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sur 6210 notes
Ce roman a rendu Duras célèbre et vénérée du grand public et pourtant ce n'est pas son meilleur, elle a voulu faire du Duras et c'est dommage. L'histoire est connue, elle est la suite de son autobiographie en Indochine. Ce qui surprend, c'est la syntaxe, des phrases courtes, puissantes et incisives. le film de Jean-Jacques Annaud, que Duras n'aimera pas au point de réécrire le roman, est lui aussi à voir, même s'il est un peu racolleur.
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« Très vite dans ma vie il a été trop tard. A dix-huit ans il était déjà trop tard. (…) A dix-huit ans j'ai vieilli. (…) Que je vous dise encore, j'ai quinze ans et demi. C'est le passage d'un bac sur le Mékong. »

Dans ce roman Goncourt 1984, Marguerite Duras narre les événements qui ont infléchi son existence, englouti son enfance, nourri sa prose, forgé son style. C'est un style tout en souvenirs et en images, presque un style incantatoire. Des phrases courtes et simples. Des mots qui éclatent comme des bulles irisées. La narration est un flux de conscience, une émergence aléatoire. le récit peut paraître déconstruit mais il suit la logique de la mémoire qui crée des liens et cherche parfois à les rompre. Ce qui surnage du flot, c'est l'évocation d'un lieu, d'un âge, d'un état d'âme, d'une passion, d'une destruction.

La fille de cette histoire, c'est elle, l'écrivaine, mais c'est aussi l'enfant qui jamais ne sera nommée. Tantôt « je » tantôt « elle », comme pour mettre à distance la petite écartelée entre une famille dysfonctionnelle et un amour précoce, impossible. On est « dans la grande plaine de boue et de riz du sud de la Cochinchine ». On traverse les eaux du Mékong. Vers Saigon où l'enfant demeure en pension et va au lycée pour filles, depuis Sadec où la mère institutrice dirige une école et a acheté une concession. Un père décédé. Deux frères, un petit sacrifié et un grand redouté. Des dettes. Et puis ce Chinois croisé sur le bac en traversant le fleuve, richissime héritier qui pose son regard sur la petite. Qui posera ses mains sur la petite, et elle qui posera ses mains sur lui. C'est la naissance d'un amour coupable, invivable au grand jour. Un amour prostitué comme un amour passionné, le premier pour elle. Dans la garçonnière du Chinois éclatent les bruits et les odeurs de la ville, se construit une intimité des corps.

Qu'a-t-elle à attendre du Chinois ? Qu'a-t-elle à attendre d'une mère qui inspire l'amour comme la honte, d'un grand frère bourreau et d'un petit qui mourra trop tôt ? C'est le drame d'une enfance et le drame d'une vie qui se construit pas à pas sous nos yeux, dans la touffeur du climat et des sentiments.
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Quand L'Amant de Marguerite Duras a été publié et a obtenu le prix Goncourt, en 1984, bien que dévoreuse de livres, je ne me souviens pas d'en avoir beaucoup entendu parler. J'avais sans doute alors d'autres préoccupations.
J'ai vu le film de Jean-Jacques Annaud longtemps avant de lire ce roman autobiographique, une autofiction dirions-nous aujourd'hui.

Commencer par l'Amant n'était pas une bonne idée car ce livre auréole son autrice d'une aura particulière, sensuelle et sulfureuse dont j'ai d'abord eu du mal à me détacher.
Je viens de relire ce court récit.
Avec le temps, j'ai appris à mieux connaître la belle écriture de Marguerite Duras, à l'apprécier dans sa fausse fluidité, sa complexité, et peut-être aussi à lire entre les lignes. Cette relecture alors que je connais mieux le parcours de cette femme m'a éclairée sur sa personnalité, sa biographie.
Son JE est ici souvent distancié, elle repasse fréquemment à l'omniscience de la troisième personne. J'ai adoré la puissance évocatrice et la sensibilité de ce texte.

L'Amant ne peut pas être réduit au récit des amours d'une jeune fille de quinze ans et demi et d'un banquier chinois de trente-six ans à la fin des années 1920 en Indochine… Certes, la partie initiation sexuelle a son importance et l'histoire d'amour entre Marguerite et son amant relève de la transgression ; leur relation est à la fois belle, passionnée et malsaine car la jeune fille est mineure et il est beaucoup question d'argent…Mais il y d'autres clés de lecture à explorer.

C'est aussi une histoire de famille sur fond d'implantation française en Indochine au sortir de la première guerre mondiale. Marguerite Duras est née le 4 avril 1914 à Gia Dinh, une ville de la banlieue Nord de Saïgon. Après la mort de son père et un court séjour en métropole, sa mère s'installe, à partir de 1923, à Vinh Long, une ville située dans le delta du Mékong avec la fillette et ses deux frères aînés.
Marguerite est une adolescente brimée, inscrite de force par sa mère dans un lycée pour y étudier les mathématiques alors qu'elle rêve de devenir écrivaine. Elle ne partage pas les ambitions de sa mère et s'entend mal avec l'un de ses frères, au caractère violent et aux moeurs dissolues ; elle préfère le second, fragile et délaissé. La famille manque cruellement d'argent et vit dans le paraître. La mère est distante, égoïste, paradoxalement intrusive mais également peu concernée par ce qui arrive vraiment à sa fille. Elle apparaît intéressée et vénale, encourage la séduction de sa fille, l'incite à porter des toilettes provocantes, profite des avantages pécuniers fournis par l'amant, agissant presque comme une mère maquerelle.

Le contexte socio-économique est également particulier : les parents de Marguerite avaient choisi de travailler dans les colonies françaises comme directeur d'usine et institutrice.
Les mariages mixtes étaient très mal vus, les liaisons entre autochtones et colons prohibées par la bienséance. le récit illustre bien la séparation entre les communautés dans l'Indochine du début du XXème siècle.

Le personnage de l'amant est très intéressant, mystérieux, jamais nommé. C'est plus un révélateur, un catalyseur qu'un protagoniste à part entière. Il est simplement l'instrument d'une initiation, d'un rite de passage. Malgré l'ambiguïté des relations entre lui et la jeune fille, je n'arrive pas à le trouver antipathique au contraire de la mère…

En conclusion : un court roman d'une incroyable densité…
L'Amant fait partie de ces livres que l'on redécouvre à chaque nouvelle lecture.

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L'experiment, c'est le nom donné à une expérience de vie incommensurable, qui laisse des traces indélébiles sur le visage.
Du style la rencontre d'une toute jeune fille avec son premier amant dans un contexte historique particulier (L'Indochine) au sein d'une famille particulière (colonialisme et déchéance et folie et "honte de principe") qui laissera à l'adolescente des traces de vieillesse comme si cet amour était un vampire qui lui avait aspiré le visage de sa jeunesse pour n'en lui laisser qu'un masque figé.
Ce masque "exténué, ces yeux cernés en avance sur le temps" conforté par l'alcool et la littérature.
Quelle femme peut à se point écrire avec tant de lucidité, de détachement et de transfiguration sur son visage et sa vie dévastés ? Seule une Marguerite Duras, seule.
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J'ai vu le film avant de lire le livre. Et oui on s'attend à de la poésie, à de l'érotisme et une narration bien particulière. J'en eu deux sur trois et je suis loin d'être déçue.
Le texte de Marguerite Duras est sensible et touche le coeur du lecteur. Mais il n'y pas d'érotisme à proprement parlé. SI à l'époque il a fait polémique c'est avant tout pour le film que le réalisateur à transcrit les mots de Marguerite Duras. Il a bousculé les tabous et le côté incestueux de cette histoire de corps hors norme. On s'imagine facilement les premiers émois sexuels de l'héroïne. On se sent mal à l'aise de se dire qu'elle n'a que 15 ans et demi. Qu'elle frôle limite la prostitution et vit dans une famille dysfonctionnelle. Un amant chinois, je comprend aussi la polémique de l'époque. Heureusement certaines mentalités ont changé….
Marguerite Duras nous offre un roman 100% narratif et atypique. C'est osé et bien ficelé. Je retrouve la même ambiance entre le livre et le film. Dire que mes parents m'ont interdit de lire ce chez d'oeuvre. ET dire que mes littératures actuelles sont bien plus cochonnes et explicites….
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Il y a de ces livres dont on entend parler à tout vent. Je les aborde toujours avec prudence dans la mesure où des attentes trop élevées mènent presque inévitablement vers des déceptions à la même hauteur. Bizarrement j'ai trouvé que l'histoire de l'amant chinois n'est pas le thème central de ce livre que je retiens plutôt comme une histoire familiale qui a marqué au fer rouge la narratrice. Famille complètement dysfonctionnelle avec une mère possiblement bipolaire, un frère aîné toxique au cube, un père absent-mort...etc.L'histoire est aussi intéressante qu'intemporelle, mais c'est l'écriture qui frappe et élève ce roman au statut d'cône. J'ai été déstabilisé au début par les sauts dans le temps jamais annoncés mais on s'y fait vite. Mais comment ne pas tomber sous l'envoûtement de cette plume passionnée, de l'intelligence du propos. Les idées sont crues mais comme adoucies par un enrobage tellement attractif que c'est comme si l'impudique devenait pudique sans concessions toutefois. Je comprend pourquoi ce livre est un classique.
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Ça y est j'ai bel et bien fini l'amant de Marguerite Duras. A vrai dire, je ne sais plus vraiment si je l'avais déjà lu ou tout du moins commencé mais en tout cas ça m'a pas marqué. L'histoire me dit vaguement quelque chose. C'est peut être la 4ème de couverture très prometteuse. Enfin, maintenant que je l'ai terminé, je peux dire que ce ne sera pas une lecture qui restera gravée dans ma mémoire (maintenant que Babelio est là, je saurai que je l'ai lu celui-là…).

La 4ème de couverture nous parle de prose. J'en conviens. Seulement, il me faut un repère de temps à moi petite lectrice… L'auteur nous « promène » de passé vers le futur, du présent vers le passé, d'un paragraphe à un autre… C'est pas facile à suivre. J'arrive à reconstituer un peu sa vie, son grand frère qui tyrannise sa famille, son petit frère et elle apeurés et sa mère qui a l'air de se tenir éloignée de tout ça.

Idem pour le contexte. Je n'ai pas cherché plus loin mais on ne sait pas pourquoi ils sont en Indochine, ce qu'il s'y passe. A priori, au vu des autres commentaires, il faut avoir lu d'autres livres d'elle pour comprendre un minimum… J'avoue que j'ai vraiment pas envie…

Lien : https://letempsdelalecture.w..
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Lecture qui impacte le lecteur jusqu'au physique. le coeur bat plus calmement ou plus fortement, au fur et à mesure des pages... pas une ligne invite au sourire, tout est grave.
Duras triture la phrase sèche, pointue, glaçante, vibrante, tranchante. Elle aime à répéter, au cas où nous ne comprendrions pas, au cas où son esprit refuserait la réalité proche ou passée, il faut que ça sorte. Réalité ou fiction, cela n'a plus d'importance, Marguerite est happée par les souvenirs.

Elle aime autant qu'elle hait sa généalogie: sa mère restée seule avec sa progéniture aux colonies, son frère aîné qui dilapide, méprise, vole, s'enfonce.... "Intolérable splendeur", d'ailleurs, cette tombe réunissant la mère et le fils.
Le petit frère meurt en Asie personne n' aura rien pu pour lui.
Reste le souvenir d'un amant interdit, un chinois, fils de milliardaire, leur relation fait d'elle une "catin" amoureuse à quinze ans... de qui, surtout de quoi ? d'après quel point de vue ?

Duras embarque le lecteur dans une discordance des temps, là bas il y a longtemps et plus proche de nous, en Tourraine, peu avant le temps de l'écriture.

Lire c'est précisément souffrir avec Marguerite, vouloir l'aimer (à son corps défendant), du moins lui faire savoir qu'on a compris et qu'on compatit.

Un chef d'oeuvre inoubliable. D'un genre nouveau, d'une musique nouvelle, d'un temps perdu mais jamais tout à fait englouti par la narratrice. L'écriture de ce nouveau roman lui apporte-t-il un peu de repos, enfin ?

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L'Amant, écrit en 1984, est largement autobiographique. Il reprend le fil de l'enfance de l'auteure en Indochine.

La narratrice, âgée de 15 ans et demi, rencontre, lors du passage d'un bac, sur le Mékong, un riche chinois.
Elle vit alors, avec lui, une passion initiatique aux jeux de l'Amour.
Elle y découvre, la sensualité, le tumulte, l'ardeur, l'émoi, malgré la honte, la peur, la jalousie et l'impossibilité de cet amour.
Au détour de cette passion, Marguerite Duras nous plonge dans son passé.
Passé encombré des souffrances familiales et des turpitudes des colons de l'entre-deux guerres.

Un style d'écriture Durassien dans un livre sensuel tout en poésie.

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Ça ressemble à un script cinématographique avec une succession de scènes et des fragments de souvenirs épars mis bout à bout : on peine parfois à trouver un lien entre eux. Le style est réduit au minimum syndical. Des répétitions à foison pas toujours heureuses ni évocatrices. L'absence de verbe d'introduction alterne avec une avalanche de : « je dis », « il dit », en cascade… p98 par ex. Très peu de coordination entre les phrases (nominales souvent) courtes qui s'entassent les unes sur les autres. Pénible à lire.
Je ne comprends pas comment cela a pu donner un prix Goncourt. Peut-être à cause de l'histoire. En résumé, on est dans une famille en décomposition et pour s'en échapper une ado de 15 ans, à peine sortie de l'enfance, couche avec un riche Chinois très épris et va découvrir le plaisir. De surcroit, c'est l'occasion de se la jouer : « princesse », de profiter de son argent avec la complicité inavouée de la mère et du frère ainé qui, malgré le déshonneur qui rejaillit sur eux et un racisme nauséabond, semblent y trouver leur compte. Du sordide à la louche. On comprend que l'auteur ait eu besoin de mettre des mots là-dessus. Mais si j'entends les gémissements et les récriminations d'une victime, j'ai aussi la pénible impression qu'elle ruse (dans la première partie du récit du moins), qu'elle force trop dans ce registre de l'innocence bafouée, en empruntant volontairement la voix de l'enfant (pourtant à 15 ans c'est bien jeune, mais on n'est plus vraiment une enfant) et je me sens un peu flouée. (Je n'ai pas eu cette impression à ma première lecture lorsque j'étais ado.) On sent trop la posture.
Paradoxalement, j'ai quand même été touchée par les dernières pages (comme quoi il faut se donner la peine de lire jusqu'au bout) où le style devient moins haché, par la plainte monocorde qui accompagne la longue agonie de cette enfance massacrée et qui ressurgit à la disparation du petit frère, par cette terrible peur de la mort qui la hante et l'imperceptible dévoilement de cet amour inavoué, qui n'a jamais pu s'épanouir, englué dans la boue des préjugés de toute sorte.
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