Citations sur Teen Spirit (132)
Je suis resté un moment sur place, déstabilisé. J'avais tellement l'habitude d'exagérer, de manipuler, de faire semblant... que mes émotions n'étaient plus jamais légitimes.
Ce qui faisait la légitimité de sa classe d'origine, odieuse, cruelle, discutable, mais légitimité quand même, c'était le plaisir. Le bon goût, le raffinement, le savoir-vivre... Une toute petite classe sociale privilégiée était le "point de convergence" fitzgéraldien du travail abrutissant de la planète entière. Tout le monde trimait pour que ces quelques personnes puissent s'occuper de prendre du bon temps, d'avoir du goût et un bon style. Et, justement, de ne pas travailler vulgairement.
A présent, même ceux-là, surtout ceux-là, en première ligne, courbaient l'échine comme des esclaves, vies laborieuses, sans garantie, sans prendre le temps de rien. L'exploitation s'était durcie, mais ne convergeait plus vers le bonheur de personne.
Vous savez aussi bien que moi que c’est pas comme ça que ça se goupille. C’est elle qui est dehors dans la nuit, même si c’est vous et votre dame qui flippez, c’est elle qui va dehors se mettre en danger. C’est elle qui risque tout. Alors, c’est elle qui a besoin d’être rassurée, et rassurée, et encore rassurée. Jusqu’à ce que ça lui rentre dans le crâne qu’elle avait tort de paniquer. Sinon, vous lui donnerez raison. Si vous la livrez aux autorités, quelles qu’elles soient, vous lui montrerez juste qu’elle a bien raison de se méfier. Ou bien vous la péterez en deux.
On a mangé des conneries de plats de chez le traiteur, j'avais rarement rencontré quelqu'un d'aussi chiant qu'Alice. D'aussi imbue d'elle-même, étalée dans son sale confort qui n'était pas que matériel, bardée de certitudes idiotes et partiales. Elle était obsédée par des purs trucs de psychopathe : la bourse, l'immobilier, les plantes vertes, les magasins de meubles, les grandes marques de fringues, les hôtels de luxe et les grands restaurants...
Petite, frêle, blonde, poitrinaire, des toutes petites mains, une grosse chatte large... Elle avait un tout petit nez comme une poupée, les yeux très clairs. Vrai bourge de souche : éduquées, sur trente générations à être les meilleures putes, destinées à l'élite des mâles... et moi, bingo, je passais là pile dans sa période rebelle, elle s'est jetée sur le fils de cheminot comme la faim sur le monde... Elle tremblotait dès que je l'effleurai, je l'appelais ma petite pute électrique, elle surkiffait sa race. Petite maison, sur quatre étages, au fond d'un jardinet pété de fleurs de toutes les couleurs... Elle avait punaisé des posters de Sid Vicious dans sa chambre, elle voulait faire toxicote, quand elle serait grande. Manifestement, elle a changé d'option, depuis. C'était l'année du bac.
Désolé? Tu peux! Ma mère traîne une gueule pas possible parce qu'à bientôt quarante ans elle a jamais connu d'histoire sérieuse. Elle se fait des marques aux poignets, au couteau, le soir, comme si c'était de son âge. Tu le savais, ça? Maintenant, son nouveau truc, c'est s'enfiler une bouteille de whisky et moi pendant la nuit je me relève et faut que je l'aide à dégueuler et elle chiale comme une merde et t'as vu de quoi elle a l'air? De rien, de que dalle... j'ai une mère merdique et paumée, ça serait drôle que dans un sitcom. Et toi, je te trouve vraiment gentil, tu sais, mais t'as même pas de maison, et t'as même pas de travail, ni de copine... ton livre, tu l'écriras jamais, parce que t'es qu'un foutu raté et faut vraiment avoir dix ans pour te trouver drôle et classieux. Qu'est ce que je peux devenir entre vous? Hein? Une putain de ratée, moi aussi. C'est pas juste.
J'avais toujours de l'affection pour les gens qui n'allaient pas bien. Ça les ramenait à mon niveau.
Cette putain de mouise que je me traînais, je ne connaissais rien d'autre que je sois sûr de pouvoir garder, elle me constituait, me définissait, et je refusais de l'abandonner. Mais elle finirait par me terrasser, m'écrabouiller et s'étendre à ma place. Seulement, je n'avais jamais appris à me méfier d'elle, à chercher à m'en éloigner.
A quoi ça sert d'être potes si ça n'est pas pour s'encourager dans la mauvaise foi ?
Dans quel genre de monde ces enfants-là seraient-ils adultes ?