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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La vie de Maryse Condé est loin d'avoir été un long fleuve tranquille. Dans « La vie sans fards » son dernier roman autobiographique, elle raconte son enfance en Guadeloupe et sa mère qu'elle idolâtrait. Elle évoque également ses études à Paris, son premier amour qui lui fera un enfant et l'abandonnera ainsi que sa rencontre avec Mamadou Condé qui deviendra son mari et le père de ses enfants. C'est avec ce dernier qu'elle s'établira en Afrique et découvrira les tensions qui peuvent facilement se faire jour entre Antillais et Africains, mais c'est aussi en Afrique qu'elle découvrira les textes d'Aimé Césaire et le concept de la négritude...

MON AVIS : Plus qu'une autobiographie c'est un retour sur soi sans concession que propose Maryse Condé dans « La vie sans fards ». Ce livre était à l'origine un texte qu'elle souhaitait écrire pour ses petits-enfants afin que ceux-ci puissent mieux comprendre la vie de leur grand-mère. Mais au cours du processus d'écriture, une évidence l'a frappée, souvent l'homme qui se raconte ne dit que des demi-vérités . Elle s'est donc imposé un exercice difficile, tout dire, sans rien trahir, au risque de choquer son entourage et son lectorat, au risque d'écorner son image d'écrivaine bien pensante et militante.

Comment ne pas être touchée par cette femme, cette mère, cette auteure qui accepte de se mettre à nue, et de raconter ses forces et ses faiblesses, ses douleurs et ses joies. de ce récit transpire la vérité, l'honnêteté et le courage d'une grande dame qui se regarde en face et qui dit : voilà qui je suis. Son écriture est franche, directe et sans fioriture, mais l'humour est toujours présent entre les lignes comme pour faciliter l'énonciation des moments de vie douloureux, des mauvais choix, des dissimulatios. Maryse Condé n'hésite pas à faire de nombreux allers-retours entre sa vie et les romans dont elle est l'auteure, elle met ainsi en évidence le propre du travail de l'écrivain : se nourrir de ses observations, de sa vie, du réel afin d'écrire et de décrire la vie, la société. Un livre et une oeuvre à découvrir, on a trop peu parlé de cette grande dame et de son livre en cette rentrée littéraire.


Lien : http://www.meellylit.com/
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Maryse Condé est une grande écrivaine, personne n'en doute... mais cette "autobiographie" m'a mis mal à l'aise.
Elle ne s'en cache pas : elle nous expose sa vie "sans fards", et en particulier le choix entre être une femme ou être mère.
La femme, je respecte son parcours, curieux, chaotique, sinueux, maladroit, trébuchant... nous sommes beaucoup à emprunter ce chemin.
Mais là où naît pour moi le malaise, c'est quand la femme se fait mère... et quelle mère !
Une mère qui entre l'âge de 19 et 26 ans donne naissance à quatre enfants de trois ou quatre pères différents.
Les pauvres gosses vont connaître le placement en institution ou chez une nourrice, être repris par leur mère, puis nomadisés de la France, à l'Afrique ... je devrais dire "aux Afriques", exilés à Londres, "abandonnés" pour moitié à Londres pendant un an, pendant que l'autre moitié poursuit... à cause d'une mère instable ... une nomadisation déstabilisante aux Afriques...
Et cette mère s'étonne sans vergogne que ses enfants urinent la nuit dans leur sommeil et soient la proie de terreurs... !!!
Extrait :
" Leïla ne me manifestait jamais pareille tendresse. Quels sentiments éprouvait-elle pour une mère qui la traînait de pays en pays, de maison en maison, qui lui avait infligé cette détestable parenthèse en Angleterre ? En bref, une mère grâce à laquelle elle avait été si tôt initiée aux terribles expériences du déracinement, de l'exil et du racisme ? Quand Adeeza fut partie, je la pris dans mes bras. J'aurais aimé la supplier d'essayer de me pardonner le mal que j'avais causé, bien malgré moi."
Dans ce court extrait, on croit percevoir chez cette mère enfin un peu de lucidité... jusqu'à ce terrible "bien malgré moi". Et là on se souvient d'une de ses amies lui disant "sans fards" : "Avec l'intelligence que tu as, tu ne fais que des conneries !"
Et des conneries la femme ne se prive pas d'en faire, s'amourachant et ayant un enfant du fils de Duvalier (le dictateur haïtien père des sinistres "tontons macoutes"), épousant un apprenti comédien guinéen... pour offrir à ses deux enfants (car elle se fait également engrosser par Mamadou Condé... c'est le nom du garçon) un père (qu'elle n'aime pas), un foyer et une stabilité... et en passant, pour elle, une "respectabilité" d'épouse (et plus l'infamie d'être une fille-mère) et... un passeport.
Car obsédée par une quête identitaire, Maryse, désormais Condé, guadeloupéenne adepte de "la négritude", admiratrice de Césaire et de Frantz Fanon, va côtoyer l'Afrique de la fin des années 50 et celle des années 60. de Sékou Touré, à Houphouët-Boigny, de Sédar-Senghor à Kwame Nkrumah, sans oublier Patrice Lumumba et d'autres.
Ces années de révolutions pour l'indépendance et trop souvent pour la dictature, elle va les vivre "sur le terrain", dans sa chair et dans son sang... croisant des figures mythiques comme celles du Che, de Malcom X, de Maya Angelou, pour ne citer que les plus célèbres.
C'est passionnant je dois le dire pour le lecteur qui rencontre L Histoire, la vraie, et en même temps déstabilisant, qui voit cette femme habitée par cette quête obstinée, sourde et aveugle au bon sens et aux intérêts fondamentaux de ses enfants.
Extrait :
-"Depuis la mort de ma mère, la Guadeloupe ne signifiait rien pour moi. Je me sentais libre d'explorer l'Ailleurs. Pour l'heure, quelque chose me retenait en Afrique. J'avais la certitude que cette terre pouvait m'offrir des richesses essentielles. Lesquelles ? Cette dernière phrase ("tu ne fais que des conneries") s'imprima dans mon esprit de manière indélébile. Aujourd'hui encore, elle brûle ma mémoire. Je la tourne et la retourne dans mon souvenir. Si je n'ai fait que des "conneries", comme m'en accusait Arlette (et bien d'autres), n'ai-je pas accumulé les décisions et les choix hasardeux, poursuivi avec obstination des rêves et des fantasmes personnels ? Aussi, n'ai-je pas fait souffrir les miens ? Mes enfants surtout, dont j'ai toujours cru avoir l'intérêt à coeur ?"
Ne voulant pas écrire une autobiographie de complaisance, Maryse Condé a écrit une autobiographie "sans fards"... au risque d'apparaître comme une "épouse menteuse, infidèle, adultère", une femme psychorigide, préférant ses amants à ses enfants. Indéniablement la femme se montre sous un jour qui laisse apparaître ses failles et ses faiblesses. Quant à la mère, elle ne trouve à aucun moment grâce à mes yeux.
C'est ou ce sont les travers de ce genre d'autobiographie. C'est peut-être aussi son intérêt ?
Un livre bien écrit, au contenu culturel riche... humainement... troublant et questionnant !
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« Cette réappropriation matérielle de l'Afrique me prouvait qu'allant plus loin que le chef de la Négritude, mon maître à penser, je commençais de m'assumer. »

Maryse Condé se livre telle quelle, au risque peut-être de choquer, ou pour le moins de surprendre ses lecteurs.
Femme noire, douée, partie étudier à Paris, elle y rencontrera le meilleur comme le pire. Elle semble cumuler les déconvenues, les galères. On la sent largement en délicatesse avec la France.
« C'est à Paris que j'avais été blessée et humiliée. J'avais souffert dans mon coeur et dans mon orgueil. J'étais devenue une déclassée, une paria. »
C'est l'Afrique qui l'appellera, et lui « offrira « ses années les plus difficiles accompagnée d'hommes qui ne lui mèneront pas la vie facile ; L'Afrique, où elle tentera de se trouver. Une Afrique qui ne la comble pas, et à laquelle elle s'accroche pourtant si fort. Une Afrique qui la rejette, elle femme des Antilles, qui rejette son fils ainé, métis.
La vocation littéraire de Maryse Condé n'a rien de précoce. C'est finalement assez tard qu'elle a commencé à livrer dans ses romans ce qui a fait sa vie.
Elle a longtemps cherché l'amour, sans le trouver en retour, hormis dans celui de ses enfants qui l'ont, malgré les aléas de la vie, et ses conditions matérielles le plus souvent proches de la misère, accompagnée dans ses errances africaines. Cette vie, narrée avec réalisme, dans un style fluide, permet de mieux comprendre son oeuvre, et son engagement en faveur de la mémoire de l'esclavage.
J'ai apprécié la distance prise par Maryse Condé ; les faits sont anciens, elle a laissé le temps faire son oeuvre pour parler de « ses années d'apprentissage ».Si les mots sont sans concessions, je n'ai perçu ni haine, ni rancoeur ; sa vérité nous est présentée, comme le titre l'indique « sans fards », sans artifices tout simplement.

Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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Lecture passionnante, bien qu'intime, je ne sais pas si c'est le format autobiographique qui y contribue, mais j'ai ressenti un peu de voyeurisme à me sentir intéressée par la vie de Maryse Condé (dont je découvre le travail et je suis à présent attirée par la lecture de certains de ses romans et essais), je suis même sur ma faim que le récit s'interrompe au tiers-temps de sa vie, je pense que la suite de son parcours doit être tout aussi captivant et inspirant.

Captivant et inspirant, c'est ce que j'ai ressenti.
Le parcours de cette femme, les épreuves de la vie, sa résilience, ses choix, ses forces, ses doutes, sa liberté, ses émotions, ses besoins. Son parcours de mère aussi, sincère, authentique, terrible aussi parfois (le récit de la naissance de sa fille m'a beaucoup touché)
Quel courage d'avoir vécu cette vie, d'avoir eu tant d'audace, de volonté, à cette époque, en tant que femme. du moins, ce sont des projections de mes propres croyances limitantes. Car au final, ce récit, témoignage d'une époque et d'un contexte dont j'ignore tout, m'a fait reconsidérer pas mal de mes connaissances, et découvrir tant de personnages, de courants de pensées, de lieux, que j'ai à présent envie d'en apprendre encore plus.

Car sans conteste, ce qui m'a captivé à titre très personnel, c'est que ce témoignage de vie se déroule dans plusieurs pays d'Afrique, durant les années 1960, dans des contextes de décolonisation, de rupture avec l'occident, de révolution socialiste, de dictatures et coups-d'états, d'expansions de pensées indépendantes de l'Afrique, des Caraïbes, d'Haïti aussi. J'ai beaucoup appris mais découvre que j'ai encore tant à apprendre.

A moi les ouvrages de Maryse Condé à présent !
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Quelle merveilleuse lecture tout en poésie.. La romancière se met à nue dans ce roman, elle nous décrit avec une grande lucidité sa vie, ses choix de vie sans tomber dans le mélodrame et les clichés. Elle nous raconte son enfance en Guadeloupe, son amour pour sa mère, son parcours à Paris, sa découverte de l'Afrique, sa quête identitaire, la négritude.
Toutes ces années qui l'ont forgées en tant que femme, mère et écrivaine. Un parcours semé d'embuches parfois même chaotique mais raconté d'une manière que seule Maryse Condé maîtrise.
Une jolie decouverte..
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« Pourquoi faut-il que toute tentative de se raconter aboutisse à un fatras de demi-vérités ? » voilà la première phrase de ce livre. le ton est donné, Maryse Condé a décidé de tout dire dans cette autobiographie, sans rien trahir, même si cela doit choquer son entourage ou ses lecteurs, même si cela risque de ternir son image d'écrivain. Elle se dévoile totalement.
(...)
Ce livre est passionnant, elle raconte le quotidien d'une femme qui se bat pour faire vivre sa famille de quatre enfant dans des contextes politiques et économiques difficiles. Elle parle de ses rencontres politiques, professionnelles, amicales, amoureuses. Elle décrit les pays, les villes où elle a vécu.
J'ai beaucoup appris sur les relations entre les Antillais et l'Afrique. Ce continent peut les fasciner et également les décevoir. J'ai beaucoup aimé le ton de l'auteur franc et direct, avec des touches d'humour pour tout raconter avec lucidité et sans aucune concession.
Son oeuvre littéraire est parsemée de ses expériences ou souvenirs personnels. Elle parle de son travail d'écrivain.
Lien : http://aproposdelivres.canal..
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Après avoir lu trois romans de Maryse Condé : « La femme cannibale », « En attendant la montée des eaux » et « Moi, Tituba sorcière… » - je l'ai adopté dans le cercle de mes écrivains favoris. J'ai été séduit par sa prose envoutante, ses descriptions détaillées, son riche vocabulaire, son humour, son ironie et surtout ses réflexions sur l'Afrique, la Guadeloupe, les Antilles et ce qu'on dénomme comme le Tiers Monde.

J'ai été intéressé à comprendre son origine, l'histoire de sa vie, ses motivations comme écrivaine, comme femme et comme Antillaise ayant un tel engouement pour l'Afrique. Tout cela m'a porté à lire son autobiographie où elle se livre brutalement à la face du monde, comme elle le dit « sans fards », sans embellissements, sans fioritures.

Sa biographie se lit comme un roman où elle devient très vite dès les premières pages comme une anti-héroïne. J'avais voulu comprendre sa relation avec Jean Dominique, un journaliste haïtien de renom assassiné en Haïti pour ses positions politiques. Elle en parle candidement et ouvertement. Il devient le père de son fils, Denis, qui semblerait-il ne le connaîtra jamais. Elle raconte son mariage avec Condé, le père de ses 3 filles, ses nombreuses infidélités, ses myriades de relations amoureuses, ses voyages à travers l'Afrique, l'Europe, ses choix de vie, ses mauvais choix d'hommes, ses faiblesses et comment débute sa vocation d'écrivaine.

Je dois avouer que j'aime beaucoup plus ses romans que sa vie. Mais sa vie est sa vie, ce qu'elle ne peut pas changer. Et ses choix ont été ses choix, ce que je respecte. L'autobiographie est captivante, beaucoup de passages ont été navrants pour moi, surtout ses mauvais choix de mère – je me suis souvent demandé comment ses enfants ont pu lire cet ouvrage dans lequel sa vie a paru si décousue, si instable, si difficile et déprimante dans bien des cas.

Mais puisqu'une autobiographie n'est pas un roman et ne doit pas être comprise comme tel, je ne peux que la complimenter d'avoir toutefois eu le courage d'écrire ce livre et de permettre au lecteur que je suis de vraiment savoir qui elle est comme femme et comme écrivaine. Une lecture difficile, mais un livre que je recommande.
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