AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,44

sur 126 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Manger l'autre est l'histoire terrifiante d'une jeune fille hors norme qui se livre sans fard ni pudeur devant l'oeil avide d'internet.
Elle a 16 ans et raconte comment depuis sa naissance elle ne cesse de grossir, habitée par un appétit d'ogre qui la pousse à manger sans fin et l'enferme dans un corps de presque 200 kg.
Son obésité morbide lui interdit de vivre d'abord normalement puis de vivre tout court. Elle meurt à petit feu. Abandonnée par sa mère, gavée par son père, humiliée et stigmatisée par les autres, elle se retrouve piégée dans une immense solitude jusqu'à ce qu'on lui offre la possibilité de porter un autre regard sur elle même. Mais cela suffira-t-il à la délivrer du poids de son énorme souffrance...
Ce roman qui dénonce "le gonflement grotesque de l'inutile" et la tyrannie du regard de l'autre qui juge tout en incitant à s'exposer d'avantage, est une lecture coup de poing. Elle risque de heurter les natures délicates par le caractère horrifique de son propos mais l'écriture sensuelle d'Ananda Devi l'adoucit et la rend totalement addictive. Elle sait tellement bien mettre en appétit avec la description de nourritures succulentes que vous pourriez céder à la tentation de satisfaire vos papilles gustatives mises en émoi . Au risque de le regretter...
J'ai dévoré cette histoire d'une traite et ne peux que vous conseiller d'en faire de même. C'est tout simplement éblouissant !
.
Commenter  J’apprécie          180
Un roman dur, dérangeant, miroir de notre société.
.
Nous suivons une adolescente obèse, à sa naissance, elle faisait 10 kg, elle demandait toujours le sein, voulait manger toutes les heures, sa mère prit peur et partit. le père aime sa fille plus que tout mais son amour devient malsain quand il raconte à sa fille qu'elles étaient deux à l'origine mais que cette dernière a mangé sa jumelle. A partir de ce jour, le père s'adresse à "elles", fait à manger pour deux, il ne voit pas la détresse de sa fille, son mal-être, le harcèlement qu'elle subit au lycée, sur Internet à travers cet Oeil qui la guette, la scrute. Un jour, la jeune fille de seize ans connaît le toucher d'un homme, voit le désir qui s'allume dans ses yeux, elle expérimente de nouvelles sensations, apprivoise son corps, se sent belle, puissante. Mais lui autorise-t-on le bonheur ?
.
Ananda Devi use de son écriture poétique et grinçante pour nous livrer une histoire intime, où le corps est sujet principal. L'envie, la surconsommation mène au vide, au néant. Internet est le lieu où la rancoeur, la jalousie, la méchanceté s'épanouissent et prennent des proportions effroyables. La douleur de cette jeune fille m'a bouleversé, j'ai dû faire plusieurs pauses dans ma lecture tant le récit est dur et peut rendre mal à l'aise.

Un roman essentiel et bouleversant
Commenter  J’apprécie          104
Dès sa naissance, la narratrice était obèse. Devant une telle monstruosité, la mère a fui, cédant la place au père qui a commencé une gigantesque entreprise de gavage tant de nourriture préparée avec amour que de mensonges. Il raconte en effet à sa fille qu'elle a dévoré in utero sa soeur jumelle, ce qui expliquerait son poids.
Harcelée, cyber-harcelée, la jeune femme connaîtra pourtant, lors d'une deuxième naissance symbolique, un homme qui sera son exact opposé et lui fera découvrir les beautés de son corps. Mais Éros et Thanatos sont intimement mêlés et dans une société du paraître, se faire voir peut entraîner de douloureuses conséquences.
Roman de de la dévoration, de l'abondance ,de l'excès , Manger l'autre charrie, comme un fleuve furieux, les métaphores et tend à notre société un miroir à peine déformant. Oui, nous vivons dans un monde où certains ont accès à la nourriture déversée sur nous comme d'une corne d'abondance mais où on nous enjoint la minceur, voire la maigreur.Nous nous gavons d'images mais ne jetons pas un regard sur les exclus de la société et nous acharnons sur ceux que nous considérons comme hors-normes.
Un roman au rythme soutenu, à l'écriture tantôt rabelaisienne, tantôt sensuelle, qui ne tombe jamais dans le voyeurisme ni le pathos, soulignant toutes les ambiguïtés des personnages et des relations qu'ils entretiennent entre eux. Une allégorie puissante et roborative. Un grand coup de coeur !
Commenter  J’apprécie          90
Ce roman est superbe. J'ai été saisie par l'écriture. On tourne les pages, sans pouvoir s'arrêter, peut-être un peu par voyeurisme aussi. C'est l'histoire de cette adolescente en obésité extrême. Elle naît à 10 kg, bébé hors-norme et très glouton, loin de ce qu'avait imaginé sa mère très mince et jolie. le bébé dévore, il est pendu aux seins de sa mère, la blesse, la vide. La mère finit par quitter le foyer familial et abandonne sa fille ainsi que son mari. le père de la narratrice quant qu'à lui, adore sa fille… enfin plutôt « ses » filles. Il est persuadé d'une chose : que sa fille a dévoré sa propre soeur dans le ventre de sa mère, ce qui expliquerait sa taille gigantesque. Il nourrit donc sa fille à l'excès, lui prépare de très bons repas et double les rations pour la jumelle absente. C'est l'orgie de nourriture. Pour l'adolescente, c'est le désastre, en plus des moqueries à l'école, elle doute, entretient une relation et des discussions avec sa soeur fantôme. Elle trouve l'apaisement dans la nourriture. Elle est hyperphage, a toujours faim, et son père la rassure, lui disant qu'elle est belle et continue de la gaver. Elle pèse jusqu'à 200 kg et ne peut plus se lever, ses membres ploient sous la masse de sa graisse. Un jour, l'héroïne se coince dans une porte, elle a tant et tant grossi qu'elle ne peut plus sortir de sa chambre. Après une longue agonie, son père revient et la retrouve. Les secours arrivent, et c'est René, le charpentier, qui trouve la solution. En enduisant son corps d'huile, il la font glisser hors de son étau. Honte ultime. La jeune fille entame une relation (sexuelle et basée sur la nourriture) avec René. Ils se découvre des points communs. René, ancien SDF, a souffert du regard des autres et de la solitude. Ensemble, ils se réchauffent et réchauffent leur solitude. L'adolescente est heureuse et se sent belle. Mais comme le pressentait la jeune fille, ça ne va pas durer et le bonheur et la volupté vont cesser. La fin est extrême et clôt la métaphore.
Commenter  J’apprécie          30
Tout dévorer sur son passage. Les aliments, l'espace autour de soi, l'essence de tout, l'absence des êtres chers, la culpabilité et l'incapacité de savoir quoi faire pour ceux qui restent, voilà tout l'esprit de ce roman. Dur, sans fard, nullement accommodant, le récit est celui d'une enfant qui grossit et grossit au fil des ans et qui n'arrive plus à s'arrêter, à se sustenter. Face à cette enfant obèse, où se trouve la normalité ? Existe-t-elle ? Et si oui, est-elle présente afin de ranger les êtres humains dans des cases ou de pointer encore plus facilement du doigt et plus rageusement ceux qui ont franchi depuis longtemps la limite ? Sans réellement se morfondre où s'apitoyer sur son sort, la jeune narratrice fait face à ses difficultés et à ses travers. Regardant en face sa vie sur terre depuis sa naissance, elle relate l'évolution gigantesque de son corps, les surplus qui s'ajoutent peu à peu sans qu'elle y fasse attention pour que finalement ils ne puissent plus jamais disparaître. Conte de l'excès, de la dévoration de tout, de la haine d'autrui pour sa différence, Ananda Devi réussit avec beaucoup de justesse à nous retranscrire l'avancement d'une enfant jusqu'à l'adolescence fortement marquée par le regard venimeux et/ou apeuré des autres et par le sien tout aussi destructeur.

Ce roman ne sera sûrement pas facile à lire face à la multitude d'émotions que la narratrice et que le lecteur, par le regard parfois acerbe de la jeune fille face cette société dont elle ne fait peu à peu plus partie, peut ressentir. Face à son obésité, la majorité des gens vous montrer du dégoût, de l'incompréhension, de la peur. Et il y a ceux comme son père qui vont tenter de trouver une explication plus ou moins rationnelle afin d'accepter l'état de sa fille. Tel un ogre, la jeune fille dévore tout sur son passage, les forces de sa mère qui s'amenuisent peu à peu jusqu'à ce que celle-ci disparaisse de sa vie, ses défenses face au monde extérieur qui ne fait que la rejeter toujours un peu plus, ses forces personnelles physiques et mentales, jusqu'à ce qu'elle ne ressente que solitude et fatalité. Heureusement, la vie offre de nombreux cadeaux et le sien sera René. Par son regard tendre est différent des autres, elle arrivera peut-être à mieux s'accepter en tant que fille, en tant que femme et en tant qu'amante. Ce roman de l'excès propose quelques moments de douceur parmi toute cette constatation de la société contemporaine : l'abus des nouvelles technologies avec les réseaux sociaux, une image de la femme parfaite ancrée dans la majorité des esprits par la société de consommation, les relations humaines parfois régies uniquement par les apparences,…

À l'image de tout ce récit, la fin se trouve montre particulièrement fort et déchirante. L'auteure n'espère pas par son récit apporter une certaine complaisance ou un espoir surdimensionné face à un avenir potentiellement meilleur mais une véritable constatation de ce que peut être la vie d'un être vivant en surpoids, en proie à une obésité morbide qu'il n'arrive pas à contrôler, à réfréner. Manger l'autre semble être un roman important qui s'adonne à signaler comme tant d'autres les maux d'une société occidentale (ici, spécifiquement la société américaine) tournée trop fortement vers les apparences. Je remercie donc fortement la maison d'édition Grasset et NetGalley pour m'avoir fait découvrir ce récit poignant et pas toujours aisé à apréhender face aux sentiments de la narratrice et à l'introspection souvent très rationnelle qu'elle opère continuellement.
Lien : https://entournantlespages.w..
Commenter  J’apprécie          30
Difficile de parler après Ananda Devi, je vais juste emprunter ses mots.
« Commencer, donc, par l'orgasme du vivant. »
« C'est là que débute le mensonge de ma vie duelle »
Mais, « Nous ne sommes pas faits pour le jeûne ou l'abstinence, sauf comme forme de punition et d'autoflagellation. Et je ne suis pas prête à m'autoflageller. »
Aussi, je peux « me livrer à cette caresse qui pourrait presque être la première après la naissance, tant le silence entre nous a été long ; ma mère me renaît. »
Il y a aussi mon amour qui « sait si bien mentir. J'adore tes mensonges. Je n'en connais pas de plus beaux. Mens moi encore »
Et enfin mon père qui « ne mesure pas l'étendue du monde virtuel. On ne peut pas en sortir. Il est éternel. Il est partout. Infini. Il n'y a pas d'oubli possible puisqu'il est en dehors du temps et de l'espace.
Nous avons inventé l'enfer. »

Ananda Devi a l'art de me faire ressentir l'innommable, de me permettre de rentrer dans la peau de personnages torturés, hallucinés, criminels, non seulement en les comprenant et en les acceptant mais en allant jusqu'à adhérer totalement à leur folie.

« Au commencement était un éléphant rose et bâfreur »
Commenter  J’apprécie          10
En décidant de consacrer son nouveau roman à une adolescente monstrueuse selon les canons en cours, obèse comme un phoque,, la romancière mauricienne Ananda Devi raille allègrement une ère de gonflement grotesque. En toile de fond, elle brosse le portrait de parents fuyards ou siphonnés, de camarades cruels qui rivalisant pour l'humilier via leur écran d'ordinateur et un apprentissage contrarié de l'amour. Un récit entre humour et dénonciation.
Commenter  J’apprécie          10
J'ai beaucoup aimé ce livre : son écriture très agréable aborde avec beaucoup de pudeur le thème de l'obésité et son rapport au corps, à la nourriture. Il permet de mieux comprendre l'impact de cette maladie qui conduit, ici, à l'autodestruction.
Ce roman évoque également de nombreux problèmes de société : la surconsommation, la mode de s'exposer à travers des selfies, la cruauté des réseaux sociaux et de ses commentaires lapidaires, la place de la parentalité entre amour et éducation (y compris alimentaire), l'impact du regard de l'autre souvent incapable d'empathie, le culte de l'image, de l'apparence et de la minceur,...
On suit le parcours de la narratrice, de sa naissance à son adolescence. On ne connaît pas son nom comme si son identité se définissait uniquement par les atroces quolibets dont elle est victime. On la considère comme un monstre en oubliant ce qu'elle peut ressentir... Peu à peu, elle va perdre son amour propre, son humanité et devenir un être monstrueux au delà de l'imaginaire.
Commenter  J’apprécie          10
Difficile de rassembler mes pensées après la lecture de ce roman. Il m'a happé et je n'ai pas pu arrêter ma lecture mais j'ai une drôle de sensation après ça...
En effet, la narratrice arrive au monde en pesant 10 kilos faisant s'enfuir sa mère effrayée par ce corps déjà monstrueux qui ne va faire que grossir au fil des années.
Son père va être son unique soutien, persuadé que sa fille a mangé sa soeur jumelle in-utero.
À l'école, la vie de la jeune fille est difficile, moquée par ses camarades, on ne connaît finalement d'elle que son surnom « la Couenne », surnom soit dit en passant extrêmement cruel.

Ne supportant plus son image, la jeune femme s'isole, ne se regarde plus dans les miroirs mais continue de manger, d'engloutir et de grossir. La société la rattrape, la traque pour exposer au monde sa grosseur à travers des photos volées sur Internet.
Elle devient une bête de foire contemporaine et la violence des écrans conduit à une folie horrifique.

J'ai ri dans ce roman, mais plutôt jaune face à la bêtise du monde, capable de désigner un bouc-émissaire et de le sacrifier en place publique, car les réseaux sociaux sont aujourd'hui devenus la place où exerçait le bourreau à l'époque. Les conséquences de cette modernité ne sont pas toujours la mort mais une destruction de la vie.

Ce roman est terriblement noir, les autres sont cruels, on ne connaît jamais le prénom la narratrice de la narratrice ce qui la déshumanise et c'est assez difficile de suivre impuissant le parcours chaotique de cette jeune femme.
J'ai beaucoup aimé, l'auteure s'est exercée à un style peu commun avec une belle écriture mais je n'ai rarement lu une histoire aussi dérangeante et qui fait réfléchir à l'aspect chaotique de notre société.
Commenter  J’apprécie          12
A sa naissance, elle pesait plus de 10 kilos. Devenue adolescente, elle frôle les deux quintaux. Entre-temps, sa mère s'est enfuie affolée par le monstre qu'elle a engendré. Elle vit seule avec un père cuisinier qui entretient son appétit en lui concoctant de bons petits plats qu'elle ingurgite avec délectation et avidité tout en s'adressant à elle comme si elle était double, comme si son énorme corps contenait une soeur jumelle. Pas facile dans ces conditions d'avoir une vie équilibrée...
Rejetée par ses « camarades » de classe parce que son physique difforme ne répond pas aux canons de beauté, elle se cloître dans sa chambre pour dévorer en toute tranquillité.
Allégorie des excès de la société de consommation, « Manger l'autre » est le magnifique portrait d'une jeune fille qui aimerait être une autre. Mais le plaisir de manger est plus fort !
L'écriture, virtuose comme toujours chez cette femme de lettres mauricienne, oscille entre truculence et sensualité. Et l'humour et le sens de l'autodérision de la narratrice allègent le climat morbide qui plane sur le récit.
Lien : http://papivore.net/litterat..
Commenter  J’apprécie          10




Lecteurs (249) Voir plus



Quiz Voir plus

Le rire des déesses

Que signifie Chinti, le nom que décide de se donner la petite fille à l’âge de neuf ans ?

Abeille
Coccinelle
Fourmi
Papillon

13 questions
2 lecteurs ont répondu
Thème : Le rire des déesses de Ananda Devi NirsimlooCréer un quiz sur ce livre

{* *}