Ce roman est fabuleux car il m'a fait passer par un ascenseur émotionnel. À chaque étage on monte d'une gamme. Ça démarre doucement puis au fil des pages, de rebondissement en rebondissement, ça monte crescendo. Jusqu'à l'envie de meurtre, oui oui.
Il s'agit d'une histoire de famille, une histoire où les secrets sont si bien enfouis que lorsque Isabelle commence à dénouer le fil d'Ariane en tombant sur une photo en triant les affaires de sa mère décédée, elle ne sait pas qu'elle vient de mettre le doigt sur un énorme tabou de la famille et qu'il va lui falloir de la patience et de la chance pour arriver au bout.
Je ne spoile rien en disant que ce livre aborde aussi l'amour entre femmes, de façon très belle, très réaliste. Pour moi ce livre est très réussi car il peint de façon très juste, très vraie, les sentiments des personnages. Je n'ai pas pu lâcher ma lecture avant d'avoir le fin mot de l'histoire. Bravo à l'autrice pour ce coup de maître.
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Lorsque j’ai poussé la porte et que je l’ai aperçue, dans la pénombre de la chambre, je ne l’ai pas reconnue. On lui avait enlevé le foulard qu’elle portait en permanence par coquetterie depuis qu’elle avait perdu ses cheveux et son crâne chauve luisait de transpiration. Elle avait beaucoup maigri ces derniers mois mais là, dans sa chemise d’hôpital, elle semblait toute ratatinée et perdue dans un lit beaucoup trop grand pour elle. Je me suis approchée en faisant un effort surhumain pour ne pas éclater en sanglots et j’ai posé délicatement mes lèvres sur son front brûlant de fièvre. « Maman, c’est moi, Isabelle. »
Elle a tourné la tête dans ma direction, m’a regardée avec des yeux exorbités qui lui mangeaient le visage tout entier, des yeux immenses semblables à ceux des enfants tristes des tableaux de Margaret Keane. Je lui ai pris la main, une main moite et décharnée et je suis restée un instant à côté d’elle, sans être tout à fait certaine qu’elle m’ait reconnue. Finalement, submergée par le chagrin, je suis ressortie pour laisser couler mes larmes. Le médecin m’a reçue dans son bureau pour me confirmer ce que j’avais compris, à savoir que sa fin était proche. J’ai prévenu ma sœur, elle a beaucoup pleuré au téléphone et pendant une semaine nous nous sommes relayées à son chevet. Ce fut une terrible épreuve. La semaine la plus longue de ma vie, sans doute.
Elle s’arrête de nouveau, submergée par des souvenirs qui semblent affluer en masse.
- Alors ! Je m’impatiente, que s’est-il passé ?
- Il s’est passé quelque chose d’inimaginable, d’effroyable, d’inconcevable même, surtout à cette époque… Alix et la femme de l’américain, Liz, je crois qu’elle s’appelait Liz, ont eu une liaison.
- Hein ! je m’écrie stupéfaite. Tu veux dire qu’elles ont eu une liaison amoureuse ?
- Oui, c’est ça. Elles sont tombées amoureuses l’une de l’autre.
- Non ! Je n’y crois pas ! Elles ont eu une relation homosexuelle ?
Tante Cécile ne répond rien, se contentant de hocher la tête. De mon côté, je suis complètement sous le choc. Quelle histoire ! Si je m’attendais à ça !
- Et ensuite ? Que s’est-il passé ?
- Alix s’est enfuie avec l’Américaine, en abandonnant son mari et sa fille, laisse-t-elle tomber brutalement.
Je reste muette de stupéfaction. Comment pouvait-on abandonner ainsi son enfant ? Je ne sais pas pourquoi, mais cette Alix commençait à me plaire, elle me semblait sortir des sentiers battus, elle était moderne et en avance sur son temps. Mais, maintenant que j’apprends qu’elle était partie en laissant son enfant… Je ne sais plus quoi penser d’elle.