve, que de fougue, et aussi que d'humour dans ce regard acéré sur les Arabes, ou quelle lucidité je ne sais. C'est un régal de lire des choses comme ça (si c'était un "Blanc" qui l'avait écrit, il serait jugé pour racisme), et cela m'a fortement fait penser aux deux bouquins de
Saphia Azzeddine que j'ai lus, "
Mon père est femme de ménage" et "
La Mecque-Phuket" : on y retrouve la même prise de distance, moqueuse et cependant respectueuse des coutumes qui appartiennent à d'autres.
Je m'en vais de ce pas lire la suite, "
La part du sarrasin", mais aussi l'"
Antigone" d'
Anouilh dont il est question dans le texte et qui m'a fortement donné envie de le redécouvrir ;-)