L'île au trésor était une de mes lectures de jeunesse préférées. Elle contenait tout ce qu'un jeune lecteur recherchait : le mélange d'action et d'aventure, le grand océan et les îles tropicales, des pirates et un trésor, un jeune protagoniste attachant et, surtout, Long John Silver. Vous savez, ce genre d'antagoniste qu'on aime détester (et qu'on déteste aimer, un peu…)? Il s'agit des personnages littéraires les plus intéressants et
Xavier Dorison et
Mathieu Lauffay ont décidé de le déterrer et d'en faire le protagoniste de leur nouvelle série de bande dessinée. Quel coup de maître! Ils ne se sont pas contenté d'adapter le populaire roman, non. Plutôt, ils ont amené cette histoire encore plus loin en imaginant une suite, en quelque sorte. Bon, pas une suite à proprement parler mais une énième aventure, parce que Long John Silver n'avait pas dit son dernier mot. À la fin de L'île au trésor, ce vieux loup de mer avait réussi à s'enfuit et, quand j'étais jeune, je me plaisais à imaginer dans quelles autres tribulations il se serait lancé.
Dorison et Lauffay l'ont fait pour moi. Et merveilleusement bien. Peut-être un peu plus sombre que dans mon imagination mais ça fonctionne. Étrangement, ce n'est pas le quartier-maître qui ouvre cet album mais Lady Vivian Hastings et son beau-frère opportuniste, dans une mauvaise posture financière, qui se lancent à leur tour dans la quête de l'Eldorado. Cette lady Vivian, peut-être pas aussi sympathique que je l'aurais souhaité – quoique c'est la société de l'époque qui l'a confinée dans un roman de méchante – mais elle est suffisamment intelligente pour faire appel au meilleur : le fameux Long John Silver. Par la bande, on retrouve également le familier docteur Livesay. le début est un peu lent mais c'est souvent le cas d'un premier tome qui sert à mettre en place les éléments : tout ce beau monde pris sur la terre ferme ne fait que se préparer à l'expédition vers le Nouveau Monde.
Si l'intrigue est suffisamment accrocheuse et prometteuse – peut-il en être autrement? –, les dessins m'ont plus ou moins convaincus. Ne vous méprenez pas, ils sont bien faits, extrêmement bien faits, soignés. Par exemple, Long John Silver fait une entrée remarquée. Il n'est pas aussi vieux que ce à quoi je m'attendais. Après tout, cette nouvelle aventure se déroule une dizaine d'années après celle racontée dans L'île au trésor. C'est comme si le temps n'avait aucune emprise sur des personnages comme lui… Dans son repère, éclairé par des feux ardents, donnant un air maléfique, comme s'il venait directement des enfers. Ouf! Ceci étant dit, beaucoup de cases étaient sombres, très sombres. Ça convient peut-être à l'histoire, rendant parfaitement le ton et l'atmosphère, mais ça la rendait parfois difficile à suivre. Lord Hastings, le docteur Livesay, le second Dantzig… tous des vieux hommes grisonnants à l'allure un peu semblable pouvaient être ardus à distinguer les uns des autres au premier coup d'oeil. Ou à un coup d'oeil rapide. Bien sûr, quand on regarde de près, on peut remarquer l'air hautain du dernier de l'un, les lunettes de l'autre puis les petits yeux et la mâchoire carrée du dernier. Pour le reste, je suis preneur et j'ai hâte de continuer les aventures de cette bande de chercheurs de trésor.