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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le narrateur, cinquantenaire, rentre en Italie après vingt ans passés en Argentine : il y a perdu Dvora, son premier amour, et a échappé de justesse aux forces de la junte au pouvoir après une longue traque. ‘' Une vie d'homme dure autant que celle de trois chevaux et tu as déjà enterré le premier.'' lui a dit le patron d'un bar à matelots qui l'a aidé à fuir.
Il est jardinier, solitaire avec les livres pour seule compagnie et n'attend plus rien de l'avenir : ‘'Moi je connais les vies qui durent un jour. Arriver jusqu'à la nuit, c'est déjà mourir vieux''
Il va néanmoins faire deux rencontres : l'amour avec Làila, de vingt ans sa cadette et l'amitié avec Selim, africain, manoeuvre en Italie et éleveur dans son pays. Le temps s'écoule... cet amour et cette amitié s'épanouissent entrecoupés de souvenirs conjugués au présent et de l'observation de la nature et du travail de jardinier. L'intervention de Selim dans ses projets clôturera sa deuxième vie


J'ai été très sensible à l'amour des livres qui transparaît tout au long du récit, amour probablement dû au goût du père de l'auteur pour la lecture et dont les livres tapissaient sa chambre d'enfant : ‘' Je n'avais pas de chambre d'enfant ; j'étais l'hôte des livres de mon père'' (interview). ‘'Les livres neufs sont impertinents, les feuilles ne se laissent pas tourner sagement, elles résistent et il faut appuyer pour qu'elles restent à plat. Les livres d'occasion ont le dos détendu, les pages, une fois lues, passent sans se soulever. (…) Je lis de vieux livres parce que les pages tournées de nombreuses fois et marquées par les doigts ont plus de poids pour les yeux, parce que chaque exemplaire d'un livre peut appartenir à plusieurs vies.'' (extraits du livre)... J'adhère tout-à-fait à cette façon de voir les livres d'occasion.


Aimant beaucoup les arbres j'ai été sensible à la façon dont ce jardinier en parle : ‘'Un arbre est une alliance entre le proche et le lointain parfait. (…) Un arbre ressemble à un peuple, plus qu'à une personne. Il s'implante avec effort, il s'enracine en secret. S'il résiste, alors commencent les générations de feuilles.''


Seul inconvénient : l'écriture de Erri de Luca est quelquefois trop élaborée pour moi ; je préfère une écriture plus simple.


En résumé : un roman en forme de conte sensuel et poétique.

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Les vieux de chez moi, à la campagne, racontaient toujours qu'il ne faut jamais dire merci à un ami. Je ne comprenais pas pourquoi. Ils n'expliquaient pas. C'est qu'ils parlaient peu. Ils regardaient le ciel et suivant le vent me disaient « Tiens, la pluie va venir ». Comme si l'important était le temps. Je viens de rencontrer un homme qui parle au présent du passé. le temps, encore une fois. Je ne connais pas son prénom, mais il dira dans ses pensées des bribes de souvenirs. Pour les entendre, il faut avoir les cheveux dans le vent. Cet homme ne remerciera pas Selim, préfèrera garder ce noyau d'olive, qu'il remettra en terre. Cette terre qui délivre ses richesses, ses odeurs dans le froissement d'une feuille de basilic, avec ses arbres qui jointent la terre au ciel. Làila, je t'ai rencontrée dans l'une de mes vies, d'autres ont été vécues dans une souffrance de fuite. Cette ligne de fuite qui marque les champs des vignes et m'emporte constamment, d'un continent à un autre, jusqu'à les retourner, au risque qu'ils s'entrechoquent. Une dérive continentale, tout comme ma dérive émotionnelle quand j'écrase de l'ail sur du pain et que je revois celles et ceux qui ont coulé ou péri sous les coups féroces de la dictature. Alors j'ancre mes pieds dans cette terre qui fait des angles avec les pierres et des courbes sur tes reins. Et je te tiens. le temps d'un instant. J'ai pleinement vécu au galop une vie, avec toi. Mais « il est des créatures destinées les unes aux autres qui n'arrivent jamais à se rencontrer et qui se résignent à aimer une autre personne pour raccommoder l'absence. Elles sont sages. » Tu es jeune, et moi je reviens de vingt ans passés en Amérique du Sud. Je suis un vieux livre qui t'aime.
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Un petit livre qui a l'épaisseur d'une odyssée.
Chaque ligne est un roman, chaque paragraphe a l'odeur du vent, chaque page le parfum d'une vie…
Ce n'est pas un récit linéaire, c'est la vie qui coule, c'est le sang-timent, qui s'égraine, graine de mimosa, noyaux d'olives. C'est la rive des sens que l'on longe, qui nous fait « songe »…
Trois chevaux, trois chevaux et la vie passe.
Pour reprendre une phrase d'Erri de Luca “ Si moi aussi je suis un autre, c'est parce que les livres, plus que les années et les voyages, changent les hommes”…
Il arrive qu'à force d'épurer, la phrase ciselée en dentelle ce casse… Là, le travail d'orfèvre est si parfait, que l'équilibre perdure, que la fragilité se fait solide et l'oeil avec émotion rebondit sur ce fils tendue entre les points.
L'histoire ? Elle est là, sur chaque bout de syllabe et cette voix, si rauque, si tendre, si puissante reste, bien que la dernière page soit tournée et le livre depuis longtemps refermé.
Il y a des petits récits qui racontent notre monde mieux que milles pages. Il y a des talents qui savent dans la phrase, sculpté l'indicible et le sensible…
Merci Erri de Luca…
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Pourquoi ce titre « Trois chevaux » ?
C'est la formule qu'utilise un aubergiste rencontré aux Malouines par le héros :
« Une vie d'homme dure autant que celle de trois chevaux et tu as déjà enterré le premier. »

J'avais lu jusqu'ici avec beaucoup de plaisir plusieurs livres d'Erri de Luca, mais celui-ci m'a tout particulièrement touché ! C'est comme un long poème en prose, un poème d'amour, avec sa narration où le passé et le présent s'entremêlent de façon permanente.

Je ne voulais pas le lire trop vite, je voulais m'imprégner des saveurs, des odeurs du Sud, qu'il évoquait… (J'ai relu plusieurs phrases 2 à 3 fois pour davantage en apprécier la beauté poétique).

La nature, le vent, la mer, sont très présents. Ils apportent un souffle de liberté au narrateur qui en a bien besoin…
L'Argentine, ce pays qui est toujours dans les pensées du héros, de façon obsessionnelle…
Car il a été marqué de façon indélébile par les graves événements qui s'y sont déroulés :
« Je parle des garçons qu'on envoyait là-haut pour tomber dans des crevasses et sous des balles, pour rouler en bas sous l'effet de souffle d'une bombe, ayant vécu pour offrir des yeux aux corbeaux ».
Il est comme sur le qui-vive, comme un animal traqué, prêt à bondir, à fuir !
Obligé d'être méfiant à l'égard des gens qu'il ne connaît pas…

Ce héros, il a la cinquantaine, c'est un émigré italien, il est jardinier, mais pas n'importe quel jardinier !
C'est un homme qui a un profond rapport à la nature. C'est un passionné de lecture aussi.
Un homme qui a beaucoup souffert dans la vie, qui sait être généreux envers les plus démunis…

Il fait la connaissance d'une femme (de 20 ans plus jeune que lui), Laila, dont il tombe amoureux.
Quand il se confie à elle, il a déjà épuisé la vie d'un cheval…

Lorsqu'il était jeune, il a suivi en Argentine, Dvora, une femme qu'il aimait éperdument.
Mais ils se sont aimés pendant la dictature militaire de la fin des années 1970, et Dvora a été tuée et repose « au fond de la mer, jetée au large du haut d'un hélicoptère, les mains attachées. A vécu pour moi, est morte pour offrir des yeux aux poissons. »

Lui, se tenait à l'écart des événements, et a d'abord été épargné grâce à son passeport italien.
Il a rejoint la clandestinité, il a été pourchassé, a pris la fuite, a dû se cacher, a connu la peur, avant que la guerre des Malouines, en 1982, ne mette fin à la dictature et ne lui permette de revenir en Europe.
Il reprendra une vie, mais pas tout à fait une vie normale…

Au contact de Laila, il va épuiser sa deuxième vie.
Laila, elle aussi, connaît la souffrance et la peur. Après avoir été dentiste, elle vit à présent de ses charmes, mais sa rencontre avec le héros lui fait prendre la résolution de tout arrêter.

Mais s'ils veulent vivre ensemble, sans crainte, il va leur falloir tuer un homme…

Le ton est grave, mais pas triste ; c'est fort et intense, du vécu du narrateur.

Roman sur l'amour, le voyage, la solitude, les rencontres, les relations humaines, le courage, la souffrance, l'exploitation de l'homme, le destin, …

Erri de Luca exprime beaucoup de sensualité avec peu de mots. L'écriture est ciselée, les phrases sont courtes. Rien n'est superflu. C'est une belle écriture poétique, nostalgique à souhait !

Un court roman plein d'émotions, de sensualité, de délicatesse, de retenue, de pudeur…
Un moment de grâce.
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Récit de soi très simple dans l'écriture mais émotionnellement intense avec un arrière-goût de nostalgie de la vie passée. le narrateur évoque la fuite du temps, le passé sur lequel l'on ne peut revenir, les douleurs accumulées mêlées du bonheur des rencontres. Tout cela avec une grande pudeur. Un homme est tout cela à la fois, se construit peu à peu et poursuit sa route malgré les vicissitudes. On peut souffrir du chagrin de la mort de son amour et retomber amoureux ailleurs, plus loin et plus tard.
Dans cette écriture tout s'entremêle : présent, souvenirs du passé, pensées tournées vers un futur éventuel… J'ai beaucoup aimé comment l'auteur accompagne ces nombreuses pensées de gestes du quotidien basiques mais indispensables. Il sait nous raconter le travail de l'ouvrier manuel, du jardinier qui connaît la terre et les plantes. On parvient à retrouver les sensations, les odeurs au travers de ses mots.
Au fil des pages la tension monte et le drame se prépare. Pas besoin de commenter les faits, tous les facteurs se sont rassemblés pour ce dénouement.
Ce n'est pas une lecture des plus faciles avec ces sauts d'une époque à une autre. C'est une lecture riche, bouleversante, terriblement humaine.
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Ce n'est pas ma première lecture de cet écrivain et pas ma dernière, non plus : il me reste plusieurs livres dans ma PAL....mais à chaque rencontre, le même envoûtement opère. L'écriture d'Erri de Luca est riche tout en étant simple mais dense, sonore, poétique, ,il n'y a pas assez d'adjectifs pour la décrire mais le plaisir de la lecture est toujours là.


Trois chevaux qui décrit avec autant de bonheur l'amour des livres - d'occasion ! - l'amour des arbres et du travail de la terre, des rencontres différentes, du vin et du café partagés avec l'autre, et avec autant d'âpreté les souvenirs douloureux d'une vie en Argentine...
Un livre que l'on lit doucement pour tout entendre,pour vivre la solitude du narrateur,pour partager sa tristesse et respirer toutes les senteurs de l'Italie décrite ici.
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Très belle écriture, Erri de Luca fait chanter les mots.
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C'est le premier livre d'Erri de Luca que je lis. Et j'ai la chance de découvrir un auteur qui trouve immédiatement une place majeure dans ma bulle littéraire.
Ceci dès les premières pages.
Il a ce verbe simple, ces vérités tranquilles, ce rythme serein quoi qu'il raconte, qui me happent littéralement.
Mais comme le livre est court, je traîne en chemin, je freine des quatre fers, je fais durer.
La fin sera ce qu'elle sera, de l'histoire de cet homme qui me parle de ses vies précédentes, lesquelles affleurent sur un mot, quelque chose dans l'air, le geste d'une femme, le regard d'un ami.
Il me parle de ses jours de jardinier, de marin, d'amant, d'homme debout.
Il a l'amour des arbres, de la terre et des plantes, et une belle façon de l'évoquer.
Il a aussi, surtout, une fraternité avec l'humain que je trouve bouleversante.
C'est une rencontre capitale pour moi.
Et comme je ne veux pas abîmer, égratigner cet ouvrage avec la faiblesse de mes mots, je m'arrête là.
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L'homme a 50 ans. Il est de retour d'Argentine où il avait suivi son amour, sa femme. Elle a payé de sa vie son combat contre la dictature. Il a poursuivi, seul, ce combat : il a épousé ses convictions. Puis il a pris part à la guerre des Malouines. Mais était-ce encore son combat ?
De retour en Italie, il devient jardinier et tombe amoureux de Laïla. Il lui parle à mots couverts de son passé. Les mots content sans violence, pourtant ce qu'il a vécu en est rempli. Elle, elle comprend que ces récits vont lui servir à se sauver de sa propre vie. L'homme sait alors que sa deuxième vie touche à sa fin...

Roman très court, qui se lit lentement, comme une caresse alors que ce récit est plein de violence.
Les phrases sont comme des poèmes, comme des cicatrices dont la peau est devenue très douce.

Excellent !
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Écriture poétique pour dessiner les corps, la séduction, la sensualité ; pour offrir la terre, les arbres, les plantations, l'effort ; pour évoquer les arômes, lavande, sauge, tomate, vin ; pour chanter le pouvoir et la beauté des livres.

Écriture tranchante pour raviver la guerre, la perte, la souffrance, la fuite, l'exil, la solitude.

Écriture palpitante qui retrace l'Italie, l'Argentine, l'Afrique et l'océan ; qui parle d'amour, d'amitié, de peur et de mort, celle que l'on donne, celle que l'on attend.

Écriture économe, légère de mots et lourde de sens.

Écriture unique et superbe.
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