Aux avants postes du mouvement metoo
King Kong Théorie est publié en 2006, « le deuxième sexe de Simone de Beauvoir a 56 ans. J'entre avec cet essai dans l'univers de
Virginie Despentes et je reçois son texte comme une évidence, portée à la fois par des mots qui claquent tout autant que les propos. Écrit à la première personne du singulier, par une femme qui ne se reconnait pas dans la représentation courante de la féminité, elle dénonce ce que les sociétés patriarcales ont fabriqué tout au long de leur histoire. Son propos part d'elle-même, elle affirme dans son essai le droit à l'individualité, le droit à la différence, à l'envers de tous les principes, tous les lieux communs, toutes les convenances que la société conditionne. Elle écrit donc « d'ici », pour toutes celles et tous ceux qui sont loin des clichés ceux qui assignent aux hommes et aux femmes des postures campées dans la puissance d'un côté la soumission de l'autre avec tout le dégradé des idées reçues qui vont avec ce schisme originel. Dès le premier chapitre « Bad lieutenantes » le décor est planté, la dénonciation de l'hypocrisie sociale, grande ordonnatrice du jeu de rôle des sexes, va aller crescendo. L'évocation du viol qu'elle subit à 17 ans, son cheminement pour dire le mot, sa découverte d'écrits qui éveillent sa conscience, jusqu'à réaliser ce qu'il pèse dans ce qu'elle est « C'est en même temps ce qui me défigure et ce qui me constitue ». le rappel de ses deux années de prostitution occasionnelle, lui permet de mettre en perspective le statut de la femme prostituée et celui des autres femmes, les plus dominées, exploitées ne sont pas forcément les premières, elle écrit «
Baise moi » pendant cette période : « Il y a un lien entre l'écriture et la prostitution… » (p 84 Poche). Son analyse de la pornographie, qui y voit un anxiolytique social, « Il est important que la sexualité fasse peur » lui donne un dernier champ de référence pour critiquer la toute-puissance de la sexualité masculine dans l'imaginaire social.
Un livre à portée universelle qui invite à repenser la société :
« le féminisme est une aventure collective, pour les femmes, pour les hommes, et pour les autres. »