Au milieu de tous les personnages créés par
Jean-Laurent del Socorro pour
Royaume de vent et de colères, Silas est resté le plus mystérieux. Seul d'entre eux à nous parler, il ouvre et ferme la scène sans que nous n'apprenions la moindre chose sur lui.
Avec ce roman, l'auteur vient nous raconter sa jeunesse et comment il a bien pu arriver à Marseille, lui est né loin de là, à Grenade, en pleine Reconquista.
Silas ne s'est pas toujours appelé ainsi et, surtout, il n'a pas toujours été seul. Un père, une mère, une préceptrice, une petite soeur et une soeur jumelle, une famille somme toute banale malgré les difficultés liées à la religion, du moins au premier abord. Parce que dans l'intimité, les choses sont bien différentes et on nous parle de maltraitance familiale, de violences, d'indifférence et de deuil.
Un combat de tous les jours que les enfants mènent en se protégeant les uns les autres du mieux qu'ils peuvent. Jusqu'au drame.
Jean-Laurent del Socorro fait le choix de laisser le volet fantastique, celui qui tourne autour des Artbonniers et qui prend ici le nom de Pierre du Dragon, très loin dans son récit. C'est une quête un peu vague qui réapparait de temps en temps, un objectif à atteindre pour Silas et Rufaida. Pourtant, ce n'est pas le plus important parce qu'on est focalisé sur cette violence, de cette famille tout d'abord, puis de la ville, du pays et jusqu'à Montpellier où les enfants partent finir leurs études et où ils tombent en plein soulèvement protestant.
Des guerres de religion, encore et toujours puisque c'est l'époque qui veut cela et qui vont poursuivre Silas.
Ce passage à Montpellier m'a particulièrement interpellée. On sait que les jumeaux n'y trouveront pas la paix mais, malgré l'injustice que vit Rufaida qui ne peut pas poursuivre les études qu'elle souhaite parce qu'elle est une femme, il y a des instants d'apaisement où se retrouvent leur logeuse juive, deux étudiants musulmans et Peter, le Protestant calviniste.
Un espoir vite balayé en même temps que l'Histoire avance.
Je ne vous parlerai pas de la troisième partie parce qu'elle est très spoilante et qu'elle nécessite, à mon sens, d'avoir lu
Royaume de vent et de colères, Gabin sans aime, et sans doute même
La Guerre des trois rois pour avoir un intérêt. Elle détonne un peu dans le récit et c'est un choix audacieux, mais sa conclusion m'a beaucoup plu.
Silas c'est un beau, un magnifique personnage. Un de ceux pour lesquels je serai prête à lire la moindre ligne pour en apprendre plus sur lui, sur la haine qu'il a enfouie, sur l'amour qu'il a eu pour sa petite soeur, sur la passion poétique fugace qu'il a vécue.
Sur l'ancien Sinan, temporaire Simon, devenu Silas pour ne pas étouffer sous cette violence qu'il aura connue jusqu'au bout. Avant d'accepter l'apaisement.
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