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Pour faire connaissance avec la plume de Jean Echenoz, est-il judicieux de commencer par un roman noir? Il est certain que je n'ai pas entièrement saisi le noeud de l'intrigue qui mêle une histoire d'héritage à la cinquième génération, une secte adoratrice des rayons, la disparition d'un perroquet Morgan, avec pour fil rouge un colosse au réseau cortical peu développé. Peu importe. Dès les premières phrases, je suis happée par le travail d'écriture, fine, ciselée, développant l'art de la métaphore recherchée mais gracieuse, raffinée . Un exemple :

"un pont enjambait ensuite le boulevard périphérique, où renâclait sur huit files un bétail contraint ruant dans son oxyde d'où s'échappaient, à peine perceptible, par les déflecteurs poussés, des filaments d'autoradios " .

Beaucoup d'humour également, comme dans cette séquence où Georges, à la recherche de Jenny, se fait passer pour un animateur d'un émission radio intitulée Manque de bol! On sourit, on rit même.

C'est donc, à défaut d'un rendez-vous réussi avec la trame policière, un baptême convaincant avec un magicien de la langue, que je vais continuer à fréquenter dans les semaines à venir.


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Flaubert rêvait d'écrire « un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force interne de son style… » C'est à une telle entreprise, ô combien périlleuse, que se livre Jean Echenoz dans Cherokee (1983), et avec quel brio !
En commençant son roman, on a pourtant le sentiment d'être en terrain connu : s'agirait-il d'un polar à l'ancienne, façon Touchez pas au grisbi, avec son lot de cadavres, de poursuites en voiture, de femmes forcément fatales, d'indics louches et de malfrats sur la piste d'un magot ?
Certes, mais on s'aperçoit très vite que ce n'est pas tout à fait ça : les poursuites tournent court parce que les voitures sont de vieux clous qui ne cessent de tomber en panne ; ce fameux magot que tout le monde recherche, on finit par se demander s'il a jamais existé ; d'ailleurs, sa quête est sans cesse parasitée par des enquêtes secondaires, nettement plus intéressantes, comme par exemple celle qui concerne un mystérieux perroquet nommé Morgan.
Quant aux personnages, ils sont si nombreux et si stéréotypés qu'on ne tarde pas à confondre les bons avec les méchants, les flics avec les bandits... Il est vrai qu'ils ont tous leurs bons côtés, et partagent une certaine forme de mélancolie, non sans rapport avec ces paysages désenchantés de la banlieue parisienne, qu'affectionne l'auteur.
C'est que l'essentiel du livre est ailleurs : dans le choix des adjectifs, presque toujours inattendus, dans les dialogues décalés, frôlant souvent le nonsense, et dans la manière dont chaque phrase ou presque est conçue comme une petite énigme, un micro-suspens : bien malin qui pourrait en prédire la chute.
Cela donne un roman échevelé, superbement servi par une écriture étincelante – à mon avis l'une des plus belles de la littérature contemporaine.
Personnellement, j'ai adoré.
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Partir d'une histoire de polar à deux balles et en faire un objet littéraire de haut niveau, il n'y a pas 36 auteurs qui relèvent de défi – et encore moins si l'on impose comme condition d'être drôle à chaque page. L'Artiste en la matière, le Grand Maître de la chose, est sans conteste Jean Echenoz.

« Cherokee » a reçu le Prix Médicis 1983. Il est difficile de vous résumer l'histoire car chaque phrase la modifie. Mais, sachez qu'il y a notamment des policiers désastreux, des zeugmas, des cousins qui se détestent ou qui s'aiment, des descriptions minutieuses d'objets et de lieux, des questions d'héritages, du jazz, des disparitions d'oiseaux, une secte, des belles phrases et filles. En mélangeant tout cela, le roman constitue une déambulation drôle et prenante, qui ne se détache pas des mains. Dans ce style-là, un peu intello, un peu « Tontons flingueurs », c'est un petit bijou.
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"Un jour, un homme sortit d'un hangar. C'était un hangar vide, dans la banlieue est. C'était un homme grand, large, fort, avec une grosse tête inexpressive. C'était la fin du jour."
Ainsi débutent les aventures rocambolesques de Georges Chave. Contraint de sortir de sa léthargie, il entre au service d'une agence de détectives. C'est le début d'une série de poursuites : il doit pister une épouse volage, un perroquet rarissime et les héritiers d'une fortune ancienne. Mais le chasseur va progressivement devenir proie et s'enfermer dans un piège finement tissé. Il va cheminer dans la nébulosité des quartiers populaires de la banlieue parisienne et croiser toute une faune sinistre : affairistes sans scrupules, détectives minables, policiers incompétents, disciples d'une secte fantoche et autres Pieds nickelés.
Les décors grisâtres et les personnages louches s'emmêlent, le récit s'étoffe et étouffe un lecteur qui finit par se faire une raison : le roman noir n'est qu'un prétexte, une porte d'entrée dans un milieu interlope. Les filatures, les échanges de coups de poing ou de feu ne sont qu'un écran de fumée ; finalement, tout repose sur la virtuosité de l'écriture.

J'ai eu besoin de lire le roman une seconde fois pour pouvoir apprécier le style de l'auteur, une fois l'intrigue évacuée. Certains passages sont truculents. Voici la description de Crocognan, l'«homme grand, large, fort» présent dans l'incipit : « C'était un bar sombre et maigre, absolument désert, sans même un barman derrière le comptoir auquel, du haut d'un tabouret crevé, s'accoudait pesamment un seul consommateur : un être herculéen coiffé d'un chapeau mou qui ballotait sur son crâne comme un flan, avec un pull-over bleu roi et des socquettes vertes fluorescentes. » Si vous êtes calé en figures du style et si vous aimez herboriser les oxymores ou et autres paraboles, ce texte est fait pour vous. Un billet du blog « l'oreille tendue » de Benoît Melançon en relève quelques-unes. «La voyante posa sur lui un regard attendri, sur ses jambes un plaid » là, par exemple, il faut le savoir, c'est un zeugme ! (lecture du blog recommandée). Si ces figures de style peuvent échapper au lecteur « non expert », ce n'est pas le cas des traits d'humour qui jalonnent le récit. Et ça marche ! On ne peut s'empêcher de sourire à la lecture de ces piques.

Cherokee est aussi un roman sur Paris et sa proche banlieue. J'ai apprécié les descriptions du Cirque d'Hiver et des passages couverts de la capitale, riches de portes dérobées et de sorties secrètes. le lecteur suit les personnages dans leurs pérégrinations à pied, en métro, en voiture, dans la ville et hors la ville, une fois le périphérique franchi, ou après de longs trajets en autoroute, dans des automobiles en bout de course.

J'ai relu des passages de ce roman en mettant en fond musical diverses interprétations de 'Cherokee' pour tenter de m'imprégner du rythme de ce morceau de jazz et de l'associer à ma lecture.Sans succès. J'avais réalisé la même expérience avec le roman "White jazz" de James Ellroy qui par son rythme saccadé, son mouvement permanent s'y prêtait parfaitement.

Cherokee est mon premier roman d'Echenoz. le roman est remarquable mais je ne l'ai pas trouvé passionnant. Je vais tenter de lire d'autres romans, notamment «les grandes blondes », pour me faire une idée plus précise de son oeuvre.
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Toujours un plaisir de retrouver Echenoz et ses récits facétieux, ici dans le cadre de son second roman placé très clairement sous le signe du Roman Noir.
Pour autant si l'on s'amuse au début du livre de cette intrigue marabout-de ficelle qui entraîne les personnages dans un vagabondage poetico- cocasse à travers Paris et sa banlieue et à laquelle on ne comprend pas grand chose, on s'ennuie assez vite en définitive devant l'inconsistance des personnages et au gré d'une phrase encore un peu laborieuse, qu'Echenoz fort heureusement épurera par la suite et qui alors donnera à ses récits elliptiques un merveilleux contre champ pour aboutir au fil des livres à une oeuvre précieuse et singulière.
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Une course folle dans un polar noir à la française.

On suit là l'aventure de Georges Chave, dont la rencontre avec Véronique va bouleverser la vie. le cours des choses va prendre une allure de course folle où les personnages s'entrecroisent et où l'intrigue part, semble t-il, à vau-l'eau.

Cherokee, c'est le titre d'une composition de Charlie Parker, dont Georges possède un enregistrement d'une interprétation très peu courante qu'il a prêté à Fred il y a une dizaine d'année, et que celui-ci ne lui a jamais rendu.

Ecrit avec un style recherché et fin, dont l'humour n'est pas exclu, Jean Echenoz nous ballade. Parfois difficile à suivre, cette histoire échevelée m'a parfois laissé dubitatif. Puis finalement, avec le recul, une fois la lecture terminée, on se dit que tout se tient, même s'il m'est difficile de dire d'emblée ce qui constitue le liant de ce roman.

En bref, une bonne impression générale pour une lecture parfois difficile mais souvent amusante.
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Je gardais ce livre dans ma pal bien au chaud pour le jour où j'aurai besoin de me réconcilier avec la littérature. Après ma incommensurablement pénible lecture de la vie d'une autre, le temps d'Echenoz était arrivé.

Choisir de lire Echenoz, c'est accepté de se faire balader, sortir continuellement des rails du récit classique. Car celui qui est probablement le plus émérite des ambassadeurs des Editions de Minuit, manipule les artifices du polar au point de faire capoter "l'enquête" à tout moment. On s'amuse à suivre "les aventures du héros", Georges Chave, enquêteur rapidement devenu à son tour objet d'enquête. le tout, sous la plume affûtée d'un écrivain qui, dans la lignée d'un Robbe-Grillet ou encore d'un Hubert Aquin, prend un malin plaisir à brouiller les pistes en multipliant les descriptions toujours à la limite du sujet, à proposer avec un ton et une géographie bien à lui, "l'aventure d'une écriture".

Lire aujourd'hui ce livre publié initialement en 1983 rajoute un petit côté vintage qui n'est pas sans intérêt. Me voilà réconcilier avec la littérature.
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Je n'ai pas croché à ce livre. J'ai eu une peine folle à me mettre dans l'ambiance, à identifier les personnages, à comprendre l'histoire. Ca doit être mon état d'esprit du moment. Dommage !
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Il y a deux pôles dans l'oeuvre de Echenoz : une dilection pour des phrases travaillées, qui ne répugnent pas à la préciosité, et dans laquelle surviennent des dérapages parfaitement contrôlés, qui donnent toute leur saveur à son style ; un goût pour des personnages loufoques, sans lien apparent, qui finissent ou pas par se télescoper. Ces personnages écument Paris et sa banlieue à bord d'automobiles dont la variété et les descriptifs ne dépareraient pas un magazine spécialisé. Ils aiment le jazz et les looks improbables. Ils travaillent pour d'obscures officines et entrent par effraction dans des villas luxueuses ou des maisons miteuses. Ils y croisent des femmes mystérieuses qui le restent jusqu'au bout. Ils se livrent parfois à des courses-poursuites effrénées au cours desquelles ils empruntent des couloirs interminables. Ils courent après des perroquets rares comme dans l'Oreille cassée.
On n'y comprend pas grand chose pendant une grosse partie du livre. On ne sait pas qui court après qui. Mais tout ça n'a sans doute pas grande importance...
Il émane de ce livre un charme lancinant, irrésistible. Comme à bord d'une belle Ford Mustang Fastback 1968, la route suffit à elle-même : ne comptent que la beauté de la ligne, l'odeur du cuir, la douceur de l'asphalte et un standard de Charlie Parker.
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Ouille je n'ai pas honte de le dire, j'ai eu l'impression d'une pelote de mots dans ce livre, aucun fil conducteur perçu, un personnage à chaque chapitre, je n'ai rien compris du tout à ce livre,… pourtant je pense pouvoir dire être une bonne lectrice….
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