Personne ne voudrait qu'il y ait la guerre, jamais. Mais cela a toujours existé...
- Il n'y a rien du tout. Il y a des pierres.
- Alors ces gens vont se battre pour des cailloux?
- Ils veulent posséder ce qui est en dessous.
- Sous le désert? Qu'est-ce qu'il y a?
- Du pétrole.
- Pourquoi le veulent-ils, ce pétrole?
- Ils le veulent pour que les autres ne l'aient pas. Ils veulent ce pétrole parce que le pétrole est indispensable pour faire la guerre.
Tistou estima que la guerre était le plus grand, le plus vilain désordre qui se puisse voir au monde, puisque chacun y perdait ce à quoi il tenait le plus.
Dans une guerre, tout le monde perd quelque chose.
J'avais bien raison de penser que la guerre était une chose horrible, puisqu'on peut y perdre son pays comme on perd un mouchoir.
L'idée que Tistou se fit de la guerre fut celle d'une chose pas propre puisqu'on n'en parlait qu'à voix basse, une chose laide, une maladie des grandes personnes pire que l'ivrognerie, plus cruelle que la misère, plus dangereuse que le crime.
De temps en temps survient un monsieur qui révèle un morceau d'inconnu; on commence toujours par lui rire au nez; quelquefois même on le jette en prison parce qu'il dérange l'ordre de Monsieur Trounadisse, et puis, quand on s'est aperçu, après qu'il est mort, qu'il avait raison, on lui élève une statue. C'est ce qu'on appelle un génie.
La médecine ne peut pas grand-chose contre un coeur triste. J'ai appris que pour guérir il faut avoir envie de vivre. Docteur, est-ce qu'il n'y a pas de pilules pour donner de l'espoir?
Une fleur qui pousse, c'est une vraie devinette, qui recommence tous les matins. Un jour elle entrouvre un bouton, le jour d'après elle défroisse une feuille verte comme une petite grenouille, et puis après elle se déroule en pétale...
Moustache soigne la vie des fleurs et moi je soigne la vie des gens.
Mais soigner la vie des gens était beaucoup plus difficile; Tistou le comprit vite en écoutant le docteur Mauxdivers. Etre médecin, c'était livrer sans cesse une bataille. D'un côté il y avait la maladie, toujours prête à entrer dans le corps des gens, et de l'autre la bonne santé, toujours prête à s'en aller. En plus il y avait mille sortes de maladies et une seule bonne santé. La maladie se mettait toute espèce de masques pour qu'on ne la reconnaisse pas; un vrai Mardi gras. Il fallait la déceler, la décourager, la chasser et en même temps attirer la bonne santé, la tenir serrée, l'empêcher de s'enfuir.