L'événement dont parle ici l'auteur est la mort subite de son mari, l'écrivain George Gregory Dunne, après quarante ans de mariage, vers neuf heures du soir, le 30 décembre 2003, à New York, à la table du dîner qu'ils étaient en train de prendre. Crise cardiaque. Mort immédiate et foudroyante.
Ils venaient de rentrer de l'hôpital où Quintana, leur fille unique, avait passé les cinq dernières nuits, inconsciente, dans une unité de soins intensifs d'un hôpital new-yorkais. Elle venait de se marier quelques mois auparavant.
C'est neuf mois après que
Joan Didion, romancière culte américaine, peu traduite en France, écrit très vite ce roman encensé par toute la critique aux Etats-Unis et déjà considéré comme un classique couronné par le National Book Award dans la catégorie « Non fiction ».
L'année de la pensée magique est le récit de ses mois de deuil quand elle vivait dans cette sorte de folie lucide consistant à croire et à agir comme si son mari allait revenir, avec le sentiment de pouvoir contrôler les événements par la seule force de la pensée.
C'est ainsi qu'elle ne peut se résoudre à se séparer des chaussures de son mari pour qu'il puisse les retrouver au cas où il reviendrait!
Ecrivains célèbres tous les deux dans leur pays, ils ont travaillé ensemble quarante ans, côte à côte, 24 heures sur 24. Ils ont tout partagé, travail, vie de couple, vie de famille mais la vie, d'une simple touche a «fait voler en éclats la séquence du temps», alors maintenant elle écrit «pour montrer simultanément tous les instantanés de mémoire qui lui viennent, pour trouver le sens.»
Quelque temps après avoir terminé d'écrire ce livre et avant même sa parution,
Joan Didion verra sa fille mourir à 39 ans mais elle ne retouchera pas ce qui vient d'être écrit.
J'ai aimé ce livre pour son honnêteté et sa rigueur. C'est une femme qui souffre mais qui ne pleure pas. Elle veut comprendre ce qui se passe en elle. La sécheresse du style atténue l'émotion. Les faits dominent avec une précision toute scientifique. Il s'agit de comprendre l'incompréhensible, de tenir à distance cette pensée magique qui déforme le réel, de se regarder vivre le grand bouleversement de la mort dans la vie.
«Il fallait s'adapter à ces changements !»
Un grand, très grand livre!
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