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Citations sur Le coeur de l'Angleterre (226)

Benjamin [...] regarda une dernière fois la rivière. Était-ce un effet de son imagination . On aurait dit qu'elle était un peu plus haute, ce soir, et le courant un peu plus vif. Quand il avait acheté la maison, on lui avait souvent demandé s'il avait envisagé les risques d'inondation, question qu'il avait balayée d'un revers de main, n'empêche que le doute s'était insinué en lui. Il se plaisait à voir la rivière comme une amie. Une compagne facile à vivre dont il comprenait les comportements, avec laquelle il se sentait à l'aise. Se leurrait-il ? Et si elle devait un jour abandonner ses habitudes accommodantes et raisonnables ? Si, elle aussi, se mettait en colère sans crier gare ? Quelle forme prendrait sa colère ?
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Venaient d'abord les abris modestes tout juste assez grands pour loger une tondeuse, un souffleur de feuilles et une poignée d’outils, mais on arrivait bientôt aux vraies petites maisons, aux gloriettes, aux pavillons de jardin et à des structures à la fantaisie tarabiscotée empruntant leurs éléments à toutes les autres, des structures qui avaient vocation à exaucer le vœu le plus cher de l'homme marié britannique : un refuge où échapper à sa famille sans quitter le foyer pour autant.
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Personne ne sait comment aller de l’avant. C’est ce que j’appelle l'indécision radicale; c’est le nouvel esprit du temps.
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On y était enfin. Au sujet à ne pas aborder, défiant tout dialogue. Au sujet mortifiant, clivant entre tous, parce que l’évoquer c’était se mettre à nu, déchirer les vêtements de l’autre et être forcé de s’entre-regarder dans cette nudité, sans aucune protection, sans pouvoir détourner les yeux. Quoi qu’elle réponde à Helena – pour peu qu’elle essaye de rendre compte honnêtement de sa divergence –, il lui faudrait fatalement affronter la vérité indicible, à savoir qu’elle-même et ses semblables d’une part et Helena et ses semblables d’autre part avaient beau vivre côte à côte dans le même pays, elles habitaient pourtant deux univers différents, séparés par une cloison étanche, une muraille formidable faite de peur et de suspicion, voire peut-être de ces traits britanniques par excellence, la honte et la gêne. (p. 123)
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- les gens en ont assez des intellectuels" dit Nigel. Un éclair passa dans son regard, comme s'il était frappé par cette brillante formule. "Un instant, je note.
-Ne laissez pas se perdre vos perles de sagesse, dit Doug qui sourit en le voyant griffonner dans un calepin.
- Avec quelques retouches, ça pourrait faire un vrai slogan."
Page 345
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"Je crois bien que j'ai pas entendu un seul mot d'anglais sur le trajet", avait déclaré Colin, et elle avait compris que ce qu'il déplorait était précisément ce qu'elle aimait le plus dans cette ville. Ce soir, elle avait déjà entendu du français, de l'italien, de l'allemand, du polonais, de l'ourdou, du bengali et quelques autres langues qu'elle n'identifiait pas. Elle n'était nullement gênée de ne pas comprendre la moitié de ce qui se disait ; cette Babel de voix contribuait à l'effet de brouillage euphorique ; elle était en harmonie avec la rumeur de la ville, le kaléidoscope de couleurs créé par les feux de circulation, les phares, les feux de position, les lampadaires et les vitrines.
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Le téléphone de Naheed vibra sur la table, elle lui jeta un coup d’œil, se demandant si elle allait lire le message, grand dilemme du savoir-vivre moderne.
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Enfin, c'est vrai, nos bagnoles, c'était de la camelote. Je sais bien que les Allemands et les Japonais faisaient ça beaucoup mieux que nous. Je suis pas crétin, je le comprends tout ça. Je comprends pourquoi les gens préfèrent acheter une voiture japonaise, qui ne va pas tomber en panne au bout de deux ans comme les nôtres dans le temps. Ce que je comprends pas, c'est que... Ce que je comprends pas, c'est où ça va finir. Comment faire si on continue comme ça ? On fabrique plus rien. Et si on fabrique plus rien, on a plus rien à vendre... Et comment on va survivre ? C'est ça qui m'inquiète. Parce que, bon, ce qu'on voit là, ça m'inquiète pas, ces terrains vagues, c'est pas grave. Quand on démolit une usine et que tous ces emplois disparaissent, on s'attend bien à voir ça. C'est-à-dire, rien. Mais ce magasin, là, ce magasin immense, bon Dieu, et ces maisons, ces centaines de centaines de maisons ? A quoi ça sert ? Comment est-ce qu'on peut remplacer une usine par des boutiques ? S'il n'y a plus d'usines, comment est-ce que les gens vont gagner de quoi dépenser dans les boutiques ? Comment ils vont gagner de quoi acheter les maisons ? Ca n'a pas de sens.
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"_ Célébrité, comme tu y vas...
_ Les journalistes viennent te parler, non ? dit Doug.
Tu vas avoir ta photo dans les journaux. Les belles femmes à tes pieds. Tu seras reconnu dans les lieux publics."
Benjamin, toujours modeste, sentit une présence inconnue à ses côtés. Il se retourna et vit une blonde qu'on pouvait qualifier de superbe créature sans trop d'exagération; elle le considérait avec déférence, attendant d'avoir attiré son attention.
_ Excusez-moi, lui dit-elle avec dans la voix une hésitation charmante, qu'on aurait aisément pu mettre sur le compte de la révérence, mais vous êtes bien... monsieur Benjamin Trotter ?"
Les autres se turent aussitôt. On aurait dit qu'ils se faisaient les témoins collectifs de la nouvelle vie de Benjamin.
_ Oui ?" dit Benjamin avec une intonation montante. Puis il répéta sur un ton plus fier, plus assuré : "Oui, c'est bien moi.
_ Parfait, dit la femme. Votre table est prête."
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Il monta le volume. Il pouvait écouter de la musique aussi fort et aussi tard qu'il voulait ici. Pourtant, quand le morceau s'acheva, il éprouva une forme de soulagement. Au fond, il préférait de loin le silence. Le silence de l'Angleterre qui sombrait dans un sommeil profond et bienheureux, un sommeil comme on en goûte après avoir donné une soirée réussie, quand tous les invités sont partis et qu'on sait qu'on n'aura pas à se lever de bonne heure. L'Angleterre lui faisait l'effet d'un territoire calme et stable. D'un pays en bonne intelligence avec lui-même. L'idée que tant de millions de gens disparates avaient été réunis, rassemblés par une émission de télévision* le ramenait à son enfance et le fit sourire. Tout allait pour le mieux. Et la rivière semblait d'accord avec lui, la rivière dont la voix seule rompait le silence, et qui ce soir filait sa course sans âge, bondissait, bouillonnait, joyeuse, joyeuse, si joyeuse.

*la cérémonie d'ouverture des JO de Londres.
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