Nous ne connaissons pas la civilisation extraterrestre, mais nous connaissons la civilisation humaine.
📖Page 398📖
Elle avait jadis démasqué le mal profond de la Révolution culturelle que la plupart de ses contemporains trouvaient juste et glorieuse, comme Rachel Carson avait démasqué celui de l'usage des pesticides que Wenjie trouvait normal et légitime. Il était bien possible que toutes les actions humaines soient mauvaises par nature et que différentes personnes puissent démasquer différentes formes de mal. L'humanité ne saurait jamais atteindre une véritable conscience morale, de la même manière que l'homme ne pouvait s'élever du sol en tirant sur ses propres cheveux. Pour réussir, il fallait l'aide d'une force extérieure à l'homme.
L’univers était un cœur ratatiné, un utérus étroit, parcouru de vaisseaux sanguins à moitié translucides. En suspension dans le sang, il s’aperçut que les lumières rouges clignotaient de façon erratique, comme si les pulsations de ce cœur, les contractions de cet utérus étaient irrégulières. Wang Miao sentit alors une présence si démesurée et si étrange qu’elle était destinée à ne jamais être comprise par l’entendement humain.
Je suis un homme simple et direct, on voit mon cul au fond de ma gorge.
Elle n’avait pas imaginé que, même au plus rude de l’hiver, il y ait autant d’oiseaux dans la forêt. Elle fut alors le témoin d’un spectacle atroce : une nuée d’oiseaux s’envola dans le périmètre où pointait l’antenne et, derrière le nuage diaphane, elle les vit distinctement retomber sur le sol, comme foudroyés en plein vol.
Ye Wenjie n’avait qu’un seul mot pour décrire la déforestation dont elle était témoin : “folie”. Les hauts et nobles mélèzes de Dahurie, les pins sylvestres à feuilles persistantes, les gracieux bouleaux de Mandchourie, les trembles qui touchaient les nuages, les sapins de Sibérie, les bouleaux noirs, les ormes des montagnes, les frênes de Mandchourie, les chosenias, les chênes de Mongolie : ils coupaient tout ce qui se trouvait sur leur chemin. Les tronçonneuses fondaient sur les arbres comme un essaim de criquets d’acier. Partout où étaient passées les unités du Corps, il ne restait plus qu’un parterre de souches.
Tout ce qui n’avait pas pu sortir sous forme de pleurs ou de cris s’était dissous dans son sang et l’accompagnerait le restant de sa vie.
En Chine, toutes les pensées libres et contestataires, après avoir pris leur envol, finissent toutes un jour ou l’autre par s’écraser sur le sol, car la gravité de la réalité est trop lourde.
En secouant ce drapeau de guerre, c’était son adolescence passionnée qu’elle agitait. L’ennemi serait bientôt consumé par les flammes et demain, un monde idéal jaillirait de son sang bouillonnant…
« En Chine, toutes les pensées libres et contestataires, après avoir pris leur envol, finissent toutes un jour ou l’autre par s’écraser sur le sol, car la gravité de la réalité est trop lourde. »