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3,44

sur 126 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
On ne connaîtra jamais le prénom de la jeune héroïne et narratrice de ce roman. Pesant 10 kilos à la naissance, elle a continué à prendre du poids de façon exponentielle. Il n'en fallait pas davantage pour que ses "copains" de classe l'affublent du surnom de "la Couenne", entre autres gentillesses. Elle-même ne se voit que comme un "éléphanteau rose", et ses parents ne l'aident guère à se construire une identité : sa mère, jolie femme à la taille mannequin, s'enfuit quelques mois après la naissance, horrifiée par ce bébé monstrueux et ce qu'il menace de devenir. Quant à son père, persuadé que sa fille a dévoré sa soeur jumelle in utero, il ne s'adresse à elle qu'au pluriel et se dévoue corps et âme à nourrir "ses chéries, ses princesses" de mets aussi savoureux que caloriques, en dépit de tout bon sens ("Le plus grand don que mon père pense pouvoir me faire est celui de moi-même. Il veut me rendre l'amour de mon corps en le nourrissant. Mais à la fin, cela revient à une seule chose : il me fait don d'un élargissement dont je n'ai nul besoin"). La jeune fille, pas dupe ("Père : mon adorateur ; mon bourreau"), joue le jeu de la dualité pour ne pas peiner son père. Et malgré sa lucidité et la culpabilité qu'elle ressent, ne peut s'empêcher de manger sans fin, avec une faim insatiable, parce que "l'acte de manger est orgasmique". Alors elle continue à grossir et, forcément, dans un monde soumis aux diktats de la minceur et de l'apparence, à subir les humiliations et le harcèlement de ses condisciples, qui publient des photos d'elle sur les réseaux sociaux, jetant sur elle une opprobre planétaire.

Puis arrive un jour, vers 15-16 ans, où elle est incapable de sortir de chez elle, de s'extraire de son lit, de passer la porte de sa chambre. Un isolement forcé qui la met à l'abri des moqueries mais qui n'occulte pas la catastrophe imminente, celle qui la condamne, telle une baleine échouée, à mourir écrasée sous son propre poids... Avant une fin qu'elle sait inéluctable, le Bonheur daigne cependant lui rendre une visite aussi inattendue qu'improbable sous la forme de l'Amour, d'un homme providentiel qui lui fera découvrir les plaisirs de la chair et de la passion.

Manger pour se sentir vivante, pour exister, pour s'anéantir, manger sa soeur jumelle dans le ventre de sa mère, se faire bouffer par cette soeur imaginée qui lui bourre la tête de belles idées impraticables, être rongée par la cruauté du regard des autres démultiplié par l'Oeil d'Internet, être reniée par une mère lâche et un père qui la voit double, la gave et la gâte (dans tous les sens du terme) et l'assassine à feu doux à coup de plats en sauces et de gâteaux au chocolat, se perdre dans une montagne de nourriture, dans la montagne de chair qu'elle devient, puis dans la folie d'un amour passionnel, l'héroïne de "Manger l'autre" questionne son identité, son humanité jusqu'à l'auto-destruction.

Avec un dernier twist inattendu et une fin nauséeuse à la limite du supportable, voici un conte tragique, un texte fort porté par une écriture riche et sensuelle, dont la noirceur totale est (heureusement) tempérée par une certaine auto-dérision corrosive. Sur les thèmes de l'acceptation de soi et du regard des autres, "Manger l'autre" est un roman dérangeant, interpellant, dans lequel on oscille sans cesse entre répulsion et empathie.  Si vous décidez de "consommer" cette histoire, oubliez toute modération.

En partenariat avec les Editions Grasset via le réseau Netgalley.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Manger l'autre de Ananda Devi Nirsimloo m'a été envoyé par net galley et les éditions Grasset.
Je l'ai fini il y a quelques jours et j'avoue avoir du mal à le chroniquer ! Que dire de ce roman ? Ai je aimé ? Ai je détesté ? Je ne sais pas trop en fait !
Manger l'autre, c'est l'histoire d'un bébé de 10 kilos, notre narratrice, dont nous ne saurons jamais le nom. Choquée par ce bébé obèse sa mère les quitte, son père et notre narratrice, dès que possible. le père est persuadé que sa fille a mangée sa jumelle dans le ventre de sa mère, et quand il leur parle il dit mes filles...
Evidemment elle se met à manger encore et toujours plus, grossissant encore et toujours plus...
Elle subit de nombreuses moqueries, car les enfants peuvent être très cruels...
Et elle grossit et... je n'en dirais pas plus, pour savoir la suite, à vous de le lire ;)
C'est un roman dérangeant tout en étant facile à lire, et honnêtement j'ai eu du mal à le lâcher une fois commencé.
C'est cruel, comme la vie peut l'être parfois.
C'est dur à lire par moment, car certains passages sont forts, mais c'est bien ficelé et dans l'ensemble, ça m'a plu.
Je l'ai lu sans savoir à quoi m'attendre et je ne regrette pas ma lecture.
Je n'ai pas eu de coup de coeur, et j'ai parfois eu du mal à m'attacher à la narratrice, mais il est sur que je n'oublierais pas ce roman de sitôt.
C'est pour ça que je mets quatre étoiles :)
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Ce livre audacieux et provocateur d'Ananda Devi est une plongée profonde dans les abîmes de l'âme humaine.
À travers une écriture incisive, l'autrice nous transporte dans un univers trash, glauque voire gore sur la fin.

Cette histoire dérangeante nous confronte, entre autre, à la part de notre inhumanité dissimulée derrière les pseudos des réseaux sociaux dans un monde où règne la jouissance sans prix ni limites.

En refermant ce livre, je me suis senti mal à l'aise, secoué par cette lecture troublante. L'autrice a clairement cherché à attirer notre attention sur ce que nous refusons de voir : les aspects les plus tristes de notre nature. Elle nous pousse à ressentir la puanteur des comportements toxiques qui se cachent derrière l'anonymat des réseaux sociaux, et à prendre conscience de notre propension à valoriser la jouissance à tout prix dans nos sociétés matérialistes en occultant les personnes différentes, obèses,sdf,...

Pourtant, je reconnais qu'il y a une certaine beauté dans cette exploration audacieuse de l'obscurité humaine à travers son style d'écriture percutant et sa plume acérée ce qui m'a quand même retenu jusqu'au point final.

Bien que troublé, je suis intrigué par l'audace et la provocation de cette autrice, et je me demande si je ne serais pas prêt à me plonger dans une autre de ses oeuvres à l'avenir.
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roman sur l'obésité. Histoire très spéciale et dérangeante d'une jeune femme mangeant et dévorant tout sur passage, notamment sa jumelle qu'elle aurait mangé dans le ventre de sa mère. Intéressant et donne à réfléchir notamment sur la société dans laquelle nous vivons actuellement
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Attention à ne pas mettre dans les mains de tous. Terrible histoire de cette adolescente obèse qui vit avec son père et qui va finir par se manger elle même... une très belle écriture mais le sujet tellement dérangeant rend la lecture étrange et l'a laissé le sentiment d'avoir été dans une position de voyeur... a tenter
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Un livre déroutant... le récit d'une ado de 16 ans "obèse" (le terme est faible selon ses mots) qui a tellement grossi qu'elle ne peut plus sortir de sa chambre.
Une réflexion sur notre société d'aujourd'hui et ses standards du paraître, sur l'amour et ses mystères, sur les normes, la solitude et la vie virtuelle.
Le premier chapitre dessine les contours du dernier, qui pousse à son paroxysme l'obsession dévoratrice de la narratrice.
Impressionnant de maîtrise stylistique, il dérangera néanmoins plus d'un lecteur par les transgressions des tabous les plus ancrés.
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Croisement étrange entre Rabelais et le fantastique, dénonçant les diktats de la beauté, le harcèlement notamment via les réseaux sociaux et l'amour parental toxique. On y suit une toute jeune héroïne née hors norme dont la mythologie familiale raconte qu'elle a dévoré sa jumelle in utéro. Rejetée par sa mère, adulée par son père, elle ne fera que croître entre fascination morbide et curiosité malsaine envers le monde extérieur et elle-même.
Une lecture noire et lumineuse sur ce qui créé l'enfer, pavé de bonnes intentions et parfois de soi.
Une lecture que je recommande à un public averti.
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Un roman qui m'a donné la nausée par le sujet même mais aussi par l'écriture qui amène cette impression de trop plein, de débordement. J'ai trouvé d'ailleurs intéressant ce style qui colle au thème.
J'ai trouvé le roman riche. le traitement de la maladie, l'autodestruction mais surtout la relation père fille amène une autre dimension au roman. Cette dernière m'a mise en en colère, m'a intrigué et m'a accroché.
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Plus de dix kilos à la naissance ! Et elle voit le jour déjà affamée avec le soupçon affreux d'avoir dévoré sa soeur intra-utérine.
A partir de là, c'est un long monologue sur le calvaire de la vie d'une obèse, ses réflexions sur son état, sur la façon dont elle perçoit le mépris, les railleries,la méchanceté et parfois la pitié dont elle fait l'objet.
La faim perpétuelle, la graisse envahissante et la honte permanente sont les compagnes incessantes de celle qui n'est plus, pour elle et pour les autres qu'une ruine saliveuse qui sans trêve poursuit son oeuvre solitaire de dévoration.
Et finalement, celle que l'on n'appelle plus que "La Couenne" a la fonction de dégoûter ou d'amuser et finalement de consoler les autres d'être ce qu'ils sont.
Alors à 16 ans, au fil de dialogues avec sa soeur jumelle imaginaire, elle va décrire sa vision du monde où l'on voit que la soi-disant normalité n'est qu'une vue de l'esprit.
C'est profond, bien écrit et passionnant.
"Nous avons inventé l'enfer".
C'est un roman totalement atypique et la quasi absence de dialogues n'est absolument pas gênante. Un livre tout simplement incroyable dont la fin, hallucinante est tout simplement l'allégorie ultime représentant notre civilisation.
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Je suis sortie de ce livre atérée, bouleversée, choquée, abasourdie... Ce n'est pas un livre que je peux recommander, parce qu'à mon avis on ne se tire pas indemne de sa lecture. Presque drôle dans ses débuts, avec une narratrice incontestablement dotée d'humour il sombre progressivement dans l'horreur. Jusqu'au bout je me suis dit qu'il y allait avoir une rédemption, une lumière, un sursaut de révolte, mais non. L'auteur déroule inexorablement son récit jusqu'à son terme, terrifiant. Tout en dénonçant le culte de l'image, et la tyrannie du regard, amplifiée par le web, elle nous met en position de voyeur. On assiste à la destruction d'une âme. le tout écrit dans une langue superbe, imagée, avec un vocabulaire riche et juste, envoutant.
J'étais si bouleversée par ce livre que j'ai été cherché à quoi ressemblait son auteur... Comment une si jolie petite dame peut-elle écrire des récits aussi terribles ? A voir sa bibliographie elle n'en est pas à son coup d'essai.
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