Chéri est un enfant gâté qui a grandi, plein de défauts et insupportable : paresseux, capricieux, gourmand, lâche, menteur, insultant et méprisant envers sa mère, pervers et manipulateur envers sa femme, utilisant ses amis... Seulement,
Chéri est beau, très beau - et il semble bien faire l'amour, ou, du moins, il s'en vante... Il a donc un grand succès auprès des femmes. En réalité, il n'est pas le héros de sa propre histoire, il n'en est pas le personnage principal, et il n'agit pas : il se laisse séduire, il se lisse marier, il se laisse entretenir par les femmes. Il est très passif, puisque son seul acte de volonté est de fuir son foyer pour s'enfermer et rester couché au fond d'un lit. Je n'ai donc pas compris pourquoi toutes les femmes du réci sont à ses pieds.
Non, le personnage intéressant, c'est celui de Léa, la courtisane qui vieillit, qui atteint cinquante ans. Et c'est assez fascinant de la voir scruter les signes de l'âge sur son visage et son corps, des rides qui apparaissent, aux couleurs de la peau qui changent, aux plis qui se forment. Il y a des ruses, bien sûr, la teinture des cheveux, le collier de perle pour cacher le cou. Il y a l'essai d'une vie rangée, retirée - retraitée dirait-on aujourd'hui. Mais impossible de nier les sentiments quand le coeur est toujours jeune... C'est donc Léa qui apporte de l'émotion et de l'intérêt dans ce roman, avec un personnage relativement rare au début du XX ème siècle en littérature, celui de la femme mûre qui désire et qui aime encore.