LES MOTS
Prisonnier de la blancheur
tu flottes dans une foule de mots translucides
Des lucioles enfouies dans la nuit
jaillissent d’un coup
comme une rivière laiteuse
Comme des fruits découpés par un coup de dés
les mots se rangent sages
près du pain et du vin dans la corbeille
du poème
LE PAROLIER DE LA RUCHE
Sur une route pierreuse
le parolier de la ruche est ta faim et ta soif
il est cette oreille que tu dresses
à la vue de la gazelle dans le sable
et cette main tendue vers le mirage
miré dans tes yeux ouverts sur
la mâchoire d’un cheval
Hennissement et monnaie payée d’avance
il est l’unique
habitant du fleuve déferlé de la respiration
Chien veilleur de sept eaux dormantes
me voilà devenu homme
C’est encore moi l’antique exilé de la ruche silencieuse
c’est encore moi cet Autre que tu portes en toi
sur une route arrosée d’aube
À QUI
À qui appartient cette tête ce trou
qui me déserte de tout zéphyr et
me fait oublier
le soleil le fruit la pluie
de la parole
Et à qui est-il ce palais
où par temps de chagrin ou de guerre
je me réfugie je me plie
comme un bout de langue
meurtrie
ACTION NON-ACTION
La foi se fait aveugle
si on la laisse sommeiller…
J’ouvre mes blessures jusqu’à la pointe du soleil
la folie me gagne
quelle merveille voir dans l’obscurité
la figue mûrissant doucement puis tombant soudain
et pour toujours
Action non-action la foi est cette eau
où je m’abreuve
en buvant la route et le tombeau
d’un seul coup
RAVISSEMENT
Près de la mer parmi les taillis
psalmodie la cigale
ta prêtresse
ô Main silencieuse
cueilleuse
de mes jours des dattes enluminées
par le souffle
du soleil
que tu calligraphies
sur les abeilles
courbes
de la Terre